N° 37/CJ-S du Répertoire ; N° 2005-33/CJ-S du greffe ; Arrêt du 13 novembre 2020 ; ADEMOLA F. C et Consorts (Me Bertin AMOUSSOU) C/ BCB LIQUIDATION (Me Alexandrine SAÏZONOU BEDIE)
Droit social – Arrêt de défaut – Opposition – Cassation (Oui).
L’arrêt rendu par défaut en matière sociale ne peut faire l’objet d’opposition, l’appel étant jugé sur pièces.
Les dispositions de l’article 247 du code du travail ne s’appliquent qu’au jugement de défaut rendu par le tribunal du travail, juridiction du 1er degré dont les décisions sont seules susceptibles d’opposition.
La Cour,
Vu l’acte n°15/2004 du 1er juillet 2004 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Bertin AMOUSSOU, conseil de Ai Ao C, Ae Y et huit (08) autres a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°24/CS/04 rendu le 28 avril 2004 par la chambre sociale de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes telle que modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 13 novembre 2020 le conseiller Michèle CARRENA ADOSSOU en son rapport ;
Ouï le procureur général Ad Aa AI en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°15/2004 du 1er juillet 2004 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Bertin AMOUSSOU, conseil de Ai Ao C, Ae Y et huit (08) autres a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°24/CS/04 rendu le 28 avril 2004 par la chambre sociale de cette cour ;
Que par lettre n°3910/GCS du 25 novembre 2005 du greffe de la Cour suprême, maître Bertin AMOUSSOU a été mis en demeure de produire son mémoire ampliatif dans un délai d’un (01) mois, conformément aux dispositions de l’article 51 de l’ordonnance n°21/PR du 26 avril 1966 organisant la Cour suprême ;
Que les mémoires ampliatif et en défense ont été produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ;
Qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
Faits et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par jugement n°06/97 du 13 janvier 1997, le tribunal de Cotonou a déclaré irrecevable la demande en paiement des accessoires de salaire, débouté Aj X de sa demande de dommages-intérêts correspondant aux salaires devant être perçus lors de sa détention, constaté que la BCB Liquidation a violé les dispositions de l’article 2 de la loi n°84-006 du 15 mars 1984 relative à la délivrance des carnets et livrets de pension de retraite et l’a en conséquence condamnée à payer des sommes variables à titre de dommages-intérêts à Ai Ao C, Ae Y, Aj An A, Ag Am Af, Ac AH, Ab B, Al AJ, Ak Z, Aj X et Ah AG ;
Que sur appel de maître Grâce d’ALMEIDA-ADAMON, la cour d’appel de Cotonou a par arrêt n°045/2èmeCCMS/01 du 18 juillet 2001 confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Que suite à l’opposition de maître Christelle AHOLOU substituant maître Alexandrine F. SAÏZONOU-BEDIE, la cour d’appel de Cotonou a par arrêt n°24/CS/2004 du 28 avril 2004, rétracté l’arrêt n°045/2èmeCCMS/01 du 18 juillet 2001, puis évoquant a constaté que le retard dans le paiement des pensions des consorts Ai Ap C est dû aux difficultés économiques qu’a connu la BCB Liquidation, dit que les intimés ne sont pas fondés à réclamer des dommages-intérêts et les a par conséquent déboutés de leurs demandes ;
Que c’est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION DES MOYENS
Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi par fausse application des articles 247 et 250 alinéa 3 du code du travail
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé la loi par fausse application des articles 247 et 250 alinéa 3 du code du travail en ce qu’il a affirmé que l’opposition est une voie de recours de droit commun et de rétractation qui est ouverte au défaillant ; que le défaut de comparution en cause d’appel empêche certes le défaillant de pouvoir fonder ensuite un pourvoi en cassation sur des moyens qu’il n’a pas pu soutenir devant la cour d’appel ; que la seule voie de recours qui lui reste était l’opposition qui a pour effet de faire revenir l’affaire devant la même juridiction qui a déjà statué une première fois ; que l’article 247 du code du travail