N°154 /CA du Répertoire REPUBLIQUE DU BENIN
N°2003-109/CA3 du Greffe
AU NOM DU PEUPLE BENINOIS Arrêt du 22 juillet 2020
COUR SUPREME
Affaire :
CHAMBRE ADMINISTRATIVE B Ab
Préfet des départements
de l’Atlantique et du Littoral
et Aa A
La Cour,
Vu la requête introductive d’instance valant mémoire ampliatif en date à Cotonou du 10 juillet 2003, enregistrée au greffe de la Cour le 24 juillet 2003 sous le n°369/GCS, par laquelle B Ab, assistée de maître Mousbaye PADONOU-AMINOU, avocat au barreau du Bénin, a saisi la haute Juridiction aux fins de l’annulation de l’arrêté préfectoral n°2/018/DEP-ATL/CAB/SAD du 20 février 2003 portant abrogation des dispositions de l’arrêté préfectoral n°2/331/DEP- ATL/CAB/SAD du 28 juillet 1999 ;
Vu la loi n° 90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin telle que modifiée par la loi n°2019-40 du 07 novembre 2019 ;
Vu l’ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême, alors en vigueur ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 modifiant et complétant la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Vu toutes les pièces du dossier ;
Le conseiller Etienne FIFATIN entendu en son rapport et l’avocat général Saturnin AFATON en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
\ + Considérant que la requérante expose que par l’arrêté n°2/331/DEP-ATL/CAB/SAD du 28 juillet 1999, le préfet des départements du Littoral et de l’Atlantique a attribué à titre onéreux, la parcelle «R» du lot n°811 du lotissement de Gankpodo, arrondissement de YENAWA-Cotonou, a PADONOU Modeste, agent de l’OPT ;
Qu’à son tour, celui-ci lui a cédé ladite parcelle le 10 février 2002 moyennant la somme de FCFA trois millions cinq cent mille (3.500.000) ;
Qu'elle a sollicité et obtenu du préfet des départements de l’Atlantique et du Littoral le permis d’habiter n°2/713 du 11 septembre 2002 ;
Que conformément aux prescriptions dudit permis d’habiter, elle a entrepris des travaux pour la clôture de la parcelle ;
Qu’à peine a-elle-démarré les travaux que la nommée A Aa se présenta sur les lieux pour démolir les murs et ordonner la cessation des travaux au motif qu’elle est propriétaire de la parcelle ;
Que pour faire cesser les troubles causés par A Aa, elle a sollicité l’intervention des services compétents de la préfecture ;
Qu’à deux reprises, la préfecture, par les messages portés n°2/256 et 374/DEP-ATL/SG/SAG des 30 août et 23 décembre 2002 a ordonné à la Police de lui prêter main forte ;
Que c’est ainsi que la police a pu renvoyer manu militari A Aa des lieux ;
Qu'en outre, le secrétaire général de la préfecture dans une correspondance adressée au Directeur du Cabinet de Topographie chargé du lotissement de GANKPODO, a signifié que seules doivent être appliquées les dispositions des arrêtés n°2/331 et 477/DEP-ATL/CAB/SAD des 28 juillet 1999 et 12 octobre 2001 qui lui confèrent le droit de propriété sur la parcelle contestée ;
Qu’ils en étaient là quand, contre toute attente, elle eut la désagréable surprise de découvrir l’arrêté incriminé au niveau du commissariat de Ac ;
Qu’à l’article 2 dudit arrêté, il est indiqué que « les droits de propriété de madame A Aa sont confirmés sur la parcelle "R" du lot 811 du lotissement de GANKPODO » ;
(@ Qu’une telle mention venant d’un préfet qui, quelques mois auparavant, lui a délivré un permis d’habiter afférent à la même parcelle, est pour le moins inconcevable et curieuse ;
Qu'elle saisit la Haute Juridiction aux fins d’annulation de l’arrêté année 2003 n°2/018/DEP-ATL/CAB/SAD du 20 février 2003 portant abrogation des dispositions de l’arrêté n°2/331/DEP-ATL/CAB/SAD du 28 juillet 1999 ;
EN LA FORME
Sur la recevabilité du recours
Considérant que maître Magloire YANSUNNU, conseil de A Aa appelée en intervention forcée, soulève l’irrecevabilité du recours tirée de la forclusion de la requérante ;
Qu’il soutient qu’à compter de la date du 10 avril 2003, date de dépôt du recours hiérarchique à la préfecture de l’Atlantique, la requérante disposait de quatre (04) mois, soit jusqu’au 16 août 2003 au plus tard pour saisir la Cour ;
Considérant cependant que l’examen du cachet du bureau de poste au quartier Akpakpa apposé sur le pli, aux fins de l’expédition de la requête, fait ressortir la date du 11 juillet 2003 comme d’expédition du courrier ;
