ARTICLE 13 AUA ARTICLE 179 AUSCGIE ARTICLE 23 TRAITE OHADA ARTICLE 1134 CODE CIVIL BURKINABÈ ARTICLE 1184 CODE CIVIL BURKINABÈ ARTICLE 1583 CODE CIVIL BURKINABÈ ARTICLE 1650 CODE CIVIL BURKINABÈ ARTICLE 1654 CODE CIVIL BURKINABÈ ARTICLE 1694 CODE CIVIL BURKINABÈ ARTICLE 126 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ ARTICLE 536 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ ARTICLE 544 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ ARTICLE 550 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABÈ
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU, Chambre commerciale (Z A), Arrêt n° 037/09 du 19 juin 2009, Société C X et Société ETISALAT c/ Société PLANOR AFRIQUE et Société TELECEL)
LA COUR,
FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte d'huissier en date du 30 avril 2008 signifié à la société PLANOR AFRIQUE et à la société TELECEL Faso, et déposé au greffe de la Cour d'appel de Ouagadougou, les sociétés C X et ETISELAT ont relevé appel du jugement rendu le 09 avril 2008 par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou en ces termes : « Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort ; En la forme Rejette les exceptions d'incompétences soulevées par les défenderesses à l'instance ; Se déclare compétent ; Au fond Reçoit la société PLANOR AFRIQUE SA en ses demandes comme étant bien fondées ; Ordonne l'exclusion et la cession forcée de l'ensemble des actions détenues par les défenderesses à l'instance dans la société TELECEL FASO SA sur le fondement des articles 9 - 1 à 9 - 3 du pacte d'actionnaires ; Fixe à neuf milliard neuf cent millions deux cent soixante neuf mille trois cent quarante quatre mille (9.900.269.344) francs FCA la valeur de l'ensemble des actions à céder à la société PLANOR AFRIQUE SA ; Autorise la société PLANOR AFRIQUE SA à introduire un nouvel actionnaire majoritaire dans les plus brefs délais dans le capital de la société TELECEL FASO SA afin de se conformer aux obligations imposées par le droit national aux sociétés évoluant dans le domaine des télécommunications ; Condamne les défenderesses à payer à la société PLANOR AFRIQUE SA la somme de quarante millions (40.000.000) au titre des frais non compris dans les dépens ; Déboute les défenderesses de toutes leurs prétentions comme étant mal fondées ; Dit que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire ; Condamne les défenderesses aux dépens. »
C X soulève in limine litis l'incompétence des juges étatiques en faisant valoir que PLANOR Afrique a fondé sa demande sur la clause de rachat forcé énoncée à l'article 9-3A du pacte d'actionnaires conclu entre la société West Africa Growth Fund (WAGF) alors actionnaire de TELECEL FASO signé à Abidjan le 10 février 2004 et auquel B Y est devenue partie d'une part, à la suite de la convention de cession d'actions passée entre elle et C X le 26 août 2004 et, d'autre part en raison de l'accord du 28 août 2004 conclu entre elle et le groupe C X sur le contenu des missions de contrôle à TELECEL FASO intégré audit pacte d'actionnaires ; que ledit pacte stipule en son article 17-2 que « pour les besoins de la résolution de tout différend relatif au pacte, qui ne pourrait être résolu à l'amiable entre les parties, chacune des parties accepte le recours à un arbitre à Dakar (Sénégal), en langue française, suivant le règlement d'arbitrage de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage de l'OHADA (la « Cour ») par un ou plusieurs arbitres nommés conformément à ce règlement » ; qu'il apparaît donc que la seule juridiction compétente est le tribunal arbitral ; que le Tribunal de grande instance est incompétent pour examiner la demande de PLANOR AFRIQUE ; qu'en effet l'article 23 du traité OHADA disposé que « tout tribunal d'un Etat partie saisi d'un litige que les parties étaient convenus de soumettre à l'arbitrage se déclarera incompétent si l'une des parties le demande et le renverra le cas échéant, à la procédure d'arbitrage prévue au présent traité » ; qu'au surplus le tribunal requis de statuer immédiatement sur l'exception d'incompétence ainsi soulevée, est passé outre en joignant l'exception au fond, violant ainsi l'article 126 alinéa 2 du
