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14/01/2022 | BéNIN | N°001/CJ-P

Bénin | Bénin, Cour suprême, 14 janvier 2022, 001/CJ-P


Texte (pseudonymisé)
ARRETS DE CASSATION AVEC RENVOI
N°001/CJ-P DU REPERTOIRE ; N°2019-17/CJ-P DU GREFFE ; ARRET DU 14 JANVIER 2022 ; AFFAIRE : Ab B A C/ MINISTERE PUBLIC ET Aa C.
Droit pénal — Pourvoi en cassation — Violation de la loi — Eléments matériel et moral de l’infraction — Pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond — Irrecevabilité (oui)
Procédure pénale —_ Pourvoi en cassation —_ Motifs contradictoires — Insuffisance de preuve du préjudice subi — Montant du préjudice — Cassation (oui)
Procédure pénale — Violation du principe de réparation inté

grale — Condamnation à un montant forfaitaire à titre de dommages-intérêts
L’examen des éléments mat...

ARRETS DE CASSATION AVEC RENVOI
N°001/CJ-P DU REPERTOIRE ; N°2019-17/CJ-P DU GREFFE ; ARRET DU 14 JANVIER 2022 ; AFFAIRE : Ab B A C/ MINISTERE PUBLIC ET Aa C.
Droit pénal — Pourvoi en cassation — Violation de la loi — Eléments matériel et moral de l’infraction — Pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond — Irrecevabilité (oui)
Procédure pénale —_ Pourvoi en cassation —_ Motifs contradictoires — Insuffisance de preuve du préjudice subi — Montant du préjudice — Cassation (oui)
Procédure pénale — Violation du principe de réparation intégrale — Condamnation à un montant forfaitaire à titre de dommages-intérêts
L’examen des éléments matériels et moral de l’infraction relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.
Use de motifs contradictoires, une cour d’appel qui constate l’insuffisance de preuve pour évaluer les préjudices subis et relève cependant le montant des préjudices retenus par le premier juge.
Encourt cassation pour violation du principe de la réparation intégrale un arrêt qui condamne le prévenu à x un montant forfaitaire à titre de dommages-intérêts.
La Cour,
Vu l’acte n°009/15 du 03 août 2015 du greffe de la cour d’appel de Cotonou par lequel maître Vincent TOHOZIN, conseil de Ab B A, a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°246/15 rendu le 31 juillet 2015 par la chambre correctionnelle de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 14 janvier 2022 le conseiller Georges TOUMATOU en son rapport ;
Ouï l’avocat général Saturnin AFATON en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°009/15 du 03 août 2015 du greffe de la cour d’appel de Cotonou, maître Vincent TOHOZIN, conseil de Ab B A, a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l'arrêt n°246/15 rendu le 31 juillet 2015 par la chambre correctionnelle de cette cour ;
Que par lettre n°0185/GCS du 11 janvier 2019 du greffe de la Cour suprême reçue en son cabinet le 22 janvier 2019, le conseil du demandeur au pourvoi a été invité à produire ses moyens de cassation dans le délai d’un (01) mois, conformément aux dispositions des articles 12 et 13 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Que par lettre n°1406/GCS du 27 février 2019 du greffe de la Cour suprême, une mise en demeure comportant un nouveau et dernier délai d’un (01) mois a été adressée à maître Vincent TOHOZIN aux mêmes fins, sans réaction de sa part ;
Que maître Igor Cécil SACRAMENTO a produit le mémoire ampliatif ;
Que par lettres numéros 3162 et 7654/GCS des 30 avril et 27 novembre 2019 du greffe de la Cour suprême, le procureur général près la cour d’appel de Cotonou et maître Friggens ADJAVON, conseil de Aa C, ont été invités à produire leurs mémoires en défense dans le délai d’un (01) mois conformément aux dispositions de l’article 12 de la loi précitée ;
Que par lettres numéros 7650 et 1568/GCS des 27 novembre 2019 et 03 mars 2021 du greffe de la Cour suprême, une mise en demeure comportant un nouveau et dernier délai d’un (01) mois leur a été adressée aux mêmes fins, sans réaction de leur part ;
EXAMEN DU POURVOI
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi a été introduit dans les forme et délai légaux ;
Qu'il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
Faits et Procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Aa C a pris à bail une boutique sise à Cotonou, quartier Ad Ac auprès de Ab B A ; que prétendant que la locataire lui est redevable de plusieurs mois d’arriérés de loyer, le bailleur a remplacé les cadenas placés par elle et a déplacé les marchandises, effets et produits de la boutique à son domicile ; que le procès-verbal de constat établi par un huissier de justice a fait état de ce que certains cartons de liqueur ont été mouillés ou déchirés tandis que d’autres ont porté des moisissures ; que sur plainte de Aa C, Ab B A a été traduit devant le tribunal de première instance de première classe de Cotonou statuant en matière correctionnelle de flagrants délits ;
