N°56/CJ-P DU REPERTOIRE ; N°2021-24/CJ-P DU GREFFE ; ARRET DU 10 JUIN 2022; AFFAIRE : A C (ME GUSTAVE A. X) C/ MINISTERE PUBLIC ET L’AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR (AJT).
Droit pénal — Pourvoi en cassation — Violation de la loi - Jugement d’incompétence — Computation du délai de prorogation du mandat de dépôt
Défaut de motivation — Demande de mise en liberté provisoire — Acte instruction
Ne viole pas la loi, le juge des libertés et de la détention qui, saisi après un jugement d’incompétence, décompte le délai de prorogation du mandat de dépôt de l’inculpé à partir de la date du mandat par lui émis et non à partir de celle du mandat de dépôt antérieurement décerné par le procureur de la République
N’est pas reprochable du grief de défaut de motivation, le juge des libertés et de la détention qui rejette une demande de mise en liberté au motif que la détention de l’inculpé est encore nécessaire pour la réalisation par le juge d’instruction d’autres actes.
La Cour,
Vu l’acte n°003 du 20 juillet 2020 du greffe de la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) par lequel maître Gustave ANANI CASSA, conseil de A C, a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°003/CRIET/CA/SLD rendu le 16 juillet 2020 par la section des libertés et de la détention de la chambre des appels de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n° 2004-07 du 23 octobre 2007 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n° 2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi 10 juin 2022 le conseiller André Vignon SAGBO en son rapport ;
Ouï l’avocat général Nicolas BIAO en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°003 du 20 juillet 2020 du greffe de la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET), maître Gustave ANANI CASSA, conseil de A C, a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°003/CRIET/CA/SLD rendu le 16 juillet 2020 par la section des libertés et de la détention de la chambre des appels de cette cour ;
Que par lettre n°1594/GCS du 05 mars 2021 du greffe de la Cour suprême, maître Gustave ANANI CASSA a été invité à produire ses moyens de cassation dans le délai d’un (01) mois, conformément aux dispositions des articles 12 et 13 de la loi n°2004-20 du 17 août 2007 portant règles de procédures applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Que les mémoires ampliatif et en défense ont été produits ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ;
Qu'il convient de le déclarer recevable ;
AU FOND
Faits et Procédure
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que A C voulant se rendre en Belgique, s’est fait établir à Cotonou avec l’aide de Aa B courant 2019, un faux passeport de service et un ordre de mission qui la faisait passer pour un médecin pédiatre ;
Qu’interpellée à l'aéroport de Ab au Niger en possession desdits faux documents de voyage, elle a été poursuivie en flagrant délit des faits de faux et usage de faux en écriture publique, escroquerie et placée sous mandat de dépôt le 13 décembre 2019 ;
Que la chambre de jugement saisie s'est déclarée incompétente et a renvoyé le ministère public à mieux se pourvoir
Qu’une information a été ouverte et A C a été placée le 24 janvier 2020 en détention provisoire par la chambre des libertés et de la détention de la cour sur saisine de la commission d’instruction ;
Que le conseil de la demanderesse au pourvoi a saisi la chambre des libertés et de la détention de la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) d’une demande de mise en liberté provisoire qui a été rejetée suivant ordonnance du 10 juin 2020 ;
Que sur appel de A C, la section des libertés et de la détention de la chambre des appels de la CRIET a par arrêt n°003/CRIET/CA/SLD du 16 juillet 2020, confirmé la décision de rejet de la demande de mise en liberté provisoire ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION Sur le premier moyen tiré de la violation de l’article 147 du code de procédure pénale
Attendu qu'il est fait grief à l’arrêt attaqué de la violation des dispositions de l’article 147 du code de procédure pénale en ce que la section des libertés et de la détention de la chambre des appels de la CRIET a rejeté la demande de mise en liberté provisoire de la demanderesse au pourvoi au motif qu’elle a feint de constater l’expiration de la durée légale de six (06) mois, en l'espèce le 05 juin 2020, alors que, selon le moyen, le mandat de dépôt du 04 décembre 2019 décerné contre l’inculpée n'ayant pas été prorogé à bonne date, est devenu caduc, induisant de facto la mise en liberté d’office de celle-ci ;
Que par ailleurs, « au regard des visas et des motifs illégitimes, il est aisé de constater que la commission d'instruction, seule habilitée à saisir le juge des libertés et de la détention … ; s’est malheureusement auto saisie … donc illégalement …» ;
Qu’en statuant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges de la section des libertés et de la détention de la chambre des appels de la CRIET ont violé la loi ;
Que leur décision encourt cassation de ce chef ;
