La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/10/2007 | BURKINA FASO | N°139

Burkina Faso | Burkina Faso, Cour d'appel de ouagadougou, 19 octobre 2007, 139


Texte (pseudonymisé)
En l’espèce, le débiteur ne conteste pas la créance issue d’une vente de produits pétroliers, mais critique plutôt les pièces produites par le créancier à l'appui de sa requête aux fins d'injonction de payer. Cependant, les pièces produites au dossier (relevé du détail des factures échues accompagné des factures elles-mêmes, états d'enlèvement mensuels ainsi les effets de commerce revenus impayés) suffisent amplement pour asseoir le caractère de certitude, de liquidité et d'exigibilité de la créance.
Concernant le bénéfice d'un délai de grâce au motif d’une

situation financière déjà fragilisée, le débiteur n'apporte ni n'offre d'apporter ...

En l’espèce, le débiteur ne conteste pas la créance issue d’une vente de produits pétroliers, mais critique plutôt les pièces produites par le créancier à l'appui de sa requête aux fins d'injonction de payer. Cependant, les pièces produites au dossier (relevé du détail des factures échues accompagné des factures elles-mêmes, états d'enlèvement mensuels ainsi les effets de commerce revenus impayés) suffisent amplement pour asseoir le caractère de certitude, de liquidité et d'exigibilité de la créance.
Concernant le bénéfice d'un délai de grâce au motif d’une situation financière déjà fragilisée, le débiteur n'apporte ni n'offre d'apporter la preuve d'une telle situation à même de fonder le bénéfice de cette mesure.
La mise en demeure résulte indubitablement de toute manifestation de volonté réclamant le paiement adressée au débiteur et reçue par ce dernier. Le débiteur ne conteste pas avoir reçu une lettre ayant en objet « mise en demeure » de laquelle il ressort une interpellation suffisante d'avoir à s'acquitter de sa dette. Il convient dès lors d'infirmer le jugement attaqué en ce qu’il a rejeté la demande du créancier portant sur les intérêts de droit au motif que la preuve d'une mise en demeure préalable à son débiteur n'a pas été rapportée.
Selon les dispositions de l'article 192 du Règlement UEMOA relatif aux systèmes de paiement, le porteur d'une lettre de change peut réclamer à celui contre lequel il exerce son recours outre le montant de la lettre de change non payée avec les intérêts qu'il en a été stipulés, les intérêts au taux légal à partir de l'échéance, les frais de protêt, ceux des avis donnés ainsi que les autres frais. Il convient dès lors d'infirmer le jugement querellé sur ce point en condamnant le débiteur au remboursement des frais de banque.
ARTICLE 4 AUPSRVE ARTICLE 15 AUPSRVE ARTICLE 39 AUPSRVE ARTICLE 263 AUDCG ARTICLE 550 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ ARTICLE 192 REGLEMENT UEMOA RELATIF AUX SYSTEMES DE PAIEMENT
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU, Chambre commerciale (B A), Arrêt
n° 139 du 19 octobre 2007, Aa Ab c/ SONABHY)
LA COUR,
FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte d'huissier en date du 13 mars 2006 signifié à la SONABHY et déposé au greffe de la Cour d'appel de Ouagadougou, la Société Fadoul Technibois a interjeté appel du jugement en date du 22 février 2006 rendu par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou en ces termes : « Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en premier ressort ; Déclare la Société Fadoul Technibois recevable en son opposition la déclare fondée ; En conséquence condamne la Société Fadoul Technibois à payer à la SONABHY la somme de six cent soixante dix huit millions huit cent quatre vingt douze mille (678.892.000) francs CFA en principal, outre les intérêts de droit à compter de la présente décision ; Déboute la SONABHY de sa demande ; Déboute la Société Fadoul Technibois de sa demande de paiement échelonné ; Condamne la Société Fadoul Technibois aux dépens ».
La Société Fadoul Technibois fait valoir que la décision du premier juge confirmant l'ordonnance d'injonction de payer n° 269/2005 du 12 août 2005 est irrégulière en droit au regard des dispositions pertinentes de l'Acte uniforme OHADA sur les procédures simplifiées de recouvrement ; qu'en effet il résulte de l'article 4 alinéa 2 de l'Acte uniforme que la requête afin d'injonction de payer contient à peine d'irrecevabilité « l'indication précise de la somme réclamée avec le décompte des différents éléments de la créance ainsi que le fondement de celle-ci ; elle est accompagnée des documents justificatifs en originaux ou en copies certifiées conformes » ; que pour tous justificatifs de sa créance, la SONABHY a produit d'une part, un relevé de facture datée du 18 juillet 2005 et d'autre part deux lettres datées du 28 février 2005 et du 1er avril 2005 relatives à des rejets de traites échues de février et mars 2005 ; que ces documents ne valent pas pièces justificatives au sens de l'article 4 alinéa 2 précité que la requête est par conséquent irrecevable.
