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02/11/2015 | CADHP | N°002/2015

CADHP | CADHP, Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, 02 novembre 2015, 002/2015


Texte (pseudonymisé)
628 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 2
Demande d’avis consultatif par the Centre for
Rights, University of Pretoria et the Coalition of
Lesbians (avis consultatif) (2017) 2 RJCA 628

(2017-2018)
Bv
Ag

Requête 002/2015 Demande d’avis consultatif par the Centre for Bv
Ca, University of Pretoria et the Coalition of Ag Cd
Avis consultatif, 28 septembre 2017. Fait en anglais et en français, le
texte anglais faisant foi.
Juges : ORÉ, KIOKO, NIYUNGEKO, GUISSÉ, BEN ACHOUR, BOSSA,
MATUSSE, MENGUE, MUKAMULISA, CHIZUMILA et BENSAOULA

La Cour a estimé qu’elle n’est pas compétente pour examiner une
demande d'avis consultatif émanant d...

628 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 2
Demande d’avis consultatif par the Centre for
Rights, University of Pretoria et the Coalition of
Lesbians (avis consultatif) (2017) 2 RJCA 628

(2017-2018)
Bv
Ag

Requête 002/2015 Demande d’avis consultatif par the Centre for Bv
Ca, University of Pretoria et the Coalition of Ag Cd
Avis consultatif, 28 septembre 2017. Fait en anglais et en français, le
texte anglais faisant foi.
Juges : ORÉ, KIOKO, NIYUNGEKO, GUISSÉ, BEN ACHOUR, BOSSA,
MATUSSE, MENGUE, MUKAMULISA, CHIZUMILA et BENSAOULA
La Cour a estimé qu’elle n’est pas compétente pour examiner une
demande d'avis consultatif émanant d’une ONG non reconnue par
l’Union africaine.
Compétence (demande d’avis consultatif, organisation africaine, 50,
51 ; reconnue par l’Union africaine, 56, 57)
Opinion individuelle : BEN ACHOUR
Compétence (demande d'avis consultatif, 8, 9)
Opinion individuelle : MATUSSE
Procédure (décision, 13, 15, 20)
1 La présente demande, datée du 2 novembre 2015 et reçue le même jour au Greffe, a été déposée conjointement par le Centre pour les Droits de l'Homme de l’Université de Pretoria et la Coalition des Lesbiennes africaines (ci-après dénommés « les demandeurs »).
2 Le Centre pour les droits de l'homme de l'Université de Pretoria (ci-après dénommé « le Centre ») se présente comme un département de l’Université et une organisation non gouvernementale (ONG) créée en 1986 et qui œuvre pour l’éducation aux droits de l'homme en Afrique, la large diffusion de publications sur les droits de l'homme en Afrique et l’amélioration des droits des femmes, des personnes vivant avec le VIH, des peuples autochtones et des autres groupes défavorisés ou marginalisés à travers le continent. || déclare qu’il a le statut d’observateur auprès de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après dénommée « la Commission ») depuis décembre 1993, qu’il a reçu le prix UNESCO de l'éducation aux droits de l'homme en 2006 et qu’en 2012, à l’occasion de la célébration de son 25ème anniversaire, la Commission lui a décerné son prix des « Droits de l'Homme pour les ONG ».
3 La Coalition of Ag Cd AHci-après dénommée« la

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Coalition »), se présente comme un réseau d'organisations engagées pour l'égalité des lesbiennes en Afrique. Selon les demandeurs, cette Coalition a été créée en 2003 et elle est enregistrée en Afrique du Sud, en tant qu’organisation non gouvernementale dont le Secrétariat est basé à Johannesburg. La coalition déclare également que le but de ses actions est de contribuer à la transformation de l'Afrique en un continent dans lequel les femmes, dans toute leur diversité, y compris les lesbiennes, jouissent de l’ensemble des droits humains et sont reconnues comme citoyennes à part entière. Les demandeurs précisent en outre que cette coalition est également dotée du statut d’observateur auprès de la Commission.
Il. Circonstances et objet de la demande
4 En janvier 2015, dans sa Décision sur le 37ème rapport d’activité de la Commission, le Conseil exécutif de l'Union africaine (ci-après dénommé « le Conseil exécutif ») a demandé à la Commission de supprimer, dans son rapport d’activité, des passages concernant deux décisions prises à l'encontre de la République du Rwanda et de donner à cette dernière l’occasion de présenter ses arguments au cours d’une audience publique sur les deux affaires.
5 En juillet 2015, dans sa décision sur le 38ème rapport d’activité de la Commission, le Conseil exécutif a demandé à la Commission « de prendre en compte les valeurs, l’identité et les bonnes traditions fondamentales de l'Afrique et de retirer le statut d’observateur accordé aux ONG qui essaient d'imposer des valeurs contraires aux valeurs africaines ». À cet égard, le Conseil exécutif a demandé à la Commission de revoir ses critères d’octroi du Statut d’Observateur aux ONG et de retirer le statut d’observateur accordé à la Coalition of Ag Cd.
6. Le Conseil exécutif a en outre recommandé que la Conférence de l’Union africaine n'autorise la publication du 38ème rapport d'activité de la Commission qu'après la mise à jour de celui-ci et l’incorporation des propositions formulées à ce sujet par les États membres.
7 Le Conseil exécutif a également demandé à la Commission de « respecter les procédures légales lors de la prise des décisions sur les requêtes reçues, d'envisager la révision de son Règlement intérieur, en particulier en ce qui concerne les mesures provisoires et les appels urgents et de prendre des mesures appropriées pour éviter l’ingérence des ONG et d’autres tierces parties dans ses activités ».
8 Le Centre et la Coalition sollicitent l’avis de la Cour sur la
1 Doc.EX.CL/921(XXVII), EX.CL/Dec.887(XXVII).

