N°304/CA du Répertoire
N°2016-44/CA2 du Greffe
Arrêt du 22 septembre 2021
AFFAIRE :
REPUBLIQUE DU BENIN
AU NOM DU PEUPLE BENINOIS
COUR SUPREME
CHAMBRE ADMINISTRATIVE Aa Ac Ae
Ministre de l’Intérieur
et de la Sécurité Publique
La Cour,
Vu la requête introductive d’instance en date à Porto-Novo du 20 janvier 2016, enregistrée au Greffe de la Cour le même jour sous le numéro 0059/GCS, par laquelle Aa Ac Ae a saisi la haute Juridiction d’un recours aux fins de reconstitution de sa carrière ;
Vu la loi n°2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes en République du Bénin ;
Vu toutes les pièces du dossier ;
Le Conseiller Etienne FIFATIN entendu en son rapport et l’Avocat général Arsène Hubert DADJO en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant qu’au soutien de son recours, le requérant expose :
Qu’incorporé à la police nationale le ''" décembre 1972 à l’instar d’un autre collègue du nom de SAMA Zato, sa carrière avait été bloquée, comme c’est le cas d’autres promotions du fait de l’administration policière ;
Qu’après le déblocage de cette situation, il a été reversé et reclassé inspecteur de police divisionnaire pour compter du 18 juin 1990 par arrêté n°047/MISAT/DGPN/CNRCPN du 04 mars 1998 pris sur la base du décret n°97-622 du 30 décembre 1997 portant statuts particuliers des corps des
personnels de la police nationale ; x 2
Que certains de ses collègues dont A Ad Ab ont été reversés et reclassés au même titre que lui, dans le grade d’inspecteur de police divisionnaire pour compter du18 juin 1990 ;
Que malheureusement, depuis le 04 mars 1998 que l’arrêté ci-dessus cité lui a conféré le grade d’inspecteur de police divisionnaire pour compter du 18 juin 1990, aucun autre acte d’avancement n’a été pris à son profit ;
Qu'il a effectué des démarches, ensemble avec ses collègues qui sont dans la même situation, à l’endroit de la hiérarchie policière aux fins de reconstitution de leurs carrières ;
Que c’est en l’état de sa situation administrative qu’est intervenu le décret n°2009-713 du 31 décembre 2009 portant modalités de règlement des problèmes de reconstitution de carrière de certains fonctionnaires de police, suite à leurs réclamations et aux arrêts de la Cour suprême ;
Qu’il ressort de l’article 6 dudit décret que tous les agents de police qui ont acquis le grade d’inspecteur de police divisionnaire depuis le 18 juin 1990 et qui ont réuni cinq (05) années d'ancienneté dans ce grade seront avancés au grade de commissaire de police de 2°" classe ;
Qu’ayant acquis le grade d’inspecteur de police divisionnaire le 18 juin 1990, il réunissait le nombre d’années d’ancienneté nécessaires pour porter le grade de commissaire de police de 2°"° classe à partir du 18 juin 1995, le grade de commissaire de police de 1° classe le 18 juin 1998, et celui de commissaire principal de police le 18 juin 2002, avant d’être admis à faire valoir ses droits à la retraite le 1 janvier 2003 ;
Que curieusement, à la prise du décret n°2015-408 du 20 juillet 2015 de reconstitution des carrières des agents de police, seuls ses collègues concernés ont accédé aux catégories hiérarchiquement supérieures ;
Qu’en ce qui le concerne, l’administration ne l’a pris en compte sur aucun décret de reconstitution de carrière ;
Qu’il sollicite de la Cour la reconstitution de sa carrière à l’instar de ses collègues ;
En la forme
Sur la recevabilité du recours
Considérant que le recours a été introduit conformément à la loi ;
Qu’il y a lieu de le déclarer recevable ;
Au fond
Considérant que le requérant fonde son recours sur les moyens de rupture d’égalité devant la loi, de détournement de pouvoir, de violation des droits acquis et de violation de la loi ;A ‘(
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Sur le moyen du requérant tiré de la rupture d’égalité sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens
Considérant que le requérant soutient que les obligations contenues dans les dispositions des articles 65 de la loi n°86-013 du 26 février 1986 portant statut général des agents permanents de l’Etat, 52 à 61 de la loi n°93- 010 du 20 août 1997 portant statut spécial des personnels de la police nationale et 53 et 61 du décret n°97-622 du 30 décembre 1997 portant statuts particuliers des corps des personnels de la police nationale, relèvent d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire de l’autorité administrative chargée de la gestion de la carrière des agents de la police nationale ;
Qu'’en ne procédant pas à la reconstitution de sa carrière à l’instar de ses collègues, alors qu’il remplissait les conditions requises par la loi, l’administration a rompu l’égalité de traitement ;
Que la décision de rejet par l’administration de sa demande doit être par conséquent annulée et sa carrière reconstituée comme ci-après :
