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28/04/1978 | BéNIN | N°4

Bénin | Bénin, Cour suprême, Chambre administrative, 28 avril 1978, 4


Procédure: Renvoi préjudiciel.

Domaine Public - Déclassement de ruer - Conditions d'attribution.

Lorsqu'une partie au procès saisit la Cour en exécution d'un renvoi préjudiciel, les questions soumises au renvoi sont définies par la décision de sursis et non par les conclusions des parties. L'aliénabilité d'une voie déclarée entraîne ipso facto la disposition des droits et servitude grevant la voie publique ainsi que le droit de préemption qui s'y attache.

N° 4/CA du 28 Avril 1978

DJIDONOU Apollinaire
c/
Le Préfet de l'Atlantique

Vu la re

quête en date du 6 Janvier 1973, par laquelle le nommé DJIDONOU Apollinaire, élisant domicile en l'...

Procédure: Renvoi préjudiciel.

Domaine Public - Déclassement de ruer - Conditions d'attribution.

Lorsqu'une partie au procès saisit la Cour en exécution d'un renvoi préjudiciel, les questions soumises au renvoi sont définies par la décision de sursis et non par les conclusions des parties. L'aliénabilité d'une voie déclarée entraîne ipso facto la disposition des droits et servitude grevant la voie publique ainsi que le droit de préemption qui s'y attache.

N° 4/CA du 28 Avril 1978

DJIDONOU Apollinaire
c/
Le Préfet de l'Atlantique

Vu la requête en date du 6 Janvier 1973, par laquelle le nommé DJIDONOU Apollinaire, élisant domicile en l'Etude de son Conseil FELIHO a saisi la Cour d'une requête tendant à annuler la décision par laquelle le Préfet de l'Atlantique a attribué au nommé Olympe POSSY BHELY QUENUM un "délaissé de voirie" entre les parcelles 123 et 124 du lotissement de Cotonou;

Vu le mémoire communiqué par lettre 184/GCS du 20 Février 1973 au Préfet de l'Atlantique laquelle n'a fait l'objet d'aucune observation de la part de l'Administration;

Vu le rappel à l'autorité administrative par lettre n° 418/GCS du 27 Avril 1973, par lequel la Cour lui a adressé une mise en demeure sou numéro 595 du 18 Juin 1975 qui est également restée sans réponse;

Vu le silence opposé à ces communications par l'Administration préfectorale défenderesse;

Vu l'intervention par mémoire du 17 Avril 1974 du nommé Olympe POSSY QUENUM tendant au rejet de la demande de DJIDONOU;

Vu la loi n° 60-20 du 13 juillet 1960 organisant le régime de permis d'habiter;

Vu l'article 121 de la loi 65-25 du 14 Août 1965 sur la propriété foncière;

Vu l'Arrêté n° 3767/TP du 13 Décembre 1939;

Vu l'arrêté n°2/PR-A du 31 juillet 1973;

Vu le communiqué n° 2/PR-A du 30 Décembre 1968 du Préfet de l'Atlantique;

Vu la décision n°919 du 10 Avril 1963;

Vu l'Arrêt avant dire droit du 9 Novembre 1972 par lequel la Cour d'Appel de Cotonou a sursis à statuer;

Vu l'ordonnance n° 21/PR du 26 Avril 1966 portant organisation de la Cour Suprême;

Oui à l'audience publique du Vendredi 28 Avril 1978, le Président Alexandre PARAÏSO en son rapport;

Oui le Procureur Général Grégoire GBENOU en ses conclusions;

EN LA FORME:

Considérant que le nommé DJIDONOU Apollinaire a saisi la Cour d'une requête tendant d'une part à l'annulation de la décision préfectorale n° 919 du 10-4-1963 attribuant à Olympe BHELY QUENUM un permis d'habiter sur une parcelle de terrain comprise entre les lots 123 et 124 de Cotonou et subsidiairement d'autre part à la reconnaissance à son profit d'une servitude de trois mètres, grèvant la susdite parcelle;

Considérant que ce recours a été formulé à l'occasion d'un renvoi préjudiciel par lequel la Cour d'Appel de Cotonou a sursis à statuer sur le litige opposant DJIDONOU à QUENUM "jusqu'à ce qu'il soit décidé par la juridiction administrative compétente sur les conséquences de l'existence simultanée du droit d'occuper la parcelle comprise entre les lots 123 et 124 de Cotonou et de la servitude de trois mètres prévue par le Préfet de l'Atlantique au profit des propriétaires riverain des rues déclassées".

