N° 29/CJ-P du répertoire ; N° 2019-33/CJ-P du greffe ; Arrêt du 11 juin 2021 ; Affaire : - Y Ac X - C Ad B C/ MINISTERE PUBLIC Procédure pénale – Ultra petita – Chambre des libertés et de la détention – Mesures de contrôle judiciaire – Annulation des ordonnances du juge des libertés et de la détention – Absence de motivation – Rejet Droit pénal - Mauvaise appréciation des faits – Principe de la personnalisation et de l’individualité de la faute pénale – Cas d’ouverture à cassation (Non) - Rejet Ne statue pas ultra petita la Chambre des libertés et de la détention d’une cour d’appel qui évoque et statue à nouveau sur les mesures de contrôle judiciaire mises à la charge d’un inculpé après l’annulation d’une ordonnance du juge des libertés et de la détention pour absence de motivation.
La mauvaise appréciation des faits de la cause et de la violation du principe de la personnalisation et de l’individualité de la faute pénale ne constituent pas des cas d’ouverture à cassation.
La Cour,
Vu l’acte n°003/15 du 24 mars 2015 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Friggens J. ADJAVON, conseil de Ac X a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°33/15 rendu le 23 mars 2015 par la chambre des libertés et de la détention de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ; Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 11 juin 2021 le président Sourou Innocent AVOGNON en son rapport ;
Ouï l’avocat général Nicolas BIAO en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°003/15 du 24 mars 2015 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Friggens J. ADJAVON, conseil de Ac X a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°33/15 rendu le 23 mars 2015 par la chambre des libertés et de la détention de cette cour ;
Que suivant l’acte n°004/15 de la même date, maître Friggens J. ADJAVON, substituant maître Zakari BABA BODY, conseil de C Ad B a déclaré élever pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de ce même arrêt ;
Que par lettres n°2571/GCS et n°2572/GCS du 12 avril 2019 du greffe de la Cour suprême maîtres Friggens J. ADJAVON et Zakari BABA BODY ont été respectivement mis en demeure d’avoir à produire leur mémoire ampliatif dans un délai d’un (01) mois conformément aux dispositions des articles 12 et 13 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Que maître Friggens J. ADJAVON a produit le mémoire ampliatif ;
Que par lettre n°5875/GCS du 06 août 2019 du greffe de la Cour suprême une mise en demeure comportant un nouveau et dernier délai d’un (01) mois a été adressée à maître Zakari BABA BODY pour la production de son mémoire ampliatif, en vain ;
Qu’en outre, le procureur général près la cour d’appel de Cotonou n’a pas produit son mémoire en défense, en dépit de la communication à lui assurée du mémoire ampliatif de maître Friggens J. ADJAVON et des mises en demeure objet des correspondances n°5878/GCS du 06 avril 2019 et n°7231/GCS du 11 novembre 2019 du greffe de la Cour suprême ;
EXAMEN DU POURVOI EN LA FORME Attendu que les présents pourvois ont été élevés dans les forme et délai de la loi ;
Qu’il convient de les déclarer recevables ;
SUR LA FORCLUSION Attendu que selon l’article 12 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême, le rapporteur dirige la procédure et impartit aux parties un délai qui ne peut être inférieur à un (01) mois pour la production du mémoire ampliatif ;
Qu’aux termes de l’article 51 de la même loi : « lorsque le délai prévu à l’article 12 ci-dessus imparti par le rapporteur pour la production du mémoire est expiré, une mise en demeure comportant un nouveau et dernier délai est adressée à la partie qui n’a pas observé le délai.