Mais attendu qu'aux termes des dispositions de l’article 483 alinéa 1er du code de procédure pénale : « si le fait déféré au tribunal est de nature à entraîner une peine criminelle, le tribunal peut, le ministère public entendu, décerner mandat de dépôt contre le prévenu puis il renvoie le ministère public à se pourvoir ainsi qu’il avisera » ;
Que comparaissant devant la chambre de jugement de la cour, elle s'est déclarée incompétente et a renvoyé le ministère public à mieux se pourvoir ;
Qu'une information a été ouverte contre A C qui a été placée en détention provisoire le 24 janvier 2020 par la chambre des libertés et de la détention de la cour sur saisine de la commission d’instruction ;
Que la détention provisoire de l’inculipée A C a été régulièrement prorogée pour compter du 23 juillet 2020 puis du 23 janvier 2021 sur saisine de la chambre des libertés et de la détention par la commission d'instruction de la CRIET ;
Qu’avis des ordonnances de prorogation a été donné à l’inculpée comme en fait foi sa signature sur lesdites ordonnances ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen tiré de la violation du principe du contradictoire
Attendu qu’il est reproché à l'arrêt entrepris la violation de l’article 147 alinéa 3 du code de procédure pénale en ce que le principe du contradictoire n’a pas été respecté en son exigence faite à la chambre des libertés et de la détention, de requérir les observations de l’inculpé ou de son conseil avant toute prorogation de détention provisoire, alors que, selon le moyen, « à la date d'expiration de la durée légale de six (06) mois, en l'espèce le 05 juin 2020, au terme de laquelle le mandat de dépôt des inculpés était devenu caduc, la constitution d’avocat.…… était pourtant déjà acquise.……, aux côtés des inculpés ; mais malheureusement, aucune communication du dossier, ni avis, ne lui a été faite.……, les visas de l’ordonnance incriminée le prouvent à suffire » ;
Qu’en statuant comme ils l’ont fait, les juges de la section de libertés et de la détention de la CRIET exposent leur décision à cassation ;
Mais attendu que les alinéas 3 et 4 de l’article 13 nouveau de la loi n°2020-17 du 17 février 2020 modifiant et complétant la loi n°2001-37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin telle que modifiée par la loi n°2018-13 du 02 juillet 2018 relative à la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET ) disposent : « les décisions de la chambre des libertés et de la détention sont susceptibles d'appel dans les conditions, modalités, formes et délais prescrits au code de procédure pénale.
L'appel est jugé sur pièces, par une session des libertés et de la détention de la chambre d'appel » ;
Que l’arrêt n°003/CRIET/CA/SLD du 16 juillet 2020 dont pourvoi a mentionné dans ses visas, les pièces qui ont renseigné sur le respect du principe du contradictoire ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le troisième moyen tiré du défaut de motivation
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt entrepris du défaut de motivation au rejet de la demande de mise en liberté provisoire de A C en ce que la section des libertés et de la détention de la chambre des appels de la CRIET a confirmé en toutes ses dispositions, l'ordonnance de rejet querellée rendue par la chambre des libertés et de la détention de ladite cour, alors que, selon le moyen, il est fait obligation au juge de motiver sa décision en lui donnant ainsi une base légale ;
Qu’en statuant ainsi qu’ils l’ont fait, les juges de la section des libertés et de la détention de la chambre des appels de la CRIET exposent leur décision à cassation ;
Mais attendu qu’au sens des dispositions de l’article 499 alinéa 1er du code de procédure pénale « tout jugement doit contenir des motifs et un dispositif. Les motifs constituent la base de la décision » ;
Qu'en mentionnant dans la motivation de leur arrêt « que la détention de l'incuipé A C est encore nécessaire pour la réalisation des actes d'instruction ultérieurs ;
que cette motivation de rejet est conforme à la loi en ce qu’elle énonce des considérations de fait et de droit », les juges de la section des libertés et de la détention de la chambre des appels de la CRIET ne sont pas reprochables du grief du défaut de motivation ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Le rejette quant au fond ;
Met les frais à la charge du Trésor public.
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême, au procureur spécial près la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) ainsi qu’aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au procureur spécial près la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme (CRIET) ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême composée de : Sourou Innocent AVOGNON, président de la chambre judiciaire, PRESIDENT; Vignon André SAGBO et Badirou O. LAWANI, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du vendredi dix juin deux mille vingt-deux, la Cour étant composée comme il est dit ci-dessus en présence de : Nicolas BIAO, AVOCAT GENERAL; Osséni SEIDOU BAGUIRI, GREFFIER ;
Et ont signé
Le président, Le rapporteur,
Sourou Innocent AVOGNON Vignon André SAGBO
Le greffier.
Osséni SEIDOU BAGUIRI