code de procédure civile qui lui fait obligation de statuer sans délai sur sa compétence s'il en est requis ; qu'au regard de ce qui précède, le jugement attaqué mérite d'être infirmé ;
C X fait valoir, au cas où par extraordinaire, la Cour venait à rejeter les exceptions soulevées que PLANOR AFRIQUE soit déboutée de sa demande pour défaut de base légale ou conventionnelle ; qu'elle prétend fonder son action sur l'article 9-3 du pacte d'actionnaires du 10 février 2004 contenant la clause de rachat forcé ; que cette clause est inapplicable en l'espèce car elle ne concerne uniquement que le rachat forcé des actions détenues par l'actionnaire minoritaire en cas de changement de contrôle au niveau de l'actionnaire majoritaire C X, que cette disposition visait à protéger la société WAGF en cas de changement de contrôle de C X en imposant à cette dernière de lui racheter les actions qu'elle détenait dans TELECEL FASO ; qu'en aucun cas cette disposition ne permet à un actionnaire de demander l'exclusion d'un autre actionnaire en cas de blocage des organes sociaux ;
Reconventionnellement, C X sollicite sur le fondement des articles 1134, 1184, 1650 et 1694 du code civil la résolution pure et simple de la convention de cession d'actions en date du 26 août 2004 signée entre elle et PLANOR AFRIQUE ; qu'en effet la cession portait sur cent dix mille (110.000) actions de TELECEL FASO d'une valeur nominative de dix mille (10.000) francs chacune soit un prix de cession global convenu de deux milliards quatre cent onze millions neuf cent quarante huit mille (2.411.948.000) francs CFA avec des modalités de paiement échelonnées ; qu'en violation flagrante de l'article 4 de la convention de cession PLANOR AFRIQUE refuse de s'acquitter du paiement de la dernière échéance du 30 septembre 2006 qui s'élève à la somme de quatre cent cinquante millions (450.000.000) de franc CFA et alors même qu'elle s'est acquittée, pour sa part, de son obligation en remettant le certificat d'actions à PLANOR AFRIQUE par exploit d'huissier en date du 13 décembre 2006 ; que pour n'avoir pas procédé au paiement de la dernière échéance, le cessionnaire a violé la loi des parties au sens de l'article 1134 du code civil ; que l'article 1654 du même code précise que si l'acheteur ne paie pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la vente ; qu'au surplus, les multiples procédures engagées par PLANOR AFRIQUE et sa résistance injustifiée à payer le reliquat du prix convenu lui ont causé un préjudice énorme ; qu'étant une société commerciale avec un plan d'action d'investissements et de prospection, les violations des termes contractuels par B Y ont entraîné de graves conséquences financières qui ont perturbé énormément ses activités ; que l'allocation à son profit de la somme de neuf cent cinquante millions (950.000.000) francs CFA à titre de dommages-intérêts, sur la base de l'article 1184 alinéa 2 du code civil couvrira les préjudices subis ; qu'il plaira par conséquent à la Cour d'infirmer le jugement sur ce point et par évocation lui allouer l'entier bénéficie desdites demandes ;
C X sollicite, au cas où la Cour venait à passer outre les moyens développés ci-dessus, qu'il soit alors ordonné plutôt l'exclusion de l'actionnaire minoritaire PLANOR AFRIQUE et le rachat de ses actions par l'actionnaire majoritaire ; qu'en pareille circonstance où les deux parties demandent chacune le rachat forcé des actions de l'autre, la jurisprudence ordonne l'exclusion de l'actionnaire à qui il est imputé une faute dans la survenance des difficultés que traverse la société ; qu'en l'espèce, PLANOR AFRIQUE n'a jamais rien fait pour le développement de TELECEL FASO et pour preuve : de première part, elle n'a jamais versé un centime dans son compte courant d'associé pour faire face aux besoins de financement de TELECEL FASO évalués à coût de milliards, de seconde part, dans le cadre de l'exécution de son plan d'investissement TELECEL FASO s'est vue dans l'obligation