Considérant qu'il s'agit en fait de se prononcer sur la validité de la décision n° 919 du 10 Avril 1963 et sur les effets du communiqué préfectoral n°2/PR-A du 30 Décembre 1968 relativement à cette décision antérieure de même autorité administrative;

Considérant en droit que s'il eût agit proprio motu DJIDONOU eût été irrecevable à demander l'annulation de la décision susvisée du 10 Avril 1963 comme étant tardivement sollicitée;

Considérant en l'espèce que DJIDONOU a introduit sa requête à l'occasion d'un renvoi préjudiciel de l'autorité judiciaire;

Considérant que lorsqu'une partie saisit la Cour en exécution d'un renvoi préjudiciel, les questions soumises au renvoi sont définies par la décision de sursis et non par les conclusions des parties;

Considérant qu'il en résulte que les litigants ne peuvent ni étendre, ni restreindre la mission du juge de renvoi et ne peuvent en particulier profiter de la saisine de ce dernier pour joindre à un recours en appréciation de validité, des conclusions aux fins d'annulation de l'acte administratif querellé;

Considérant par suite que DJIDONOU Apollinaire ne pouvait valablement présenter à la Cour des conclusions en annulation du permis d'habiter n°919 du 10 Avril 1963 et celles en attribution d'une servitude grèvant la parcelle concédée par l'autorité administrative et qu'il échet dès lors déclarer ces conclusions irrecevables en la forme;

Considérant sur l'intervention de Olympe BHELY QUENUM que ce dernier a intérêt au maintien de la décision dont il est demandé d'apprécier la légalité;

Qu'il y a lieu en conséquence de déclarer recevable son intervention.

AU FOND

Considérant que l'arrêt de renvoi de la Cour d'Appel tend à ce qu'il soit déclaré si la décision n°919 du 10 Avril 1963 attribuant à QUENUM des droits d'habiter la parcelle litigieuse est conforme à la réglementation en vigueur et si par ailleurs le communiqué radiodiffusé préfectoral n°2/PR-A du 30 Décembre 1968 a pu valablement concéder à DJIDONOU une servitude de 3 m grèvant ladite parcelle;

Considérant sur le premier point que DJIDONOU argue de l'illégalité de la décision n°919 du 10 Avril 1963 motifs pris qu'elle viole le droit de préemption qu'il pouvait tirer de l'arrêté n°3767/T.P. du 30 Décembre 1939 dont l'article 20 dispose que "lorsqu'un plan d'alignement comporte en certains points la réduction de la largeur d'une voie existante, la portion du domaine public ainsi laissée en dehors des limites constitue un délaissé de Voirie et les propriétaires riverains doivent être sollicités par l'Administration d'acquérir le terrain ainsi offert";

Considérant en droit que l'alignement est le tracé fait par l'autorité administrative pour fixer la limite qui sépare la voie publique de la propriété privée et déterminer la ligne sur laquelle les riverains peuvent planter ou construire;

Considérant que lorsque l'alignement a pour but de rétrécir la voie existante, la partie de l'assiette abandonnée par l'Administration constitue un délaissé de Voirie sur lequel le texte susvisé donne aux propriétaires riverains un droit de préemption;

Considérant que le droit de préemption n'a pas pour but d'accroître les propriétés riveraines mais seulement de garantir les droits et servitudes divers qui grèvent la voie publique et qui leur sont reconnus de ce seul fait;

Considérant en l'espèce que c'est à la suite d'une opération de déclassement de la voie comprise entre les lots 123 et 124 de Cotonou que l'Administration a crée au profit de Olympe BHELY QUENUM le droit d'occuper une parcelle de cette rue;

Considérant que le déclassement se définit comme l'acte par le quel l'Administration enlève à une portion de territoire son caractère de voie publique d'une collectivité déterminée soit pour le reclasser dans une nouvelle catégorie de voie publique, soit pour lui retirer l'incorporation à la Voirie Publique;

