Recours pour excès de pouvoir - Fonction publique - Décision portant modification de situation administrative - Procédure - Recevabilité - Compétence - Violation - Annulation.
En le forme: Est recevable le recours pour excès de pouvoir formé dans les délais légaux.
Au fond: Le vice d'incompétence étant d'ordre public, le juge doit soulever d'office et annuler la décision administrative prise par une autorité compétente.
n° 13/CA du 05 mai 1972
Grégoire Bocossa DAGBA
C/
Etat Dahoméen
Vu les requêtes et mémoires enregistrés les 05 octobre 1966 et 18 août 1969 au greffe de la Cour Suprême par lesquels le sieur Grégoire COSSA DAGBA, alors Directeur de l'hôpital de Ouidah, actuellement Econome au Centre hospitalier de Cotonou, a déféré à la sanction de la Cour Suprême, la décision constituée par la note de service n° 2058/MSPAS/DS/Pel. Du 21 juillet 1966 du Directeur de la santé public, entachée d'excès de pouvoir pour avoir modifié la situation administrative que lui avait conférée les décrets n° 355/ PR/MSPAS/DS/Pel du 08 avril 1963 et 20/GP/MSP/Pel du 21 janvier 1964 le nommant et le confirmant Directeur-Econome d'hôpitaux par les moyens que le requérant, nommé Directeur-Econome P.I. de l'Ambulance de Parakou par décret n°355/PR/MSPAS/DS/Pel. Du 08 avril 1963 pris par le président de la République en Conseil des Ministres du 21 janvier 1964 pris dans les même conditions a été affecté à ce titre à l'ambulance de Ouidah par décision n° 175/MSPAS/DS/Pel.1 du 04 mai 1965 du Ministre de la Santé Publique;
Que par note de service n° 2058/MSPAS/DS/Pel.1 du 21 juillet 1966 du Directeur de la Sa,nté Publique, le sieur DAGBA a été relevé des fonctions de Directeur et nommé Econome de cette même formation;
Que le requérant soutient que cette note de service ne peut avoir le pas sur le décret pris en Conseil des Ministre l'ayant nommé;
Que de plus, ladite note de service modifie sa situation administrative en le rétrogradant de Directeur-Econome à Econome;
Que le sieur DAGBA a introduit un recours hiérarchique le 25 juillet 1966;
Qu'une note de service ne peut rapporter les effets d'un décret pris en Conseil des Ministres;
Que les effets de cette note de service constituent une rétrogradation pour le requérant et une sanction disciplinaire sans accomplissement des formalités prescrites par les textes régissant la fonction publique;
Que le sieur DAGBA a en suite développé des moyens afférents au préjudices matériels et moraux qu'ils a subis du fais de cette note de service;
Vu la lettre n° 2168 du secrétaire général du Ministère de la Santé publique enregistrée comme ci-dessus le 24 décembre 1969;
Vu notre mise en demeure n° 439 enregistrée le 30 avril 1970 au Cabinet dudit Secrétaire Général;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier;
Vu l'ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 portant composition, organisation et fonctionnement et attributions de la Cour Suprême;
Ouï le Conseiller BOUSSARI en son rapport;
Monsieur le Procureur Général GBENOU en ses conclusions;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Considérant que le recours du sieur DGBA a été introduite sous l'empire de l'ordonnance 21/PR du 26 avril 1966 régissant la Cour Suprême; que c'est au vu des prescriptions de ladite ordonnance en son article 68 qu'il convient d'analyser la recevabilité de la requête en la forme;
Considérant que la décision incriminée, note de service n° 2058/MSPAS/DS/Pel.1 est du 21 juillet 1966;
Que le recours hiérarchique du requérant enregistré le 25 juillet 1966 (Bordereau n°373/AO/Dir) est intervenu dans les délais de la loi;
Considérant que la requête susvisée, enregistré le 05 octobre 1966 au Greffe de la Cour Suprême est recevable comme étant intervenue dans les délais prescrits par l'ordonnance 21/PR susvisée en son article 68;
Considérant qu'un seul moyen est présenté par le requérant en c deux branches, que ce moyen peut se résumé ainsi qu'il suit:
«La note de service n° 2058/MSPAS/DS/Pel.1 du 21 juillet 1966 du Directeur de la Santé Publique est illégale comme étant inopérante pour rapporter les effets d'un décret pris en Conseil des Ministres et de surcroît pour infliger une sanction sans l'accomplissement des formalités prescrites par la loi régissant la fonction Publique Dahoméenne»
Considérant que le ministre de la Santé publique n'a pas produit ses observations à la suite de la communication des requête et mémoires reçus en son Cabinet le 29 septembre 1969;
Que par lettre reçue au greffe de la Cour Suprême le 24 septembre 1969, le secrétaire général du ministère de la fonction publique demandait un délai supplémentaire pour produire les observations du ministère; qu'un délai de deux mois supplémentaires lui a été accordé; qu'aucune réponse n'étant parvenue dans les délais impartis, un nouveau rappel a été dépêché audit Secrétaire Général et reçu au Ministère le 30 avril 1970; que le Ministère de la Santé ne s'est pas pour autant manifesté; qu'il à lieu de passer outre;
SANS QU'IL SOIT BESOIN D'EXAMINER LES MOYENS DU POURVOI:
Considérant que le sieur DAGBA a été nommé Directeur-Econome par décret Présidentiel, pris en Conseil des Ministres;
Considérant que la note de service incriminée est signée du Directeur de la Santé Publique; que cette décision est entachée d'incompétence positive, cette autorité n'ayant pas légalement compétence pour signer un tel acte;
Considérant que le vice d'incompétence étant d'ordre public, c'est d'office que le juge doit le soulever et annuler la décision pour ce motif;
Qu'en effet, une décision explicite est toujours réputée prise par l'autorité qui l'a signé, même si cette autorité n'en est que l'auteur apparent, par exemple si elle a agi en se conformant aux instructions ou en exécutant les ordres de son supérieur hiérarchique.
Considérant que les autres moyens du requérant afférents aux préjudices matériels et moraux par lui subis ne peuvent être pris en considération s'agissant d'un recours pour excès de pouvoir;
PAR CES MOTIFS
DECIDE
Article 1er: La requête du sieur DAGBA Grégoire enregistrée comme ci-dessus est recevable;
Article 2: La décision n° 2058/MSPAS/DS/Pel. Du 21 juillet 1966 du Directeur de la Santé Publique est annulée;
Article 3: Les autres demandes du requérant sont rejetées;
Article 3: Les dépens sont mis à la charge du trésor public;
Article 4: Notification de la présente décision sera faite aux parties;
Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Administrative) composée de messieurs:
Cyprien AÏNADOU, Président de la Cour Suprême: PRESIDENT
Corneille T. BOUSSARI et Gaston FOURN: CONSEILLERS
Et prononcé à l'audience publique du vendredi cinq mai mil neuf cent soixante douze, la Chambre état composée comme il est dit ci-dessus en présence de messieurs:
Grégoire GBENOU: PROCUREUR GENERAL
Et Maître Honoré GERO AMOUSSOUGA: GREFFIER EN CHEF
Et ont signé:
Le Président
Le Rapporteur
Le Greffier en Chef