[N7 043/CJ-CM du répertoire ; N° 2013-03/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 21 Mai 2021 ; Affaire Ad A Y (Me Angelo Aimé HOUNKPATIN) Contre SOCIETE DES CIMENTS DU SAHEL SA DE DROIT SENEGALAIS (Me Jacques MIGAN- Me Vincent TOHOZIN)
Pourvoi en cassation - Cas d’ouverture à cassation - Violation de la loi par fausse application (de la loi).
Encourt annulation, pour fausse application de la loi, l’ordonnance du Président du Tribunal de Première Instance, qui a ordonné l’exéquatur à une décision étrangère sur le fondement de la convention de l’OCAM (convention générale de coopération en matière de justice du 12 septembre 1961) sans au préalable vérifier entre autres, si cette décision, d’après la loi de l’Etat où elle a été rendue, est passée en force de chose jugée et susceptible d’exécution. (Article 30.3 Convention de lOCAM).
La Cour,
Vu l’acte n°001/2013/GTC du 04 mars 2013 du tribunal de première instance de première classe de Cotonou par lequel maître Angelo Aimé HOUNKPATIN, conseil de Ad A Y, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’ordonnance n°117/2013 du 12 février 2013 rendue par le président du tribunal de première instance de première classe de Cotonou par laquelle il a accordé l’exéquatur au jugement n°315 du 05 avril 2011 du tribunal régional hors classe de Aa BAfC et à l’arrêt n°10 du 04 janvier 2012 de la chambre correctionnelle de la cour d’appel de Dakar ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu là ToI N7 ZUU4-2U du 17 aout ZUU7 portant régies de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 21 mai 2021 le conseiller, Michèle CARRENA-ADOSSOU en son rapport ;
Ouï l’avocat général Saturnin AFATON en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°001/2013/GTC du 04 mars 2013 du tribunal de première instance de première classe de Cotonou, maître Angelo Aimé HOUNKPATIN, conseil de Ad A Y, a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’ordonnance n°117/2013 du 12 février 2013 rendue par le président du tribunal de première instance de première classe de Cotonou par laquelle il a accordé l’exéquatur au jugement n°315 du 05 avril 2011 du tribunal régional hors classe de Aa BAfC et à l’arrêt n°10 du 04 janvier 2012 de la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Dakar ;
Que par lettre n°1553/GCS du 12 mai 2013, maître Angelo Aimé HOUNKPATIN, a été invité à consigner au greffe de la Cour suprême dans le délai de quinze (15) jours, sous peine de déchéance et à produire ses moyens de cassation dans le délai de deux (02) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 931 alinéa 1 et 933 alinéa 2 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Que la consignation a été payée et les mémoires ampliatif et en défense produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations ;
Que le cabinet d'avocats MIGAN-TOHOZIN Ã produit ses observations ;
SUR LA COMPETENCE
Attendu que les défendeurs au pourvoi soulèvent l'incompétence matérielle de la Cour suprême, au motif qu’aux termes des dispositions des articles 10, 14 du traité OHADA et 33.2 de l’acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage est l’unique juridiction de cassation en matière d'interprétation et d’application des dispositions relatives à tout contentieux de l’exécution fondée ou non sur un titre exécutoire ;
Mais attendu que ni les décisions (jugement n°315 du 05 avril 2011 du tribunal régional hors classe de Dakar et l'arrêt n°10 du 04 janvier 2012 de la cour d'appel de Dakar) dont l’'exéquatur est sollicité, ni l’ordonnance n°117/2013 du 12 février 2013 du tribunal de première instance de Cotonou l’accordant, n’ont appliqué ni interprété un quelconque acte uniforme ou règlement prévu au traité OHADA du 17 octobre 1993 ;
Que dès lors, la Cour suprême est compétente pour examiner le présent recours ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme
et délai de la loi ;
Qu'il convient de le déclarer recevable ;
AU FOND
FAITS ET PROCEDURE
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par exploit en date du 23 septembre 2011, la socié`` "les Ciments du SAHEL SA" a directement cité devant le tribunal correctionnel régional hors classe de Dakar :
représentant légal de la Société Africa Consulting Societed de Negocio international sous la prévention d’escroquerie ;
- La société Africa Consulting et la CBAO, groupe Ac Ae en qualité de civilement responsable pour les voir condamnés à leur payer la somme de huit cent millions (800 000 000) francs in solidum à titre de dommages-intérêts ;
