N°186/CA du Répertoire
N° 2014-46/CA2 du Greffe
Arrêt du 14 août 2020
AFFAIRE : B M. Ab
A REPUBLIQUE DU BENIN
AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE La Cour,
Vu la requête introductive d’instance en date à Ac du 24 mars 2014, enregistrée au greffe le 31 mars 2014 sous le n°337/GCS, par laquelle B M. Ab, a saisi la Cour d’un recours en annulation de l’arrêté n°164/MICPME/DC/SGM/DRFM/DRH/SA du 04 décembre 2013 mettant fin aux fonctions de l’agent comptable du Bureau de Restructuration et de Mise à Niveau des entreprises (BRMN) ;
Vu la loi n°90-032 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin telle que modifiée par la loi n°2019-40 du 07 novembre 2019 ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Vu toutes les pièces du dossier ;
Le conseiller Rémy Yawo KODO entendu en son rapport et l’avocat général Saturnin D. AFATON en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Que par arrêté interministériel n°193/MEF/ MICPMH/DC/SGM/DGB/DEB/SOCA du 17 avril 2013, elle à été nommée agent comptable au Bureau de Restructuration et de Mise à Niveau des entreprises
Qu'elle à pris service le 26 avril 2013 et a prêté serment le 10 mai 2013 ;;
Que le BRMN est une structure sous tutelle du ministère de l’Industrie, du Commerce, des Petites et Moyennes Entreprises (MICPME) qui bénéficie des subventions de l’Htat et donc des fonds publics ;
Qu’en matière de finances publiques, ces fonds doivent être gérés par un agent comptable tenu d’exercer un rôle de contrôle et d’exécution financière en matière de recetle, en matière de dépense et en matière de patrimoine (en lieu et place du délégué du contrôleur financier) ;
Que dès sa prise de service, elle a été confrontée à diverses contradictions et à d’énormes difficultés quant à l’observance des règles et des procédures en vigueur en matière de gestion de fonds publics, difficultés ayant engendré par le passé de nombreux dysfonctionnements au BRMN ;
Que non seulement elle rendait compte à sa hiérarchie, mais encore qu’elle lui a demandé de clarifier les responsabilités et d’expliquer le rôle fondamental dévolu à l’agent comptable ;
Que ses efforts ct son insistance pour rencontrer le ministre en charge de l’Industrie sont restés vains ;
Que grande a été sa déception alors qu’aucun début de solution n’a été trouvé, de recevoir l’arrété mettant fin à ses fonctions pour « refus délibéré d’exécuter les tâches rentrant dans le cadre de sa mission d’agent comptable » ;
Que les situations qui ont été assimilées à des cas de refus ont été appréciées comme telles parce qu’elle a émis
- refus de signer des chèques à blanc ;
- refus d’exécuter un ordre de réquisition qui contrairement aux dispositions de l’article 70 du décret n°2001-039 du 15 février 2001 portant règlement général sur la comptabilité publique, n’émanait pas du ministre des finances ;
- refus de virer la subvention de l’Etat dans un compte ouvert dans une banque primaire sur lequel l’agent comptable n’a pas signature ;
- refus d’acheter des billets d’avion en classe affaires pour une mission à l’île Maurice en exécution du relevé du conseil des ministres n°17/PR/SGG/Com/Extra 2008 du 14 juillet 2008 faisant obligation de voyager en classe économique, y compris pour les membres du gouvernement ;
- refus de présenter des états financiers à la date du 15 novembre 2013 en conformité aux dispositions de l’OHADA selon lesquelles l’élaboration des états financiers n’est pas possible avant la clôture de l’exercice en cours ;
Qu'’au total, toutes les situations assimilées à des cas
de refus, ont été motivées par le souci du respect des textes
en vigueur ;
Que pour voir le ministre en charge de l’Industrie
rapporter l’arrêté mettant fin à ses fonctions, elle l’a saisi
d’un recours gracieux daté du 24 janvier 2014 et reçu à son Qu’aucune suite n’ayant été donnée à son recours administratif, elle en réfère à la haute Juridiction pour que justice soit rendue ;
Considérant que le recours a été introduit dans les forme et délai prévus par la loi ;
Qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
Sur la légalité de l’arrêté n°164/MICPME/ DC/SGM/DRFM/DRH/SA du 04 décembre 2013
