[N7 103/CJ-CM du répertoire ; N” 2019-19/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 03 Décembre 2021 ; LA SOCIETE DE GESTION DES MARCHES DE PARAKOU (SGMP) sA (Me Igor Ab A) Contre LA MAIRIE DE PARAKOU (Me Michel AHOUMENOU)
Le Juge des référés se déclare incompétent, toutes les fois que la connaissance du contentieux qui lui est soumis doit le conduire à préjudicier au fond - Pourvoi en cassation
- Violation de la loi pour mauvaise application en admettant la contestation sérieuse comme une condition de compétence, plutôt qu’une cause d’irrecevabilité (non) - Violation de la loi pour défaut d’appréciation de la contestation sérieuse par rapport à chacune des demandes des parties (non) - Violation de la loi pour insuffisance de motifs pour cause de non démonstration juridique de la contestation sérieuse pour les juges d’appel (non) - Violation de la loi, notamment de l’article 885 de Code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes.
Encourt un rejet, le moyen tiré de la violation de la loi pour mauvaise application, en admettant la contestation sérieuse comme une condition de compétence, plutôt qu’une cause d’irrecevabilité, dès lors l’appréciation de la contestation sérieuse par le juge, doit être préalable à sa propre compétence ;
Encourt rejet, les moyens tirés de la violation de la loi, notamment pour cause de mauvaise application, insuffisance de motifs, défaut d’appréciation de la contestation sérieuse par rapport à chacune des demandes des parties, lesdits moyens visent en réalité à remettre en discussion devant la haute Juridiction les éléments de faits souverainement appréciés par les juges d’appel ;
Encourt rejet, le moyen tiré de la violation de l’article 885 de Code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, car ce moyen tend à remettre en débat devant La Cour,
Vu l’acte n°04/19 du 16 juillet 2019 du greffe de la Cour d'appel de Parakou par lequel la société de gestion des marchés de Parakou (SGMP) représentée par son directeur général, Ac C, ayant pour conseil maître Igor C A a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°002/19/RCOM rendu le 16 juillet 2019 par la chambre des référés de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 03 décembre 2021 le conseiller, Michèle CARRENA-ADOSSOU en son rapport ;
Ouï l’avocat général Saturnin AFATON en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°04/19 du 16 juillet 2019 du greffe de la Cour d’appel de Parakou, la société de gestion des marchés de Parakou (SGMP) représentée par son directeur général, Ac C, ayant pour conseil maître Igor C A a élevé pourvoi en cassation contre les dispositions de l'arrêt N"UUZ/19/KCOM rendu le T6 juillet ZUT9 par la chambre des référés de cette cour ;
Que par lettres n°°7599/GCS et 7600/GCS du 21 novembre 2019 du greffe de la Cour suprême, la direction générale de la société de gestion des marchés de Parakou et son conseil ont été respectivement invités à consigner dans le délai de quinze (15) jours, sous peine de déchéance et à produire leur mémoire ampliatif dans le délai de deux (02) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 931 alinéa 1°'et 933 alinéa 2 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Que la consignation a été payée et les mémoires ampliatif et en défense produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions, lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi est respectueux des forme et délai légaux ;
Qu'il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
FAITS ET PROCEDURE
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que dans le cadre d’une délégation de service public, la Circonscription Urbaine de Parakou (CUP) a, par contrat en date du O7 juin 2002, concédé, par affermage, la gestion et l'exploitation des ouvrages et équipements situés dans l’ensemble du marché central, du dépôt de Parakou, du marché de Tourou, de celui de Guéma, de celui de friperie du camp militaire de Parakou ainsi que celui de Zongo, des parkings y attenant et la station de lagunage à la société de gestion des marchés de Parakou (SGMP) SA ;
Que suite à la décision en date du 15 décembre ZU16, du Maire de la ville de Parakou de suspendre unilatéralement ce contrat d’affermage, et considérant que cette décision lui cause un trouble dans ses activités et est constitutive de voies de fait, la société de gestion des marchés de Parakou a saisi le juge des référés du tribunal de première instance de première classe de Parakou qui, suivant ordonnance n°009/18 du 22 octobre 2018, a dit que ”l’appréciation de la suspension du contrat vise à interpréter et à analyser le fond de ce contrat d’affermage et à préjudicier au fond”, et s’est déclaré incompétent ;
Que sur appel de la société de gestion des marchés de Parakou, la cour d'appel de la même ville a rendu l’arrêt confirmatif n°002/19 du 16 juillet 2019 ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
SUR LE MOYEN UNIQUE TIRE DE LA VIOLATION DE LA LOI EN SES QUATRE BRANCHES
Première branche du moyen : violation de la loi par
mauvaise application
Attendu qu’il est reproché à l'arrêt attaqué la violation de la loi par mauvaise application en ce que les juges d’appel ont retenu l'incompétence du juge des référés comme conséquence de l’existence d’une contestation sérieuse alors que, selon la branche du moyen, aux termes des dispositions des articles 165 et 204 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, la contestation sérieuse ne détermine pas la compétence du juge des référés mais conditionne la recevabilité ou non de l’action ou la demande en référé ;
Qu’en confirmant en l’état l’ordonnance du juge des référés, les juges de la chambre commerciale de la cour d'appel de Parakou ont violé la loi, admettant la contestation sérieuse comme une condition de compétence plutôt qu’une cause d’irrecevabilité ;
