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03/06/2016 | CADHP | N°002/2013

CADHP | CADHP, Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, 03 juin 2016, 002/2013


Texte (pseudonymisé)
158 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL
Commission africaine des droits de l'homme et des
Libye (fond) (2016) 1 RICA 158

1 (2006-2016)
peuples c.

Commission africaine des droits de l'homme et des peuples c.
République de Libye
Arrêt du 3 juin 2016. Fait en anglais, en français et en arabe, le texte
français faisant foi.
Juges AG, THOMPSON, NIYUNGEKO, OUGUERGOUZ,
TAMBALA, ORÉ, GUISSE, KIOKO, BEN ACHOUR, BOSSA et
MATUSSE
La Cour avait été saisie par la Commission africaine au nom de Am Aq
Az C qui avait été arrêté par une

brigade révolutionnaire » en
Libye. Dans la requête, il était allégué la violation des articles 6 et 7...

158 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL
Commission africaine des droits de l'homme et des
Libye (fond) (2016) 1 RICA 158

1 (2006-2016)
peuples c.

Commission africaine des droits de l'homme et des peuples c.
République de Libye
Arrêt du 3 juin 2016. Fait en anglais, en français et en arabe, le texte
français faisant foi.
Juges AG, THOMPSON, NIYUNGEKO, OUGUERGOUZ,
TAMBALA, ORÉ, GUISSE, KIOKO, BEN ACHOUR, BOSSA et
MATUSSE
La Cour avait été saisie par la Commission africaine au nom de Am Aq
Az C qui avait été arrêté par une « brigade révolutionnaire » en
Libye. Dans la requête, il était allégué la violation des articles 6 et 7 de la
Charte du fait de la détention et du procès intenté à l'encontre du sieur
C. |! était également allégué la violation de ses droits fondamentaux
en raison du non-respect par la Libye de l’ordonnance portant mesures
provisoires. La Cour a estimé que la Libye avait violé les articles 6 et 7 de
la Charte et a ordonné la cessation de la procédure pénale engagée
contre le sieur.C.
Mesures provisoires (non-conformité, 18)
Arrêt par défaut (40-42)
Responsabilité des États (acteur non-étatique, 49)
Recevabilité (épuisement des voies de recours internes, 69, 70)
Liberté et sécurité de la personne (détention au secret, 84)
Procès équitable (jurisdictionextraordinaire, 90, 91 ; droit à un avocat
93-96)
Opinion individuelle : OUGUERGOUZ
Arrêt par défaut (les moyens doivent être fondés en fait et en droit, 6, 16,
17, 27 ; obligations du tribunal en l’absence d’une des parties, 18, 20, 26,
28)
I Les parties
1. La requérante est la Commission africaine de droits de l'homme et des peuples (ci-après désignée « la Commission africaine » ou « la requérante »). Elle a saisi la Cour suite à une communication qui lui a été présentée au nom de Am Ay Az C, citoyen libyen détenu dans un endroit secret.

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2. Le défendeur est l’État libyen qui a ratifié la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (ci-après désignée « la Charte africaine ») le 19 juillet 1986 et le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, (ci-après « le Protocole ») le 19 novembre 2003, et qui a adhéré au Pacte international sur les droits civils et politiques (ci-après désigné « le PIDCP ») depuis le 15 mai 1970.
Il. Objet de la requête
3. La Cour a été saisie de la présente affaire par la Commission africaine par une requête en date du 28 février 2013, introduite en vertu de l’article 34 du Règlement intérieur de la Cour (ci-après « le Règlement »).
4. La requête a été présentée suite à une Communication introduite le 2 avril 2012 devant la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples par Mme Ag A au nom de Monsieur Am AJ C (ci-après « le Détenu »), alléguant de la violation des droits de ce dernier par la Libye (ci-après « le défendeur »), droits garantis par les articles 6 et 7 de la Charte africaine.
5. Suite à cette communication, la Commission africaine a saisi la Cour dès le 8 janvier 2013, d’une requête en indication de mesures provisoires, reçue au Greffe le 31 janvier 2013, et enregistrée sous le N° 002/2013, formée en vertu de l’article 5(1) du Protocole, l’article 29(3) du Règlement intérieur de la Cour (ci-après désigné « le Règlement ») et 3 du Règlement intérieur de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples.
6. Par la suite, la Cour a été saisie d’autres demandes, dont :
| une demande datée du 28 février 2014, reçue au Greffe le 3 mars 2014, tendant à faire constater à la Cour le non-respect par la Libye de l’Ordonnance portant mesures provisoires qu’elle a rendue le 15 mars ;
Il une autre demande qualifiée de « requête introductive d'instance », portant la même date et reçue au Greffe le 03 mars 2014, dans laquelle la Commission africaine « demande à la Cour de conclure à la violation des articles 6 et 7 de la Charte africaine par l’État défendeur ».
iii. enfin, le 15 mai 2015, une requête reçue au Greffe le 28 mai 2015 était introduite devant la Cour en vertu de l’article 55 de son Règlement, « aux fins d’un arrêt par défaut ».
A Faits à l’origine de l’affaire
7.11 ressort de la Communication que le Conseil national de Transition, reconnu alors comme Gouvernement de Libye, le 19 novembre 2011, a arrêté le Détenu, l’a placé en détention et maintenu dans l’isolement, sans accès ni à sa famille, ni à ses amis, ni à un conseil quelconque, le Détenu n’ayant fait l’objet d'aucune inculpation, encore moins d’une procédure judiciaire, et que le Détenu est gardé au secret. Elle allègue que « la vie de la victime est en danger et que son intégrité physique et sa santé risquent de subir des dommages irréparables ».

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8. Face à cette situation, le 18 avril 2012, la Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples a ordonné des mesures provisoires pour faire cesser tout préjudice irréparable au Détenu comme demandé l'auteur de communication. Toutefois, ces mesures auraient été par ignorées par l’État la défendeur malgré les rappels à lui adressés par la
requérante.
B. Violations alléguées
9. Aux termes de la requête, la Commission africaine allègue que la Libye aurait violé les articles 6 et 7 de la Charte africaine relatifs, respectivement, au droit de l’individu à la liberté et à la sécurité de sa personne et au droit à ce que sa cause soit entendue, du fait de la privation du Détenu de ses droits fondamentaux en le maintenant continuellement en détention, de façon secrète depuis le 19 novembre 2011, sans qu’il ait eu la possibilité de se faire assister par un conseil de son choix.
10. En outre, la Commission africaine affirme que la Libye aurait violé les droits du Détenu par son refus de se conformer à l’Ordonnance portant mesures provisoires rendue par la Cour le 15 mars 2013.
C. Mesures demandées par la requérante
11. Dans la requête aux fins d'arrêt par défaut du 15 mai 2015, la Cour est priée de prendre les mesures suivantes :
a) Rendre un arrêt par défaut contre la Libye en vertu de l’article 55 du Règlement intérieur de la Cour et constater que la Libye a violé et continue de violer les droits de M. C garantis par les articles 6 et 7 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (« la Charte ») ;
b) Accorder toutes les mesures de réparation sollicitées au paragraphe 2.4 de la requête sur le fond introduite le 24 février 2014 ;!
c) Dire et juger que la Libye ne s'est pas conformée aux mesures provisoires ordonnées par la Cour en vertu de l’article 51(4) du Règlement intérieur de la Cour ;
1. « Comme conséquence de cette violation et en guise de mesures de réparation efficaces en l'espèce, la requérante prie la Cour d’ordonner à l’État défendeur de protéger tous les droits de M. C consacrés par la Charte en suspendant les procédures pénales engagées devant les juridictions internes et en s'assurant dans les plus brefs délais :
a) qu'il constitue un conseil de son choix pour assurer sa défense ;
b) que le conseil qu'il s’est librement choisi puisse s’entretenir avec lui à huis clos ; c) que le conseil qu’il s’est librement choisi dispose d’un délai raisonnable pour examiner les procédures préliminaires engagées jusqu’à présent et a la possibilité sans entrave aucune de contester la légalité de ces procédures ;
d) que les amis et les membres de la famille de M. C peuvent lui rendre visite, sous réserve de mesures de sécurités justifiables et de sa volonté ;
e) que son conseil et ses témoins bénéficient de mesures de protection adéquates ;
f) que l’État défendeur fasse rapport à la Cour dans un délai de soixante (60) jours, sur les mesures qu’il a prises en vue de se conformer à l'ordonnance de la Cour dans cette affaire ».