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manière dont le terme « examen » utilisé à l’article 59(3) de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après dénommée« la Charte ») doit être interprété. Plus précisément, ils veulent savoir si, dans la décision mentionnée plus haut prise en 2015, le Conseil exécutif et la Conférence des Chefs d’États de l’Union africaine n’ont pas dépassé les limites raisonnables de leur pouvoir d’ « examiner » les rapports d’activité de la Commission.
9. La demande d’avis consultatif a été reçue au Greffe de la Cour le 2 novembre 2015 et elle a été aussitôt enregistrée comme Demande d'avis consultatif n°002/2015.
10. À sa trente-neuvième session ordinaire tenue du 9 au 29 novembre 2015, la Cour a examiné la demande et a décidé de la communiquer aux États membres de l’Union africaine, à la Commission ainsi qu’à l’Institut africain de Droit International, pour observations éventuelles, en application de l'article 69 du Règlement intérieur de la Cour (ci-après dénommé « le Règlement »). Cette communication a été faite par lettres datées respectivement des 21 décembre 2015, 27 et 29 janvier 2016 et fixant un délai de quatre-vingt-dix (90) jours pour le dépôt d’éventuelles observations.
11. Le 2 mars 2016, la Commission a informé la Cour que la demande ne se rapporte à aucune des requêtes pendantes devant elle (article 68 (3) du Règlement).
12. Le 14 avril 2016, le Centre a soumis à la Cour une demande d'intervention de quatre (4) autres ONG, en qualité d’amicis curiae;
13. La Cour a rejeté la demande du Centre parce que ce n’était pas le Centre lui-même qui souhaitait intervenir en qualité d’amicus curiae mais plutôt les quatre ONG. La Cour a, par conséquent, exigé que chaque ONG dépose sa demande individuelle en précisant sa contribution à cet égard. Aucune des quatre ONG n'a soumis sa demande.
14. À sa quarante-et-unième session ordinaire tenue du 16 mai au 3 juin 2016, la Cour a décidé de prolonger de soixante (60) jours, le délai accordé aux États membres et aux autres entités pour déposer leurs observations éventuelles sur la demande d’avis consultatif.
15. Le 6 juin et le 3 avril 2016 respectivement, la République de Côte d'Ivoire et la République fédérale d’Éthiopie ont communiqué leurs observations à la Cour.
16. Le 20 octobre 2016, le Greffe a informé les parties que la procédure écrite était close.

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IV. Sur la compétence de la Cour
17. Aux termes de l’article 72 du Règlement :« La Cour applique, mutatis mutandis, les dispositions du Titre IV du présent Règlement dans la mesure où elle les estime appropriées et acceptables ».
18. 17. Aux termes de l’article 39 du Règlement, « La Cour procède à un examen préliminaire de sa compétence… ».
19. Il ressort des dispositions ci-dessus que la Cour doit déterminer si elle a compétence sur une demande qui lui est présentée.
20. Pour déterminer si elle jouit de la compétence personnelle en l'espèce, la Cour doit s'assurer que le Centre et la Coalition font partie des entités ayant qualité pour la saisir d’une demande d’avis consultatif, en vertu de l’article 4 (1) du Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après « le Protocole »)
A. Arguments des demandeurs
21. Le Centre et la Coalition rappellent que l’article 4 (1) du Protocole énumère quatre catégories d’entités ayant qualité pour saisir la Cour d’une demande d’avis consultatif, à savoir (1) les États membres; (2) l'Union africaine ; (3) tout organe de l’Union africaine et (4) « toute organisation africaine reconnue par l’Union africaine ».
22. ls soutiennent qu’ils relèvent de la quatrième catégorie et que l'expression « toute organisation africaine reconnue par l’Union africaine » doit être interprétée selon son sens ordinaire et conformément à l’objet et au but du Protocole portant création de la Cour.
23. Selon les demandeurs, le terme « organisation », qui s'entend, au sens du dictionnaire Bq Ah Cb, comme étant « un groupe organisé de personnes avec un but particulier » est suffisamment large pour inclure les organisations non gouvernementales.
24. Is affirment encore qu’en plus de l’article 4(1), ce terme est également utilisé dans d’autres articles du Protocole comme l’article 5(1) où il est fait référence aux « organisations non gouvernementales » ; ce qui indique que l’utilisation de l'expression « toute Organisation africaine » à l’article 4(1) est délibérée et a pour but d’inclure divers types d'organisations sous le terme générique « organisation ».
25. LeCentreetla Coalition soutiennentégalementque contrairement à l’article 5 du Protocole qui traite de la compétence contentieuse de la Cour, l’article 4(1) ne fait pas de distinction entre les organisations gouvernementales et les organisations non gouvernementales
26. |ls en déduisent donc que le terme « Organisation » intègre, notamment, les « organisations intergouvernementales » mais