Considérant que la requérante a été nommée par
DGB/DEB/SOCA du 17 avril 2013 ;
Que dès le 08 juillet 2013, elle a adressé au ministre de l’Industrie, du Commerce, des Petites et Moyennes Entreprises (MICPME), un courrier faisant le point des dysfonctionnements observés au sein du Bureau de Restructuration et de Mise à Niveau des Entreprises (BRMN) ;
Qu’elle a indiqué dans le même courrier que son choix de faire observer les règles et les procédures en vigueur a été souvent à l’origine des malentendus et des non-dits relatifs à son poste ;
Que par courrier en date du 21 octobre 2013, elle a été co-signataire d’une lettre d’un collectif de six agents comptables de structures sous tutelle du MICPME demandant l’intervention du ministre en vue de la clarification du rôle de l’agent comptable ;
Que dans une fiche datée du 27 novembre 2013 et adressée au MICPME, la requérante a rendu compte des difficultés rencontrées avec le directeur du BRMN au sujet du paiement au personnel du salaire du mois de novembre 2013 et invité le ministre à régler les différents problèmes liés aux agents comptables du ministère ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la requérante a, de manière répétée, rendu compte au ministre en charge de l’Industrie aussi bien de la persistance des dysfonctionnements observés, que de la mauvaise perception par sa hiérarchie du rôle et des attributions de l’agent comptable ;
Qu’à aucun moment, le ministre ne s’est obligé à procéder ou à faire procéder aux clarifications souhaitées ;
Considérant qu’excepté une demande d’explication adressée à la requérante le 29 novembre 2013 et à laquelle elle a fait suite le 02 décembre 2013, il n’existe au dossier aucune preuve de procédure graduelle ayant abouti à la cessation des fonctions d’agent comptable de la requérante ;
Que le motif de l’arrêté querellé, tiré du « refus délibéré d’exécuter les tâches rentrant dans le cadre de sa mission d’agent comptable, rendant très difficile le fonctionnement du BRMN » paraît spécieux ;
Considérant au surplus que l’autorité de nomination à des fonctions administratives devrait être la même à mettre fin auxdites fonctions ;
Considérant qu’en l’espèce, c’est seulement le ministre en charge de l’Industrie à l’exclusion de celui des
Finances qui a mis fin aux fonctions de l’agent comptable
B Aa Ab ;
Qu’il n’est même pas établi que le ministre des
Finances cosignataire de l’arrêté de nomination de la requérante, a été informé des faits imputés à celle-ci et qui sont à l’origine de la décision contestée ;
Qu’en prenant de façon unilatérale comme il l’a fait,
l’arrêté controversé, le ministre en charge de l’Industrie n’a pas respecté les formes, commettant ainsi un excès de pouvoir ;
Qu’au bénéfice de ce qui précède, il y a lieu de conclure que l’arrêté querellé est entaché de vice de forme et encourt annulation ;
Par ces motifs,
Décide :
Article 1°" : Le recours en date à Ac, du 24 mars 2014, de B M. Ab, administratrice des Finances et agent comptable du Bureau de Restructuration et de Mise à Niveau des entreprises (BRMN), tendant à l’annulation de l’arrêté n°164/MICPME/DC/SGM/DRFM/ DRH/SA du 04 décembre 2013 mettant fin à ses fonctions, est recevable ;
Article 2 : Ledit recours est fondé ;
Article 3 : Est annulé, l’arrêté n°164/MICPME/DC/ SGM/DRFM/DRH/SA du 04 décembre 2013 mettant fin aux fonctions de l’agent comptable du Bureau de Restructuration et de Mise à Niveau des entreprises ;
Article 4 : Les frais sont mis à la charge du Trésor public ;
Article S : Le présent arrêt sera notifié aux parties et au procureur général près la Cour suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre administrative) composée de :
Rémy Yawo KODO, Conseiller à la Chambre administrative ;
PRESIDENT ;
Etienne FIFATIN
Et CONSEILLERS ; , Césaire F. S. KPENONHOUN 0 Et prononcé à l’audience publique du vendredi quatorze août deux mille vingt, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Saturnin D. AFATON, Avocat général,
MINISTERE PUBLIC ;
Calixte A. DOSSOU-KOKO ;
GREFFIER ;
Et ont signé,
Le Président Rapporteur, Le Greffier,
Rémy Yawo KODO Calixte A. DOSSOU-KOKO