de procéder à une augmentation de capital pour renflouer ses caisses, ce à quoi PLANOR AFRIQUE a refusé de souscrire, allant jusqu'à demander en justice l'annulation de la décision d'augmentation, l'obligeant ainsi à souscrire et à libérer seule le montant de trois milliards (3.000.000.000) de francs CFA ; de troisième part, à peine entrée dans la société, PLANOR AFRIQUE a initié depuis 2005 des procédures judiciaires incessantes perturbant ainsi le fonctionnement de TELECEL FASO ; qu'enfin en demandant dans son assignation de l'autoriser à introduire un nouvel actionnaire majoritaire en lieu et place de C X, PLANOR AFRIQUE démontre son incapacité à gérer la société, n'ayant ni les capacités financières, ni l'ingénierie technique pour ce faire ; qu'au contraire C X réunit déjà toutes ces ressources et ne fera que poursuivre son plan d'investissement et d'équipement ; que la doctrine indique qu'en cas de demandes croisées d'exclusion par cession forcée, le juge apprécie en donnant la préférence à celui des associés qui offre le plus de garantie pour le développement de la société ;
C X réclame à PLANOR AFRIQUE, sur le fondement de l'article 6 nouveau de la loi portant organisation judiciaire au Z A, le paiement de la somme de soixante dix millions (70.000.000) de francs CFA représentant les frais non compris dans les dépens que les parties appelantes ont dû exposer pour s'attacher les services d'avocats conseils pour assurer la défense de leurs intérêts ;
La société ETISALAT conclut quant à elle, au principal à l'annulation du jugement entrepris et demande à la Cour, sur évocation, de se déclarer incompétente ; A titre subsidiaire et vu les demandes de la société PLANOR, elle demande à la Cour de dire et juger que celle-ci ne démontre pas l'intérêt qu'elle a à agir à l'encontre de la société ETISALAT relativement à sa demande d'achat forcé des actions détenues par C X dans TELECEL FASO ; dire en conséquence que PLANOR AFRIQUE est irrecevable en ses demandes dirigées contre ETISALAT ; A titre infiniment subsidiaire, dire et juger que les demandes de la société PLANOR sont mal fondées, la condamner aux dépens et au paiement de la somme de dix millions (10.000.000) de francs CFA au titre de l'article 6 de la loi portant organisation judiciaire au Z A, pour avoir été contrainte d'exposer pour sa défense des frais irrépétitibles qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge ;
ETISALAT soutient que le 02 août 2007, PLANOR AFRIQUE et C X se sont réunies sous l'égide du Ministre des Postes, des Technologies de l'Information et de la Communication pour tenter de trouver une solution à ce litige ; qu'à la suite, le 05 septembre 2007, ETISALAT, dont C X est la filiale, et PLANOR AFRIQUE ont signé un protocole d'accord transactionnel en langue anglaise (MOA) dont l'objet était de transiger l'ensemble des litiges en cours entre ces deux sociétés et prévoyait notamment que : - PLANOR AFRIQUE s'engageait à souscrire une augmentation du capital de TELECEL FASO portant sur l'émission de deux cent trente trois mille neuf cent vingt deux (233.922) actions nouvelles et à vendre concomitamment à C X 12% du capital social de TELECEL FASO afin que sa participation finale s'établisse à 33% ; - PLANOR s'engageait à suspendre toutes les procédures judiciaires en cours avec C X et X A et à n'introduire aucune nouvelle procédure ;
ETISALAT expose que le même jour le MOA a été communiqué au Ministre des Postes et Télécommunications qui a estimé que la procédure de fixation du prix de cession à dire