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également les ONG africaines œuvrant pour les droits de l'homme, comme le Centre et la Coalition.
27. S'agissant de l'adjectif « africain », le Centre et la Coalition font valoir que l’Bq Ah Cb le définit comme ce qui « se rapporte à l'Afrique », que conformément à ce sens ordinaire, ce terme peut se rapporter à (i) la situation géographique d’une organisation, ce qui, selon eux, est valable pour les organisations basées en Afrique , (ii) des organisations avec une structure de gestion essentiellement africaine, même si elles ne sont pas basées en Afrique, et, enfin, (iii) à des ONG internationales de défense des droits de l'homme ayant une composition ou une thématique essentiellement africaines.
28. ls concluent qu’une organisation est considérée comme « africaine » en vertu de l’article 4(1) du Protocole lorsqu'elle remplit l’un des critères cités dans les trois catégories ci-dessus.
29. Ence qui concerne l'exigence de la « reconnaissance par l'Union africaine », les Demandeurs soutiennent que la reconnaissance d’une ONG par l’un des organes ou l’une des structures de l’Union africaine devrait valoir reconnaissance par le principal organe, à savoir l’Union africaine.
30. Le Centre et la Coalition affirment qu’il est courant, en droit international « moderne », qu’un agent soit autorisé à agir au nom de son mandant dans le cadre du mandat qu’il a reçu de ce dernier ; qu’il est donc logique et pratique de considérer les ONG ayant le statut d’observateur auprès d'organismes de l’Union africaine, comme la Commission ou les organisations de la société civile représentées au Conseil économique, social et culturel de l'Union Africaine (ECOSOCC), comme étant reconnues par l’Union africaine, en vertu de l’article 4(1) du Protocole
31. Is font encore valoir que le Centre et la Coalition jouissent du statut d’observateur auprès de la Commission (depuis décembre 1993, pour le Centre, et mai 2015, pour la Coalition) et que, pour cette raison, les deux organisations doivent être considérées comme ayant rempli l'exigence de reconnaissance par l'Union africaine, prévue à l’article 4(1) du Protocole
B. Observations des États membres
32. Les observations de la République fédérale démocratique d'Ethiopie et de la République de Côte d'Ivoire sont présentées ci- dessous :

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i. Observations de la République fédérale démocratique d’Ethiopie
33. Surlaquestion de savoir siles demandeurs sont des organisations africaines au sens de l’article 4 du Protocole, la République fédérale démocratique d’Éthiopie répond par la négative.
34. Elle indique que l’Union africaine a adopté une résolution sur les critères d'octroi du statut d’observateur et un système d’accréditation et que le terme «organisation » dans le Protocole doit être interprété à la lumière de ce système de reconnaissance et d'accréditation défini par
35. Selon la République fédérale démocratique d’Éthiopie, le Centre et la Coalition ne sont pas des organisations au sens de la définition du terme « Organisation » adoptée par ladite résolution de l’Union africaine. Elle indique que selon cette résolution, une « organisation » est une « organisation d'intégration régionale ou une organisation internationale, y compris les organisations sous régionales, régionales ou interafricaines qui ne sont pas reconnues comme des communautés économiques régionales »
36. La République fédérale démocratique d’Éthiopie fait en outre valoir que les organisations non gouvernementales (ONG) reconnues par l’Union africaine obtiennent le statut d’observateur conformément aux critères d'octroi de ce statut auprès de l’UA ; que ni le Centre ni la Coalition n’affirment être reconnus par l’'UA ou bénéficier du statut d’observateur suivant cette procédure ; que même si ces organisations bénéficiaient du statut d’observateur, cela ne leur confèrerait pas le droit de solliciter un avis consultatif devant la Cour parce que cette prérogative ne figure pas parmi celles que leur reconnaît la décision du Conseil exécutif
37. La République d'’Éthiopie soutient également que la reconnaissance ou l'acquisition du statut d’observateur auprès des organes créés par traité, y compris la Commission, ne sont pas synonymes de reconnaissance par l’Union africaine et qu'aucune disposition de la Résolution ci-dessus mentionnée ne l’envisage
38. Elle affirme encore que la Commission a été créée en vertu de la Charte pour surveiller la situation des droits de l'homme en Afrique ; qu’elle accorde le Statut d'Observateur aux organisations non gouvernementales sur la base de sa propre résolution pour faciliter la participation des ONG à la promotion des droits de l'homme sur le continent ; que ce statut permet aux ONG de prendre part aux sessions de la Commission, de soumettre des rapports alternatifs et d'entretenir un dialogue constructif sur l'examen des rapports des États parties ; que le Centre et la Coalition, en tant qu’ONG ayant le statut d'’observateur auprès de la Commission, peuvent jouir de ces privilèges et introduire

