[N7 106/CJ-CM du Répertoire ; N° 201/-12/CJ-CM du greffe ; Arrêt du 17 décembre 2021 ; Société Donan et Fils CY A et CHADARE Me Alexandrine SAÏZONOU BEDIE - Me Mousbaye PADONOU AMINOU) contre Société béninoise de brasseries (AbX (Me Magloire YANSUNNU)
Procédure civile — Cas d’ouverture à cassation - Violation de la loi par fausse application ou refus d’application — Rejet - Défaut de réponse à conclusions — Rejet
N’est pas fondé, tout moyen visant à demander au juge saisi de ne pas rechercher la commune intention des parties à un contrat pour la résolution du contentieux né de l’exécution fautive des stipulations contenues dans ledit contrat ;
Encourt rejet tout moyen visant à : demander au juge de considérer comme contrat liant les parties, les pourparlers, les simples échanges de correspondances qui ne sauraient s’analyser en accord exprès constitutif d’un nouveau contrat.
La Cour,
Vu l’acte n° 77 du 14 décembre 2009 du greffe de la Cour d'appel de Cotonou, par lequel Maître Prosper AHOUNOU, conseil de la société Donan et Fils a déclaré élever pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de l'arrêt n° 17/09/C.COM du 8 octobre 2009 rendu par la chambre commerciale de cette Cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des 2016 ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 17 décembre 2021 le président Sourou Innocent AVOGNON en son rapport ;
Ouï le procureur général Ac Aa B en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n° 77 du 14 décembre 2009 du greffe de la Cour d'appel de Cotonou, Maître Prosper AHOUNOU, conseil de la société Donan et Fils a déclaré élever pourvoi en cassation contre toutes les dispositions de l'arrêt n° 17/09/C.COM du 8 octobre 2009 rendu par la chambre commerciale de cette Cour;
Que par lettres n° 2087, 2088, 2089, 2090 et 2091/GCS du 3 août 2017 du greffe de la Cour suprême, le demandeur au pourvoi et ses conseils ont été invités à consigner dans le délai de quinze (15) jours sous peine de déchéance et à produire leurs mémoires ampliatifs dans le délai de deux (2) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 931 alinéa premier et 933 alinéa 2 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Que les mémoires ampliatif et en défense ont été produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions, lesquelles ont été communiquées aux conseils des parties pour leurs observations ;
Que par correspondance en date à Cotonou du 5 novembre
demandeur au pourvoi, a versé ses observations au dossier ;
EN LA FORME Attendu que le présent pourvoi est respectueux des forme et délai légaux ;
Qu'il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
Faits et procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que suite à la rupture du contrat de distribution de produits qui la lie à la Société béninoise de brasseries (AbX, la société Donan et Fils, par exploit du 13 mars 2009, a attrait ladite société devant le tribunal de première instance de première classe de Cotonou statuant en matière commerciale aux fins de sa condamnation, à son profit, à la somme de vingt millions (20 000 000) de francs cfa à titre de dommages et intérêts ;
Que par jugement n° 36/1ère Ch. Com du 30 mars 2009, la juridiction saisie a, entre autres, constaté que le contrat de distribution agréé conclu le 7 mars 2008 entre la société Donan et Fils et la société Ab est à durée déterminée et sans possibilité de tacite reconduction, dit qu’il n’y a pas rupture abusive dudit contrat par la société Ab, constaté également que la société Donan et Fils ne fait pas la preuve du retard de livraison des marchandises de la Ab les 9 et 13 janvier 2009 au vu des usages et rejeté en conséquence sa demande de condamnation de la Ab à des dommages-intérêts ;
Que sur appel de la société Donan et Fils, la Cour d’appel de Cotonou a, par arrêt n° 17/09/C.COM du 8 octobre 2009, confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
Sur le premier moyen tiré de la violation de la loi par fausse application ou refus d'application
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé la loi par fausse application ou refus d'application en ce que, les juges de la Cour d’appel ont confirmé le jugement entrepris sur le fondement de l’article 1134 du code civil, en invoquant comme loi des parties, l’article 4 du contrat de distribution agréée des produits de la société Ab signé le 1er janvier 2008 et qui stipule :
« Le présent contrat est conclu pour une durée déterminée d’un (1) an qui prend effet le premier janvier 2008 et expire le 31 décembre 2008, sans aucune possibilité de tacite reconduction.