Si la mise en demeure reste sans effet, la forclusion est encourue. » ;
Que dans le cas d’espèce, en dépit des mises en demeure objet des lettres n°2572/GCS et n°5875/GCS des 12 avril et 06 août 2019 reçues respectivement à son cabinet les 17 avril et 13 août 2019, maître Zacharie BABA-BODY, conseil de C Ad B n’a pas produit son mémoire ampliatif ;
Qu’il convient dès lors de déclarer celui-ci forclos en son pourvoi et de mettre les frais à la charge du Trésor public ;
AU FOND Faits et procédure Attendu, selon l’arrêt attaqué, que courant 2012, dans le cadre du recouvrement d’une créance de montant total d’un milliard cent deux millions neuf cent dix mille cinq cent quatre-vingt-seize (1 102 910 596) francs CFA que détenait la Poste du Bénin sur son homologue de la République du Congo, C Ad B, alors directeur général de la Poste du Bénin SA, sur conseil de Ac X a conclu une convention de recouvrement avec Ab A, directeur général de la société « AFRICABOURSE SA » moyennant une commission à hauteur de 35 % de la somme à recouvrer, le tout de gré à gré et en violation des dispositions du code des marchés publics ;
Que dans l’exécution des termes de cette convention, des irrégularités graves ont été observées ayant conduit les responsables de la Poste du Bénin SA à déposer plainte contre les personnes impliquées ;
Que c’est ainsi qu’inculpés par le juge du 7ème cabinet d’instruction du tribunal de première instance de première classe de Cotonou d’abus de fonction, détournement de deniers publics, violation de l’obligation de contrôle à priori dans les marchés publics et de la complicité de ces infractions, Ab A, Ae Aa Z, Ac Af X et Aboubacar O. B. B ont été placés sous contrôle judiciaire par le juge des libertés et de la détention de ce tribunal par ordonnance du 11 septembre 2014 ;
Que sur appel de leurs conseils respectifs, la chambre des libertés et de la détention de la cour d’appel de Cotonou a rendu l’arrêt n°033/15 du 23 mars 2015 par lequel elle a annulé lesdites ordonnances puis, évoquant et statuant à nouveau, a pris des mesures de restriction des libertés individuelles des uns et des autres et sous cautionnement de montants conséquents de vingt-quatre millions (24 000 000) francs CFA pour C Ad B, dix-huit millions (18 000 000) francs CFA pour Ac X et deux millions (2 000 000) francs CFA pour Ae Aa Z ;
Que c’est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION Premier moyen tiré de la nullité de l’arrêt attaqué pour avoir statué ultra petita Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir statué ultra petita en ce que, saisis de l’appel pour prononcer l’annulation de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention pour absence de motivation, les juges de la chambre des libertés et de la détention ont prononcé cette annulation et ont cru devoir, évoquant et statuant à nouveau, édicter de nouvelles mesures de contrôle judiciaire sans la demande des inculpés et sans les réquisitions du ministère public dans ce sens, alors que, selon le moyen, de jurisprudence bien établie, l’étendue de la saisine de la cour d’appel est déterminée par l’acte d’appel et non par la décision ;
Mais attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 537 du code de procédure pénale « si le jugement est annulé pour violation ou omission non réparée de formes prescrites par la loi à peine de nullité, la cour évoque et statue sur le fond » ;
Qu’en évoquant et statuant à nouveau sur les mesures de contrôle judiciaire mises à la charge des demandeurs au pourvoi après l’annulation des ordonnances du juge des libertés et de la détention pour absence de motivation, la chambre des libertés et de la détention de la cour d’appel de Cotonou n’a pas statué ultra petita ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
Deuxième moyen tiré de la mauvaise appréciation des faits de la cause et violation du principe de la personnalisation et de l’individualité de la faute pénale Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de la mauvaise appréciation des faits de la cause et de la violation du principe de la personnalisation et de l’individualité de la faute pénale en ce qu’il a mis le demandeur Ac X sous contrôle judiciaire alors que, selon le moyen, seul Ab A a reçu « pouvoir général » du directeur général de la Poste pour le recouvrement de la créance, qu’il reconnaît les faits et déclare n’avoir remis une quelconque somme d’argent à Ac X ;
Mais attendu que la mauvaise appréciation des faits de la cause et la violation du principe de la personnalisation et de l’individualité de la faute pénale ne constituent pas des cas d’ouverture à cassation ;
Que le moyen est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS Reçoit en la forme les pourvois n°003/15 de Y Ac X etn°004/15 de C Ad B ;
Déclare C Ad B forclos en son pourvoi ;
Rejette le pourvoi de Y Ac X quant au fond ;
Met les frais à la charge du Trésor public ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême, au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême composée de : Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambre judiciaire, PRESIDENT; Vignon André SAGBO et Georges TOUMATOU, CONSEILLERS ; Et prononcé à l’audience publique du vendredi onze juin deux mille vingt-un, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de : Nicolas BIAO, AVOCAT GENERAL; Osséni SEIDOU BAGUIRI, GREFFIER;
Et ont signé Le président rapporteur, Le greffier Sourou Innocent AVOGNON Osséni SEIDOU BAGUIRI