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d) Notifier au Conseil Exécutif et aux parties les décisions ci-dessus et les publier conformément aux articles 51(4), 64(2) et 65 du Règlement intérieur de la Cour ;
e) Prendre toutes autres mesures qu’elle juge appropriées et nécessaires afin de garantir les droits de M. Am AJ C à un procès équitable ».
II. _ Procédure devant la Cour
12. Le 31 janvier 2013, la Cour a reçu une requête introduite par la requérante et dirigée contre le défendeur.
13. En application de l’article 35(2) du Règlement, le Greffier a, par lettre en date du 12 mars 2013 adressée au Ministère des Affaires étrangères de la Libye avec copie à l'Ambassade de la Libye à Addis- Abeba, communiqué une copie de la requête au défendeur. Dans cette même lettre, le Greffier a demandé au défendeur d’indiquer, dans les trente (30) jours de la réception de la requête, les noms et adresses de ses représentants conformément à l’article 35(4) du Règlement, et de répondre à la requête dans un délai de soixante (60) jours, conformément à l’article 37 du Règlement.
14. Conformément à l’article 35(3) du Règlement, le Greffier a, par lettre en date du 12 mars 2013, adressé copie de ladite requête à la Présidente de la Commission de l’Union africaine, et par son intermédiaire, au Conseil exécutif de l'Union africaine et aux autres Etats parties au Protocole relatif à la Charte africaine portant création de la Cour.
15. En application de l’article 27(2) du Protocole et 51(1) du Règlement, la Cour a usé de son pouvoir discrétionnaire pour ordonner des mesures provisoires et par Ordonnance en date du 15 mars 2013, la Cour a, à l’unanimité, ordonné au défendeur de prendre les mesures suivantes :
« 1 S'abstenir de toute action portant sur des procédures judicaires, des enquêtes ou de détention, qui pourraient causer des dommages irréparables au Détenu, en violation des dispositions de la Charte ou des autres instruments internationaux auxquels la Libye est partie ;
2 Permettre au Détenu de se faire assister par un conseil de son choix ; 3 Permettre au Détenu de recevoir la visite des membres de sa famille ; 4 S’abstenir de prendre des mesures susceptibles de porter atteinte à l'intégrité physique et mentale ainsi qu'à la santé du Détenu ;
5 Faire rapport à la Cour dans un délai de quinze jours (15) de la réception, sur les mesures prises pour mettre en œuvre la présente ordonnance ».
16. En application de l’article 51(3) du Règlement, l’Ordonnance portant mesures provisoires a été, le 15 mars 2013, communiquée aux Parties et à la Présidente de la Commission de l'UA.
17. Le défendeur devait déposer son rapport sur la mise en œuvre de l’Ordonnance au plus tard le 10 avril 2013. Cependant, face à l'absence de réponse du défendeur, la Cour a, le 12 avril 2013, décidé de sa propre initiative, de lui accorder un délai supplémentaire de quinze (15) jours. Une lettre en ce sens a été signifiée au défendeur par

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l'intermédiaire de ses Ambassades à AM AOAfAL et à Dar es-Salaam (République-Unie de Tanzanie), respectivement les 16 et 22 avril 2013. En vertu de ce délai supplémentaire, le défendeur devait déposer sa réponse indiquant les mesures par lui prises pour mettre en œuvre l’Ordonnance portant mesures provisoires rendue par la Cour, au plus tard le 30 avril 2013. Malgré la prolongation des délais, le défendeur n’a pas déposé de réponse.
18. Pour cette raison, en application de l’article 51(4) de son Règlement, la Cour a porté la question du non-respect par la Libye de l’Ordonnance portant mesures provisoires à l'attention de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine, par l'intermédiaire du Conseil exécutif, à ses vingt-quatrième,? vingt- cinquième,* vingt sixième* vingt-septième* et vingt-huitième® sessions ordinaires. Dans ses décisions, le Conseil exécutif a exhorté la Libye à collaborer avec la Cour et à se conformer à l’Ordonnance de celle-ci. Malgré cela, l'Etat défendeur a continué d'ignorer l’Ordonnance de la Cour et les décisions des organes politiques de l’Union.
19. Le 29 mai 2013, c’est-à-dire en dehors des délais prescrits, le défendeur a adressé une note verbale” au Conseiller juridique de la Commission de l’UA, dont copie est parvenue à la requérante le 17 juin 2013, et à la Cour le 9 juillet 2013. Dans cette note verbale, le défendeur ne fait valoir aucun moyen de défense et se contente de transmettre à la Cour et à la requérante les documents suivants :
i) une « note » constituée de deux pages d'observations ;
il) une note non datée du Comité d'enquêtes et de révision du Cabinet du Procureur général de Libye recommandant la jonction de la procédure engagée contre M. C au niveau interne et celle engagée contre d’autres accusés dans l’instance n° 630/2012 ;
iii) l’Ordonnance n° 2/1371 du Procureur général, qui relève qu’aux termes de la loi n° 3/1371 W.R., le bureau du Procureur peut solliciter une prorogation du délai de détention provisoire auprès d’un tribunal au cas où le premier délai de détention provisoire expire avant la clôture des enquêtes, à condition que la durée maximale cumulée de la détention provisoire ne dépasse pas 90 jours. Elle fait par ailleurs obligation au Procureur général ou à son adjoint de solliciter des prorogations de la durée de détention provisoire ;
iv) la Décision n° 03/1435 du Procureur général datée du 2 janvier 2013 donnant mandat à M. Bo Bx Be pour solliciter
2 Janvier 2014, voir rapport de la vingt-quatrième session ordinaire du Conseil Exécutif de l’Union Africaine tenue à AM AOAfAL du 21 - 28 Janvier 2014, page 38.
3 Juin 2014, voir rapport de la vingt-cinquième session ordinaire du Conseil Exécutif de l’Union Africaine tenue à Malabo, Guinée équatoriale du 20-24 juin, page 42.
4 Janvier 2015 voir rapport de la vingt-sixième session ordinaire du Conseil Exécutif de l’Union Africaine tenue à Addis-Abeba, Ethiopie, du 23-27 janvier 2015, page 36. 5 Juin 2015 voir rapport de la vingt-septième session ordinaire du Conseil Exécutif de l’Union Africaine tenue à Johannesburg, Afrique du Sud, du 7-12 juin 2015, page 34. 6 Juin 2015 voir rapport de la vingt-huitième session ordinaire du Conseil exécutif de l’Union africaine tenue à Addis-Abeba, Ethiopie, du 23 au 28 janvier 2016, page 1. 7 N° 2445-2013, référence de la note verbale du 29 mai 2013 adressée au Conseiller juridique de l’Union Africaines.

