N° 2020-13/CJ-P du greffe ; Arrêt du 29 mai 2020 ; Ministère public c. Ad Aa C
La Cour,
Vu la lettre n°232/CRIET/Parquet spécial/PS-C en date à Porto-Novo du 25 mai 2020 enregistrée au secrétariat de la chambre judiciaire de la Cour suprême le même jour sous le n°618/CJ par laquelle le procureur spécial près la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) a présenté, en application des dispositions de l’article 637 alinéa 1 du code de procédure pénale, requête à ladite chambre en vue de la désignation de la juridiction chargée de l’instruction et éventuellement du jugement des faits de corruption, d’intelligence avec une organisation terroriste et d’abus de fonction dont le nommé Ad Aa C, brigadier major de police, officier de police judiciaire est susceptible d’être inculpé ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2012-15 du 18 mars 2013 modifiée et complétée par la loi n° 2018-14 du 02 juillet 2018 portant code de procédure pénale ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience en chambre de conseil du vendredi 29 mai 2020, le conseiller Michèle O. A. Y A en son rapport ;
Ouï le procureur général Ac Ae X en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que par lettre n°232/CRIET/Parquet spécial/PS-C en date à Porto-Novo du 25 mai 2020 enregistrée au secrétariat de la chambre judiciaire de la Cour suprême le même jour sous le n°618/CJ, le procureur spécial près la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) a présenté, en application des dispositions de l’article 637 alinéa 1 du code de procédure pénale, requête à ladite chambre en vue de la désignation de la juridiction chargée de l’instruction et éventuellement du jugement des faits de corruption, d’intelligence avec une organisation terroriste et d’abus de fonction dont le nommé Ad Aa C, brigadier major de police, officier de police judiciaire est susceptible d’être inculpé ;
EN LA FORME
Attendu que la requête du procureur spécial près la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) est recevable, l’article 637 de la loi n°2012-15 du 18 mars 2013 portant code de procédure pénale n’ayant prescrit aucune forme particulière pour la requête à adresser à la chambre judiciaire de la Cour suprême ;
AU FOND
Faits et procédure
Attendu qu’il ressort de la requête du procureur spécial près la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) que le jeudi 07 mai 2020, le nommé B Ab a été retrouvé et interpellé dans le parc national W dans une zone reculée et inaccessible aux populations civiles riveraines située à 25 kilomètres de la frontière avec le Burkina-Faso et 80 kilomètres de celle du Nigéria ;
Qu’interpellé, il a déclaré avoir appartenu à une organisation terroriste dont il se serait soustrait en raison des actes de violence que pose ce groupe ;
Qu’il a été mis à la disposition du commissariat d’arrondissement de Af pour enquête ;
Que l’officier de police judiciaire Ad Aa C, brigadier major de police, n’a pas mis toutes les informations utiles à la disposition des autorités de poursuite du tribunal de première instance de deuxième classe de Af ;
Qu’il n’a pas non plus accompli les actes d’enquêtes judiciaires nécessaires à l’infraction de terrorisme reprochée à Ab B ;
Qu’il a agi en méconnaissance de la loi n°2018-13 du 02 juillet 2018 modifiant et complétant la loi n°2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin relative à la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) ;
Qu’Ad Aa C est déféré au parquet spécial de la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) ce 25 mai 2020 pour être poursuivi pour les faits de corruption, d’intelligence avec une organisation terroriste et d’abus de fonction ;
DISCUSSION
Attendu que l’article 637 alinéa 1 du code de procédure pénale dispose que : « Lorsqu’un officier de police judiciaire est susceptible d’être inculpé d’un crime ou d’un délit qui aurait été commis dans la circonscription où il est territorialement compétent hors, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, le procureur de la République saisi de l’affaire présente sans délai requête à la chambre judiciaire de la Cour suprême qui procède et statue comme en matière de règlement de juge et désigne la juridiction chargée de l’instruction ou du jugement de l’affaire. » ;
Attendu que l’application dudit article suppose la réunion des conditions ci-après :
la qualité d’officier de police judiciaire ;
la nomination de l’intéressé à un emploi emportant l’exercice des fonctions d’officier de police judiciaire ;
la commission de l’infraction dans la circonscription où il est territorialement compétent, hors, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ;
Que dans le cas d’espèce, le brigadier major de police Ad Aa C est officier de police judiciaire ;
Qu’il a été nommé à un emploi emportant l’exercice des fonctions d’officier de police judiciaire puisqu’il était, au moment des faits, commissaire de police de Af par intérim ;
Que toutes les conditions sont donc réunies à l’endroit de Ad Aa C et qu’il peut bénéficier de la dérogation de compétence prévue à l’article 637 du code de procédure pénale ;
Que par ailleurs, conformément aux dispositions de de l’article 5 alinéas 3 et 6 nouveau de la loi n°2020-07 du 07 février 2020 modifiant et complétant la loi n°2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin telle que modifiée par la loi n°2018-13 du 02 juillet 2018 relative à la Cour de Répression des infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET), les faits de terrorisme et les infractions connexes d’abus de fonction, de corruption d’agents publics dont le susnommé est susceptible d’être poursuivi, ressortissent à la compétence exclusive de cette cour qui, du reste est déjà saisie de la procédure ;
Que pour une bonne administration de la justice, il convient de désigner la Cour de Répression des infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) pour être chargée de l’instruction et/ou du jugement de cette affaire ;
Que la juridiction ainsi désignée sera également compétente, en raison des liens de connexité, à l’égard du mis en cause ;
PAR CES MOTIFS
Reçoit en la forme la requête du procureur spécial près la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) ;
Au fond, désigne la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) comme juridiction d’instruction et ou de jugement des faits de corruption, d’intelligence avec une organisation terroriste et d’abus de fonction dont le nommé Ad Aa C, brigadier major de police, officier de police judiciaire est susceptible d’être inculpé ;
Dit que cette juridiction sera également compétente à l’égard de tous co-auteurs ou complices desdits faits ;
Met les frais à la charge du Trésor public ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur spécial près la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) ;
Ordonne la transmission du dossier au procureur spécial près la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) ;