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une requête sans démontrer qu’elles y ont un intérêt ; que ce statut ne leur permet pas, cependant, de solliciter un avis consultatif de la Cour sur des affaires concernant une autre organisation.
39. La République fédérale démocratique d’Éthiopie soutient, en outre, que le Règlement intérieur de la Commission établit une distinction entre les « organisations jouissant du statut d’observateur » et les « organisations reconnues par l’UA » et rappelle que l’article 32(3) (e) dudit Règlement dispose qu’une organisation reconnue par l’Union africaine, une institution nationale des droits de l'homme jouissant du statut de membre affilé ou une organisation non gouvernementale jouissant du statut d’observateur, peuvent proposer des points à inclure dans l’ordre du jour provisoire de la session de la Commission ; que, dans le même sens, l’article 63(1) accorde à ces deux types d'organisation le droit de demander à la Commission d'inscrire à l’ordre du jour d’une session ordinaire, un débat sur toute situation des droits de l'homme ; qu’au regard de ces dispositions, le Règlement intérieur de la Commission traite les deux types d'organisations de manière différente.
40. La République fédérale démocratique d’Éthiopie conclut que le statut d’observateur obtenu par le Centre et la Coalition auprès de la Commission ne leur confère pas la qualité pour solliciter un Avis consultatif de la Cour.
ii. Les observations de la République de Côte d’Ivoire
41. La République de Côte d’Ivoire soutient qu’en vertu de l’article 4(1) du Protocole, les demandes d’avis consultatif sont réservées aux États membres de l’Union, à ses organes et aux organisations africaines reconnues par elle ; que contrairement aux affirmations des ONG demanderesses, l'expression « organisation africaine reconnue par l’Union africaine » utilisée à l’article 4 du Protocole ne recouvre pas à la fois les organisations internationales africaines et les organisations non gouvernementales dotées du statut d’observateur auprès de la Commission ; que si tel était le cas, les rédacteurs dudit Protocole n'auraient pas pris le soin d’énumérer, en son article 5, ces deux catégories au titre de celles qui sont autorisées à introduire devant la Cour des requêtes dirigées contre les États parties.
42. La République de Côte d'Ivoire souligne qu’en droit, l'interdiction d'introduire une distinction non prévue par la loi emporte obligation de marquer la distinction là où la loi l’a fait ; que par conséquent, faute d'avoir été expressément citées à l’article 4 du Protocole, comme cela a été fait à l'article 5, les ONG dotées du statut d’observateur auprès de la Commission ne doivent pas être considérées comme autorisées à saisir la Cour d’une demande d’avis consultatif ;

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43. Elle ajoute que la notion d’« organisation africaine », employée à l’article 4 du Protocole concerne les Organisations Intergouvernementales africaines et non pas les ONG ; qu’il s'agit notamment des Communautés économiques régionales, comme l’Union du Maghreb arabe (UMA), la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest( CEDEAO), l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), la Communauté économique et monétaire d'Afrique centrale (CEMAC), la Communauté de l'Océan indien (COI) et la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE).
44. La République de Côte d’Ivoire fait en outre valoir qu’offrir la possibilité aux ONG dotées du statut d’observateur auprès de la Commission de saisir la Cour d’une demande d'avis consultatif leur permettrait de viser les Etats, même ceux n'ayant pas encore fait la déclaration prévue à l’article 34(6) du Protocole ; que la démarche du Centre et de la Coalition s'inscrit justement dans cette logique ; que leur requête a, en effet, pour cible réelle l’Union africaine qui, à travers le Conseil exécutif, a recommandé le retrait du statut d’observateur auprès de la Commission à la Coalition des Lesbiennes africaines.
45. La République de Côte d'Ivoire demande, en conséquence, à la Cour de constater son incompétence à examiner la demande d’avis consultatif introduite par le Centre et la Coalition.
iii. Position de la Cour
46. L'article 4(1) du Protocole qui énumère les quatre catégories d’entités ayant qualité pour saisir la Cour d’une demande d'Avis Consultatif dispose comme suit : « [À] la demande d’un État membre de l’[Union africaine (UA)], de l’[UA], de tout organe de l’UA ou d’une organisation africaine reconnue par l'UA, la Cour peut donner un avis sur toute question juridique concernant la Charte ou tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’'homme… »
47. Le fait que les deux ONG demanderesses ne relèvent pas des trois premières catégories n’est pas contesté.
48. La première question qui se pose ici est celle de savoir si ces ONG relèvent de la quatrième catégorie, c’est-à-dire si elles ont la qualité d’ « organisations africaines », au sens de l’article 4(1) du Protocole
49. À cet égard, la Cour a établi, dans son avis consultatif X Ca and Accountability (SERAP), que le terme « organisation» utilisé à l’article 4(1) du Protocole couvre aussi bien les organisations non-gouvernementales que les organisations