d'expert n'offrait pas une sécurité juridique suffisante et a demandé aux parties de se rapprocher à nouveau afin d'y remédier ; que l'avenant signé le 08 septembre 2007 à la suite de cette demande n'a pas totalement satisfait le Ministre qui a demandé de nouveau aux parties de fixer par avance le prix de cession des actions de TELECEL FASO ; que les 18 et 19 septembre 2007 ETISALAT et B Y se sont rencontrées à Abu Aa et ont négocié le prix de cession des actions ainsi que les modalités de mise en œuvre de leur accord et en ont tenu informé le Ministre des Postes et Télécommunications ; que c'est dans ce contexte que, en violation de ses engagements aux termes du MOA, PLANOR AFRIQUE l'a assignée aussi que C X et X A pour s'entendre ordonner la cession forcée des actions détenues pas ces sociétés dans TELECEL FASO ; que l'article 14 du MOA stipule que tous les litiges afférents au contentieux B Y et ETISALAT, et notamment les litiges relatifs à l'actionnariat de TELECEL FASO, seront résolus de façon exclusive par un tribunal à Paris ; que c'est donc en violation de cette clause que le premier juge a refusé malgré l'injonction claire et précise de l'article 126 alinéa 2 du code de procédure civile, de se prononcer d'abord sur sa compétence ; qu'ensuite il s'est abstenu de répondre au moyen tiré de la violation de l'article 14 du MOA et enfin, il a apprécié l'existence et la validité de la convention d'arbitrage de l'article 17-2 du pacte d'actionnaires du 10 février 2004, en violation de l'article 13 de l'Acte uniforme OHADA sur le droit de l'arbitrage ; qu'il suit de là que le premier juge était manifestement incompétent pour examiner les demandes de PLANOR AFRIQUE ;
En réplique PLANOR AFRIQUE explique que suivant convention en date du 26 août 2004, la société C X lui a cédé 110.000 actions de la société TELECEL FASO moyennant la somme de deux milliards quatre cent onze millions neuf cent quarante huit mille (2.411.948.000) francs CFA et dont elle s'est acquittée à hauteur de un milliard neuf cent soixante un million neuf cent quarante huit millions (1.961.948.000) francs CFA restant ainsi redevable de la somme de quatre cent cinquante millions (450.000.000) de francs CFA arrivée à échéance en septembre 2006 ; que suivant les termes de la convention elle deviendra « propriétaire des actions ainsi cédées et aura la jouissance des droits y attachés à compter de la date des présentes » ; que le 27 août 2004, le Conseil d'Administration de TELECEL FASO a donné son agrément quant à la cession des 44 % des actions d'ATLANTIQUE TELECOM à son profit, tout en lui attribuant la présidence du Conseil d'Administration de TELECEL FASO ; que depuis son entrée dans le capital de la société TELECEL FASO SA, elle fut très vite confrontée à la gestion opaque de C X, l'actionnaire majoritaire, qui ne laissait filtrer aucune information sur la gestion et le fonctionnement de la société, qu'il s'en est alors suivi des procédures judiciaires visant tantôt à obtenir l'audit financier sur la gestion de TELECEL FASO, tantôt la nomination d'un administrateur provisoire, tantôt l'annulation des délibérations d'assemblées générales ordinaires ou extraordinaires ou encore la plainte avec constitution de partie civile contre les dirigeants de X A pour faux et usage de faux ;
PLANOR AFRIQUE fait valoir qu'outre ce contentieux entre actionnaires, la société TELECEL FASO connaissait des difficultés vis-à-vis de l'Etat résultant du non respect du cahier de charges révélées par l'audit du 31 mai 2003 effectué par l'Etat et portant sur plusieurs points allant de l'exécution partielle des obligations de couverture et du déploiement du réseau à la communication à l'Autorité de Régulation des Télécommunication (ARTEL) de faux documents portant sur le contrôle et l'actionnariat de X A, en passant par le non paiement des droits, redevances et contributions prévus malgré la mise en demeure répétée de l’ARTEL ; que cependant, malgré la gravité de ces manquements l'Etat a privilégié la