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l'autorisation du juge des appels auprès du Tribunal de première instance pour proroger la durée de détention des personnes accusées dans l'affaire sur laquelle portent les enquêtes menées par le comité créé en vertu de la décision n° 98/2011 ;
v) une lettre du Procureur adjoint du Comité d’enquête datée du 2 janvier 2013 transmettant la résolution n° 03/2013 sur la prorogation de la durée de détention de l’accusé dans le cadre des enquêtes en cours menées par le Comité ;8
vi) une lettre du Procureur adjoint datée du 8 octobre 2012 adressée à tous les Procureurs de la République leur demandant de se conformer à la décision n° 42/2003 sur le mandat des Procureurs en matière de prorogation de la durée de détention provisoire ;
vii) une ordonnance de détention provisoire délivrée dans le cadre de l'affaire n° 229-2012 pour le chef d’ « émission d'ordres sans base légale », par laquelle un Procureur de la République au sein du Cabinet du Procureur général a émis un mandat de détention provisoire à l'encontre de M. C, et le procès-verbal y relatif prévoyant que « la durée de détention provisoire de l'accusé court à compter du 18 juin 2012, date de son acquittement dans l'affaire de corruption » ;
viii) une série d’ordonnances de prorogation de la durée de détention provisoire datées respectivement du 1er août 2012, du 13 septembre 2012, du 30 octobre 2012, du 13 décembre 2012, du 27 janvier 2013, du 26 février 2013, du 26 mars 2013 et du 24 avril 2013, toutes signées du Procureur général de Libye et indiquant que « l'autorisation du magistrat compétent » a été obtenue ;
ix) une série de requêtes en prorogation de la durée de détention provisoire dans l'affaire n° 299-2012, signées par M. Bo Bx, du Cabinet du Procureur général, adressées au juge des appels du Tribunal de Tripoli Sud et datées respectivement du 23 janvier 2013, du 25 février 2013, du 25 mars 2013 et du 23 avril 2013, sollicitant toutes des prorogations du délai de détention provisoire, au motif que les enquêtes sont « encore en cours », afin de « permettre la poursuite des enquêtes et de l'examen des pièces du dossier » ;
x) une série de comptes rendus d’audiences datés respectivement du 1er août 2012, du 13 septembre 2012, du 30 octobre 2012, du 13 décembre 2012, du 27 janvier 2013, du 26 février 2013, du 26 mars 2013 et du 24 avril 2013 au cours desquelles le Tribunal a toujours décidé de proroger la détention provisoire du Détenu.°
20. Par lettre datée du 2 août 2013, le Greffier a communiqué à la requérante la lettre du Conseiller juridique de la Commission de l’Union africaine du 29 mai 2013, transmettant la note verbale du défendeur. Un délai de trente (30) jours à partir de la notification a été fixé à la requérante pour faire part à la Cour de ses observations.
21. Par lettre datée du 28 juillet 2013, la requérante a demandé une prorogation de délai d’un (1) an pour le dépôt de ses observations. La lettre a été transmise le même jour au par l'intermédiaire de l'Ambassade de la Libye à Addis-Abeba, défendeur, Éthiopie, avec copie à la Secrétaire exécutive de la Commission.
8 La résolution n° 03/2013 n’a pas été jointe à la lettre
9 II ne ressort pas de ces comptes rendus que le Détenu aurait bénéficié d'une forme quelconque de représentation juridique à ces audiences.

164 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 1 (2006-2016)
22. Par lettre datée du 12 août 2013, avec copie à l'Ambassade de la Libye à Addis-Abeba, adressée au Greffier, la requérante, rappelant les termes du rapport intérimaire par lequel il a été notifié au Conseil exécutif de l’'UA le non-respect de l’Ordonnance portant mesures provisoires, a transmis une lettre des auteurs de la Communication faisant part d’une menace imminente d’exécution de la victime et demandant une intervention urgente de la Cour.
23. Par lettre datée du 27 août 2013, adressée à la requérante, avec copie à l'Ambassade de la Libye à Addis-Abeba, le Greffier l’a informée que suite à la demande de prorogation de délai d’un (1) an en vue du dépôt des conclusions sur le fond de l'affaire, la Cour a décidé de proroger la date de dépôt des observations au 28 février 2014, compte tenu de la nature de l'affaire et des mesures demandées.
24. Par lettre datée du 28 février 2014, la requérante a déposé une « requête interlocutoire » concernant le non-respect de l’'Ordonnance portant mesures provisoires rendue par la Cour le 15 mars 2013.
25. Le même jour, à savoir le 28 février 2014, la requérante a introduit une autre pièce intitulée « requête introductive d'instance ». Elle traite des faits, de la nature de l'affaire, de la preuve de l'épuisement des voies de recours internes, des violations alléguées, de la recevabilité de la requête et des mesures demandées à la Cour.
26. Par lettre du 20 mars 2014, adressée au Ministre des Affaires étrangères de la Libye, le Greffe a transmis copies de la « requête interlocutoire » ainsi que de la requête introductive d’instance en indiquant que le défendeur disposait d’un délai de trente (30) jours, à compter de la date de notification, pour déposer sa réponse.
27. Par note verbale du 16 mai 2014,"° reçue au Greffe de la Cour le 17 mai 2014, l'Etat défendeur déclare soumettre à la Cour un rapport sur la mise en œuvre de l’Ordonnance portant mesures provisoires rendue le 15 mars 2013 par la Cour. Dans cette note, l'Ambassade de la Libye en Éthiopie et sa représentation permanente auprès de l’Union africaine a déclaré ce qui suit :
« Le bureau du Procureur de l’État de la Libye est très disposé et soucieux de veiller à ce que le procès de Saif al-lslam et les autres accusés soit un procès juste et équitable, conformément aux normes juridiques.
Le bureau du Procureur de l’État de la Libye est disposé à coopérer avec toute organisation juridique pour s'assurer, par une visite de terrain au centre de redressement et de réhabilitation, de l’endroit où il est Détenu, ainsi qu’à lui permettre de vérifier et de confirmer les informations fournies. Le bureau du Procureur de l’État de la Libye est disposé à permettre à toute organisation légalement accréditée d'assister aux séances du procès de Am AJ B devant la Chambre pénale compétente de la Cour d’appel de Tripoli.
Le bureau du Procureur de l’État de la Libye réitère sa disponibilité à répondre à toute question, demande de renseignements ou demande d’information concernant les informations fournies ».
10 Réf. 3/4/548, note verbale portant réponse de la Libye, suite à la demande de la Cour de lui faire rapport sur les mesures prises concernant les circonstances de détention de Saif al Az C

