N°118/CJ-DF DU REPERTOIRE ; N°2021-118/CJ-DF DU GREFFE ; ARRET DU 09 DECEMBRE 2022 ; AFFAIRE : Ad AK AG AJ X AH, MADELEINE ASSOGBA ET FELICITE ASSONGBA.
Droit foncier — Défaut de base légale — Disposition coutumière discriminatoire et contraire à l’ordre public — Application du code des personnes et de la famille — Rejet.
N’est pas fondé, le moyen tiré du défaut de base légale, lorsque les juges du fond ont écarté une disposition coutumière discriminatoire et contraire à l’ordre public pour appliquer celles du code des personnes et de la famille.
La Cour,
Vu l’acte n°63/21 du 02 mars 2021 du greffe de la cour d'appel de Cotonou, maître Olga ANASSIDE, conseil de Ad AK AG a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°07/1CH-DPF-21 rendu le 02 février 2021 par la première chambre civile de droit de propriété foncière de cette cour ;
Vu la transmission du dossier à la Cour suprême ;
Vu l’arrêt attaqué ;
Vu la loi n°2022-10 du 27 juin 2022 portant composition, organisation, fonctionnement et attributions de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2022-12 du 5 juillet 2022 portant règles particulières de procédure applicables devant les formations juridictionnelles de la Cour suprême ;
Vu la loi n°2008-07 du 28 février 2011 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes modifiée et complétée par la loi n°2016-16 du 28 juillet 2016 ;
Vu la loi n° 2013-01 du 14 août 2013 portant code foncier et domanial en République du Bénin modifiée et complétée par la loi n°2017-15 du 10 août 2017 ;
Vu les pièces du dossier ;
Ouï à l’audience publique du vendredi neuf décembre deux- mil vingt-deux, le conseiller Marie-José PATHINVO en son rapport ;
Ouï le premier avocat général Pierre Nicolas BIAO en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que suivant l’acte n°63/21 du 02 mars 2021 du greffe de la cour d'appel de Cotonou, maître Olga ANASSIDE, conseil de Ad AK AG a déclaré élever pourvoi en cassation contre les dispositions de l’arrêt n°07/1CH-DPF-21 rendu le 02 février 2021 par la première chambre civile de droit de propriété foncière de cette cour ;
Que par lettres numéros 7971, 7972, 7973, 7974 et 7975/GCS du18 novembre 2021 du greffe de la Cour suprême, le demandeur au pourvoi et ses conseils, maîtres Césaire SANVI, Jean Claude GBOGBLENOU, Rosalie DEMAGNITCHE et Olga ANASSIDE ont été invités à consigner dans le délai de quinze (15) jours, sous peine déchéance et à produire leurs moyens de cassation dans le délai de deux (02) mois, le tout, conformément aux dispositions des articles 931 alinéa 1” et 933 alinéa 2 du code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes ;
Que la consignation a été faite et les mémoires ampliatif et en défense produits ;
Que le procureur général a pris ses conclusions, lesquelles ont été communiquées aux parties pour leurs observations ;
Que seule la Société Civile Professionnelle d’Avocats D2A, l’un des conseils du demandeur au pourvoi a produit ses observations qui sont versées au dossier ;
EN LA FORME
Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans la forme et délai de la loi ;
Qu'il convient de le déclarer recevable ;
Sur le moyen tiré de l’irrecevabilité et le mal fondé du pourvoi de la succession Aa Y Z
Attendu que dans leurs moyens en défense X AH,
l’irrecevabilité au fond du pourvoi de la succession Aa Y Z au motif que celle-ci ne peut prétendre à plus de droits que ses vendeurs que sont AK Ad B AG et B AH, qui, ont été présents au procès et ont acquiescé à la décision rendue ;
Que le pourvoi élevé par la succession Aa Y Z est irrecevable au fond ;
Mais attendu qu’il ressort des pièces du dossier, notamment de la déclaration de pourvoi en date à Cotonou du 1° mars 2021 et de l’acte de pourvoi n° 63/21 du 02 mars 2021, que la succession Aa Y Z n’a pas élevé pourvoi contre la décision querellée ;
Que l’irrecevabilité soulevée est inopérante ;
Attendu que le présent pourvoi a été élevé dans les forme et délai de la loi ;
Qu'il y a lieu de le déclarer recevable ;
AU FOND
Faits et Procédure Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par requête en date du 05 novembre 2005, Aa Y Z a saisi le tribunal de première instance de première classe de Cotonou statuant en matière traditionnelle des biens d’une action en confirmation de droit de propriété contre AK AG et X AH sur un domaine de 04 ha 53 ca sis à Glo-Djigbé dans la commune