Par suite, tout renouvellement fera l’objet d’un accord exprès des deux parties. En cas de non reconduction du présent contrat, le distributeur agréé ne pourra revendiquer la propriété commerciale de ce contrat de distribution et son non renouvellement ne pourra donner lieu à aucune indemnisation à son profit »,
Alors que, selon le moyen, cette clause est contraire :
- d'une part à l’article 88-b du traité de l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) qui prescrit que « sont interdites de plein droit, toutes pratiques d’une ou de plusieurs entreprises, assimilables à un abus de position dominante sur le marché commun ou dans une partie significative de celle-ci »
- et d'autre part à l’article 2, du règlement n ° 02/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002 sur les pratiques commerciales anticoncurrentielles qui dispose que «par application de l’article 88 du traité de l'UEMOA, constituent des pratiques anti-concurrentielles les pratiques visées aux articles 3, 4, 5 et 6 ci-dessous. Ces pratiques sont interdites, sans qu'aucune décision préalable ne soit nécessaire, lorsqu'elles ont été mises en œuvre au moins un an après l'entrée en vigueur du traité de l'UEMOA. Les accords ou décisions interdits en vertu du paragraphe qui précède sont déclarés nuls de plein droit » ;
Que l’arrêt attaqué a appliqué sans nuance l’article 1134 du code civil et méconnu les dispositions des textes communautaires
Qu'il encourt cassation de ce chef ;
Mais attendu que le juge a l'obligation de rechercher la commune intention des parties à un contrat ;
Que dans le cas d'espèce, les juges d'appel ont relevé qu’ « il est constant au dossier que la société Donan et Fils Sarl est liée à la Société béninoise de brasseries (AbX par un contrat dénommé “contrat de distribution agréé des produits Ab » ;
Que l’article 4 dudit contrat stipule que :
« le présent contrat est conclu pour une durée déterminée d’un (1) an qui prend effet le 1er janvier 2008 et expire le 31 décembre 2008 sans aucune possibilité de tacite reconduction ;
Par suite, tout renouvellement fera l’objet d’un accord exprès des deux parties (…)
Qu'il ne fait pas l'ombre de doute, au regard de ces stipulations, que le contrat de distribution agréé de l'exercice 2008 est arrivé à son terme le 31 décembre 2008 ;
Qu’à cette date, les parties étaient juridiquement déliées de toute obligation contractuelle » ;
Qu’en se déterminant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges d’appel ont fait une juste et saine application de la loi ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen tiré du défaut de réponse à conclusions
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué du défaut de réponse à conclusions, en ce qu’il a omis de statuer sur le moyen relatif au nouveau contrat de distribution, ayant une durée indéterminée, issu de la lettre de la société Ab en date du 11 décembre 2008, adressée à la société Donan et Fils, qui s’analyse comme une offre de renouvellement du précédent contrat d’agréation expirant le 31 décembre 2008, et de la lettre d'acceptation de la société Donan et Fils, en date du 26 décembre 2008, alors que, selon le moyen, les juges d'appel ont l’obligation de répondre aux conclusions régulièrement déposées au dossier de la procédure ;
Que ces échanges de correspondances sont constitutives d’un accord de volonté des parties devant recevoir la qualification de contrat de distribution à durée indéterminée, lequel a été abusivement rompu par la société Ab ;
Qu’en raison du défaut de réponse à ce moyen, l'arrêt querellé encourt cassation ;
Mais attendu qu’il ressort des énonciations de l'arrêt querellé que les juges d’appel ont constaté d’une part, que le contrat de distribution agréé des produits de la société Ab expire le 31 décembre 2008 sans aucune possibilité de tacite reconduction et d'autre part, que tout renouvellement devra faire l’objet d’un accord exprès des deux parties ;
Que par ses énonciations, l’arrêt attaqué a répondu aux conclusions de la société Donan et Fils, de simples échanges de correspondances ou des livraisons de commandes ponctuelles ne pouvant s’analyser en un accord exprès constitutif d’un nouveau contrat ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
Déclare recevable en la forme le présent pourvoi ;
Le rejette quant au fond ;
Met les frais à la charge de la société Donan et Fils ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur
général près la Cour suprême ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d'appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (chambre judiciaire) composée de :
Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambre judiciaire ; PRESIDENT;
André Vignon SAGBO
et CONSEILLERS ;
Georges TOUMATOU
Et prononcé à l’audience publique du vendredi dix-sept décembre deux mille vingt et un, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus, en présence de :
Ac Aa B, PROCUREUR GENERAL ;
Djèwekpégo Paul ASSOGBA, GREFFIER ;
Et ont signé :
Le président Le greffier
Sourou Innocent AVOGNON _ Djèwekpégo Paul ASSOGBA