AH c. Libye (fond) (2016) 1 RJCA 158 165
28. Lors de sa trente-troisième session ordinaire tenue du 26 mai au 13 juin 2014, la Cour a examiné ladite « note verbale » et a conclu qu’elle ne constitue pas le rapport sur la mise en œuvre, demandée par la Cour dans son Ordonnance du 15 mars 2013.
29. Par note verbale en date du 6 juin 2014, dont copie a été adressée à la requérante, le Greffier a informé le défendeur que la Cour avait pris note du défaut de réponse aux deux requêtes, et que la Cour lui avait accordé d’office une prorogation de délai de 15 jours pour répondre à la requête sur le fond et à la requête interlocutoire. L'État défendeur a par ailleurs été informé que sa réponse transmise par note verbale portant la référence 3/4/548 n’était pas conforme aux exigences de l’Ordonnance portant mesures provisoires. La Cour a demandé au défendeur de lui soumettre un rapport sur la mise en œuvre des mesures provisoires qu’elle avait ordonnées.
30. En outre, par lettre du 16 juin 2014 adressée au Ministre des Affaires étrangères de l’État défendeur, dont copies ont été adressées à l'Ambassade de la Libye en Ethiopie ainsi qu'à la Secrétaire exécutive de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, le Greffier a indiqué qu’à sa trente-troisième session ordinaire sus-indiquée, la Cour a constaté que la Libye n’avait pas encore répondu à la requête interlocutoire ni à la requête sur le fond contenues dans la requête transmise au défendeur le 20 mars 2014 et que faute de réponse, la Cour serait amenée à appliquer, sans aucune autre notification, les dispositions de l’article 55 de son Règlement qui traite de la procédure du jugement par défaut.
31. Le Greffe a de nouveau attiré l'attention du défendeur sur son non- respect des mesures provisoires ordonnées par la Cour le 15 mars 2013, notamment par lettre du 14 juillet 2014 adressée à M. Au Bw Ab, directeur adjoint des Affaires juridiques du Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale de Libye, dont copies ont été adressées à la requérante d’une part, et de l’autre, à l'Ambassade de la Libye en Ethiopie.‘
32. Par lettre du 18 mars 2015"? adressée à la requérante, et dont copies ont été communiquées au défendeur par le biais du Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, aux Ambassades libyennes en Tanzanie et en Ethiopie, le Greffe a confirmé que le défendeur n’a répondu ni à la requête sur le fond, ni à la requête interlocutoire et que la Cour, à sa trente-sixième session ordinaire tenue du 9 au 27 mars 2015, lui avait demandé d'attirer l'attention de la requérante sur les dispositions pertinentes de l’article 55 du Règlement en vue du déclenchement éventuel d’une procédure par défaut dans les trente (30) jours suivant la réception.
11 Les services FEDEX/Arusha ont indiqué que cette lettre n'a pas pu être délivrée à son destinataire en raison des événements qu’a connu l'aéroport international de Tripoli à cette date. Le Greffe a alors réacheminé la lettre vers l'Ambassade de Libye en Ethiopie où elle a été dûment reçue contre décharge le 18 août 2014 à 14 heures.
12 Référence AFCHPR/Reg./APPL/002/2013/022

166 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 1 (2006-2016)
33. Par lettre datée du 16 avril 2015, la requérante a informé la Cour de son intention d’avoir recours à la procédure prévue par l’article 55 du Règlement, et qu'à cet effet, une requête allait lui être communiquée dans les trente (30) jours.
34. Par lettre du 15 mai 2015, la requérante a transmis à la Cour une requête aux fins d'arrêt par défaut.
35. Par lettre du 3 juillet 2015, et en application de l’article 35(3) du Règlement, le Greffe a informé le défendeur du dépôt de la requête susmentionnée et lui a transmis le texte de la requête et ses annexes ainsi que la Charte africaine, le Protocole relatif à la Charte africaine, le Règlement intérieur de la Cour et les Instructions de procédure de la Cour.
36. Cependant, au mois de juillet 2015, des informations ont fait état de la condamnation à mort par contumace du Détenu par la Cour d'Assises de Tripoli (Libye) malgré l’Ordonnance de la Cour.
37. Vivement préoccupée par ces informations, la Cour a, le 10 août 2015, en application de l’article 27(2) du Protocole et de l’article 51(1) de son Règlement, rendu une deuxième Ordonnance dans laquelle elle :
« fait observer que l'exécution de la peine capitale par le Gouvernement libyen constituera une violation de ses obligations internationales découlant de la Charte, du Protocole et des autres instruments des droits de l'homme dûment ratifiés par la Libye » (para 10) et :
i Ordonne à la Libye de prendre les mesures nécessaires pour préserver la vie de Mr Am C en s'abstenant de toute action qui pourrait lui causer des dommages irréparables et compromettre l’examen de l'affaire qui est pendante devant la Cour ;
ii Ordonne à la Libye de veiller à ce que l’accusé bénéficie d’un procès équitable conformément aux normes internationalement reconnues en matière de procès équitable, notamment l'indépendance du système judiciaire et l’impartialité dans la procédure, ainsi que la possibilité pour les avocats de l'accusé, sa famille ou des témoins, le cas échéant, de participer au procès ;
ii Ordonne à la Libye de prendre des mesures urgentes pour arrêter et poursuivre les auteurs de la détention illégale de Mr Am C ; et iv Ordonne à la Libye de faire rapport à la Cour dans un délai de quinze jours (15) suivant réception de la présente ordonnance, des mesures prises pour la mettre en œuvre ».
IV. Sur le bien-fondé de la demande de rendre un arrêt par défaut
38. La requérante prie la Cour de :
« Rendre un arrêt par défaut contre la Libye en vertu de l’article 55 du Règlement intérieur de la Cour et de constater que la Libye a violé et continue de violer les droits de M. C garantis par les articles 6 et 7 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples « la Charte »)». 39. Afin de répondre à cette demande de la requérante, la Cour doit rappeler les dispositions pertinentes de l’article 55 de son Règlement relatives au « jugement par défaut » et vérifier si toutes les conditions posées par cet article sont réunies dans le cas de l'espèce.