dispose : « En cas de jugement par défaut, … le délai d’opposition est de quinze (15) jours à compter de la date de signification » ; que l’arrêt n°045/2èmeCCMS/01 du 18 juillet 2001 a été rendu par défaut à l’égard des parties ; alors que, selon le moyen, d’une part les dispositions de l’article 247 du code du travail visées, en un domaine spécial qu’est celui du droit du travail, ne concernent que le jugement de défaut rendu par le tribunal du travail, juridiction du premier degré, dont les décisions de défaut sont susceptibles d’opposition, d’autre part, l’article 247 du code du travail a renvoyé explicitement à l’article 243 du même code qui énonce : « Le tribunal du travail saisi par le procès-verbal de non-conciliation … », enfin, dans leurs conclusions d’appel en réplique du 07 janvier 2003, les demandeurs au pourvoi ont fait valoir à titre principal que selon les dispositions de l’article 250 alinéa 3 du code de travail, « L’appel est jugé sur pièces », ce qui signifie que l’arrêt rendu par la cour d’appel a, en matière sociale, un caractère contradictoire même si les parties qui ne sont pas tenues de se présenter à l’audience, n’ont pas conclu en cause d’appel ; que, dès lors, l’arrêt dont opposition se situe en dehors de l’hypothèse selon laquelle une opposition peut être formée contre un arrêt d’appel ;
Qu’en faisant une fausse application de l’article 247 du code du travail, en méconnaissant le champ d’application de l’article 250 alinéa 3 du code du travail, et en s’abstenant de répondre au moyen y relatif, la cour d’appel a violé la loi ;
Attendu en effet, que pour déclarer recevable l’opposition de la Banque Commerciale du Bénin Liquidation (BCB Liquidation), l’arrêt attaqué retient que l’opposition est une voie de recours de droit commun et de rétractation ouverte au défaillant ; que le défaut de comparution en cause d’appel empêche le défaillant de pouvoir ensuite fonder un pourvoi en cassation sur des moyens qu’il n’a pas pu soutenir devant la cour d’appel ; que la seule voie de recours qui lui reste était l’opposition qui a pour effet de faire revenir l’affaire devant la même juridiction qui a déjà statué une première fois ; que l’article 247 du code du travail dispose : « En cas de jugement par défaut, … le délai d’opposition est de quinze (15) jours à compter de la date de signification » ; que l’arrêt n°045/2èmeCCMS/01 du 18 juillet 2001 a été rendu « par défaut à l’égard des parties » ; que c’est à bon droit que la BCB Liquidation a formé opposition contre l’arrêt querellé ;
Qu’en statuant ainsi, alors que les dispositions de l’article 247 du code du travail ne s’appliquent qu’au jugement de défaut rendu par le tribunal du travail, juridiction de premier degré, dont les décisions de défaut sont seules susceptibles d’opposition, et que l’article 250 dispose en son alinéa 3 : « L’appel est jugé sur pièces », ce qui signifie que l’arrêt rendu par la cour d’appel a, en matière sociale, un caractère contradictoire, ce qui le met hors du champ d’action de l’opposition ; que la cour d’appel a donc violé les dispositions des articles 247 et 250 alinéa 3 du code du travail ;
Que la cassation est ainsi encourue ;
PAR CES MOTIFS
Et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen ;
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Au fond, casse et annule l’arrêt n°24/CS/2004 du 28 avril 2004 en toutes ses dispositions ;
Renvoie l’affaire devant la chambre sociale de la cour d’appel de Cotonou autrement composée ;
Met les frais à la charge du Trésor public ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judicaire) composée de :
Sourou Innocent AVOGNON, président de la Chambre judiciaire, PRESIDENT ;
Michèle CARRENA ADOSSOU ET Isabelle SAGBOHAN, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du vendredi treize novembre deux mille vingt, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Ad Aa AI, PROCUREUR GENERAL;
Djèwekpégo Paul ASSOGBA, GREFFIER ;
Et ont signé
Le président Le rapporteur,
Sourou Innocent AVOGNON Michèle CARRENA ADOSSOU
Le greffier
Djèwekpégo Paul ASSOGBA