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27/12/2019 | BéNIN | N°59

Bénin | Bénin, Cour suprême, 27 décembre 2019, 59


Texte (pseudonymisé)
N° 59/CJ-S du Répertoire ; N° 2014-02/CJ-S du greffe ; Arrêt du 27 décembre 2019 ; Ad A (Me Rafiou PARAÏSO) C/ Société SOCOPAO (Me Bertin AMOUSSOU)

Procédure sociale – Rupture du contrat de travail – Licenciement abusif – Perte de confiance – Détention de l’employé – Suppression du contrat de travail – Réintégration du salarié (Rejet).

La perte de confiance induite par une série de comportements blâmables, une mise de faits constitutifs de faute, la détention de l’employé, sa comparution devant le tribunal dénotent d’un manque de sérieux et p

euvent justifier et même légitimer un licenciement, quand bien même la procédure se serait solder...

N° 59/CJ-S du Répertoire ; N° 2014-02/CJ-S du greffe ; Arrêt du 27 décembre 2019 ; Ad A (Me Rafiou PARAÏSO) C/ Société SOCOPAO (Me Bertin AMOUSSOU)

Procédure sociale – Rupture du contrat de travail – Licenciement abusif – Perte de confiance – Détention de l’employé – Suppression du contrat de travail – Réintégration du salarié (Rejet).

La perte de confiance induite par une série de comportements blâmables, une mise de faits constitutifs de faute, la détention de l’employé, sa comparution devant le tribunal dénotent d’un manque de sérieux et peuvent justifier et même légitimer un licenciement, quand bien même la procédure se serait solder par un non-lieu.

La Cour,

Vu l’acte n° 009 du 29 août 2013 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Rafiou PARAÏSO, conseil de Ad A, a élevé pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de l’arrêt n°023/13 rendu le 12 juin 2013 par la chambre sociale de cette cour ;

Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ; Vu l’arrêt attaqué ;

Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;

Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Vu les pièces du dossier ;

Ouï à l’audience publique du vendredi 27 décembre2019 le président Sourou Innocent AVOGNON en son rapport ;

Ouï le procureur général Ac Aa B en ses conclusions ; Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que suivant l’acte n° 009 du 29 août 2013 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Rafiou PARAÏSO, conseil de Ad A, a élevé pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de l’arrêt n°023/13 rendu le 12 juin 2013 par la chambre sociale de cette cour ;

Que par lettre n°0861/GCS du 1er avril 2014 du greffe de la Cour suprême, maître Rafiou PARAÏSO, a été mis en demeure d’avoir à produire son mémoire ampliatif dans un délai de deux (02) mois, conformément aux dispositions de l’article 933 de la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;

Que les mémoires ampliatif et en défense ont été produits ; Que le procureur général a produit ses conclusions ;

EN LA FORME

Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ; Qu’il convient de le déclarer recevable

AU FOND

FAITS ET PROCEDURE

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par procès-verbal de non conciliation de la direction départementale de la fonction publique et du travail de Cotonou, le tribunal de première instance de Cotonou statuant en matière sociale a été saisi du différend qui oppose Ad A à la société SOCOPAO ;

Que par jugement n°017/3èmeCH-SOC du 14 mars 2011, le tribunal saisi a déclaré que la perte de confiance alléguée pour justifier le licenciement est fondée et que ce licenciement intervenu est légitime, puis a rejeté toutes les demandes formulées par Ad A ;

Que sur appel de Ad A, la chambre sociale de la cour d’appel de Cotonou a rendu l’arrêt n°023/13 du 17 juin 2013 par lequel elle a confirmé le jugement querellé en toutes ses dispositions ;

Que c’est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi ;

DISCUSSION

Sur le moyen unique tiré de la violation de la loi en trois (03) branches Première branche du moyen : fausse interprétation des articles 35 du code de travail et 28 de la convention collective du travail

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, la violation de la loi par fausse interprétation des articles 35 du code de travail et 28 de la convention collective générale du travail, en ce qu’il a déclaré légitime le licenciement de Ad A, au motif que « la perte de confiance même en cas d’une décision de relaxe est une cause de rupture du contrat de travail », alors que, selon cette première branche du moyen, il résulte de l’alinéa 9 de l’article 35 du code de

travail que « le contrat de travail est suspendu pendant la durée de la détention préventive du travailleur qui n’a pas commis une faute professionnelle » et de l’alinéa 3 de l’article 28 de la convention collective générale du travail que

« lorsque la détention débouche sur un non-lieu ou une décision de relaxe, l’employeur doit verser au travailleur une allocation équivalent au moins au salaire correspondant à la période de détention. Le travailleur est repris dans son emploi et la période de détention est prise en compte pour l’évaluation de l’ancienneté » ;

Que sur ce point, la doctrine a développé qu’en « principe, l’employeur ne peut licencier le salarié pendant la durée de suspension du contrat de travail » ;