L'appelante soutient par ailleurs que la SONABHY réclame outre le principal, de prétendus intérêts évalués de manière unilatérale à 6 % ; qu'en matière de vente commerciale, l'article 263 alinéa 2 de l'Acte uniforme sur le droit commercial général dispose que les intérêts légaux courent à compter de l'envoi d'une mise en demeure à l'autre partie par lettre recommandée avec accusée de réception, ou par tout autre moyen écrit ; qu'il n'a été versé à l'appui de la requête une telle lettre dite de mise en demeure. La Société Fadoul Technibois sollicite, à titre purement subsidiaire, que des termes et délais de 12 mois lui soit accordés conformément à l'article 39 alinéa 2 de l'Acte uniforme sur le recouvrement simplifié et voies d'exécution ; qu'elle ne peut faire face au paiement de la somme de six cent quatre vingt dix neuf millions quatre cent cinquante mille neuf cent vingt neuf (699.450.929) francs dans un délai très court sans compromettre irrémédiablement sa situation déjà fragilisée.
En réplique la SONABHY expose qu'elle est créancière de la somme de six cent soixante dix huit millions huit cent quatre vingt douze mille (678.892.000) francs CFA en principal,
représentant le montant total des ventes de produits pétroliers à la Société Fadoul Technibois pour la période 2004-2005 ; que cette créance est matérialisée par des factures et des avis de rejet de traites tirées sur la Société Fadoul Technibois en paiement d'une partie du prix des produits ; que c'est après avoir vainement réclamé le paiement de sa créance qu'elle a initié une procédure d'injonction de payer sanctionnée par le jugement querellé ; que la Société Fadoul Technibois bien que ne contestant pas les factures relatives à la livraison des produits pétroliers à elle faite, estime que lesdites factures ne valent pas pièces justificatives ; que cependant, les factures commerciales adressées au débiteur et non acquittées justifient amplement le recours à la procédure d'injonction de payer ; qu'il plaira dès lors à la Cour de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné l'appelante à lui payer la somme de six cent soixante dix huit millions huit cent quatre vingt douze mille (678.892.000) francs CFA tout en rejetant sa demande de termes et délais.
La SONABHY fait valoir qu'elle entend former incidemment appel contre le jugement querellé, lui reprochant premièrement de n'avoir pas condamné la Société Fadoul au paiement des intérêts de droit et deuxièmement d'avoir rejeté sa demande en paiement des frais de banque. L'intimée soutient que c'est à tort que la Société Fadoul invoque l'article 263 alinéa 2 de l'Acte uniforme sur le droit commercial général, suivie en cela par le premier juge qui a rejeté sa demande portant sur les intérêts au motif que la preuve d'une mise en demeure préalable à son débiteur n'a pas été rapportée et alors même qu'il est versé au dossier une correspondance en date du 13 juillet 2005 intitulée mise en demeure. S'agissant des frais de banque réclamés, la SONABHY explique que la Société Fadoul ne conteste pas le montant des deux traites revenues impayées, ce qui a engendré des frais constitués de frais d'escompte sur effets impayés mis à sa charge ; que dès lors elle est fondée à réclamer à son débiteur ces frais de banque à elle imputés et d'un montant de trois millions six cent trente trois mille sept cent deux (3.633.702) francs CFA, soit un million huit cent seize mille huit cent quatre vingt deux (1.816.882) francs CFA par traite impayée. Enfin l'intimé sollicite la condamnation de la Société Fadoul à lui payer la somme de cinq millions (5.000.000) de francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens conformément à l'article 6 nouveau alinéa 2 de la loi portant organisation judiciaire au B A, qu'en effet elle a exposé, par la faute de sa débitrice de mauvaise foi, des frais irrépétitibles consistant essentiellement aux honoraires d'avocats.
DISCUSSION
SUR LA FORME
Attendu que l'appel de la Société Fadoul Technibois est recevable pour avoir été interjeté dans le délai et la forme prescrite respectivement aux articles 15 de l'Acte uniforme portant recouvrement simplifié et voies d'exécution et 550 du code de procédure civile ;
AU FOND
Sur la créance
Attendu que la Société Fadoul Technibois ne conteste pas devoir la somme de somme de six cent soixante dix huit millions huit cent quatre vingt douze mille (678.892.000) francs CFA à la SONABHY auprès de laquelle elle se fournissait en carburant pour ses chantiers ; qu'elle
critique plutôt les pièces produites par son fournisseur à l'appui de sa requête aux fins d'injonction de payer ; Mais attendu que le relevé du détail des factures échues accompagné des factures elles-mêmes, des états d'enlèvement mensuels en droitures ainsi que les effets de commerce revenus impayés, produits au dossier, suffisent amplement pour asseoir le caractère de certitude, de liquidité et d'exigibilité de la créance de la SONABHY évaluée en principal à la somme de six cent soixante dix huit millions huit cent quatre vingt douze mille (678.892.000) francs CFA ;
