N°01/CJ-S du Répertoire ; N° 2005-08/CJ-S du greffe ; Arrêt du 15 janvier 2021 ; Aa B (Me Alexandrine F. SAÏZONOU BEDIE) contre FINANCIAL BANK (Me Simplice DATO)
Droit Social - Défaut de motifs (non)- Irrecevabilité du moyen qui n’attaque pas une disposition de l’arrêt- Défaut de réponse à conclusion (non)- Rejet.
Encourt rejet, le moyen tiré du défaut de motifs alors que la Cour d’appel a motivé sa décision du chef critiqué par ledit moyen.
Est irrecevable un moyen qui n’attaque pas une disposition de l’arrêt déféré à la censure de la Haute juridiction mais qui est uniquement dirigé contre les motifs dudit arrêt.
N’est pas fondé le moyen tiré du défaut de réponse à conclusion alors que les juges de la Cour d’appel ont répondu au moyen tiré de la violation de la convention collective.
La Cour,
Vu l’acte n°036 du 30 juillet 2003 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel Aa B, ex-agent de la Financial Bank a déclaré élever pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de l’arrêt n°108/CS/03 rendu le 23 juillet 2003 par la chambre sociale de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n°90-012 du 1“ juin 1990 portant remise en vigueur et modification des ordonnances n°8 21/PR du 26 avril 1966 et 70- 16 du 14 mars 1970 organisant la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu là ToI N7 ZUU4-2U du 17 aout ZUU7 portant régies de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes telle que modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 15 janvier 2021 le président Sourou Innocent AVOGNON en son rapport ;
Ouiï l’avocat général Nicolas BIAO en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°036 du 30 juillet 2003 du greffe de la cour d'appel de Cotonou, Aa B, ex-agent de la Financial Bank a déclaré élever pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de l’arrêt n°108/CS/03 rendu le 23 juillet 2003 par la chambre sociale de cette cour ;
Que par lettre n°1683/GCS du 04 mai 2005 du greffe de la Cour suprême, Aa B a été mis en demeure de constituer avocat et de produire son mémoire ampliatif dans un délai d’un (01) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 42 et 51 de l’ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 portant composition, organisation, attributions et fonctionnement de la Cour suprême ;
Que les mémoires ampliatifs et en défense ont été produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations sans aucune réaction de leur part ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ;
Qu'il y a lieu de le déclarer recevable ;
AUFOND
Faits et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par procès-verbal n°740/MFPTRA /DC/SGM/DDFPT/ATL/DCTC du 19 juillet 2000 de la direction départementale de la fonction publique et du travail de l’Atlantique et du Littoral, Aa B, ex-chef d'agence de la Ad Ag à Akpakpa, a attrait ladite banque devant le tribunal de première instance de Ab suite au licenciement dont il a fait l’objet ;
Que le tribunal saisi a rendu le 18 juillet 2002, le jugement n°38/02 par lequel le licenciement de Aa B a été déclaré abusif et la Financial Bank condamnée à lui payer, divers droits et dommages-intérêts qui s'élèvent à trente millions (30 000 000) de francs CFA ;
Que sur appels respectifs de maîtres Ae Af, conseil de Ad Ag et Ac A, conseil de Aa B, la chambre sociale de la cour d'appel de Cotonou a rendu, le 23 juillet 2003, l’arrêt n°108/CS/2003 par lequel le jugement entrepris a été infirmé et, évoquant et statuant à nouveau, a déclaré le licenciement de Aa B régulier et légitime et l’a débouté de toutes ses demandes ;
Que c'est cet arrêt qui fait l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
Sur le premier moyen tiré du défaut de motifs
Attendu qu’il est reproché à l'arrêt attaqué un défaut de motifs, en ce que, la cour d'appel a infirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions pour défaut de base légale et pour mauvaise appréciation des faits, alors que, selon le moyen, dans les motifs de cet arrêt, il n’a été nulle part indiqué ou justifié en quoi a consisté cette mauvaise appréciation des faits par le premier juge ;
Que l’obligation de motiver une décision de justice est d’ordre public et qu’il est admis que la cassation pour défaut de motifs est toujours prononcée lorsque l'arrêt ne contient aucune justification en droit et en fait ;
Qu’en l'espèce, la cour d'appel n’a pas du tout indiqué ou justifié les éléments de fait et de droit sur lesquels elle s’est fondée pour affirmer que le premier juge a fait une mauvaise appréciation des faits ;
Que l’arrêt attaqué encourt cassation pour défaut de motifs ;
Mais attendu que pour affirmer que le premier juge a fait une mauvaise appréciation des faits, la cour d’appel a, après avoir relevé les fautes imputables au demandeur au pourvoi, énoncé qu’ « en vertu de l’article 56 de la loi n°98-004 en date du 27 janvier 1998 portant code du travail, peuvent être considérées comme fautes lourdes d’ordre professionnel : le refus d'exécuter un travail ou un ordre entrant dans le cadre des activités relevant de l'emploi, la violation caractérisée d’une prescription concernant l’exécution du service et régulièrement portée à la connaissance du personnel, la malversation » ; et conclu que « … Aa B … à qui les conduites fautives sus-énumérées ont été reprochées, a régulièrement et à maintes reprises violé les prescriptions qui sont portées à sa connaissance » ;
Qu'’ainsi la cour d’appel a motivé sa décision du chef critiqué par le moyen ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen tiré de la violation de la loi par
mauvaise interprétation de l’article 250 du code du travail
