N° P.24.0653.F
D. F. G.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Benoît Debrus, avocat au barreau de Verviers.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 12 février 2024 par le tribunal correctionnel de Liège, division Liège, statuant en degré d’appel.
Le demandeur invoque cinq moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président de section chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L’avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Le demandeur a déposé des conclusions soutenant, en substance, que le radar ayant enregistré la vitesse de son véhicule n’a pas été placé conformément aux instructions données par le manuel d’utilisation.
Il a fait valoir que la présence d’un portique métallique a pu engendrer une réflexion parasitaire de nature à compromettre la fiabilité de la mesure effectuée par l’appareil.
Le jugement répond à cette défense en relevant que le demandeur n’identifie pas, dans ses conclusions, l’objet auquel il fait allusion, que la photographie jointe au dossier ne montre aucun portique métallique, et qu’il n’existe aucun élément perturbateur susceptible d’engendrer la réflexion parasitaire invoquée.
Contrairement à ce que le moyen soutient, les juges d’appel n’avaient pas à expliquer en quoi une glissière métallique ne serait pas un portique au sens de la notice d’utilisation du radar. En effet, il n’apparaît pas, des conclusions du demandeur, que la présence d’une glissière ait été invoquée comme ayant le même effet perturbateur qu’un portique muni de panneaux signalétiques, ni que la notice d’utilisation du radar ait été invoquée comme déconseillant le placement de l’appareil à proximité d’une rampe ou d’une glissière.
Le tribunal ne saurait être censuré pour n’avoir pas examiné une question dont il n’a pas été saisi.
Le moyen ne peut, dès lors, être accueilli.
Sur le deuxième moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Il est reproché au tribunal de s’être référé aux explications données, au sujet du radar, par un technicien nécessairement partial puisqu’il est un employé de la firme qui le commercialise.
A cette défense, invoquée dans les conclusions du demandeur, le jugement répond qu’il n’y a aucune raison de remettre en cause l’objectivité du technicien, que celui-ci maîtrise incontestablement l’utilisation de l’appareil, qu’il ne sert pas les intérêts de la partie publique et n’a pas de raison de le faire, et que le prévenu ne fournit aucune analyse technique de nature à contredire ses affirmations.
Dans la mesure où il invoque un défaut de motivation, le moyen manque en fait.
L’article 6.1 de la Convention garantit l’impartialité du juge et non celle des personnes entendues au cours de l’information ou de l’instruction préparatoire. La fiabilité de ces auditions relève, dès lors que les parties ont pu librement les contredire, de l’appréciation souveraine des juges du fond.
Et de la circonstance qu’un technicien est employé par la firme qui vend l’appareil dont il explique le fonctionnement, il ne se déduit pas nécessairement que cette personne est partiale ou tendancieuse.
Reposant sur l’affirmation du contraire, le moyen manque en droit.
Sur le troisième moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Quant à la première branche :
Le jugement énonce qu’il n’y a pas lieu d’ordonner une expertise judiciaire, ou quelque autre mesure d’instruction, pour vérifier si le radar a été correctement placé et utilisé.
Selon le moyen, ce refus n’est pas motivé correctement parce qu’il se fonde sur les explications unilatérales du technicien.
Le grief prend exclusivement appui sur le caractère « peu objectif » que le demandeur prête à l’avis recueilli.
Comme indiqué dans la réponse au deuxième moyen, les juges du fond ont estimé, et ont pu estimer, que cet avis présentait les garanties d’objectivité nécessaires.
Sur ce fondement, ils ont légalement justifié leur refus d’ordonner des devoirs complémentaires.
Le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la seconde branche :
Ordonnée par le ministère public à la suite des contestations du demandeur, l’audition qu’il critique a été jointe au dossier de la procédure, alors pendante devant le tribunal. Les juges d’appel ont ajourné l’examen de la cause à une audience ultérieure, afin que le conseil du prévenu puisse consulter ce devoir complémentaire. Le demandeur a critiqué ladite audition dans les conclusions qu’il a déposées à l’audience du 15 janvier 2024.
Les explications recueillies auprès du technicien ont donc été soumises au débat contradictoire.
A cet égard, le moyen manque en fait.
Pour le surplus, il n’apparaît pas, des pièces de la procédure, que le demandeur ait invité le tribunal à prescrire une audition du technicien à l’audience ou en confrontation avec le prévenu.
A cet égard, le moyen est nouveau et, partant, irrecevable.
Sur le quatrième moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Quant à la première branche :
Le tribunal a tenu compte, notamment, des contestations élevées par le prévenu, et des vérifications qu’elles ont nécessitées, pour conclure au non dépassement du délai raisonnable.
Dans la mesure où il soutient que ce motif viole la foi due aux actes, sans identifier ni les pièces dont la foi qui leur est due aurait été méconnue ni les énonciations du jugement qui la méconnaîtraient, le moyen est irrecevable à défaut de précision.
Le demandeur reproche également au jugement de soulever, en se référant à son propre comportement, un argument qui n’a pas été préalablement soumis à la contradiction.
Le comportement de la personne poursuivie constitue un des critères d’appréciation du délai raisonnable.
Le prévenu qui invoque un dépassement de ce délai, soutient nécessairement que le retard allégué n’est pas dû, ou n’est pas imputable exclusivement, à son propre fait.
En jugeant le contraire, le tribunal n’a pu surprendre le demandeur puisqu’il n’a fait que rencontrer sa défense.
A cet égard, le moyen ne peut être accueilli.
Quant à la seconde branche :
Le jugement ne dénie pas au prévenu le droit de contester l’infraction. Il se borne à relever que les devoirs complémentaires induits par sa contestation sont en lien avec la durée de la procédure et de nature à justifier raisonnablement celle-ci.
Pareille appréciation ne viole ni les droits de la défense ni le droit à un procès équitable.
Le moyen ne peut être accueilli.
Sur le cinquième moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Il est fait grief au jugement de ne pas motiver le refus d’ordonner la suspension du prononcé.
Le refus critiqué n’est pas susceptible d’encourir la censure au titre des dispositions visées au moyen. Celles-ci étant étrangères à l’omission dénoncée, le moyen manque à cet égard en droit.
Le jugement énonce qu’il n’y a pas lieu d’octroyer la suspension du prononcé. Il considère que l’importance de l’excès de vitesse reproché au demandeur, soit quarante-cinq kilomètres à l’heure au-dessus du maximum autorisé, ne permet pas de faire le choix de cette mesure, celle-ci, trop clémente, n’étant pas de nature à faire comprendre à l’auteur du délit que son acte n’est pas banal mais dangereux.
Le jugement contient donc la motivation que le moyen dit n’y pas trouver.
Dans cette mesure, le moyen manque en fait.
Le contrôle d’office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de septante-sept euros soixante et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président de section, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz, François Stévenart Meeûs, conseillers, et Sidney Berneman, conseiller honoraire, magistrat suppléant, et prononcé en audience publique du quatre septembre deux mille vingt-quatre par le chevalier Jean de Codt, président de section, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l’assistance de Tatiana Fenaux, greffier.