- Ab X ès-nom et ès qualité d'administrateur directeur général de la Compagnie Bancaire de l’Afrique de l'Ouest dite CBAO groupe Ac Ae Af sous les préventions de complicité d’escroquerie et d’abus de confiance ;
Que par jugement de défaut n°315 du 05 avril 2011, Ad A Y, a été condamné à payer solidairement avec d’autres, la somme de huit cent millions (800 000 000) francs à la société "les Ciments du SAHEL SA" ;
Que sur appel des prévenus, la cour d’appel de Dakar, a, par arrêt n°10 en date du 04 janvier 2012 infirmé le jugement ;
Que pour obtenir l'exécution de ces décisions au Bénin, la Société "les Ciments du SAHEL SA", a, conformément aux dispositions de l’article 32 de la convention générale de coopération en matière de justice, du 12 septembre 1961 dite convention de l’OCAM, par requête en date du 23 mars 2013, sollicité et obtenu du président du tribunal de première instance de Cotonou l’ordonnance n°117/2013 du 23 janvier 2013 leur accordant l’exéquatur ;
Que c'est cette ordonnance qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
SUR LE MOYEN TIRE DE LA VIOLATION DE LA LOI
PAR FAUSSE APPLICATION Attendu qu'il est reproché à l'ordonnance querellée, d’avoir fait une fausse application de la loi, en ce qu’elle a accordé l’exéquatur sur le fondement de la Convention générale de coopération en matière de justice du 12 septembre 1961 dite "Convention de l'OCAM" alors que, selon le moyen, l’article 30.3 de cette convention exige que la décision étrangère soit passée en force de chose jugée et susceptible d’exécution ;
Qu’en l’espèce, les décisions (jugement n°315 du O5 avril 2011 et l’arrêt n°10 du 04 janvier 2012) sont rendues par défaut à l’encontre de Ad A Y qui en a reçu signification le 23 janvier 2013 et disposait de quarante-cinq (45) jours à compter de cette date pour former opposition puisque ne résidant pas sur le territoire de la République du Sénégal ;
Que s'étant rendu à Dakar, Ad A Y forma opposition enregistrée le 19 février 2013 sous le n°379 ;
Qu'’ainsi, les décisions dont l’exéquatur a été ordonné ne sauraient plus être considérées comme passées en force de chose jugée et l'ordonnance n°117/2013 du 12 février 2013 mérite cassation pour violation de la loi par fausse application ;
Attendu en effet que conformément à l’article 30.3 de la convention de l’OCAM, avant de délivrer l’exéquatur, le président de la juridiction requise doit vérifier entre autres, si la décision est, d’après la loi de l’Etat où elle a été rendue, passée en force de chose jugée et susceptible d’exécution ;
Attendu que l’article 478 du code de procédure sénégalaise dispose : « si la signification du jugement a été faite à la personne du prévenu, l’opposition doit être formée dans les délais ci-après :
- Trente jours si le prévenu réside sur le territoire de la République du Sénégal ;
- Quarante-cinq (45) jours dans les autres cas » ;
Attendu que l’opposition a pour effet de suspendre la décision rendue contre la personne jugée sans avoir été présente ni représentée et de ramener le litige devant le juge qui avait statué par défaut ;
Que tant que le juge de l'opposition n’aura pas vidé sa saisine, il ne peut être engagé contre Ad A Y, l’exécution de la décision de défaut contre laquelle il a recouru ;
Qu'il suit que l’ordonnance entreprise a été rendue en méconnaissance de la loi et encourt cassation de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
Se déclare compétente ;
Déclare recevable en la forme le pourvoi n°001 en date du 04 mars 2013 introduit par maître Angelo Aimé HOUNKPATIN au nom et pour le compte de Ad A Y ;
Au fond, annule l’ordonnance n° 117/2013 du 12 février 2013 par laquelle le président du tribunal de première instance de première classe de Cotonou a accordé l’exéquatur au jugement n° 315 du O5 avril 2011 du tribunal régional hors classe de Aa BAfC et à l’arrêt n°10 du 04 janvier 2012 de la chambre correctionnelle de la cour d’appel de Dakar ;
Met les frais à la charge du Trésor public ;
Ordonne la notification du présent arrêt aux parties ainsi qu’au procureur général près la Cour suprême ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef du tribunal de première instance de première classe de Cotonou;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre
judiciaire) composée de :
Michèle CARRENA-ADOSSOU, conseiller à la chambre
judiciaire, PRESIDENT ;
Vignon André SAGBO et Georges G. TOUMATOU, Conseillers Et prononce à l'audience publique du vendredi vingt et un mai deux mille vingt et un, la chambre étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Saturnin AFATON, AVOCAT GENERAL;
Hélène NAHUM-GANSARE, GREFFIER ;
Et ont signé,
Le président- rapporteur, Le greffier.
Michèle CARRENA-ADOSSOU Hélène NAHUM-GANSARE