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40. L'article 55 du Règlement est libellé comme suit :
« Lorsqu'une partie ne se présente pas ou s'abstient de faire valoir ses moyens, la Cour peut, à la demande de l’autre partie, rendre un arrêt par défaut après s'être assurée que la partie défaillante a dûment reçu notification de la requête et communication des autres pièces de la procédure. La Cour, avant de faire droit aux prétentions de la partie comparante, doit s'assurer non seulement qu’elle a compétence, mais également que la requête est recevable et que les conclusions sont fondées en fait et en droit »
41. En ce qui concerne la condition relative à la vérification « que la partie défaillante a dûment reçu notification de la requête et communication des autres pièces de la procédure », il ressort de l'exposé des étapes de la procédure ci-dessus rappelées que la requérante d’une part, et le Greffe d’autre part, ont notifié toutes les pièces de procédure au défendeur. En effet, la requête en indication de mesures provisoires en date du 8 janvier 2013, reçue le 31 janvier 2013 par la Cour, la requête interlocutoire du 28 février 2013, demandant à la Cour de constater le non-respect par le défendeur de l’'Ordonnance de la Cour, la « requête introductive d'instance » du 28 février 2013, et enfin la requête aux fins d'arrêt par défaut ; ainsi que les deux Ordonnances rendues par la Cour respectivement le 15 mars 2013 et 10 août 2015 ont été notifiés au défendeur.
42. La Cour conclut donc que la condition pour le prononcé d’un « jugement par défaut » est remplie. Non seulement toutes les pièces de procédure ont été notifiées au défendeur, mais ce dernier, s’il a adressé à la Cour deux notes verbales en réponse à l’Ordonnance du 15 mars 2013, s’est régulièrement abstenu de faire valoir ses moyens de défense malgré les prorogations de délais qui lui ont été accordées.
43. La Cour doit en conséquence poursuivre l'examen de l'affaire conformément à l’article 55 (2) de son Règlement en vue de s'assurer de sa compétence et de la recevabilité de la requête.
V. Compétence de la Cour
44. Aux termes de l’article 39(1) de son Règlement, la Cour doit procéder à un examen préliminaire de sa compétence. À cet égard, la Cour fera observer que même lorsque l’État défendeur n’a pas soulevé d'exception en la matière, elle doit motu proprio s'assurer qu’elle a compétence pour connaître de la requête au plan personnel (ratione personae), matériel (ratione materiae), temporel (ratione temporis) et territorial (ratione loci).
45. La Cour rappelle que dans son Ordonnance en indication de mesures provisoires en date du 15 mars 2013, elle avait estimé qu’elle avait compétence prima facie pour connaître de la requête et avait en conséquence indiqué les mesures provisoires demandées.
46. Toutefois, l'Ordonnance en indication de mesures provisoires prise par la Cour ne préjuge en rien de sa compétence pour connaître du fond de l'affaire. La Cour, à ce stade, doit procéder à un examen exhaustif de sa compétence.

168 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 1 (2006-2016)
A. Compétence personnelle
47. Dans la présente affaire, la requérante est, comme on l’a indiqué, la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples. Or, selon l’article 5(1) du Protocole, la Commission africaine est une des entités/institutions habilitées à saisir la Cour. Par voie de conséquence, la Cour a la compétence personnelle dans le chef de la requérante pour examiner cette affaire.
48. Comme cela a été également relevé plus haut, le défendeur dans la présente espèce est la Libye, Etat qui a ratifié la Charte le 19 juillet 1986, et le Protocole le 19 novembre 2003, tous, textes en vigueur à son égard. Or, selon l’article 3(1) du Protocole, « [Ja Cour a compétence pour connaître de toutes les affaires et de tous les différends dont elle est saisie concernant l'interprétation et l'application de la Charte, du présent Protocole, et de tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l'homme et ratifié par les Etats concernés » (Italique ajouté). Par conséquent, la Cour a la compétence personnelle dans le chef du défendeur pour connaître de la présente affaire.
49. || ressort de la requête que Am Aq Az C est détenu en Libye par une « brigade révolutionnaire ». Toutefois, de l'avis de la Cour, l'État défendeur est responsable de ses actions autant que de ses omissions. Il a en effet, l'obligation d'adopter des mesures
veiller, arte. sur son territoire, à l'application des droits garantis au titre de pour la
50. Ainsi que cela ressort du projet d’articles de la Commission du droit international des Nations Unies sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite :19 « Tout fait internationalement illicite de l’État engage sa responsabilité ». D'après l’article 9 du même projet : « Le comportement d’une personne ou d’un groupe de personnes est considéré comme un fait de l’État d’après le droit international si cette personne ou ce groupe de personnes exerce en fait des prérogatives de puissance publique en cas d'absence ou de carence des autorités officielles et dans des circonstances qui requièrent l'exercice de ces prérogatives ». Il incombe donc à « l’État responsable du fait internationalement illicite (...) d’y mettre fin (...) ». La Cour pénale internationale a adopté la même position que la Cour de céans en estimant que les perturbations affectant la Libye ne sauraient exonérer le défendeur de son obligation de coopérer avec la CPI en lui remettant Am AJ C. La chambre préliminaire affirme que : « La Chambre a conscience de l’instabilité des conditions politiques et de sécurité en Libye et est sensible aux graves difficultés auxquelles font actuellement face les autorités de ce pays, ainsi qu'à la nécessité pour elles de concentrer leurs efforts et leurs ressources sur le rétablissement de la stabilité et de l’ordre public, comme l’a avancé la Libye. Néanmoins, la Chambre ne saurait ignorer ses propres responsabilités dans le cadre des procédures et son devoir de faire
13 Document annexé à la Résolution 56/83 de l'Assemblée générale des Nations Unies du 12 décembre 2001.

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tous les efforts possibles pour protéger les droits des parties et les intérêts des victimes ». ‘“
51. La Cour fait observer à cet égard que lorsqu'elle est saisie par la Commission africaine en vertu de l’article 5.1 du Protocole, la question de savoir si l'Etat défendeur doit avoir fait la déclaration de reconnaissance de sa compétence, requise par l’article 34.6 dudit Protocole, '“ ne se pose pas. En effet, comme cela ressort clairement de cet article lu conjointement avec l'article 5.3 du Protocole, '“ la déclaration de reconnaissance de la compétence dont il s'agit n’est applicable qu’en cas de saisine de la Cour par des individus ou des organisations non-gouvernementales.
52. || ressort des considérations qui précèdent que la Cour est compétente rationae personae pour se prononcer sur l'affaire sous examen.
B. Compétence matérielle
53. Pour ce qui est de la compétence matérielle (rationae materiae) de la Cour, l’article 3(1) du Protocole dispose que celle-ci « a compétence pour connaître de toutes les affaires et de tous les différends dont elle est saisie concernant l'application et l'interprétation de la Charte, du présent Protocole et de tout autre instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifiés par les Etats concernés ».
54. Dans la présente affaire, la requérante allègue la violation par l’État défendeur des articles 6 et 7 de la Charte. Par conséquent, l'affaire soumise par la requérante relève bien du domaine de compétence matérielle attribué à la Cour par le Protocole car il s'agit effectivement d’une affaire qui porte sur l’application de dispositions pertinentes de la Charte à laquelle la Libye est partie.
C. Compétence temporelle
55. Pour ce qui est de la compétence temporelle (rationae temporis), la Cour considère que dans la présente affaire, les dates pertinentes à retenir sont celles de l'entrée en vigueur, à l’égard de défendeur, de la Charte, le 26 mars 1987 et du Protocole, le 8 décembre 2003.
56. La Cour constate qu’il ressort de la requête que les violations alléguées de la Charte se sont produites pour la première fois en 2011 et se poursuivent à ce jour.
14 (ICC-01/11-01/11 Date : 10 décembre 2014) (https://Www.ice-epi.int/Court Records/ CR2014 10129.PDF)
15 L'article 34(6) du Protocole dispose : « À tout moment à partir de la ratification du présent Protocole, l'État doit faire une déclaration de compétence de la Cour pour recevoir les requêtes énoncées à l’article 5(3) du présent Protocole. La Cour ne reçoit aucune requête en application de l’article 5(3) intéressant un État partie qui n’a pas fait une telle déclaration ».
16 L'article 5(3) du Protocole stipule : « la Cour peut permettre aux individus ainsi qu’aux organisations non gouvernementales (ONG) dotées du statut d’observateur auprès de la Commission d’introduire des requêtes directement devant elle, conformément à l’article 34(6) de ce Protocole ».