recherche de solution à même de permettre à la société de poursuivre ses activités et de surmonter à terme ses difficultés et a, par conséquent, répondu favorablement à la requête de cette dernière en signant le 21 août 2006 un protocole d'accord visant à lui permettre d'honorer ses obligations, sur la base d'un calendrier de règlement de ses créances ; que l'état d'exécution au 31 mai 2007 dudit protocole a fait ressortir une exécution non intégrale des engagements pris par X A d'une part, et la modification par l'actionnaire majoritaire C X, sans l'accord préalable du Gouvernement, de l'actionnariat impliquant un changement de contrôle indirect de la société TELECEL FASO ; qu'au regard de ces nouveaux manquements, l'Etat a invité les actionnaires à trouver avant l'échéance du 31 août 2007 une solution définitive à leur différend afin d'éviter le retrait de la licence ; que c'est dans ce contexte que sont intervenus successivement la médiation du Ministre des Postes et de la Communication les 8 et 9 août 2007 sans succès puis le protocole d'accord d'Abu Aa du 05 septembre 2007 entre ETISALAT et B Y qui fut immédiatement notifié le 18 septembre 2007 au Ministre de tutelle ; que depuis cette date, par divers courriers restés sans suite, elle a attiré l'attention de l'actionnaire majoritaire sur les difficultés d'exécution de cette convention en vain, convention qu'il a tenté de remettre en cause en proposant un nouveau projet ; que face à cette nouvelle tergiversation, elle s'est proposée de racheter à C X l'ensemble de ses actions dans X A sans succès ; que c'est dans ces conditions que le 21 novembre 2007 l’ARTEL a mis en demeure pour la dernière fois TELECEL FASO de se conformer aux prescriptions du cahier des charges sous peine de retrait de sa licence et ce avant le 20 décembre 2007 ; que malheureusement X A n'a pas pu s'exécuter vu l'ampleur des tâches à accomplir en si peu de temps, dans un contexte de crise entre actionnaires ; que le principe du rachat forcé des actions entre actionnaires constitue l'opération de la dernière chance à même de sauver la société ; S'agissant des exceptions soulevées par C X, l'intimée fait valoir qu'en joignant l'exception d'incompétence au fond, les premiers juges ont fait une saine application de la loi ; qu'en effet s'il est vrai que l'article 126 du code de procédure civile reconnaît l'obligation faite à la juridiction saisie de statuer sur sa compétence d'office dès lors que celle-ci a été soulevée, il n'en demeure pas moins que la disposition visée n'enlève pas tout pouvoir d'appréciation au juge de joindre cette exception au fond afin qu'il soit statué dans une même décision sur ces deux points ; que pour preuve l'article 126 alinéa 2 reconnaît très explicitement que le juge « peut » joindre l'incident au fond ;
Sur l'exception d'incompétence, PLANOR AFRIQUE soutient, s'agissant de l'application du pacte d'actionnaires conclu le 10 février 2004 en son article 17-2 que les appelants reconnaissent le fait qu'elle n'était pas actionnaire de TELECEL FASO au moment de la signature dudit pacte, auquel elle n'a participé ni de façon directe ou indirecte ; que ce n'est qu'à la signature de l'accord du 28 août 2004 entre elle et les appelants portant sur le contenu de missions de contrôle à X A qui fait référence au pacte d'actionnaires, sans qu'il n'ait été produit, qu'elle a eu connaissance de son existence ; qu'elle était dès lors fondée à refuser que l'article 17-2 du pacte lui soit applicable ; que la clause compromissoire contenu dans cet article lui porte préjudice, ne l'ayant pas connu et par conséquent ne l'ayant pas accepté ;
PLANOR AFRIQUE conclut au rejet des demandes reconventionnelles de la société C X en faisant valoir, sur le premier point relatif à la résolution de la convention de cession d'actions du 26 août 2004 sur le fondement des articles 1134, 1184, 1650 et 1654 du code civil que le non paiement de la dernière échéance de quatre cent