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50. S'agissant de l’adjectif « africain », la Cour a établi qu’une organisation peut être considérée comme « africaine », si elle est enregistrée dans un État africain et est dotée d'antennes aux niveau sous-régional, régional ou continental et si elle mène des activités au- delà du territoire dans lequel elle est enregistrée.®
51. La Cour fait observer que le Centre et la Coalition sont tous les deux enregistrés en Afrique du Sud et qu'avec leur statut d’observateurs auprès de la Commission, ils sont autorisés à mener des activités au- delà de leur pays d'enregistrement. Elle en conclut que ce sont des « organisations africaines » au sens de l’article 4(1) du Protocole
52. La deuxième question qui en découle est celle de savoir si ces organisations sont reconnues par l’Union africaine.
53. La Cour relève que le Centre et la Coalition se basent sur leur statut d’observateur auprès de la Commission pour soutenir qu’ils sont reconnus par l’Union africaine.
54. Acet égard, la Cour a, dans l’Avis consultatif SERAP précité, indiqué que le statut d’observateur auprès d’un organe quelconque de l’Union africaine n’équivaut pas à une reconnaissance par cette dernière. Elle a ainsi établi que seules les ONG africaines reconnues par l’Union africaine elle-même, sont visées par l’article 4(1) du
55. La Cour a également établi que la reconnaissance des ONG par l’Union africaine passe par l’octroi du statut d’observateur ou par la signature d’un Accord de Coopération entre l’Union africaine et ces
56. La Cour fait observer qu’en l'espèce, le Centre et la Coalition n’ont ni affirmé ni prouvé qu’ils ont le statut d’observateur auprès de l’Union africaine ou qu’ils ont signé un quelconque Accord de Coopération avec cette dernière.
57. Dece qui précède, la Cour conclut que même si les Demandeurs sont des organisations africaines au sens de l’article 4(1) du Protocole, ils ne remplissent pas la deuxième condition nécessaire édictée par cette disposition comme fondement d’une compétence de la Cour, à savoir « être reconnues par l’Union africaine ».
La Cour,
2. Demande d'avis consultatif introduite par X Ca and Ap Bh AHZ), N°001/2013, Avis consultatif du 26 mai 2017, Paragraphe 46
3. Idem, Paragraphe 48
4. Idem, Paragraphe 53
5. Idem, Paragraphe 64

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à l’unanimité,
i. Dit qu’elle ne peut pas donner l’Avis consultatif qui lui a été demandé.
Opinion individuelle : BEN ACHOUR
1. Les quatre avis rendus le 28 septembre 2017, reprennent in extenso les motifs de l’avis SRAP du 26 mai 2017. Cette opinion individuelle ne fait que confirmer ce qui a été développe dans notre opinion sous cet avis SERAP
2. Encore une fois, la Cour se trouve dans l'impossibilité de donner suite a quatre demandes d’avis consultatif, et contrainte de ne pas répondre a des questions juridiques de la plus haute importance formulées par des ONG*, relativement a Interprétation de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (ci- après la Charte) et le Protocole a la Charte portant création de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après le Protocole), ou d’autres instruments pertinents des droits de l'homme en Afrique comme la Charte africaine de la démocratie, les élections et la AI ou le Protocole a la Charte relatif au droit des femmes (Protocole de Maputo).
3. Je suis dans l’ensemble d'accord avec le raisonnement et les motifs développes par la Cour dans les quatre avis pour considérer que « [Na reconnaissance des ONG par l'Union africaine passe par l’octroi du statut d’observateur ou par la signature d’un protocole d'accord ou de coopération entre l'Union africaine er ces ONG » ($ 54 Avis Centre et Coalition)
4. La Cour n'avait pas le choix et ne pouvait faire autrement. Elle
1. 1l s’agit des ONG suivantes :
- The Centre for Bv Ca, University of Pretoria (CHR) & the Coalition of Ag Cd ;
- Association Africaine de Défense des Droits de l'Homme (ASADHO) ;
- Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l'Homme (RADDHO) ;
- The Centre for Bv Ca, University of Pretoria ; Federation of Cf B in Kenya ; Women advocates Research and Documentation Centre et Aj Cf B Association.