170 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 1 (2006-2016)
57. En conséquence, et étant donné que les faits rapportés sont postérieurs à l’entrée en vigueur du Protocole, la Cour conclut qu’elle a la compétence temporelle pour connaître des allégations de violations du droit à la liberté et du droit au procès équitable soulevées dans cette affaire.
D. Compétence territoriale
58. La Cour observe enfin que s'agissant de la compétence territoriale (ratione loci), il ne fait l'ombre d’aucun doute que les faits se produisent sur le territoire relevant de l'autorité de la Libye.
59. La Cour en conclut qu’au moment de la survenance des faits et à ce jour, la Libye étant partie à la Charte et au Protocole, les deux instruments sont en vigueur à son égard et sur son territoire et que sa compétence territoriale est ainsi établie.
60. Il résulte des considérations qui précèdent que la Cour a compétence pour examiner les violations des droits de l'homme alléguées par la requérante.
VI. Recevabilité de la requête
61. La Cour rappelle qu’en vertu de l’article 39 de son Règlement intérieur, « la Cour procède à un examen préliminaire (….) des conditions de recevabilité de la requête telles que prévues par les articles 50 et 56 de la Charte et de l’article 40 du présent Règlement ».
62. Aux termes de l’article 6(2) du Protocole : « la Cour statue sur la recevabilité des requêtes en tenant compte des dispositions énoncées à l’article 56 de la Charte ».
63. L'article 40 du Règlement, qui reprend en substance le contenu de l’article 56 de la Charte, dispose :
« En conformité avec les dispositions de l’article 56 de la Charte auxquelles renvoie l’article 6.2 du Protocole, pour être examinées, les requêtes doivent remplir les conditions ci-après :
1. Indiquer l'identité de leur auteur même si celui-ci demande à la Cour de garder l'anonymat ;
2. Être compatibles avec la Charte de l'Organisation de l’unité africaine ou avec la présente Charte ;
3. Ne pas contenir des termes outrageants ou insultants ;
4. Ne pas se limiter à rassembler exclusivement des nouvelles diffusées par les moyens de communication de masse ;
5. Être postérieures à l'épuisement des recours internes s'ils existent, à moins qu’il ne soit manifeste à la Commission que la procédure de ces recours se prolonge de façon anormale ;
6. Être introduites dans un délai raisonnable courant depuis l’épuisement des recours internes ou depuis la date retenue par la Commission comme faisant commencer à courir le délai de sa propre saisine ;
7. Ne pas concerner des cas qui ont été réglés conformément soit aux principes de la Charte des Nations Unies, soit de la Charte de l’Organisation de l'Unité africaine et soit des dispositions de la présente Charte ».

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64. La Cour relève que les conditions relatives à l’identité des requérants, à la compatibilité de la requête avec l’Acte constitutif de l'Union africaine et avec la Charte, au langage utilisé dans la requête, à la nature des preuves et au principe non bis in idem, (alinéas 1, 2, 3, 4 et 7 de l’article 40 du Règlement intérieur) ne sont pas en discussion. La Cour observe également que rien dans le dossier qui lui a été soumis par les parties ne suggère que l’une ou l’autre de ces conditions pose problème.
65. Par ailleurs, dans la présente affaire, comme la Cour l’a fait observer (supra, paragraphe 41), en s'abstenant de répondre à la requête qui lui a été adressée et en dépit des prorogations de délais accordées, le défendeur n’a fait aucune observation relativement à la question de l'épuisement des voies de recours internes et à celle liée au délai de saisine de la Cour.
66. Pour ce qui concerne l'épuisement des voies de recours internes la requérante affirme que le Code de procédure pénale libyen comporte diverses dispositions, « qui en principe réglementent la détention, et octroient au Détenu le droit de se plaindre contre sa détention ». Elle cite notamment, dans la requête introductive d'instance, les articles 33, 176, 177. La requérante soutient également que la première année de détention de M. C a été régie par des procédures en vigueur devant le tribunal populaire, déclarées inconstitutionnelles. Selon ces procédures, le Procureur de la République pouvait proroger unilatéralement la période de détention sans l'autorisation préalable d’un juge. Ce n'est qu'après une année de détention que les procédures prévues par le Code pénal libyen sont redevenues applicables. Mais dans la pratique, l'accessibilité et l’efficacité desdits recours étaient contestables.
67. Au paragraphe 82.1 de son arrêt du 14 juin 2013 relatif à la jonction d’instances des requête n°009/2011 -Tanganyika Law Aa et The AI and Bp An Centre et n°011/2011 Bj Bi Bh Av c. République-Unie de Tanzanie, la Cour a affirmé que les recours internes qui doivent être épuisés préalablement à sa saisine ne peuvent être que des recours juridictionnels effectifs, disponibles et suffisants. En outre, « un recours est considéré comme disponible si le Demandeur peut poursuivre une action sans aucune entrave », De même, dans la requête n°013/2011 — Ayants droit de feus Bs et autres c. Bl Cb, arrêt du 28 mars 2014, para 68, la Cour a conclu qu’un recours efficace est un recours « qui produit l’effet qu’on en attend » ; dès lors, l'efficacité d’un « recours en tant que tel se mesure à sa capacité à remédier à la situation dont se plaint celui ou celle qui l’exerce ».
68. Il appert de manière claire des faits de l'espèce que la détention au secret, l'isolement par une brigade révolutionnaire, le fait de n’avoir pas accès à un conseil ou à un juge lors des procédures de prorogation n'étaient pas de nature à permettre au Détenu d’user des dispositions applicables en matière de recours. En outre, il ressort des documents produits par la requérante que le Détenu n’a pas pu bénéficier de ces voies de recours, si tant est qu’elles étaient disponibles.