- commissaire de police de 2°"° classe à compter du 18 juin 1995 ;
- commissaire de police de 1“° classe à compter du 18 juin 1998 ;
- commissaire principal de police à compter du 18 juin 2002 ;
Considérant que dans ses écritures adressées à la Cour en date du 06 septembre 2021, le Ministre en charge de l’Intérieur a fait observer que la situation administrative du requérant, objet de sa requête, relève d’une omission ;
Qu’en effet, sa carrière aurait dû se dérouler, au regard des dispositions du décret n°97-622 du 30 décembre 1997 portant statuts particuliers des corps des personnels de la police nationale, ainsi qu’il suit :
- élève-commissaire de police par promotion à titre normal et astreint à une formation militaire et professionnelle de neuf (09) mois à l’école nationale supérieure, pour compter du 18 juin 1995 ;
- commissaire de police de 2*"° classe pour compter du 18 mars 1996 ;
- commissaire de police de 1° classe pour compter du 1“ janvier 2000 ;
Considérant que, s’agissant du grade de commissaire principal auquel prétend le requérant, l’administration lui oppose le défaut d’accomplissement des quatre années d'ancienneté prévues par la loi ;
Considérant qu’à l’audience du 22 septembre 2021, le requérant, sans contester les dires de l’administration, a fait observer à son tour à la barre qu’il n’avait pas en réalité accompli, avant son admission à la retraite le 1°" janvier 2003, les quatre années requises pour être promu au grade den 4
commissaire principal de police confortant ainsi la position de l’administration sur ce point;
Qu'il s’en tient à la reconstitution de sa carrière telle que déclinée par
Considérant qu’aux termes des dispositions de l’article 53 du décret n°97-622 du 30 décembre 1997 portant statuts particuliers des corps des personnels de la police nationale, le grade de commissaire de police de 2°"° classe est porté après cinq (05) années dans le grade d’inspecteur de police divisionnaire ;
Qu’au regard de ces dispositions, après avoir été promu au grade d’inspecteur de police divisionnaire le 18 juin 1990, le requérant devrait porter le grade de commissaire de police de 2*"° classe au plus tard le 18 mars 1996, en tenant compte de la période de formation ;
Considérant que pour accéder au grade de commissaire de police de 1*° classe, le requérant doit accomplir trois (03) années d’ancienneté dans le grade de commissaire de police de 2*"* classe ;
Qu’en 1999, l’intéressé réunissait les trois années requises pour être inscrit au tableau d’avancement et devrait porter le grade de commissaire de police de première classe à partir de l’année 2000 ;
Que les prétentions du requérant relatives au port des grades de commissaire de police de deuxième classe et de commissaire de police de première classe sont justifiées et correspondent au déroulement de sa carrière tel qu’envisagé par l’administration dans son mémoire en défense du 06 septembre 2021 ;
Considérant qu’en ce qui concerne le grade de commissaire principal de police, le commissaire de police de première classe doit réunir quatre années d’ancienneté ;
Considérant que dans le cas d’espèce, le requérant admis à la retraite à compter du 1°” janvier 2003 n’aura réuni que trois années d’ancienneté au lieu de quatre années exigées par les statuts ;
Que du reste, il déclare lui-même à la barre n’avoir pas atteint le nombre d’années de service pour prétendre au grade de commissaire principal de police, renonçant ainsi à cette prétention ;
Considérant qu’il ressort de tout ce qui précède, que le moyen du requérant est fondé ;
Qu’il y a lieu de reconstituer la carrière de Aa Ac Ae jusqu’au grade de commissaire de police de première classe ; Ne PAR CES MOTIFS,
Décide :
Article 1°" : le recours en date à Porto-Novo du 20 janvier 2016 de Aa Ac Ae, tendant à la reconstitution de sa carrière conformément à la loi, est recevable ;
Article 2 : Ledit recours est fondé ;
Article3 : Il est ordonné la reconstitution de la carrière de Aa Ac Ae jusqu’au grade de commissaire de police de première classe pour compter du 1“ janvier 2000 ;
Article 4 : les frais sont mis à la charge du Trésor public ;
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié aux parties et au Procureur général près la Cour suprême.
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême composée de :
Etienne FIFATIN, Conseiller à la Chambre administrative,
PRESIDENT;
Edouard Ignace GANGNY
et CONSEILLERS ;
Pascal DOHOUNGBO
Et prononcé à l’audience publique du mercredi vingt-deux septembre deux mille vingt-et-un, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de :
Arsène Hubert DADJO, Avocat général,
MINISTERE PUBLIC;
Calixte A. DOSSOU-KOKO,
GREFFIER ;
Et ont signé,
Le Président rapporteur, Le Greffier ——
Etienne FIFATIN Calixte A. DOSSOU-KOKO