Considérant que lorsque la voie déclassée n'est pas reclassée dans une autre catégorie de voie publique, le déclassement a pour effet d'en faire entrer le sol dans le domaine privé de la collectivité intéressée et de la rendre par conséquent aliénable;

Considérant qu'il en résulte que l'aliénabilité d'une voie déclassée entraîne ipso facto la disparition des droits et servitudes grèvant la voie publique ainsi que le droit de préemption qui s'y attache;

Considérant en conclusion que si l'alignement de la voie publique affecte l'assiette de cette voie mais conserve sur ce sol les droits divers au profit des riverains, le déclassement au contraire laisse intactes les dimensions de la rue tout en effaçant les droits qui leur étaient inhérents;

Considérant en conséquence qu'aucune réglementation en vigueur n'imposant à l'Administration le respect d'un droit quelconque au profit des riverains d'une voie déclassée, la décision prise par le Préfet d'attribuer à Olympe BHELY QUENUM un permis d'habiter sur la parcelle comprise entre les lots 123 et 124 n'a violé aucun texte et partant n'est entachée d'aucune illégalité;

Considérant sur la validité du communiqué n°2 PR-A du 30 Décembre 1968 imposant une servitude au profit des riverains de rue déclassée qu'un simple communiqué radiodiffusé fût-il préfectoral n'a pas valeur d'acte administratif obligeant les administrés, s'il n'a pas été édité par la voie réglementaire de l'arrêté préfectoral;

Mais considérant qu'à supposer même que ce communiqué puisse avoir l'autorité attachée aux arrêtés préfectoraux, c'est à la condition de ne pas porter atteinte aux droits que les tiers tiennent des situations antérieures; juridiquement protégées;

Considérant en particulier que DJIDONOU tient ses droits non d'un acte administratif, mais d'un titre foncier régulièrement établi et dont les droits intangibles résultent expressément de l'article 121 de la loi 65-25 du 14 Août 1965 sur la propriété foncière;

Considérant dès lors qu'une décision administrative ne saurait y ajouter de droits qui ne s'y trouveraient pas inscrits à l'origine et qu'il échet dès de dire que le communiqué préfectoral n°2 PR-A du 30 Décembre 1968 n'affecte en rien les droits que Olympe POSSY BHELY QUENUM tient de l'arrêté n°919 du 10 Avril 1963 lui attribuant un permis d'habiter sur la parcelle comprise entre les lots 123 et 124 de Cotonou, ni à plus forte raison les droits qui ont été conférés à DJIDONOU Apollinaire par le titre foncier n°468 de Cotonou;

Considérant que les frais de l'instance doivent être mis à la charge du requérant.

PAR CES MOTIFS

DECIDE

Article 1. - Il est déclaré que la décision susvisée n° 919 du 10 Avril 1963 n'est pas entachée d'illégalité et que le communiqué préfectoral n°2 PR-A du 30 Décembre 1963 ne donne aucun droit à DJIDONOU sur la parcelle objet du permis d'habiter attribué à Olympe BHELY QUENUM par ladite décision n° 919 du 10 Avril 1963.

Article 2. - Le recours incident de DJIDONOU est irrecevable.

Article 3. - Les dépens sont à la charge du demandeur.

Article 4. - Notification de la présente décision à DJIDONOU, QUENUM et au Préfet de l'Atlantique, et à BHELY POSSY QUENUM.

Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Administrative) composée de:

Alexandre PARAÏSO, Président de la Chambre Administrative , PRESIDENT

Elisabeth POGNON et Michel DASSI CONSEILLERS

Et prononcé à l'audience publique du Vendredi vingt huit Avril mil neuf cent soixante dix huit, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de:

Grégoire GBENOU PROCUREUR GENERAL

et de Pierre Victor AHEHEHINNOU GREFFIER

Et ont signé:

Le Président-Rapporteur Le Greffier

Alexandre PARAÏSO P. V. AHEHEHINNOU


Synthèse
Formation : Chambre administrative
Numéro d'arrêt : 4
Date de la décision : 28/04/1978

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;1978-04-28;4 ?
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