Considérant qu’en l’espèce, la date de l’expédition du recours ci-dessus indiquée et celle de la réception du courrier au secrétariat de la Chambre administrative le 17 juillet 2003 sous le n°282/CS/CA constituent la preuve que la requérante a agi dans le délai, soit avant le 16 août 2003 ;
Considérant en outre que ledit recours a fait l’objet d’enregistrements successifs les 21 juillet 2003 et 24 juillet 2003 d’abord au secrétariat administratif de la Cour, puis à son greffe ;
Qu'en définitive, en saisissant la Cour courant juillet 2003, la requérante a respecté les conditions de forme et de délai prescrites par la loi ;
Qu’il y a lieu de recevoir le requérant en son recours ;
AU FOND
Sur l’unique moyen de la requérante tiré du détournement de pouvoir
Considérant que la requérante soutient que les circonstances de prise de l’arrêté n°2/018/DEP-ATL/CAB/SAD du 20 février 2003 portant abrogation des dispositions de l’arrêté préfectoral n°2/331/DEP-ATL/CAB/SAD du 28 juillet 1999 sont constitutives de détournement de pouvoir ;
Qu'elle fait +, valoir que l’autorité ; préfectorale se devait de se référer au comité de recasement ou à tout le moins au directeur du cabinet topographique chargé du lotissement de la zone avant de prendre l’arrêté abrogatoire ;
Que l’abrogation de l’arrêté n°2/331/DEP-ATL/CAB/SAD du 28 juillet 1999 vise la satisfaction d’un intérêt particulier ;
Considérant que A Aa, par le biais de son conseil, soutient que l’autorité préfectorale n’a pas administré la preuve du motif qui fonde le retrait de sa parcelle par l’arrêté n°2/331/DEP-ATL/CAB/SAD du 28 juillet 1999 ;
Qu'elle est fondée à retirer l’arrêté attribuant la parcelle en cause à la requérante après s’être rendue compte de son erreur ;
Considérant que maître Alexandrine F. SAIZONOU- BEDIE conclut, pour le compte de l’autorité préfectorale, au mal fondé du recours ;
Qu'elle développe qu’après analyse des diverses pièces produites par A Aa, lesquelles justifient le droit de propriété de cette derrière sur la parcelle « R » dont s’agit, l’autorité préfectorale a dû abroger l’arrêté préfectoral du 28 juillet 1999 et rétrocéder à A Aa la même parcelle précédemment objet de retrait ;
Considérant qu'il résulte des pièces versées au dossier que, bien qu'il soit établi que l'administration ait inscrit la parcelle contestée à l'inconnu, il reste cependant que le nom de A Aa, attributaire légitime figure dans les différents registres des affaires domaniales ;
Considérant qu’il en ressort que c’est une erreur de l’autorité préfectorale d’avoir cédé une parcelle appartenant à autrui en procédant à sa vente à PADONOU Modeste ;
Que par l’arrêté contesté, ladite autorité n'a fait que rétablir la bénéficiaire de l’arrêté contesté dans ses droits en abrogeant l'arrêté préfectoral n°2/331/DEP-ATL/CAB/SAD du 28 juillet 1999 par lequel elle lui avait retiré la parcelle pour l'attribuer au vendeur de la requérante ;
Qu'ainsi, l’arrêté préfectoral n°2/018/DEP-ATL/CAB/ SAD du 20 février 2003 portant abrogation des dispositions de l’arrêté préfectoral n°2/331/DEP-ATL/CAB/SAD du 28 juillet 1999 doit être regardé comme régulier avec toutes les conséquences de droit ;
Qu’il n’y a donc pas de détournement de pouvoir ;
Qu'il y a lieu de rejeter le recours introduit par B Ab ; 4 ces motifs,
Décide :
Article 1er : Le recours en date à Cotonou du 10 juillet 2003, de B Ab ayant pour conseil, maître Mousbaye PADONOU-AMINOU, tendant à l’annulation de l’arrêté préfectoral n°2/018/DEP-ATL/CAB/SAD du 20 février 2003 portant abrogation des dispositions de l’arrêté préfectoral n°2/331/DEP-ATL/CAB/SAD du 28 juillet 1999, est recevable ;
Article 2 : Ledit recours est rejeté ;
Article 3 : Les frais sont mis à la charge de la requérante ;
Article 4: Le présent arrêt sera notifié aux parties et au Procureur général près la Cour suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême composée de :
Etienne FIFATIN, conseiller à la Chambre administrative ;
PRESIDENT ;
Isabelle SAGBOHAN
Et CONSEILLERS ;
Césaire KPENONHOUN
Et prononcé à l’audience publique du mercredi vingt-deux juillet deux mille vingt ; la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Saturnin D. AFATON, Avocat général,
MINISTERE PUBLIC ;
Bienvenu CODJO,
Et ont signé
Le Président rapporteur,
Bienvenu CODJO