Que la jurisprudence établit quant à elle que « l’employeur informé de la décision de relaxe du salarié doit le réintégrer sauf si le travailleur ne s’était pas présenté immédiatement à son service » ;

Que c’est à tort que la société SOCOPAO a refusé de réintégrer le demandeur au pourvoi excipant d’une prétendue perte de confiance tirée de sa détention provisoire ;

Mais attendu que l’article 28 alinéa 3 de la convention collective générale subordonne son application à la condition que la détention est intervenue du fait du chef d’entreprise ou d’établissement ;

Qu’en outre, selon l’alinéa 1er du même article 28, la détention préventive n’est retenue comme cause de suspension du contrat de travail, que lorsqu’elle est connue de l’employeur ;

Qu’en invoquant la violation de la loi en cette première branche, le demandeur au pourvoi qui n’a pas tenu compte de l’intégralité des dispositions de l’article 28 de la convention générale du travail, n’administre pas la preuve que sa détention préventive est intervenue du fait de son employeur et que cette détention préventive était connue de celui-ci ;

Que l’arrêt attaqué n’est donc pas reprochable du grief de la violation articulée ; Que le moyen en sa première branche n’est pas fondé ;

Deuxième branche du moyen : refus d’application de la loi et défaut de base légale

Attendu qu’il est également reproché à l’arrêt attaqué, le refus d’application des dispositions de l’article 35 alinéa 9 du code de travail et l’article 28 de la convention collective générale du travail, alors que, selon cette branche du

moyen, ces dispositions constituent la base légale de suspension du contrat de travail pour cause de détention préventive ;

Qu’en outre, les juges de la cour d’appel n’ont pas motivé juridiquement leur décision par d’autres dispositions légales ;

Qu’en refusant d’appliquer les dispositions des articles 35 et 28 susvisés du code de travail et de la convention collective générale du travail, la décision de la cour d’appel manque de base légale ;

Mais attendu qu’en méconnaissance des dispositions de l’alinéa 2 de l’article 52 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédure applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême, cette branche du moyen met en œuvre deux (02) cas d’ouverture à cassation, en l’occurrence le refus d’application de la loi et le défaut de base légale ;

Que le moyen en sa deuxième branche est irrecevable ; Troisième branche du moyen : mauvaise appréciation des faits

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué une mauvaise appréciation des faits, en ce que les juges de la cour d’appel ont fondé leur décision sur une prétendue perte de confiance et motivé « que la décision de relaxe prononcée au profit de Ad A ne saurait même pas établir la crédibilité de la société SOCOPAO qui se trouve entamée au regard des faits… », alors que, selon cette branche du moyen, « la perte de confiance ne peut être un motif de licenciement surtout lorsqu’est intervenu un non-lieu sur le plan pénal … » qu’

« il faut que les faits à base de cette perte de confiance soient objectifs et établis » ;

Que par ailleurs, la perte de confiance est une notion factuelle qui ne saurait constituer une faute lourde pouvant priver le travailleur du bénéfice du préavis ; Qu’en l’espèce, la faute à la base de la détention de Ad A n’a pas été commise dans la société SOCOPAO et les juges du fond n’ont pas objectivement établi le caractère sérieux de la perte de confiance alléguée par l’employeur à l’encontre de Ad A ;

Que ce faisant, les juges du fond ont procédé à une mauvaise appréciation des faits de la cause et leur décision encourt cassation ;

Mais attendu que pour retenir la perte de confiance qui fonde le licenciement du demandeur au pourvoi, l’arrêt attaqué, après avoir relevé une série de comportements blâmables, énonce, entre autres, que « la succession de faits

constitutifs de fautes suivie d’une détention préventive à la prison civile de Cotonou, puis sa comparution devant le tribunal correctionnel dénotent le manque de sérieux et de probité, de loyauté de Ad A dans l’exercice de ses fonctions, et jette ainsi par son comportement, un discrédit sur son employeur qui se trouve exposé au paiement de pénalités et à un contrôle plus strict » ;

Que par ces constatations et énonciations la cour d’appel a fait une exacte application des faits ;

Que le moyen en cette branche n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

Reçoit en la forme le présent pourvoi ; Le rejette quant au fond ;

Met les frais à la charge du Trésor public ;

Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu’aux parties ;

Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;

Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judicaire) composée de :

SourouInnocentAVOGNON,présidentdelaChambrejudiciaire,

PRESIDENT;

Michèle CARRENA ADOSSOU

EtCONSEILLERS ;

Ab C

Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-sept décembre deux mille dix-neuf, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :

Ac Aa B, PROCUREURGENERAL;

Djèwekpégo Paul ASSOGBA, GREFFIER ;

Et ont signé

Le président-rapporteur,Le greffier.

Sourou Innocent AVOGNONDjèwekpégo Paul ASSOGB


Synthèse
Numéro d'arrêt : 59
Date de la décision : 27/12/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2019-12-27;59 ?
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