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était ‘ligotée’ par les termes explicites de l’article 4(1) de son Protocole? et par la pratique restrictive de l'Union en matière d'octroi de la qualité d'observateur auprès d'elle aux ONG.
1. Dans les quatre avis rendus le 28 septembre 2017, la Cour, sollicitée par plusieurs ONG, ayant toutes le statut d’observateur auprès de la Commission africaine de droits de l'homme, a bute sur la notion d’ « [o]rganisation africaine reconnue par l'Union africaine », utilisée par l’article 4(1) du Protocole.
2. Il convient de noter que l’article 4(1) du Protocole relatif aux entités habilitées a saisir la Cour de demandes d'avis consultatif est, paradoxalement, plus restrictif que l’article 5(3) du Protocole relatifs aux ONG habilitées a saisir la Cour au contentieux. Alors que l’article 4(1) dispose que « [A] la demande [...] d’une organisation africaine reconnue par l’OUA, la Cour peut donner un avis sur toute question juridique concernant la Charte ou tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l'homme », l’article 5(3) du Protocole dispose que « [L]a Cour peut permettre aux individus ainsi qu’aux organisations non gouvernementales (ONG) dotées du statut d’observateur auprès de la Commission d’introduire des
3. requetés directement devant elle conformément a l’article 34(6) de ce Protocole ».
4. La comparaison de cet article montre que, concernant les ONG, la saisine est plus ouverte en matière contentieuse qu’en matière consultative, puisque pour saisir la Cour au contentieux, l'ONG devra simplement avoir le statut d’observateur auprès de la Commission?, alors qu’en matière consultative elle doit être reconnue par l'UA.
5. L'innovation des quatre avis rendus le 28 septembre 2017, réside dans la formulation du dispositif. Au lieu de dire, comme elle l'avait fait dans l’avis SERAP, que la Cour « [DJeclare qu’elle n’a pas compétence personnelle pour rendre l’avis sollicite », la Cour, dans les quatre avis du 28 septembre 2017, « [D]/t qu’elle ne peut pas donner l’avis consultatif qui lui a été demande », suivant en cela la Cour internationale de justice dans son avis de 1996 (CIJ, Avis consultatif du 8 juillet 1996, Liceite de la menace ou de ! ‘emploi des armes nucleaires), solution que nous avons préconise dans notre opinion sous l’avis SERAP.
2. « À la demande d’un Etat membre de l’OUA, de l'OUA, de tout organe de l'OUA ou d’une organisation africaine reconnue par l'OUA, la Cour peut donner un avis sur toute question juridique concernant la Charte ou tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l'homme, a condition que l’objet de l'avis consultatif ne se rapporte pas a une requete pendante devant la Commission ».
3. A condition bien evidemment que l'Etat ait souscrit a la clause facultative de juridiction prevue par l’article 34(6).

CHR et CALS (avis consultatif) (2017) 2 RICA 628 639
6. En conclusion, nous réitérons notre espoir de voir l'Union africaine procéder a un amendement de l’article 4(1) du Protocole dans le sens de l’ouverture des possibilités de saisine de la CAfDHP et d'assouplissement des conditions requises des ONG pour que leur demande d’avis rentre dans le champ de compétence de la Cour ; ou alors, la voie de l'amendement étant incertaine, d'accorder ses critères d'octroi du statut d’observateur aux ONG avec ceux de la Commission de Banjul.
Opinion individuelle : MATUSSE
1. La Cour a estimé, à l’unanimité, qu’elle n'avait pas la compétence personnelle pour émettre l'avis consultatif demandé par SERAP. Et pourtant, elle qualifie « d'Avis consultatif », la procédure par laquelle elle est arrivée à cette conclusion. Je ne partage pas cette position et j'exprime ici mon opinion individuelle, qui est basée sur les motifs suivants :
I Forme des actes de la Cour
2. Les instruments juridiques qui régissent la Cour, à savoir le Protocole' et le Règlement intérieur ne donnant aucune indication quant à l'appellation de chacune des différentes formes que peuvent prendre ses actes. Néanmoins, la pratique, qui est devenue la norme est l’utilisation des appellations ci-après : « Ordonnance », « Décision » et « Arrêt ».
3. En adoptant les expressions ci-dessus, la Cour n’a pas fait preuve de cohérence dans sa pratique, dans la mesure où elle a utilisé la même expression pour désigner des actes différents, à des moments différents, comme il est démontré ci-après :
1 Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples portant création d’une cour africaine des droits de l'homme et des peuples.

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ii. Pratique de la Cour
4. Dans les demandes d'avis consultatifs numéros 002/2011,? 001/2012° et 001/2014,* la Cour a utilisé le terme « Ordonnance » pour désigner l’acte par lequel elle a décidé de rejeter les demandes au motif que les requérants les avaient soit abandonnées, soit avaient fait preuve d’un manque d'intérêt pour poursuivre les procédures.
5. Dans la Demande d’avis consultatif n° 002/2012,° la Cour a utilisé le terme « Ordonnance » pour désigner l'acte par lequel elle a décidé de ne pas examiner la demande, au motif que celle-ci se rapportait à une affaire pendante devant la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (la Commission).
6. Dans la Demande d'avis consultatif n 001/2015,° la Cour a utilisé le terme « Ordonnance » pour désigner l'acte par lequel elle a décidé de rejeter la demande au motif que les auteurs n'avaient pas précisé les dispositions de la Charte ou de tout autre instrument relatif aux droits de l'homme à propos desquelles l’avis est demandé, conformément à l’article 68(2) du Règlement intérieur de la Cour.
7. Dans la Demande d'avis consultatif numéro 002/2013;7 la Cour s’est prononcée sur le fond de la demande en rendant un « Avis consultatif ».
8. En d’autres termes, dans les cas où la Cour n’est pas arrivée jusqu’à l'étape de l'examen de la demande sur le fond, et a décidé de la radier du rôle en raison d’un manque d'intérêt de la part de son auteur ou du non-respect des exigences prévues à l’article 68, la Cour a décidé de désigner l’acte qu’elle rend par le terme « Ordonnance ». 9. En matière contentieuse, la Cour a rendu sous le terme d’ « Ordonnance » un acte par lequel elle déclarait : n’avoir pas
2 Demande d'avis consultatif de l'avocat Br Bt au nom de la « Grande Ay arabe libyenne populaire et socialiste », arrêt du 30 mars 2012.
3 Demande d'avis consultatif par X Ca & Ap Bh AHZ), « Ordonnance » du 15 mars 2013.
4 Demande n° 001/2014 - Coalition on the International Criminal Court Ltd/gte(cicen), Am Ab C Assistance Project Ltd/gte (LEDAP), Civil Cc Ar C … … ……… … … … … … Ltd/gte (WARDC), « Ordonnance » du 5 juin 2015.
5 Demande n° 002/2012 - Union panafricaine des avocats (PALU) et An Ag At Centre (SALC), « Ordonnance » du 15 mars 2013.
6 Demande n° 001/2015 - Coalition on the International Criminal Court LTD/GTE, « Ordonnance » du 29 novembre 2015.
7 Demande n° 002/2013 - Comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l'enfant sur le statut du Comité africain d'experts sur les droits et le bien- être de l'enfant devant la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, « Ordonnance » du 5 décembre 2014.