Mais attendu que le juge des rétérés est par principe le juge de l’évidence qui se déclare d'office incompétent toutes les fois que la connaissance du contentieux qui lui est soumis doit le conduire à préjudicier au fond du droit ;
Que c'est à bon droit qu’en l’espèce, les juges d'appel, après avoir constaté qu’il y a contestation sérieuse ont confirmé en l’état l’ordonnance entreprise en se déclarant incompétent ;
Que la branche du moyen n’est pas fondée ;
Deuxième branche du moyen : violation de la loi pour
insuffisance de motifs
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation de la loi pour insuffisance de motivation en ce que les juges d’appel n’ont fait aucune démonstration juridique de la contestation sérieuse alléguée avant de conclure que « le premier juge, en sa qualité de juge des référés ne peut pas trancher une contestation sérieuse lorsqu'il statue sur sa compétence » ;
Que cette motivation est insuffisante et que l'arrêt encourt cassation de ce chef ;
Mais attendu que pour conclure à son incompétence et confirmer l’ordonnance querellée, la cour d’appel a consacré tout un développement à l’incompétence du juge des référés en l’espèce et a notamment énoncé que : « attendu que le premier juge s’est déclaré incompétent motif pris de ce qu'il y a contestation sérieuse … Qu’une contestation sérieuse s'apprécie selon l’évidence des droits revendiqués par chacune des parties …, que le maire soutient » avant de conclure que « le premier juge en sa qualité de juge des référés ne peut … Sur sa compétence. » ;
Qu'’au surplus, en matière de référés, il suffit pour le juge de démontrer la contestation sérieuse qui s’induit, du reste, des prétentions des parties pour en tirer la conséquence que se prononcer sur les prétentions revient à trancher une question de droit ;
Qu'ayant mis en évidence les prétentions des parties et constaté qu’elles révèlent une contestation sérieuse, les juges n’ont pas manqué de motiver leur décision ;
Que le moyen n’est pas fondé en cette branche ;
défaut d’appréciation de la contestation sérieuse par rapport à chacune des demandes des parties
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué la violation de la loi en ce que, les juges d'appel n’ont pas apprécié la contestation sérieuse relativement à chacune des demandes formulées par les parties devant le premier juge, alors que, selon la branche du moyen, le juge doit statuer sur toutes les demandes faites par les parties devant lui ;
Que devant le premier juge en effet, il a été sollicité la réouverture des bureaux de la société de gestion des marchés de Parakou SA, la reprise des activités par celle-ci et l’injonction à la Mairie de donner mainlevée de la saisie des comptes de la société ;
Mais attendu d’une part, que sous le couvert du défaut de réponse à des demandes, le moyen vise en réalité à remettre en débat devant la Haute juridiction des éléments de faits souverainement appréciés par les juges du fond ;
Qu'’au surplus, s'étant déclaré incompétents pour contestation sérieuse, les juges du fond ne pouvaient plus statuer au fond, voire faire droit à certaines demandes sans se contredire ;
Que pour en arriver à ordonner certaines mesures ou à faire droit à certaines demandes, le juge doit, au préalable, apprécier sa propre compétence ;
Qu’une décision d’incompétence du juge des référés le rend radicalement incompétent pour statuer sur des chefs de demande ;
Que la branche du moyen n’est pas fondée ;
Quatrième branche du moyen : violation de l’article 885 du code de procédure civile commerciale, sociale, administrative et des comptes
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation de l’article 885 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, en ce que, les juges d’appel ont confirmé la décision d’incompétence du premier juge, alors que, selon la branche du moyen, ledit article dispose que : « le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. » ;
Qu'en l’espèce, les juges d'appel n’ont pas cherché à vérifier si les différentes demandes de la société de gestion des marchés de Parakou s'inscrivent dans le cadre de l’article 885 sus évoqué ;
Que la mesure de suspension dont le terme n’a même pas été prévu est illicite, la Mairie ayant fait apposer des scellés sur tous les bureaux ;
Mais attendu que les mesures provisoires que peut prononcer le juge des référés ne doivent en rien préjudicier au fond ;
Qu’au demeurant, c'est au juge du fond ayant constaté la contestation sérieuse, d’apprécier de façon souveraine les mesures provisoires sollicitées et voir si elles peuvent être ordonnées sans préjudicier au fond ;
Que sous le couvert de violation des dispositions de l’article 885 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes, la branche du moyen tend à remettre en débat devant la haute juridiction des éléments de faits souverainement appréciés par les juges du fond ;
Que cette branche du moyen est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
Reçoit en la forme Te présent pourvoi ;
Le rejette quant au fond ;
Met les frais à la charge de la Société de Gestion des Marchés de Parakou (SGMP) SA ;
Ordonne la notification du présent arrêt aux parties ainsi qu’au procureur général près la Cour suprême ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Aa ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judiciaire) composée de :
Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambre judiciaire, PRESIDENT ;
TOUMATOU, Conseillers
Et prononcé à l’audience publique du vendredi trois décembre deux mille vingt et un, la chambre étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Saturnin AFATON, AVOCAT GENERAL;
Hélène NAHUM-GANSARE, GREFFIER;
Et ont signé,
Le président, Le rapporteur,
Sourou Innocent AVOGNON Michèle CARRENA-ADOSSOU
Le greffier.
Hélène NAHUM-GANSARE