172 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 1 (2006-2016)
69. || a été en effet traduit dans un premier temps devant une juridiction d'exception dénommée « Tribunal populaire » déclarée, le 23 décembre 2012, inconstitutionnelle par la Cour suprême de Libye. En outre, M. C est détenu dans un endroit secret par une brigade révolutionnaire, totalement isolé des siens, n’a pas accès à un conseil de son choix et est condamné à mort par contumace, autant de faits qui constituent des éléments suffisants pour permettre à la Cour de conclure que le Détenu a été empêché d'exercer les recours légalement prévus par la législation libyenne et qu’en conséquence il lui était impossible de satisfaire la condition de l'épuisement des recours internes.
70. Au regard de tout ce qui précède, la Cour conclut que l'exigence de l'épuisement des voies de recours internes n’est pas strictement applicable en l'espèce, du fait que ces voies de recours ne sont pas disponibles et efficaces, et même si elles l’étaient, le Détenu n'avait pas ou n'a pas eu la possibilité de les utiliser. En conséquence, la requérante n’était pas tenue d'exercer une telle voie de recours avant de saisir la Cour.
71. S'agissant de la condition relative au délai raisonnable, la requête initiale a été introduite le 31 janvier 2013, soit moins d’un an après le constat ferme que le défendeur ne s’est pas conformé aux mesures provisoires ordonnées par la Commission le 18 avril 2012. Cette requête se limitait à demander à la Cour des mesures provisoires contre le défendeur. Il s'agit là d’un délai raisonnable.
72. En conséquence, la Cour constate que la condition énoncée à l’article 40(6) du Règlement a été satisfaite.
73. || résulte de ce qui précède que toutes les conditions de recevabilité énoncées à l’article 40 du Règlement intérieur sont remplies.
74. Dès lors que la Cour s’est déclarée compétente pour connaître de l'affaire et qu’elle l’a déclarée recevable, la Cour va maintenant procéder à l'examen du fond de l'affaire.
VII. Fond de l’affaire
75. Dans la requête en date du 28 février 2014, il est allégué la violation par le défendeur des articles 6 et 7 de la Charte.
76. La Cour constate, à titre préliminaire que s’il est admis en droit international que dans des circonstances exceptionnelles, les Etats parties à un instrument des droits de l'homme tel que le Pacte international sur les droits civils et politiques (PIDCP)'7 disposent du droit de dérogation.'8 || n’en demeure pas moins que ce droit comporte des limites dans la mesure où il existe des droits non dérogeables quelle que soit la situation qui prévaut.
77. ll en va ainsi, des droits consacrés par les articles 6 et 7 du PIDCP à savoir le droit à la vie, le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants, droits
17 Conclu à Cd Ba le 16 décembre 1966, entré en vigueur le 23 mars 1976 et auquel la Libye a adhéré le 15 mai 1970.

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consacrés pour la plupart par les articles 6 et 7 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples. La Cour en déduit que malgré la situation politique et sécuritaire exceptionnelle qui prévaut en Libye depuis 2011, l'Etat libyen est internationalement responsable du respect et de la garantie des droits de l'homme énoncés par les articles 6 et 7 de la Charte.
A. Violation alléguée de l’article 6 de la Charte
78. La requérante allègue que M. C en détention depuis le 19 novembre 2011 n’a été présenté à aucune juridiction pour contester sa détention. Elle soutient également que la détention de M. C a été plusieurs fois prorogée sans aucun contrôle juridictionnel, et que son lieu de détention est resté toujours secret.
79. Par ailleurs, dans sa requête, la Commission, se fondant sur sa propre jurisprudence, estime que la détention au secret prolongée constitue une grave violation des droits de l'homme qui peut engendrer d’autres violations telles que la torture, le mauvais traitement ou l’interrogatoire sans les mesures de protection appropriées. "°
80. La Cour est d'avis que la privation de liberté, quelle qu’en soit la forme, n’est autorisée que lorsqu'elle est conforme aux procédures établies par la législation interne qui doit être elle-même conforme aux standards internationaux des droits de l'homme.
81. L’Article 6 de la Charte dispose que :
« Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut être privé de sa liberté sauf pour des motifs et dans des conditions préalablement déterminées par la loi : en particulier nul ne peut être arrêté ou détenu arbitrairement ».
82. De ce fait, toute privation de liberté doit obéir à un certain nombre de garanties minimales communément consacrées par les instruments internationaux des droits de l'homme et notamment, par l’article 9 du PIDCP ; également applicable en l'espèce.
83. D’après l’article 9 du PIDCP, ces garanties sont les suivantes :
18 Article 4 du PIDCP :
1. Dans le cas où un danger public exceptionnel menace l'existence de la nation et est proclamé par un acte officiel, les Etats parties au présent Pacte peuvent prendre, dans la stricte mesure où la situation l'exige, des mesures dérogeant aux obligations prévues dans le présent Pacte, sous réserve que ces mesures ne soient pas incompatibles avec les autres obligations que leur impose le droit international et qu’elles n’entraînent pas une discrimination fondée uniquement sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion ou l’origine sociale.
2. La disposition précédente n'autorise aucune dérogation aux articles 6, 7, 8 (par. 1 et 2), 11, 15, 16 et 18.
3. Les Etats parties au présent Pacte qui usent du droit de dérogation doivent, par l'entremise du Secrétaire général de l'Organisation des Cf Bu, signaler aussitôt aux autres Etats parties les dispositions auxquelles ils ont dérogé ainsi que les motifs qui ont provoqué cette dérogation. Une nouvelle communication sera faite par la même entremise, à la date à laquelle ils ont mis fin à ces dérogations.
19 Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, Al Ce et Bf Cc / Erythrée, Communication 250/02, par 55.

174 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 1 (2006-2016)
« 2 Toute personne arrêtée sera informée, au moment de son arrestation, des raisons de cette arrestation et recevra notification, dans le plus court délai, de toute accusation portée contre lui ».2°
« 3 Tout individu arrêté ou détenu du chef d’une infraction pénale sera traduit dans le plus court délai devant un juge ou une autre autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires, et devra être jugé dans un délai raisonnable ou libéré. La détention de personnes qui attendent de passer en jugement ne doit pas être de règle, mais la mise en liberté peut être subordonnée à des garanties assurant la comparution de l'intéressé à l'audience, à tous les autres actes de la procédure et, le cas échéant, pour l'exécution du jugement ».
« 4 Quiconque se trouve privé de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal afin que celui-ci statue sans délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale ».
«5 Tout individu victime d’arrestation ou de détention illégale a droit à réparation ».
84. La détention au secret constitue quant à elle une grave violation des droits de l'homme qui peut entraîner d’autres violations telles que la torture, le mauvais traitement ou l’interrogatoire sans les mesures de protection appropriées. Dans ce sens, le Comité des droits de l'homme « considère que l'arrestation, la détention au secret pendant sept jours et les restrictions à l’exercice du droit de recours en habeas corpus constituent des violations de l’article 9 du Pacte dans son
85. || résulte de ce qui précède que la détention de M. C en isolation et au secret total, et les nombreuses prolongations de celle-ci en son absence, et sans qu’il ne bénéficie de l'assistance d’un conseil de son choix pour contester toute prolongation de sa détention, constitue une violation de ses droits à la liberté et à la sécurité de sa personne tels qu’énoncés à l’article 6 de la Charte.
B. Violation alléguée de l’article 7 de la Charte
86. La requérante allègue que le Détenu n’a pas accès à un conseil, ni à aucune représentation tout court. En conséquence, il n’a bénéficié d'aucune garantie lors des procédures préliminaires qui se sont déroulées jusqu’à présent, y compris son interrogatoire en l’absence d’un conseil et l'absence de toute possibilité de contester les éléments de preuve qui seront utilisés contre lui lorsque son procès s'ouvrira. En outre, plus de deux années se sont écoulées depuis son arrestation sans que son procès ne commence.
87. Par ailleurs, la requérante ajoute qu’il n’a aucun accès aux moyens lui permettant de communiquer avec sa famille, ses amis, ses avocats ou le monde extérieur.
20 Dans son observation générale N°8, le Comité des droits de l'homme affirme : « de l’avis du Comité, ces délais ne doivent pas dépasser quelques jours ».
21 Communication No 1126/2002, Bn Bd Ad AN At, 28 octobre 2005