Que par jugement n°259/6FD-11 rendu le 28 octobre 2011, la juridiction saisie a notamment déclaré Ab B A coupable de la contravention de dommages à propriété mobilière d'autrui, reçu la constitution de partie civile de Aa C et l’a condamné à payer à celle-ci une somme de cinq cent trente- cinq mille (535 000) francs CFA à titre de dommages-intérêts pour toutes causes de dommages confondues ;
Que sur appels de Aa C et du procureur de la République près le tribunal de première instance de première classe de Cotonou, la cour d'appel a, par arrêt n°246/15 rendu le 31 juillet 2015, infirmé le jugement entrepris en ce qui concerne les dommages-intérêts, puis évoquant et statuant à nouveau, a, entre autres, constaté l’insuffisance de preuve à évaluer avec précision les préjudices subis par Aa C et condamné Ab B A à payer à la partie civile la somme de sept millions (7 000 000) francs CFA de dommages-intérêts pour toutes causes de préjudice confondues ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
Sur le moyen unique tiré de la violation de la loi en ses quatre (04) branches
Première branche : violation de l’article 184 de l’Acte Uniforme portant organisation des sûretés
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation de l’article 184 de l’acte uniforme portant organisation des sûretés en ce que les juges du fond ont rejeté le moyen tiré du privilège du bailleur d’un immeuble sur les meubles garantissant les lieux loués au motif : « que le bailleur ne peut jouir de ce privilège que lorsqu'il y a eu une saisie régulièrement opérée », alors que, selon le moyen, les juges du fond ne peuvent ignorer que le privilège du bailleur d’un immeuble est indépendant et exclusif de toute procédure de saisie ; que pourtant la preuve a été rapportée de ce que les biens ont été enlevés dans l’unique dessein de libérer la boutique pour la remettre en location et que lesdits biens ont été gardés en lieu sûr ;
Qu'en statuant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges du fond ont violé la loi et l’arrêt attaqué encourt cassation ;
Mais attendu que sous le couvert de la violation de l’article 184 de l’acte uniforme portant organisation des sûretés, la branche du moyen tend à faire réexaminer par la Cour les éléments matériel et moral de l'infraction dont Ab B A a été déclaré coupable, ce qui relève de l'appréciation souveraine des juges du fond ;
Que la branche du moyen est irrecevable ;
Deuxième branche : violation des articles 132 de l’Acte Uniforme sur le droit commercial général et 772 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué la violation des articles 132 de l’Acte Uniforme sur le droit commercial général et 772 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes en ce que les juges d’appel ont rejeté l’exception d’incompétence matérielle du juge pénal aux motifs que : « HOUANGNE DEGBE Adrien n’est pas un huissier de justice pour procéder à une saisie ; qu’en procédant comme il l’a fait il a outrepassé son droit de bailleur, a causé des dommages à dame Aa C et tombe sous le coup de la loi pénale », alors que, selon la branche du moyen, les juges du fond ne peuvent retenir la compétence matérielle d’une juridiction pénale dans un litige commercial dans lequel le bailleur a exercé une prérogative légale ; que le retrait des marchandises de Aa C de la boutique pour la donner à bail à une autre personne constitue une éviction du locataire et non une destruction à propriété mobilière d'autrui ; qu’il n’y a en l'espèce aucune infraction à la loi pénale ;
Qu'’en retenant leur compétence, les juges du fond ont violé la loi et que leur décision encourt cassation de ce chef ;
Mais attendu que sous le grief non fondé de violation des articles 132 de l’Acte Uniforme sur le droit commercial général et 772 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administration et des comptes, la branche du moyen tend à remettre en débat les faits souverainement appréciés par les juges du fond ;
Qu'elle est irrecevable ;
Troisième et quatrième branches réunies : violation du principe d’adéquation entre le préjudice et la réparation et de la contradiction entre motifs et dispositif