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compétence pour connaître d’une affaire,® ou poursuivre l'examen de l'affaire,’ ou procéder à une jonction d’instances des requêtes ;"° ou
encore rejeter la requête en raison du manque d'intérêt de la part du
Requérant pour continuer la procédure."
10. Toujours en ce qui concerne les affaires contentieuses, la
Cour a rendu sous le nom d’« Arrêt » un acte pour dire que certaines requêtes étaient irrecevables'? ou qu’elle n'avait pas compétence"*.
L’appellation « Ordonnance » est également utilisée dans la plupart
des ordonnances portant mesures provisoires que la Cour a rendues‘*.
11. La Cour a largement utilisé le terme « Décision » pour dire
qu’elle n'avait pas compétence pour examiner des affaires en matière
8 Requête n° 019/2015 - Bb Be c. Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, « Ordonnance » du 20 novembre 2015.
9 Requête n° 016/2015 — Général Y AJ et autres c. République du Rwanda, « Ordonnance » du 3 juin 2016.
10 Requête numéros 009 et 011/2011 - Bz Bc Af et Legal and Bv Ca Centre et Ae Bx Bp Bd c. République-Unie de Tanzanie, « Ordonnance » du 22 septembre 2011.
11 Requête n° 002/2015 - Collectif des Anciens Travailleurs du Laboratoire (ALS) c. République du Mali, « ordonnance » du 5 septembre 2016.
12 Requête n° 003/2012 - Peter Bs Aa c. République-Unie de Tanzanie, « décision » du 28 mars 2014 ; Requête n° 003/2011 - Ax Bk c. République du Malawi, « arrêt » du 21 juin 2013.
13 Requête n° 001/2008 : Ce Ak c. République du Sénégal, « arrêt » du 15 décembre 2009 ; Requête n° 001/2011 - Bb Be c. Union africaine, « arrêt » du 26 juin 2012.
14 À savoir : Requête n° 016/2015 - Général Y AJ et autres c. République du Rwanda, « Ordonnance » du 24 mars 2017. Requête n° 004/2013 — Aq Al Bi c. Bu Bn, « Ordonnance » du 4 octobre 2013 ; Requête n° 002/2013 - Commission africaine des droits de l'homme et des peuples c. Libye, « Ordonnance » du 15 mars 2013.
15 Requête n° 002/2011 - Av Az c. République démocratique populaire d'Algérie, « Décision » du 16 juin 2011 ; Requête n° 005/2011 - Bm Ao et As Ao c. République du Mozambique et Mozambique Airlines, « Décision » du 16 juin 2011 ; Reg. n° 006/2011 - Association des Juristes d'Afrique pour la Bonne AI c. République de Côte d'Ivoire, « Décision » du 16 juin 2011; Requête n° 007/2011 - Cg Az c. Royaume du Maroc, « Décision » du 2 septembre 2011; Requête n° 008/2011 - Ekollo M. Bl c. République du Cameroun et République fédérale du Nigeria, « Décision » du 23 septembre 2011; Requête n° 010/2011 - Au By'o Ac c. Parlement panafricain, « Décision » du 30 septembre 2011; Reg. N° 012/2011 — Convention Nationale des Syndicats du Secteur Education (CONASYSED) c. République du Gabon, « Décision » du 15 décembre 2011 ; Requête n° 002/2012 - Ba Ai Aw A, M. et Mme AG de Ad c. République d’Afrique du Sud, « décision » du 30 mars 2013 ; Requête n° 004/2012 - Bw Bs Bg et autres c. République d'Afrique du Sud, « décision » du 30 mars 2012 ; Requête n° 005/2012 - Amir Bf Bo c. République du Soudan, « décision » du 30 mars 2012.