Attendu qu'il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation de l’article 250 du code du travail en ce que, à la page 1 dudit arrêt, il est mentionné qu’en la présente cause, les débats auraient lieu le 09 juillet 2003 et que, de même, au dernier paragraphe de la page 7 du même arrêt, les juges de la cour d'appel se sont référés aux prétendus débats pour motiver leur décision en ces termes : « attendu qu'il ressort de l'analyse des pièces et des débats que », alors que, selon le moyen, il est précisé à l’article 250 du code du travail que dans les quinze (15) jours du prononcé du jugement, l'appel peut être interjeté dans les formes règlementaires … que l'appel est jugé sur pièces. Toutefois, les parties peuvent demander à être entendues ;
Qu’en visant, dans l'arrêt, des débats qui ne se sont jamais déroulés devant elle et en tirant des conséquences de ces prétendus débats, la cour d’appel a manifestement violé les dispositions de l’article 250 du code du travail ;
Mais attendu que pour être recevable, un moyen doit attaquer une disposition de l'arrêt déféré à la censure de la Haute Juridiction ;
Qu’un moyen uniquement dirigé contre les motifs de l'arrêt attaqué doit être déclaré irrecevable ;
Que le moyen est irrecevable ;
Sur le troisième moyen tiré de la violation de l'alinéa 1% de l’article 46 du code du travail
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’alinéa 1 de l’article 46 du code du travail en ce que aussi bien dans les motifs que dans le dispositif, la cour d'appel a déclaré régulier et légitime le licenciement de Aa B en se fondant entre autres sur certaines fautes qui n’ont pas été énumérées dans sa lettre de licenciement du 18 août 1999, alors que, selon le moyen, il est précisé que « l’employeur qui licencie pour motif personnel doit notifier sa décision par écrit. La lettre de licenciement comporte nécessairement :
- l'indication du ou des motifs de la rupture ;
- le nom ou raison sociale … » ;
Qu'il découle de cette énonciation légale que tout motif de rupture du contrat de travail non indiqué dans une lettre de licenciement, ne peut juridiquement être examiné par la juridiction devant laquelle est déféré un litige individuel du travail ;
Mais attendu que la cour d’appel a fondé sa décision sur les motifs énumérés dans la lettre de licenciement et n’a pas substitué Tes motrs cités par la Financial Bank à ceux relevés dans cette lettre ;
Que si elle a examiné par ailleurs, les autres motifs développés par la Financial Bank dans ses différentes écritures, la cour d’appel n’a fait que sacrifier à l’obligation de répondre à des conclusions ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen tiré de l'insuffisance de motifs
Attendu qu’il est également reproché à l’arrêt attaqué d’avoir été insuffisamment motivé en ce que la cour d'appel de Cotonou a déclaré le licenciement de Aa B régulier et légitime, alors que, selon le moyen, dans les motifs de ladite décision elle n’a nulle part indiqué les éléments sur lesquels elle s’est fondée pour apprécier les conduites du demandeur au pourvoi avant de les déclarer fautives, ensuite elle n’a pas non plus précisé quand ces fautes lui ont été reprochées, enfin elle n’a également pas indiqué comment ce dernier a violé les prescriptions concernant l’exécution du service ;
Mais attendu que les juges de la cour d’appel, après avoir relevé les différentes fautes reprochées à Aa B en sa qualité de chef d’agence de la Financial Bank d’Akpakpa, tout en indiquant les conditions et les périodes de leur commission, ont expressément visé l’article 56 de la loi n°98-004 du 27 janvier 1998 définissant la faute lourde et ont conclu que le demandeur au pourvoi à qui les conduites fautives énumérées dans la décision attaquée ont été reprochées, a « … régulièrement et à maintes reprises violé les prescriptions concernant l'exécution du service, prescriptions qui ont été portées à sa connaissance … » ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le cinquième moyen tiré du défaut de réponses à
conclusions
Attendu qu’il est aussi fait grief à l’arrêt attaqué du défaut de réponse à conclusions, en ce que, la cour d’appel de Cotonou n’a pas répondu aux moyens de Aa B exposés dans ses conclusions d’appel en réplique du 10 mars 2003, selon lesquels lors de son licenciement, la Financial Bank à violé les articles 17 et 18 de la convention collective de travail des banques et établissements financiers et de ce fait son licenciement est irrégulier, alors que, selon le moyen, le juge a l’obligation de répondre aux moyens invoqués dans les motifs des conclusions et aux demandes qu’elles contiennent ;
Mais attendu que pour établir le défaut de base légale reproché à la décision du premier juge, la cour d’appel a énoncé en guise de conclusion « attendu qu’en l'espèce, le premier juge a essentiellement fondé sa décision sur un règlement intérieur qui n’existait pas au moment du licenciement de Aa B ;
Qu'il s'ensuit que cette décision manque de base légale » ;
Que par ce constat la cour d’appel a nécessairement répondu au moyen relatif à la violation de la convention collective ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Le rejette quant au fond ;
Met les frais à la charge du Trésor public ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d'appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judicaire) composée de :
Sourou Innocent AVOGNON, président de la Chambre judiciaire, PRESIDENT ;
Michèle CARRENA ADOSSOU et Georges TOUMATOU, Conseillers.
Et prononce a l'audience publique du vendredi quinze janvier deux mille vingt un, la Cour étant composée comme il est dit ci- dessus, en présence de :
Nicolas BIAO, AVOCAT GENERAL;
Et ont signé
Le président rapporteur Le greffier.
Sourou Innocent AVOGNON Djèwekpégo Paul ASSOGBA