La Cour,
Vu la requête en date du 26 septembre 1986, enregistrée au Greffe de la Cour sous N° 350/GC/CPC du 03 novembre 1986, par laquelle Monsieur ELET Michel, Préposé des Services Administratifs, précédemment en service au Ministère de la Justice, Chargé de l'Inspection des Entreprises Publiques et Semi-Publiques , et actuellement en fonction au Tribunal de Première Instance d'Abomey, a saisi la Cour d'un recours en annulation pour excès de pouvoir contre la lettre N° 303/MTAS/DGM/DPES du 05 mai 1984 du Ministre du Travail et des Affaires Sociales donnant une suite défavorable à la demande de révision de sa situation administrative;
Vu la lettre N° 87/GC/CPC du 09 mars 1987 par laquelle la requête introductive d'instance valant mémoire ampliatif du requérant a été communiquée au Ministre du Travail et des Affaires Sociales pour ses observations;
Vu la lettre N° 288/GC/CPC du 18 mai 1987 par laquelle une mise en demeure a été adressée à l'Administration qui n'a pas conclu;
Vu la consignation constatée par reçu N° 177 du 11 novembre 1986 du Greffe;
Vu toutes les pièces du dossier;
Vu la Loi N° 81-004 du 23 mars 1981 portant Organisation Judiciaire, alors applicable;
Vu l'Ordonnance N° 21/PR du 26 avril 1966 organisant la procédure devant la Cour Suprême, remise en vigueur par la Loi N° 90-012 du 1er juin 1990;
Vu la Loi N° 86-013 du 26 février 1986 portant Statut Général des Agents Permanents de l'Etat;
Vu le Décret N° 85-361 du 11 septembre 1985 portant Statuts Particuliers des Corps des Personnels Administratifs Communs;
Ouï Le Conseiller SOSSOUHOUNTO en son rapport;
Ouï l'Avocat Général en ses conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la Loi;
EN LA FORME:
Considérant que, bien que le recours du requérant soit tardif, il y a lieu de l'accueillir conformément à une jurisprudence constante de la Cour.
AU FOND:
Considérant qu'il ressort du dossier ce qui suit:
Le requérant, fonctionnaire en République de Guinée Conakry, a été, sur demande du Gouvernement Béninois, mis à la disposition du Bénin pour compter du 1er novembre 1973.
Par Arrêté Année 1979 N° 0137/MFPT/DPE/S1-A du 25 janvier 1979, il a été reclassé et avancé dans le Corps des Préposés des Services Administratifs, ce qui ne l'a pas satisfait, certains béninois revenus de Guinée comme lui et placés dans la même situation ayant bénéficié des dispositions du Décret N° 61-33/PR/MFB/CAB du 02 février 1961 fixant à titre provisoire la rémunération des fonctionnaires nationaux Dahoméens servant au Dahomey à titre de l'Assistance Technique.
Le requérant estimant qu'il a droit aux mêmes avantages, a saisi le Ministre de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative d'une lettre aux fins de révision de sa situation administrative dans le sens souhaité et se heurta à une fin de non recevoir. La décision de rejet de la requête du requérant est contenue dans la lettre N° 303/MTAS/DGM/DPES du 05 mars 1984.
Considérant que le requérant fonde son recours sur les moyens tirés de la violation de l'article 166 de la Loi N° 81-004 du 23 mars 1981 portant Organisation Judiciaire en République du Bénin et de la méconnaissance du principe de l'égalité des citoyens devant le service public.
Sur le Moyen du requérant tiré de la violation du principe de l'égalité des citoyens devant le service public, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens.
Considérant que s'il est vrai que le principe de l'égalité devant les services publics implique que tout citoyen placé dans une situation identique à l'égard du service public doit être traité de la même façon, il est aussi certain que l'égalité doit se faire et se poursuivre conformément à la loi et aux règlements en vigueur;
Que s'il est vrai qu'en Droit Administratif, l'erreur dans certains cas et après un délai de deux mois devient un acquis en application du principe de l'intangibilité des effets individuels de l'acte administratif ou principe du droit acquis au maintien des situations individuelles définitives (C.E. 3 novembre 1922, Dame CACHET, Rec.790 S. 1925 - 3.9; R.D.P. 1922 - 552), il est aussi certain que personne ne peut alléguer du fait qu'une erreur ait profité à d'autres pour réclamer l'application ou le bénéfice de l'acte erroné (Cour Suprême du Bénin, Chambre Administrative , Bernard KAYOSSI et Maly Yaya ALAO-FARY contre Ministre du Travail et des Affaires Sociales, Arrêt N° 3/CA du 23 mars 1989).
Considérant qu'en l'espèce, le Décret N° 61-33/PR/MFB/CAB du 02 février 1961, n'est applicable qu'aux fonctionnaires nationaux dahoméens servant au Dahomey au titre de l'assistance technique.
Considérant que ni le requérant, ni ses collègues ne relevaient de ce texte;
Que donc ledit requérant ne saurait exciper de l'erreur de l'Administration au profit de ses collègues pour prétendre bénéficier illégalement des mêmes avantages;
Qu'en conséquence le moyen du requérant tiré de la violation par l'Administration du principe de l'égalité des citoyens devant les services publics ne saurait être accueilli.
Considérant qu'au total le recours pour excès de pouvoir du requérant contre la décision contenue dans la lettre N° 303/MTAS/DGM/DPES du 05 mars 1984 par laquelle le Ministre du Travail et des Affaires Sociales a opposé une fin de non recevoir à la révision de sa situation administrative, doit être rejeté.
PAR CES MOTIFS:
D E C I D E:
Article 1er. - Le recours du requérant contre la décision contenue dans la lettre N° 303/MTAS/DGM/DPES du 05 mars 1984 par laquelle le Ministre du Travail et des Affaires Sociales, depuis, Ministre de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative, a opposé une fin de non recevoir à la révision de sa situation administrative, est recevable.
Article 2. - Ledit recours est rejeté.
Article 3. - Notification du présent arrêt sera faite au requérant ELET Michel, au Ministre de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative, au Ministre de la Justice et de la Législation, à l'Agent Judiciaire du Trésor et au Procureur Général près la Cour Suprême.
Article 4. - Les frais sont mis à la charge du requérant.
Ainsi fait et délibéré par la Cour Suprême (Chambre Administrative) composée de Messieurs:
Basile Emmanuel SOSSOUHOUNTO, 1er Conseiller à la Chambre Administrative), PRESIDENT;
Marius QUENUM et Mouazimou AMOUSSA MADJEBI, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l'audience publique du jeudi vingt quatre février mil neuf cent quatre vingt quatorze, la Chambre étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de Monsieur Samson DOSSOUMON, Avocat Général de la Section Administrative, MINISTERE PUBLIC;
Et de Maître Justin TOUMATOU, GREFFIER. -
Et ont signé:
Le Président, Le Greffier,