642 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 2 (2017-2018)
12. Dans la Demande d’avis consultatif objet de la présente Opinion individuelle, la Cour a conclu qu’elle n'avait pas la compétence personnelle et pourtant elle désigne cet acte par « Avis consultatif », ce qui est pour le moins contradictoire.
13. À mon avis, soit la Cour est compétente, auquel cas elle émet un avis consultatif, soit elle n’a pas compétence en l'espèce et elle n’émet pas d’avis consultatif.
14. Mes éminents collègues Juges ont sans doute été influencés par le fait que dans sa demande, SERAP invitait la Cour à examiner sa qualité pour la saisir, en vertu de l’article 4(1) du Protocole. Et pourtant, cette question aurait été examinée par la Cour, étant donné que conformément à l’article 39(1) du Règlement intérieur de la Cour en tout état de cause, applicable en vertu de l’article 72 du même Règlement, « [La] Cour procède à un examen préliminaire de sa compétence et des conditions de recevabilité de la requête. » (C’est moi qui souligne), avant de pouvoir statuer sur toute affaire dont elle est saisie.
15. À mon avis, l’article 39(1) du Règlement oblige la Cour à procéder à un examen préliminaire afin de vérifier sa compétence et la recevabilité de la requête, une procédure qui, en aucune manière, ne saurait être désignée par « Avis » en soi, même si, dans les cas où la Cour a la compétence juridictionnelle, la décision sur la compétence et la recevabilité forment partie intégrante de l’avis consultatif émis, comme ce fut le cas en la Demande d’avis consultatif n° 002/2013.
16. C’est pour cette raison que je pense que l'examen préliminaire, au sens de l’article 39(1) du Règlement, est une procédure qui est clairement différente de l'émission d’un avis consultatif, même si quelquefois elle en forme une partie intégrante.
17. En d’autres termes, lorsqu’après examen préliminaire la Cour conclut qu’elle n’est pas compétente, elle ne peut en aucun cas désigner par le terme « Avis consultatif » l’acte par lequel elle est parvenue à cette conclusion.
18. En droit comparé, lorsque la Cour interaméricaine des droits de l'homme (CIADH) décide de ne pas émettre d’avis consultatif, elle adopte une forme de « Résolution »'° et non pas un « Avis consultatif ». Même lorsqu'elle émet un « Avis consultatif », elle établit une distinction
16 Résolution de la Cour interaméricaine des droits de l'homme, du 23 juin 2016, Demande d'avis consultatif introduite par le Secrétaire général de l’organisation des Etats américains ; Résolution de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, 27 janvier 2009 ; demande d'avis consultatif introduite par la Commission interaméricaine des droits de l'homme.

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claire entre la section consacrée à sa compétence (dans laquelle elle détermine si elle a compétence sur la demande d'avis consultatif) et la section relative à l'avis consultatif lui-même (dans laquelle elle donne son avis sur la question dont elle a été saisie, dans le cas où elle conclut qu’elle est compétente pour émettre un tel avis consultatif)." 19. Dans la demande d’avis consultatif introduite par le Conseil de la Société des Nations relative à l'affaire Bj c. Finlande, la Cour permanente de justice internationale (CPJI) a implicitement‘ utilisé l'expression « Avis consultatif »°° lorsqu'elle a constaté qu’elle pouvait émettre l'avis consultatif en raison du refus ad hoc de la Bj de reconnaître sa compétence. Toutefois, il s'agit d’un précédent incongru et isolé qui remonte à un siècle et qui ne peut pas être invoqué en l'espèce. En réalité, ce précédent n’a jamais inspiré une quelconque position de la Cour dans ses décisions antérieures sur les demandes
iv. Mon opinion
20. À mon avis, pour les raisons exposées ci-dessus, la Cour devrait utiliser le terme « Décision » pour désigner les actes par lesquels elle procède à un examen préliminaire de sa compétence et de la recevabilité des demandes en vertu des dispositions de l’article 39 de son Règlement intérieur. En effet, la pratique récurrente qui consiste à utiliser le terme « Décision » lorsqu'elle se déclare incompétente pour statuer sur les affaires contentieuses, s'applique parfaitement en matière consultative. Cela d'autant plus que l’article 72 du Règlement intérieur exige de la Cour, pour les avis consultatifs, d'appliquer mutatis mutandis les dispositions relatives à la procédure contentieuse.
21. L'appellation « Décision » éviterait de donner l'impression erronée que l'acte est un avis consultatif, que la Cour n’a pas émis en fait. En revanche, la Cour de céans gagnerait à rester plus cohérente en utilisant les appellations appropriées pour désigner ses actes, ce qui l’amènera à s’aligner sur sa jurisprudence bien établie, dans laquelle elle utilise le terme « Décision » lorsqu’elle détermine sa compétence pour les affaires contentieuses.
17 Avis consultatif OC-21/14 du 19 août 2014 demandé par la République d'Argentine, la République fédérative du Brésil, la République du Paraguay et la République orientale d’Uruguay ; Avis consultatif OC-20/09 du 29 septembre 2009 demandé par la République d'Argentine.
18 Pourquoi pas formellement désignée comme telle. Ce n’est qu'à la fin de la disposition qu’il est fait mention du « (..) Présent Avis … (...) ».
19 Décision de la troisième session ordinaire du 23 juillet 1923, Dossier F. c. V Rôle
Carelie_orientale_Avis_consultatif.pdf, consultée le 24.05.2017.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 002/2015
Date de la décision : 02/11/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2022
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