N° 27/CJ-DF du répertoire ; N° 2019-51/CJ-CT du greffe ; Arrêt du 26 juin 2020 ; Ae AH (Me Brice TOHOUNGBA) C/ -Eustache LIN-TI -Héritiers de feu A AG REP/ Ak Ag AG
Droit foncier – Dénaturation de deux écrits – Remise en discussion des faits et constatations – Appréciation souveraine – Irrecevable (Oui).
Droit foncier – Constatations des faits – Motifs inopérants – Rejet (Oui).
Un moyen qui tend à remettre en discussion des faits ou éléments de faits souverainement appréciés par les juges du fond est irrecevable.
A légalement justifié sa décision une cour d’appel qui se détermine à partir des constatations de fait non contredites par les parties.
La Cour,
Vu l’acte n°20 du 08 mars 2019 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel Ae AH a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°019/19 rendu le 12 février 2019 par la deuxième chambre civile de droit de propriété foncière de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Vu la loi n° 2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin modifiée et complétée par la loi n°2017-15 du 10 août 2017 ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi vingt-six juin deux mil vingt, le conseiller Antoine GOUHOUEDE en son rapport ;
Ouï le procureur général Ad Af Y en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°20 du 08 mars 2019 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, Ae AH a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°019/19 rendu le 12 février 2019 par la deuxième chambre civile de droit de propriété foncière de cette cour ;
Que par lettres n°4832/GCS et n°4833/GCS du 05 juillet 2019 du greffe de la Cour suprême, le demandeur au pourvoi et son conseil maître Brice TOHOUNGBA ont été mis en demeure d’avoir à consigner dans un délai de quinze (15) jours et à produire leurs moyens de cassation dans le délai de deux (02) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 921, 931, 933 et 935 de la loi n°2008-07 du 28 février 2011 modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Que les mémoires ampliatif et en défense ont été produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions, lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations sans réaction de leur part ;
Que cependant, par lettre en date du 20 février 2020 reçue au secrétariat de la chambre judiciaire le 09 mars 2020 sous le n°271/CJ, Ag Z, un des défendeurs au pourvoi, a produit un mémoire en défense avec des pièces ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ;
Qu’il convient de le déclarer recevable ;
AU FOND
Faits et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par requête en date du 23 janvier 1995, A AG a saisi le tribunal de première instance de Cotonou statuant en matière de droit traditionnel (biens) d’une action en revendication de droit de propriété sur un domaine sis à Aj Ai à Cotonou contre Ag Z ;
Que par jugement contradictoire n°050/1CB/2008 rendu le 04 décembre 2008, le tribunal saisi après avoir déclaré Ae AH recevable en son intervention volontaire et Ag Z recevable en sa demande reconventionnelle, a notamment confirmé le droit de propriété de ce dernier sur deux (02) parcelles acquises auprès de A AG, constaté qu’une procédure de faux et usage de faux est en cours entre eux avant de confirmer le droit de propriété de feu A AG représenté par Ak Ag AG et Ae AH sur vingt (20) parcelles dans le domaine en cause ;
Que sur appel de Ag Z, la deuxième chambre civile de droit de propriété foncière de la cour d’appel de Cotonou a rendu le 12 février 2019, l’arrêt n°019/19 par lequel elle a annulé le jugement querellé puis évoquant et statuant à nouveau, a débouté Ae AH de sa demande tendant à se voir déclarer co-propriétaire par voie d’héritage de vingt (20) parcelles dans le domaine concerné avec A AG dont le droit de propriété exclusif a été confirmé sur lesdites parcelles tandis que le droit de propriété de Ag Z a été confirmé sur les deux (02) parcelles régulièrement achetées auprès de A AG et deux (02) autres en cours d’acquisition en le condamnant au paiement de la somme de deux cent quarante mille (240 000) francs restant due ;