Attendu qu’il est reproché à l'arrêt attaqué la violation du principe d’adéquation entre préjudice et réparation d’une part, et la contradiction entre motifs et dispositif, d’autre part, en ce que, les juges d’appel ont condamné Ab B A à payer à Aa C une somme forfaitaire de sept millions (7 000 000) francs CFA à titre de dommages-intérêts et pour toutes causes de préjudice confondues aux motifs « qu’il y a lieu de condamner le sieur Ab B A à une somme forfaitaire de francs CFA 7 000 000 à titre de dommages et intérêts et pour toutes causes de préjudices confondues … que par procès- verbal d'inventaire en dates des 27 juin et 04 juillet 2011, maître Romain P. AKELE a énuméré les produits sortis de la boutique de dame Aa C … qu’en conséquence, les photos non signées de l’huissier ne peuvent faire foi et servir à évaluer les dommages subis ... que face à ces insuffisances … la cour ne dispose pas de document fiable pouvant lui permettre d’évaluer avec précision les dommages subis par dame Aa C », alors que, selon les branches du moyen, il est un principe de droit qu’il doit y avoir nécessairement et absolument une adéquation entre le préjudice et la réparation ; que les motifs doivent être en harmonie entre eux-mêmes d’une part, et avec le dispositif, d'autre part ; que les juges d'appel ont relevé dans un premier temps que la défenderesse ne dispose d’aucune preuve pour soutenir sa demande de dommages et intérêts cependant qu’ils ont fini par y faire droit ;
Qu'il en résulte une inadéquation entre le préjudice et la réparation, d’où une contradiction de motifs ;
Que l'arrêt attaqué encourt cassation de ce chef ;
Attendu en effet, que l’article 499 du code de procédure pénale dispose : « tout jugement doit contenir des motifs et un dispositif. Les motifs constituent la base de la décision » ;
Que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ;
Qu’en l’espèce, les juges d’appel ont confirmé le jugement entrepris qui a déclaré Ab B A coupable de la contravention de dommage à propriété mobilière d’autrui ; que statuant sur les intérêts civils, ils ont constaté l'insuffisance de preuve pour évaluer les préjudices subis par Aa C et ont condamné le prévenu à une somme forfaitaire de sept millions (7 000 000) francs CFA à titre de dommages-intérêts pour toutes causes de préjudice confondues ;
Que la cour d’appel ne pouvait pas sans se contredire, après avoir constaté l’insuffisance de preuve des préjudices subis par Aa C, relever le montant des préjudices retenu par le premier juge et condamner Ab B A à sept millions (7 000 000) F CFA de dommages-intérêts ;
Qu'en outre, la condamnation de Ab B A à un montant ‘ “forfaitaire” à titre de dommages-intérêts n’est pas conforme au principe de la réparation intégrale des dommages subis selon lequel tout le préjudice mais rien que le préjudice doit être réparé ;
Qu’en statuant ainsi qu’elle l’a fait, la cour d’appel a usé de motifs contradictoires équivalents à un défaut de motifs et n’a pas donné une base légale à sa décision ;
Qu'il y a lieu de casser et d'annuler l’arrêt attaqué uniquement sur les intérêts civils ;
PAR CES MOTIFS
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
AU FOND
Casse et annule l’arrêt n°246/15 rendu le 31 juillet 2015 par la chambre correctionnelle de la cour d’appel de Cotonou uniquement sur les intérêts civils ;
Renvoie la cause et les parties devant la cour d’appel de Cotonou autrement composée ;
Met les frais à la charge du Trésor public.
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême, au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au procureur général près la cour d’appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême composée de : Michèle O. A. CARRENA ADOSSOU, conseiller à la chambre judiciaire, PRESIDENT ; André V. SAGBO et Georges TOUMATOU, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du vendredi quatorze janvier deux mille vingt-deux, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de : Saturnin AFATON, AVOCAT GENERAL ; Osséni SEIDOU BAGUIRI, GREFFIER ;
Et ont signé
Le président, Le rapporteur,
Michèle O. A. CARRENA ADOSSOU Georges TOUMATOU
Le greffier.
Osséni SEIDOU BAGUIRI


Synthèse
Numéro d'arrêt : 001/CJ-P
Date de la décision : 14/01/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bj;cour.supreme;arret;2022-01-14;001.cj.p ?
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