N” 070/CJ-CM du RÉPERTOIRE ; N° 2019-31/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 23 Juillet 2021 ; Affaire : NOUVELLE SOCIETE D’ASSURANCE (NSIA) (SCPA HK & Associés) Contre A Aa DE Ac C (Me Roland Salomon ADJAKOU)
Droit civil — Violation de la loi — Défaut de preuve — Possession d’état — Acte de mariage-époux.
Violation de la loi — Mariage légal — Mariage coutumier — Code des personnes et de la famille.
Procédure civile — Incompétence — Traité OHADA - Acte uniforme.
La preuve de la possession d’état pouvant être faite par tous les moyens, il ne peut être exigé d’un époux la production de l’acte de mariage comme seule preuve de cette qualité.
N’est pas fondé le moyen réfutant la plénitude de mariage légal un mariage coutumier antérieur au code des personnes et de la famille.
N’est pas fondé le moyen qui invoque l’incompétence de la Cour suprême sur le fondement de l’article 14 alinéa 3 du Traité de l’OHADA dès lors qu’il ne fait aucun grief à l’arrêt attaqué et que celui-ci ne s’est fondé ni sur un acte uniforme ou un règlement prévu au Traité de l’OHADA ni sur l’interprétation d’un acte uniforme ;
Une cour d’appel ne doit pas retenir sa compétence sur une disposition abrogée ou modifiée.
La Cour,
Vu l’acte n° 2019-002 du 25 avril 2019 du greffe de la cour d’appel d’Ad par lequel la société civile professionnelle d'avocats HK & Associés, conseil de la Nouvelle Société d’Assurance du Bénin (NSIA), a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°005/EP/CA-AB rendu le 28 mars 2019 par la chambre civile état des personnes de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprème ;
Vu l’arrêt attaqué ;
vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 23 juillet 2021 le conseiller, Vignon André SAGBO en son rapport ;
Ouï l’avocat général Saturnin AFATON en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n° 2019-002 du 25 avril 2019 du greffe de la cour d'appel d’Ad, la société civile professionnelle d'avocats HK & Associés, conseil de la Nouvelle Société d'Assurance du Bénin (NSIA), a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n° 005/EP/19 rendu le 28 mars 2019 par la chambre civile état des personnes de cette cour ;
Que par lettres numéros 0038, 0039, 0040 et 0041/GCS du 06 janvier 2020 du greffe de la Cour suprême, la demanderesse au pourvoi et son conseil ont été invités à consigner dans le délai de quinze (15) jours, sous peine de déchéance et à produire leur mémoire ampliatif dans le délai de deux (02) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 931 alinéa 1% et 933 alinéa 2 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Que la consignation à ête payée et les mémoires ampilatr et en défense produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions, lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations ;
Que seul maître Roland S. K. ADJAKOU a expressément renoncé à faire des observations ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi a été introduit dans les forme et délai de la loi ;
Qu'il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
FAITS ET PROCEDURE
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le dimanche 07 octobre 2012, l’un des véhicules assurés par la Nouvelle Société d'Assurance du Bénin (NSIA) s’est trouvé impliqué dans un accident de la circulation ayant occasionné la mort du conducteur de la motocyclette, Ab B ;
Que la victime est mariée à A Aa de Ac C selon la coutume Idaasha courant janvier 1999 et de leur union sont nés sept (07) enfants ;
Que pour la liquidation des droits de la conjointe survivante, A Aa de Ac C a produit à la Nouvelle Société d’Assurances du Bénin, le certificat de notoriété attestant de l’effectivité de son union avec le de cujus ;
Que la Nouvelle Société d’Assurances du Bénin lui a contesté sa qualité de conjointe survivante ;
Que pour se faire rétablir dans ses droits de veuve de feu Ab B, elle a dû initier une procédure devant le juge d'état des personnes ;
Qu'à l’audience, la Nouvelle Société d'Assurance du Bénin s’est aussitôt portée intervenante volontaire ;
Que par jugement n°021/17-EP du 23 mai 2017, le tribunal saisi, a reconnu à A Aa de Ac C, sa qualité de conjointe survivante de feu Ab B ;
Que sur appel de la Nouvelle Société d'Assurance du Bénin, la cour d'appel d’Ad a rendu le 28 mars 2018, l’arrêt confirmatif n°005/EP/CA-AB ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
SUR LE PREMIER MOYEN TIRE DE LA VIOLATION DE L’ARTICLE 111 DU CODE DES PERSONNES ET DE LA
FAMILLE POUR DEFAUT DE PREUVE
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, la violation de l’article 111 du code des personnes et de la famille en ce que les juges de la cour d’appel d’Ad ont reconnu à A Aa de Ac C, la qualité de conjointe survivante de feu Ab B, alors que, selon le moyen, au sens de l’article 111 du code des personnes et de la famille « tout demandeur à une action en possession d'état, doit établir par tous moyens de preuve, que de façon constante, il s’est comporté, a été traité par la famille et considéré par la société comme ayant l’état auquel il prétend ; que dans le cas d’espèce, la défenderesse qui prétend avoir contracté un mariage coutumier ou traditionnel, n’a pas rapporté la preuve par la production d’un acte ; que celle-ci n’a pu produire qu'un certificat de notoriété qui n’a nullement la valeur juridique d’un acte de mariage traditionnel ou coutumier » ;
