N° 021/CA du Répertoire
N° 2016-108/CA2 du Greffe
Arrêt du 03 février 2021
AFFAIRE :
A Ae Ad Ac REPUBLIQUE DU BENIN
AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE Etat béninois, représenté
Par l’Agent Judiciaire du Trésor
La Cour,
Vu la requête introductive d’instance valant mémoire ampliatif en date à Cotonou du 4 juillet 2016, enregistrée le même jour au secrétariat du Cabinet du Président de la Cour suprême sous le numéro 1211, par laquelle Ae Ad Ac A a saisi la Cour suprême d’un recours aux fins d’annulation de l’acte portant son reversement dans les effectifs des agents contractuels de l’Etat, de régularisation de sa situation administrative et de son reclassement en A3-4 avec tous les effets de droit ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Vu toutes les pièces du dossier ;
Le Conseiller Pascal DOHOUNGBO entendu en son rapport et l’Avocat général Saturnin D. AFATON en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que le requérant expose :
Qu’il a été recruté au Ministère de la Justice, de la Législation et des Droits de l'Homme (MJLDH) sur la base d’une Maîtrise en Sciences Juridiques, option administration générale et y a pris service le 3 janvier 2005 ;
Que le recrutement est effectué dans le cadre du projet danois d’appui au renforcement des capacités des agents du Ministère de la Justice, de la Législation et des Droits de l’Homme à travers la Direction de la Programmation et de la Prospective et la Direction des Droits de
l’Homme ; X 2
Que la convention de financement du projet, signée le 13 décembre 2004, a prévu en son point 10 alinéa 3, son reversement dans les effectifs des agents permanents de l’Etat ;
Que toutefois, selon le Gouvernement béninois une telle clause est contraire aux normes en vigueur pour le recrutement des agents permanents de l’Etat en République du Bénin ;
Que dès lors, l’Administration a, par relevé n°1529/06 du Conseil des ministres en date du 11 décembre 2006, émis une réserve par rapport à son reversement automatique dans les effectifs des agents permanents de l’Etat ;
Que nonobstant la réserve émise, le relevé du Conseil des ministres du 11 décembre 2006 a autorisé le paiement de ses salaires au titre de 2006 sur le budget national et sur la base de son diplôme de Maîtrise en Sciences Juridiques, option Administration générale ;
Que de 2007 à 2008, il est resté à son poste, sans salaire et dans un flou administratif ;
Que sur le fondement du décret n°2008-377 du 27 juin 2008 portant régime juridique d’emploi des agents contractuels de l’Etat, le ministère en charge de la justice a transmis son dossier au ministère du travail et de la fonction publique pour son reversement ;
Que par arrêté n°627/MTFP/DC/SP du 17 octobre 2008, il a été retenu comme candidat éligible au reversement dans les effectifs des agents contractuels de l’Etat, avec comme diplôme à prendre en compte, sa Maîtrise en Sciences Juridiques ;
Que contre toute attente, le contrat qui matérialise son reversement n’a pas été visé par le représentant du contrôleur financier au sein de la commission chargée de l’étude des dossiers de reversement, au motif que le délégué du contrôleur financier près le ministère en charge de la justice n’y a pas apposé le sien ;
Que ledit contrat n’ayant pas été visé par le délégué du contrôleur financier, il lui a été demandé de signer un nouveau contrat sur la base du baccalauréat ;
Qu’en dépit des diligences faites au niveau du ministère du travail, la direction du contrôle financier a opposé un refus à la signature du contrat établi sur la base du diplôme de Maîtrise en Sciences Juridiques ;
Qu'en retour, il a refusé de signer le contrat à lui proposé sur la base de son diplôme de baccalauréat ;
Que le ministre en charge de la Justice lui a notifié le 1% mars 2010, une correspondance mettant fin à ses services ; Ne 3
Que saisi du dossier, le Premier ministre d’alors, Aa Af B, en charge de la coordination de l’action gouvernementale a adressé une correspondance à son homologue de la Justice aux fins de régularisation définitive de sa situation administrative ;
Qu’au regard de la mauvaise volonté des uns et des autres et des menaces d’exclusion qu’il a reçues de part et d’autre, il a fini par signer le 19 mai 2011, un contrat sur la base du baccalauréat sans l’obtention d’un nouvel arrêté du ministre du travail et de la fonction publique ;
Qu’à sa reprise de service le 9 juin 2011 et dans le cadre de ses fonctions, il n’a accompli que des tâches de conception ;
Qu’en 2012, par arrêté du Ministre en charge de la Justice, il a été nommé chef du service des Associations et Organismes de Défense des Droits de l’Homme à la Direction des Droits de l’Homme ;
Qu’il en réfère à l’arbitrage de la Cour suprême aux fins de régularisation de sa situation administrative et de son reclassement en A3-4 avec toutes les conséquences de droit ;
EN LA FORME
Sur la recevabilité du recours
Considérant que le requérant sollicite la révision de son contrat de recrutement pour prendre en compte son diplôme de Maîtrise en Sciences Juridique et son reclassement en A3-4 avec toutes les conséquences de droit ;
Considérant que l’Administration soulève l’irrecevabilité du recours pour défaut de liaison du contentieux ;