cinquante millions (450.000.000) de francs CFA s'explique non par un refus mais par la crainte que ses droits ne soient compromis au regard de la profondeur des divergences entre actionnaires et la manière dont la société TELECEL FASO était spoliée par l'actionnaire majoritaire ; que dans le cas d'espèce, il n'a pas été démontré que le retard dans le règlement du reliquat a un degré de gravité tel qu'il a eu un impact sur l'accord des parties qui, du reste, ne contenait aucune clause résolutoire ou suspensive ; qu'en dehors de cet aspect qui justifie le caractère bien fondé de la décision du premier juge sur ce point, il y a lieu de relever que les dispositions de l'article 1583 du code civil sur la vente précisent que celle-ci est parfaite entres les parties et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ; qu'en droit des sociétés la jurisprudence décide que le transfert de propriété des actions entre les parties a lieu dès leur accord sur les titres et sur le prix (Cass. Com. 10 mars 1992 n° 90 14-456 ; Bull-civil IV n° 109) ; que le reliquat réclamé par C X n'est qu'un droit de créance dont le recouvrement s'exerce dans les conditions définies par le droit commun et l'exercice de ce droit ne saurait remettre en cause la qualité d'actionnaire d'une des parties en dehors d'une décision des instances dûment habilité en la matière ;
Sur la demande de rachat des actions formulée par C X, PLANOR AFRIQUE expose qu'il est établi qu'il y a une mésintelligence profonde entre les actionnaires imputable à l'actionnaire majoritaire qui a spolié l'actionnaire minoritaire par une série d'actes d'abus de biens sociaux et de pillage organisé des ressources de TELECEL FASO par des contrats « bidons » de prestation divers, avec comme entre autre conséquence la situation de péril vis-à-vis de l'Etat burkinabè qui a mis en œuvre la procédure de retrait de sa licence pour non respect du cahier des charges ; que c'est donc à bon droit que sa demande a été rejetée par les premiers juges ; que par ailleurs contrairement aux arguments avancés par C X pour lui imputer la responsabilité de la crise il y a lieu de relever s'agissant :
1) du financement de la société TELECEL FASO qu'aucune délibération du Conseil d'Administration n'a imposé comme mécanisme de financement des besoins de la société l'appel au compte courant d'associés, ce mécanisme ayant été choisi de façon cavalière dans le sens exclusif des intérêts et en fonction de la situation financière de l'actionnaire majoritaire ; qu'il est erroné de laisser croire que ce fut le seul mode de financement dont bénéficie la société ; que pour preuve elle bénéficie et continue de bénéficier de l'appui des marchés financiers et de l'appui bancaire soit pour la réalisation de ses infrastructures ou pour le règlement de certains échéances de ses traites ; que l'actionnaire majoritaire ne saurait s'approprier les acquis de la société au motif que c'est elle seule qui les a financés ; 2) des procédures initiées que celles-ci sont fondées ; qu'en effet la plainte pour abus de biens sociaux déposée devant le juge d'instruction se trouve « bloquée » par les manœuvres des appelants qui refusent de comparaître ; que par ailleurs le rapport d'expertise a mis à nu le pillage organisé des ressources de la société TELECEL FASO et a permis de comprendre les raisons objectives des difficultés de la société à respecter le cahier des charges, toutes choses qui ont constitué le lit de la mésintelligence entre les actionnaires ; 3) de l'augmentation du capital que celle-ci n'est pas intervenue dans les règles de l'art, ce pourquoi cette décision a été annulée par le tribunal ;
PLANOR AFRIQUE, au regard de ce qui précède conclut en demandant à la Cour de : - confirmer purement et simplement le jugement attaqué ; - dire qu'elle est autorisée à introduire un actionnaire ; - appeler la société C X à garantir le passif de la société TELECEL ;
condamner les appelants solidairement à lui payer la somme de cinquante millions (50.000.000) de francs CFA conformément à l'article 6 nouveau de la loi portant organisation judiciaire au Z A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; - les condamner aux entiers dépens de l'instance.