Qu’en retenant, en l'absence de preuve, l’existence d’un mariage contracté conformément à la coutume, entre A Aa de Ac C et le de cujus, avant l’avènement du code des personnes et de la famille, la cour d'appel a violé l’article 111 dudit code et l’arrêt attaqué encourt cassation de ce chef ;
Mais attendu que selon les termes de l’article 111 du code des personnes et de la famille dont la violation est invoquée, la preuve de la possession d’état peut être faite par tous moyens par le demandeur qui, de façon constante, « s’est comporté, a été traité par la famille et considéré par la société comme ayant l’état auquel il prétend » ;
Que dans la mesure où là Toi autorise la preuve de la possession d’état par tous moyens, il ne peut être exigé de la défenderesse au pourvoi, la production du seul et unique acte de mariage, comme preuve de sa qualité d’épouse ;
Que pour reconnaître cette qualité à A Aa de Ac C, les juges de la cour d’appel, en appréciant souverainement la valeur qu’il convient d’attribuer aux éléments de preuve qui leur ont été soumis, ont jugé qu’elle « à contracté avant l'avènement du code des personnes et de la famille, mariage conformément à la coutume avec Ab B ; qu’elle a vécu maritalement et notoirement avec ce dernier, …, jusqu’au jour de son décès » ;
Que ces constatations et énonciations établissent à suffire la possession d’état dont se prévaut A Aa de Ac C ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN TIRE DE LA VIOLATION
DES ARTICLES 1018 ET 1021 DU CODE DES PERSONNES ET DE LA FAMILLE
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt entrepris la violation par mauvaise application des articles 1018 et 1021 du code des personnes et de la famille, en ce que les juges de la cour d’appel d’Ad ont indiqué dans leur motivation « attendu qu’en l'espèce, l'intmée GANTIN A Aa de Chantal a contracté mariage conformément à la coutume avec Ab B, avant l'avènement du code des personnes et de la famille ; qu’elle a vécu maritalement de façon notoire avec ce dernier, avec qui elle a eu des enfants jusqu’au jour de son décès », pour lui reconnaître la qualité d’épouse, alors que, selon le moyen, une vie maritale avec des enfants en commun, ne suffit pas pour conférer la qualité d’épouse aux termes de la loi; que le concubinage notoire ne peut être assimilé au mariage ; que le mariage selon la coutume dont se prévaut la défenderesse, n'a pas été déclaré du vivant de son concubin à l’officier d’état civil pour sa transcription ; que du reste, les dispositions des articles 1018 et 1021 du code des personnes et de la famille ne confèrent qu’aux seuls mariages coutumiers et célébrés sous l’égide du code civil, toute la plénitude de mariage légal ; que ces dispositions ne peuvent être appliquées aux concubins ;
Qu’en agissant comme ils l’ont fait, les juges de la cour d'appel ont violé les dispositions des articles 1018 et 1021 du code des personnes et de la famille ;
Que l'arrêt attaqué encourt cassation de ce chef ;
Mais attendu que dans ses termes, l'alinéa 2 de l’article 1021 du code des personnes et de la famille reconnait et attache des effets aux mariages déclarés ou non, contractés conformément à la coutume ;
Que selon l’article 1018, les dispositions du code des personnes et de la famille « s'appliquent…aux conséquences que la loi tire des actes et faits antérieurs ayant créé une situation régulière au regard de la coutume et de la loi » ;
Qu’en énonçant : « … que les dispositions des articles 1021 et 1018 du code des personnes et de la famille confèrent au mariage coutumier toute sa plénitude de mariage légal ; que ces dispositions s'appliquent aux actes et faits juridiques postérieurs à l’entrée en vigueur du code et antérieurement à la date d'entrée en vigueur du présent code », les juges de la cour d'appel d’Ad ont fait une bonne application de la loi ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Le rejette quant au fond ;
Met les frais à la charge de la Nouvelle société d'Assurance du Bénin (NSIA) ;
Ordonne la notification du présent arrêt aux parties ainsi qu’au procureur général près la Cour suprême ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d'appel d’'Abomey ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre
judiciaire) composée de :
Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambre judiciaire, PRESIDENT ;
Vignon André SAGBO
Et CONSEILLERS ;
Georges G. TOUMATOU
Et prononcé à l’audience publique du vendredi vingt-trois
juillet deux mille vingt et un, la chambre étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Saturnin AFATON, AVOCAT GENERAL;
Hélène NAHUM-GANSARE, GREFFIER;
Et ont signé,
Le président, Le rapporteur,
Sourou Innocent AVOGNON Vignon André SAGBO
Le greffier.
Hélène NAHUM-GANSARE