Considérant qu’il ressort de l’examen des pièces du dossier que suite à la correspondance du ministre en charge de la Justice en date du 1° mars 2010 qui a mis fin au service du requérant, celui-ci a saisi le premier ministre d’alors aux fins de la régularisation de sa situation administrative ;
Considérant que la loi donne la possibilité au requérant d’exercer soit le recours gracieux, soit le recours hiérarchique ;
Qu'en saisissant le Premier Ministre chargé de la coordination de l’action gouvernementale, le requérant a exercé un recours hiérarchique qui tient lieu de recours administratif préalable ;
Que c’est donc à tort que l’Administration soulève le moyen tiré de défaut de liaison du contentieux ;
Qu’il y a lieu de déclarer le présent recours recevable ; M AU FOND
Sur l’unique moyen du requérant tiré de la violation de la loi
Considérant que le requérant soutient que l’établissement de son contrat de recrutement sur la base de son baccalauréat au lieu de son diplôme de maitrise en sciences juridiques constitue une violation de la convention de financement entre la République du Bénin et le Royaume de Ab et du décret n°2008-377 du 27 juin 2008 portant régime juridique d’emploi des agents contractuels de l’Etat ;
Considérant que l’Administration, quant à elle, soutient qu’au regard des dispositions du décret n°2008-377 du 27 juin 2008 ci-dessus cité et du contexte de recrutement du requérant, le diplôme à prendre en compte pour son reversement ne peut être supérieur au baccalauréat ;
Qu’à la fin du contrat du requérant le 31 décembre 2005, celui-ci est resté au service du ministère en qualité d’agent occasionnel ;
Que c’est à ce titre que son reversement a été opéré sur la base du diplôme de baccalauréat ;
Considérant qu’il ressort du dossier que le recrutement du requérant a été effectué dans le cadre du Projet danois d’appui au renforcement des capacités des agents du Ministère de la Justice, de la Législation et des Droits de l’Homme par la Direction de la Programmation et de la Prospective et la Direction des Droits de
Que la convention de financement relative au Projet danois qui est à l’origine de son recrutement a été signée le 13 décembre 2004 ;
Que le requérant a pris service à la Direction des Droits de l’Homme le 3 janvier 2005 ;
Qu’au sens de la convention de financement, en son point 10 alinéa 3 notamment, le maintien du plaideur dans les effectifs des agents de l’Etat est une condition nécessaire pour la poursuite du programme par la partie danoise ;
Considérant que l’Administration a, par relevé n°1529/06 du Conseil des ministres en date du 11 décembre 2006, émis une réserve par rapport à son reversement automatique dans les effectifs des agents permanents de l’Etat ;
Que cette réserve, bien que fondée en droit, s’avère inopérante en ce que, d’une part, le Gouvernement béninois a décidé de recruter l’intéressé parmi les agents contractuels de l’Etat et, d’autre part, pour l’exécution de la convention de financement, le requérant a été recruté sur la base de son diplôme de Maîtrise en Sciences Juridiques, option Administration générale en vue du renforcement des capacités des agents du Ministère de la Justice, de la Législation et des Droits de l’Homme
dans le cadre de la convention de financement avec la partie danoise N 5
Que cette convention, comme indiqué ci-dessus, oblige la partie béninoise à maintenir en place à la fin du projet de financement, le personnel qui aura été recruté ;
Considérant que c’est à l’aune de cette convention qu’il faut apprécier la poursuite de la carrière de l’intéressé recruté sur la base du diplôme de Maîtrise en Sciences Juridiques ;
Qu'’ainsi, dès lors qu’aucune faute n’est imputable au requérant, le renouvellement de son contrat par la partie béninoise sur la base de son diplôme de baccalauréat, ne se justifie pas au regard de la convention de financement conclue entre la République du Bénin et le Royaume de Ab ;
Que c’est à bon droit que le requérant sollicite, dans le cadre de son reversement dans les effectifs des agents contractuels de l'Etat, la prise en compte du diplôme de Maitrise en Sciences Juridiques ;
Qu’il y a en conséquence lieu de déclarer le recours fondé ;
Par ces motifs,
Décide :
Article 1°": Le recours en date à Cotonou du 04 juillet 2016 de Ae Ad Ac A tendant à son reversement sur la base de son diplôme de Maîtrise en droit est recevable ;
Article 2 : Ledit recours est fondé ;
Article 3: Pour le reversement de Ae Ad Ac A, il doit être tenu compte de son diplôme de maîtrise en droit ;
Article 4 : Il est ordonné la reconstitution subséquente de la carrière de l’intéressé ;
Article S : Les frais sont mis à la charge du Trésor public ;
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié aux parties et au Procureur général près la Cour suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre administrative) composée de :
Etienne Marie FIFATIN, Conseiller à la Chambre administrative,
PRESIDENT ;
Isabelle SAGBOHAN
Et
Pascal DOHOUNGBO M. CONSEILLERS ;
6 Le
Et prononcé à l’audience publique du mercredi trois février deux mille vingt-et-un ; la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Saturnin D. AFATON, Avocat général,
MINISTERE PUBLIC : Calixte A. DOSSOU-KOKO,
GREFFIER ; Et ont signé
Le Président, Le Rapporteur,
Etienne Marie FIFATIN Pascal DOHOUNGBO