Que c’est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION DES MOYENS
Sur le premier moyen tiré de la dénaturation de deux (02) écrits
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de la dénaturation du contenu de l’arrêt n°067/81 rendu le 02 septembre 1981 par la chambre de droit traditionnel de la cour d’appel de Cotonou et celui de l’ordonnance de référé n°21/3 CRC rendu le 14 juillet 2014 par le président du tribunal de première instance de deuxième classe d’Abomey-Calavi en ce qu’il a affirmé en l’absence de la preuve irréfutable d’un acte de partage, que les vingt-quatre (24) parcelles frauduleusement acquises dans le domaine litigieux par Ag Z sont la propriété exclusive de A AG en écartant de ce fait son frère Ae AH, alors que, selon le moyen, l’arrêt du 02 septembre 1981 rendu dans l’affaire n°016/RG-64 entre A AG et Ae AH A (appelants) d’une part, et Ab B, Aa C (intimés) d’autre part, a reconnu sans ambages le droit de « propriété de la collectivité A et par voie de conséquence celle de l’appelant Ae AH A son héritier » sur la palmeraie litigieuse tandis que l’ordonnance de référé ci-dessus citée a rétracté celle du 25 mars 2011 ayant désigné Ak Ag A et Ac Ah A comme liquidateurs des biens de la succession de feu A AG ;
Que contrairement à la motivation de l’arrêt attaqué, le fait que chacun des héritiers aurait occupé et pris possession d’une partie du domaine A AH X n’équivaut nullement à un partage dudit domaine et que contrairement aux motifs de l’arrêt attaqué, beaucoup de ventes immobilières attribuées à Ae AH font l’objet de contestations pendantes devant les juridictions compétentes ;
Que pour avoir dénaturé les dispositions claires de ces deux (02) écrits, l’arrêt attaqué encourt cassation ;
Mais attendu que sous le grief de la dénaturation du contenu de deux (02) écrits, le moyen tend en réalité à remettre en discussion devant le Haute Juridiction des faits ou éléments de fait et constatations souverainement appréciés par les juges du fond ;
Que ce moyen est irrecevable ;
Sur le deuxième moyen tiré de l’existence de motifs inopérants
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir statué sur la base de motifs inopérants en ce qu’il a écarté des débats l’arrêt n°067/81 du 02 septembre 1981 qui avait pourtant confirmé le droit de propriété de feu A AG et de Ae AH sur le domaine litigieux pour débouter le demandeur au pourvoi de sa demande ;
Que la juridiction de cassation devrait assurer un certain contrôle de la pertinence des motifs et de la réponse que le juge du fond a apporté aux moyens des parties surtout lorsque ces motifs ont été déterminants dans la décision du juge du fond, comme dans le cas d’espèce ;
Mais attendu qu’il ne ressort pas de l’arrêt attaqué que les juges du fond ont entendu écarter des débats les termes de l’arrêt n°067/81 du 02 septembre 1981, qu’en se déterminant par ailleurs sur l’occupation de façon consensuelle par chacun des héritiers de chaque portion du domaine, l’aliénation de plus de quatre-vingt-dix (90) parcelles par Ae AH sans contestation de la part de son cohéritier A AG et la condamnation de Ag Z pour faux et usage de faux commis au préjudice de A AG et portant sur une vingtaine de parcelles sans l’implication de son frère Ae AH, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Le rejette quant au fond ;
Met les frais à la charge de Ae AH ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre judiciaire) composée de :
Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambre judiciaire ; PRESIDENT ;
Michèle CARRENA ADOSSOU Et Antoine GOUHOUEDE, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-six juin deux mil vingt, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Ad Af Y, procureur général, MINISTERE PUBLIC ;
Mongadji Henri YAÏ, GREFFIER ;
Et ont signé
Le président, Le rapporteur,
Sourou Innocent AVOGNON Antoine GOUHOUEDE
Le greffier.
Mongadji Henri YAÏ