Attendu que la Société Fadoul Technibois sollicite le bénéfice d'un délai de grâce de douze (12) mois pour le paiement de sa dette en alléguant une situation financière déjà fragilisée ; Mais attendu qu'elle n'apporte ni n'offre d'apporter la preuve d'une telle situation à même de fonder le bénéfice de cette mesure ; que c'est à bon droit que le premier juge a rejeté sa demande ;
Sur les intérêts de droit
Attendu qu'il est versé au dossier une correspondance datée du 13 juillet 2005 ayant en objet « mise en demeure » adressée par la SONABHY à la Société Fadoul Technibois et ainsi libellée : « Suite à notre lettre ci-dessus référenciée restée sans réaction de votre part à ce jour, nous vous mettons en demeure de bien vouloir procéder au règlement intégral de vos impayés s'élevant à la somme de six cent soixante dix huit millions huit cent quatre vingt douze mille (678.892.000) francs CFA correspondant à vos enlèvements d'hydrocarbures » ; Attendu que le débiteur ne conteste pas avoir reçu cette lettre de laquelle il ressort une interpellation suffisante d'avoir à s'acquitter de sa dette ; que la mise en demeure résulte indubitablement de toute manifestation de volonté réclamant le paiement adressée au débiteur et reçue par ce dernier ; Attendu qu'il convient dès lors d'infirmer le jugement attaqué en condamnant la Société Fadoul à payer à la SONABHY, outre le principal, les intérêts de droit pour compter du 13 juillet 2005, date de mise en demeure ;
Sur les frais de banque
Attendu que c'est à bon droit que la SONABHY réclame les frais d'escompte sur les effets d'un montant de cinquante trois millions quatre vingt treize mille deux cents (53.093.200) francs CFA chacun arrivé à échéance le 15 février 2005 et le 15 mars 2005 et revenus impayés ; Attendu en effet que le banquier perçoit à l'occasion de l'escompte un intérêt calculé en fonction du temps à courir entre le jour de l'opération et l'échéance de l'effet ; qu'en outre différentes commissions sont perçus pour rémunérer les services rendus au client ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que les frais occasionnés par chaque lettre de change impayée ont été évalués à un million huit cent seize mille huit cent quatre vingt un (1.816.881) francs soit un million quatre cent soixante trois (1.460.063) francs d'intérêts, soixante neuf mille six cent soixante sept (69.667) francs de commission, deux cent soixante dix huit mille trois cent cinquante un (278.351) francs de TVA, dix mille (10.000) francs de commission impayée et mille huit cent (1.800) francs de taxes ;
Attendu que selon les dispositions de l'article 192 du Règlement n° 15/2002/CM/UEMOA relatif aux systèmes de paiement dans les Etats membres, le porteur d'une lettre de change
peut réclamer à celui contre lequel il exerce son recours outre le montant de la lettre de change non payée avec les intérêts qu'il en a été stipulés, les intérêts au taux légal à partir de l'échéance, les frais de protêt, ceux des avis donnés ainsi que les autres frais ; Attendu qu'il convient dès lors d'infirmer le jugement querellé sur ce point en condamnant la Société Fadoul Technibois au remboursement de ces frais évalués pour l'ensemble des effets à trois millions six cent trente trois mille sept cent deux (3.633.702) francs CFA ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens
Attendu qu'en vertu de l'alinéa 2 et suivants de l'article 6 de la loi 10-93 portant organisation judiciaire au B A, le juge peut, dans toutes les instances, sur demande expresse et motivée, condamner la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens que le juge n'est pas lié par la convention entre le justiciable et son avocat ;
Attendu que la SONABHY réclame la somme de cinq millions (5.000.000) de francs à ce titre ; Attendu que s'il est indéniable que la requérante s'est attachée les services d'un avocat conseil pour défendre ses intérêts avec comme corollaire des frais d'honoraires, il reste néanmoins que le montant réclamé est excessif et non justifié ; Attendu qu'il y a lieu, conformément au barème indicatif des frais et honoraires des avocats adopté le 20 décembre 2003 par l'assemblée générale des avocats, en son article 33, de condamner la Société Fadoul Technibois à lui payer la somme de quatre cent mille (400.000) francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort ;
Déclare l'appel de Aa Ab recevable ;
Infirme le jugement en ce qu'il a rejeté la demande portant sur les intérêts de droit et les frais de banque ; Condamne Aa Ab à payer à la SONABHY la somme de trois millions six cent trente trois mille sept cent deux (3.633.702) francs au titre des frais de banque outre les intérêts de droit pour compter du 13 juillet 2005 date de mise en demeure ; Confirme les autres dispositions du jugement ; Condamne Aa Ab à payer à la SONABHY la somme de quatre cents mille (400.000) francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; Condamne l'appelant aux dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de ouagadougou
Numéro d'arrêt : 139
Date de la décision : 19/10/2007