Que le tribunal de première instance de deuxième classe d’Abomey- Calavi à qui le dossier a été transmis, après son opérationnalisation, a, par jugement contradictoire n°022/2CB/2012 du 07 septembre 2012, entre autres, confirmé le droit de propriété de Madeleine et Félicité, enfants de feu A B, sur ledit domaine et subséquemment celui de leurs acquéreurs dont Ac C ;
Que sur appels de Aa Y Z, maître Gracia NOUTAIS HOLO et Sylvestre DJO ABOUTOU, la cour d’appel de Cotonou a rendu l’arrêt confirmatif n°07/1CH.DPF-21 du 02 février 2021 ;
Que c'est cet arrêt qui est l’objet du présent pourvoi ;
DISCUSSION
Sur le moyen unique tiré du défaut de base légale
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, le défaut de base légale en ce que les juges d'appel ont confirmé le jugement n°022/2CB/2012 du 07 septembre 2012, au motif que «lorsqu'un ensemble de règles et principes coutumiers comporte des dispositions discriminatoires, contraires à l’ordre public et aux bonnes mœurs, il cesse d’avoir force de loi », alors que, selon le moyen, les juges d’appel sont invités à un supplément d’instruction pour rendre leur décision ; que suite au partage du domaine de feu AG, la cour d’appel, en ne recherchant pas si d’une part, les héritières Félicité et Ab B A ont reçu leur part et n’en n’ont jamais été privées et d’autre part, si le domaine de 4 ha cédé à feu Aa AI fait partie de la propriété de Ad AK AG et de X AH , a privé sa décision de base légale et l’'expose de ce chef à cassation ;
Mais attendu qu’il est mentionné dans l’arrêt querellé que « la coutume est un ensemble de règles qui ont été spontanément adoptées par des groupes de personnes qui se prévalent d’un usage constant ; que c’est tirant leçon des conséquences néfastes notamment les conflits et fissures de la cellule familiale de certains principes coutumiers que le législateur béninois dans la loi n°2002- 07 portant code des personnes et de la famille en son article 1030 dispose «les coutumes cessent d'avoir force de loi en toutes matières régies par le présent code …que feu A B avait laissé à son décès …les nommées A Ab et A Ae et un domaine de 04 ha 40 a 60 ca ; qu’en application de la coutume AÏZO …, ce domaine a été attribué aux frères du de cujus que sont les nommés AK AG Ad et AH X ; qu’il en résulte que les intimés ont été privées du droit d’héritage du domaine propriété de leur père.… ; qu’une telle disposition coutumière est non seulement discriminatoire mais attentatoire à l’ordre public ;.…. que les biens du de cujus qu’ils soient mobiliers ou immobiliers sont dévolus à ses descendants quel que soit leur sexe ; que les nommées A Ab et Félicité étant les seules descendantes de feu A B, sont donc les successibles au premier rang et ont vocation à recueillir tous les biens mobiliers et immobiliers de la succession ; …… que le premier juge en annulant toutes les ventes consenties sur le domaine par les appelants et en confirmant le droit de propriété des intimées sur ledit domaine, a fait une bonne appréciation des faits de la cause » ;
Qu’en statuant ainsi, les juges d'appel ont légalement justifié leur décision ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
Rejette le moyen tiré de l’irrecevabilité du pourvoi ;
Reçoit en la forme le présent pourvoi ;
Le rejette quant au fond ;
Dit que la consignation faite est acquise au Trésor public ;
Met les frais à la charge de Ad AK AG ;
Ordonne la notification du présent arrêt au procureur général près la Cour suprême ainsi qu'aux parties ;
Ordonne la transmission en retour du dossier au greffier en chef de la cour d’appel de Cotonou ;
Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême (Chambre judiciaire) composée de :
André Vignon SAGBO, Conseiller, PRESIDENT ;
Ismaël Anselme SANOUSSI et Marie-José PATHINVO, CONSEILLERS ;
Et prononcé à l’audience publique du vendredi neuf décembre deux mil vingt-deux, la Cour étant composée comme il est dit ci- dessus en présence de :
Pierre Nicolas BIAO, premier avocat général, MINISTERE PUBLIC ;
Kodjihounkan Appolinaire AFFEWE, GREFFIER ;
Et ont signé
Le président, Le rapporteur,
André Vignon SAGBO Marie-José PATHINVO
Le greffier.
Kodjihounkan Appolinaire AFFEWE