DISCUSSION
EN LA FORME
Attendu que l'appel a été interjeté dans le délai et la forme prescrits respectivement aux articles 536 et 550 du code de procédure civile ; qu'il y a lieu de déclarer l'appel ;
AU FOND
SUR LE JUGEMENT SUR L'EXCEPTION D’INCOMPETENCE
Attendu qu'aux termes de l'article 126 alinéa 2 du code de procédure civile : « le tribunal doit statuer sans délai sur la compétence s'il en est requis par le demandeur à l'exception ; dans le cas contraire, il peut joindre l'incident au fond. » ; Attendu qu'il ressort des dispositions ci-dessus citées que le juge n'est pas tenu de statuer seulement sur l'exception d'incompétence lorsqu'il en est requis mais au contraire dispose d'un choix discrétionnaire entre les deux branches de l'option : soit il statue dans un premier temps sur la compétence et sursoit à statuer sur le fond, soit il statue également au fond ; que dans cette deuxième hypothèse, le juge a la possibilité, sans attendre, de se prononcer sur la compétence, puis de statuer au fond dans le même jugement à condition que les parties aient été préalablement mises en demeure de conclure au fond et que le juge statue sur les deux questions par des dispositions distinctes du jugement (cf. L. Cadiet, Droit judiciaire privé, 2è éd. 1998 n° 713) ; Attendu qu'en l'espèce ces conditions ayant été remplies à l'égard des parties, il ne peut être fait grief aux premiers juges d'avoir usé de la possibilité que leur offre l'article 126 du code de procédure civile ;
SUR LA COMPETENCE DES JURIDICTIONS NATIONALES
Attendu qu'il est constant qu'une convention de cession d'actions de TELECEL FASO par C X au profit de PLANOR AFRIQUE a été scellée le 26 août 2004 suivie deux jours plus tard (le 28 août) d'un accord entre les même parties sur le contenu des missions de contrôle, accord à intégrer au pacte d'actionnaires signé entre C X et le WAGF le 10 février 2004 ; que si la convention de cession d'action contient en son article 11 une clause attributive de juridiction, le pacte d'actionnaire lui contient une clause compromissoire en son article 17-2 ;
Attendu qu'en l'espèce se pose le problème de l'identification des parties, essentielle pour de permettre distinguer les personnes qui sont liées par la convention d'arbitrage de celle qui ne sont pas obligées personnellement ; qu'à cet égard, le critère tiré de la signature de l'acte contenant la convention d'arbitrage est déterminant quant à la l'identification des parties liées à cette convention ; Attendu que les conventions n'ont d'effet, selon l'article 1165 du code civil, qu'entre les parties contractantes et elles ne nuisent point au tiers et ne lui profite que dans le cas de l'article 1121
du code civil ; Attendu que l'entrée de PLANOR AFRIQUE dans le capital de la société TELECEL FASO a été faite postérieurement à la conclusion du pacte d'actionnaire dont il n'est fait référence qu'à l'occasion de la signature de l'accord sur le contenu des missions de contrôle ; Attendu que C X ne rapporte pas la preuve, en tant que partie cédante des actions, des diligences mises en œuvre pour faire adhérer PLANOR AFRIQUE, tiers au pacte d'actionnaires, en application de l'article 12-1 dudit pacte qui stipule que « pour le cas où une partie déciderait un transfert d'une ou plusieurs de ses valeurs mobilières à un tiers, elle s'engage à faire adhérer ce tiers au pacte au plus tard lors de la réalisation du transfert », c'est-à-dire, en l'espèce, à la date du 26 août 2004 (cf. article 5 de la convention de cession d'actions) ; Attendu par ailleurs que la clause d'arbitrage par référence à un document qui la stipule valable n'est opposable à la personne contre qui on l'invoque que si elle a été connue de la partie à laquelle on l'oppose et acceptée par elle ; qu'en l'espèce il ne ressort nulle part du dossier que PLANOR AFRIQUE ait eu connaissance de ladite clause et qu'elle ait manifesté la volonté d'être liée par la convention d'arbitrage ; que partant la clause compromissoire contenue dans le pacte d'actionnaires est inopposable à PLANOR AFRIQUE, et l'article 13 de l'Acte uniforme OHADA sur l'arbitrage ne peut trouver à s’appliquer ; Attendu qu'il y a lieu, par conséquent de confirmer le jugement attaqué sur ce point ;
SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE EN RESOLUTION DU CONTRAT DE CESSION D’ACTIONS
Attendu que C X réclame la résolution du contrat de cession, PLANOR AFRIQUE n'ayant pas exécuté en totalité son obligation de paiement du prix d'achat des action et restant de ce fait lui devoir une somme reliquataire de quatre cent cinquante millions (450.000.000) francs CFA sur la somme totale de deux milliards quatre cent onze millions neuf cent quarante huit mille (2.411.948.000) francs CFA
Attendu qu'en vertu de l'article 1184 du code civil, en cas d'inexécution par l'une des parties, l'autre partie conserve la faculté d'option entre la résolution du contrat et son exécution supposée, encore possible, tant qu'elle n'a pas renoncé à l'une ou l'autre ; Attendu qu'il appartient au juge du fond saisi d'apprécier souverainement, en cas d'inexécution partielle, si cette inexécution a assez d'importance pour que la résolution soit prononcée ; qu'en l'espèce le montant du reliquat (18%) dû par PLANOR AFRIQUE au regard du prix total de vente des actions ne saurait être regardé comme ayant une gravité suffisante pour justifier la résolution de la convention, l'exécution parfaite du contrat pouvant être obtenue par d'autres voies ; Attendu qu'il sied dès lors de débouter C X de sa demande ;
SUR LA CESSION FORCEE DES ACTIONS
Attendu qu'aux termes de l'article 544 du code procédure civile : « pour justifier les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelle preuves » ; Attendu que les parties ne font que reprendre devant la Cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance ; Attendu qu'en l'absence d'éléments nouveaux soumis à son appréciation la Cour estime que les premiers juges par des motifs pertinents qu'elle approuve, ont fait une exacte appréciation des
faits de la cause et du droit des parties ; qu'il convient en conséquence de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a ordonné l'exclusion et la cession forcée de l'ensemble des actions détenues par C X dans la société TELECEL FASO, fixé la valeur de l'ensemble des ses actions à neuf milliards neuf cent millions deux cent soixante neuf mille trois cent quarante quatre (9.900.269.344) francs CFA, a autorisé la société PLANOR AFRIQUE à introduire un nouvel actionnaire dans le capital de la société TELECEL FASO ;
SUR LA DEMANDE DE ETISALAT
Attendu qu'il est constant que C X est une filiale de la société ETISALAT, ainsi qu'il est précisé à l'article 179 de l'Acte uniforme OHADA sur les sociétés commerciales et le GIE ; que la société filiale est une véritable société ayant sa personnalité juridique propre ; Attendu qu'en l'espèce le litige porte sur la cession d'actions forcée de TELECEL FASO entre C X et PLANOR AFRIQUE ; Attendu que PLANOR AFRIQUE n'a aucun intérêt à agir contre ETISALAT dans le cadre de la présente instance ; Attendu qu'il y a lieu par conséquent de prononcer la mise hors de cause de ETISALAT ;
SUR LES FRAIS EXPOSES
Attendu que PLANOR AFRIQUE sollicite la condamnation des appelants à lui payer la somme de cinquante millions (50.000.000) de francs CFA au titre des frais exposés et non compris dans les dépens prévus à l'article 6 nouveau de la loi 10-93 portant organisation judiciaire au Z A ; Attendu qu'aux termes de l'article 6 alinéa 2 nouveau : « Dans toutes les instances le juge, sur demande expresse et motivée condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. » ; Attendu qu'en l'espèce PLANOR AFRIQUE n'apporte pas la preuve de la réalité du montant des frais allégués ; qu'en l'absence de motivation et de justificatif, il y a lieu de la débouter en l'état ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en dernier ressort ;
Déclare l'appel recevable ; Met la société ETISALAT hors de cause ; Confirme les autres dispositions du jugement ; Met les dépens à la charge de l'appelant.