Analyses

PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES - INJONCTION DE PAYER - DECISION D'INJONCTION DE PAYER RENDUE SUR OPPOSITION - DEMANDE DE PAIEMENT ECHELONNE - REJET - APPEL - RECEVABILITE (OUI) VENTES DE PRODUITS PETROLIERS - CREANCE - NON CONTESTATION - REQUETE AUX FINS D'INJONCTION DE PAYER - PIECES PRODUITES - DETAIL DES FACTURES ECHUES - ETATS D'ENLEVEMENT MENSUELS - TRAITES REVENUES IMPAYEES - CREANCE CERTAINE, LIQUIDE ET EXIGIBLE (OUI) - DEMANDE DE TERMES ET DELAI - SITUATION FINANCIERE FRAGILE - DEFAUT DE PREUVE DU DEBITEUR - DELAI DE GRACE (NON) - CONFIRMATION DU JUGEMENT APPEL INCIDENT - DEMANDES DE PAIEMENT - INTERETS DE DROIT - ARTICLE 263 AUDCG - MISE EN DEMEURE PREALABLE - EXISTENCE DE PREUVE - PAIEMENT DES INTERETS (OUI) - FRAIS DE BANQUE - LETTRE DE CHANGE - RECOURS FAUTE DE PAIEMENT - ARTICLE 192 REGLEMENT UEMOA (SYSTEMES DE PAIEMENT) - REMBOURSEMENT DES FRAIS (OUI) - INFIRMATION DU JUGEMENT


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bf;cour.appel.ouagadougou;arret;2007-10-19;139 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award