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88. Enfin la requérante fait valoir que ces faits suffisent à établir les violations par le défendeur des droits de M. C tels que définis à l’article 7 de la Charte, qui dispose que :
« 1 Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit Comprend :
a. le droit de saisir les juridictions nationales compétentes de tout acte violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus et garantis par les conventions, les lois, règlements et coutumes en vigueur ;
b. le droit à la présomption d’innocence, jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie par une juridiction compétente ;
c. le droit à la défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix ;
d. le droit d’être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale.
2. Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui ne constituait pas, au moment où elle a eu lieu, une infraction légalement punissable. Aucune peine ne peut être infligée si elle n’a pas été prévue au moment où l'infraction a été commise. La peine est personnelle et ne peut frapper que le délinquant ».
89. La Cour note que le droit à un procès équitable est un droit fondamental de l’homme. || implique que toute personne accusée d’un crime ou d’un délit bénéficie de toutes les garanties de la procédure et de tous les droits de la défense. Ce droit est consacré par tous les instruments universels et régionaux des droits de l'homme. Le PIDCP en son article 14(1) dispose que :
« Tous sont égaux devant les tribunaux et les cours de justice. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi…».
90. Dans la présente affaire, il est établi que le Détenu n’a pas bénéficié des garanties minimales d’un procès équitable ni au moment de son arrestation, ni au moment de sa détention, ni au moment de sa condamnation. Il a été en effet traduit dans un premier temps devant une juridiction d’exception dénommée « Tribunal populaire » déclarée, le 23 décembre 2012, inconstitutionnelle par la Cour suprême de Libye. Il est détenu dans un endroit secret, totalement isolé des siens, n'ayant accès ni à un conseil de son choix, ni à sa famille, ni à ses amis. Il a été en plus condamné à mort par contumace.
91. Il est également établi que le droit à être rapidement présenté devant une autorité judiciaire fait défaut. En effet, tout individu arrêté ou Détenu du chef d’une infraction pénale doit être traduit dans le plus court délai devant un juge ou une autre autorité habilitée par la loi à exercer une fonction judiciaire et devra être jugé dans un délai raisonnable ou libéré. Or, dans le cas de l'espèce, le Détenu a été traduit d’abord devant une juridiction d'exception et par la suite condamné à mort par un tribunal inconnu.
92. Faisant écho à l’article 14 du PIDC, le principe n°11 de l’« Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement », adopté par l’Assemblée générale des Cf Bu dans sa résolution 43/173 du

176 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 1 (2006-2016)
9 décembre 1988, qui codifie les principes généralement admis en la matière, dispose :
« 1. Une personne ne sera pas maintenue en détention sans avoir la possibilité effective de se faire entendre sans délai par une autorité judiciaire ou autre.
2. Une personne Détenue a le droit d'assurer sa propre défense ou d’être assistée d’un conseil conformément à la loi.
3. Une autorité judiciaire ou autre sera habilitée à contrôler, selon qu’il conviendra, le maintien de la détention ». Dans le même sens, la détention doit se faire dans un lieu officiellement reconnu et dans des conditions humaines décentes. La détention dans un lieu secret inflige au détenu une grande souffrance, comme l’a relevé le Comité des droits de l'homme : « le Comité reconnaît le degré de souffrance qu’implique une détention sans contact avec le monde extérieur pendant une durée indéfinie ».22
93. Enfin, dans la requête il est reproché au défendeur de n'avoir pas autorisé le Détenu à avoir accès à un conseil, ni à aucune forme de représentation, ce qui l’a privé de toute garantie tout au long de sa détention. Or, il ressort de l’article 7(1)(c) de la Charte que toute personne accusée ou Détenue doit bénéficier du « droit à la défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix ». Ce droit doit pouvoir être exercé à toutes les phases d’une procédure pénale, notamment pendant les mesures d'instruction, les périodes de détention administrative et le jugement en première instance et en appel.
94. Le droit à la défense implique également le droit pour le Détenu de communiquer avec son avocat et de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense. L'accusé ou le Détenu ne peut être jugé si son conseil n’a pas été avisé de la date du procès et des chefs d'accusation retenus contre lui en temps opportun pour lui permettre de préparer efficacement sa défense. Il a le droit de disposer de suffisamment de temps pour préparer sa défense, compte tenu de la nature de la procédure et des éléments de fait de l'affaire. Cela implique le droit de communiquer avec son avocat et le droit d'accès aux pièces nécessaires à la préparation de sa défense.
95. Il en est de même des autres juridictions internationales notamment, la Cour européenne des droits de l'homme qui, le 14 octobre 2010, a estimé que « la personne gardée à vue a le droit d’être assistée d’un avocat dès le début de cette mesure ainsi que pendant les interrogatoires, a fortiori lorsqu’elle n’a pas été informée par les autorités de son droit de se taire ».2 Dans une autre affaire, « la Cour rappelle que le droit de tout accusé à être effectivement défendu par un avocat, au besoin commis d'office, figure parmi les éléments fondamentaux du procès équitable ».?5
22 Communication No 1640/2007, EI Bb c. Libye, 26 juillet 2010.
23 Voir Cour européenne des droits de l'homme, affaire Ca c. France, 14 octobre 2010 Gaz.Pal, 17 octobre 2010.
24 Idem.
25 Idem CEDH 13 octobre 2009, affaire Bc c. Turquie, Req 7377/03, para 30.

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96. Les informations actuellement disponibles font ressortir que le Détenu n'a pas eu accès à un avocat ou n’a pas bénéficié de l'assistance d’un défenseur de son choix. Il n’a donc pas été encadré dans toutes les étapes de la procédure d’instruction engagée contre lui. Par exemple, il a été interrogé hors présence d’un conseil et il ne lui a pas été offert la possibilité d'examiner les chefs d'accusation qui seront retenus contre lui lorsque le procès commencera. Le Détenu a été arrêté il y a plus de deux ans et condamné à mort par contumace.
97. || est tout à fait manifeste qu’aucun des droits en relation avec la situation du détenu et consacrés par l’article 7 de la Charte n’a été respecté et qu’en conséquence le défendeur a violé l’article 7 de la Charte africaine.
Par ces motifs,
La COUR,
À l'unanimité,
i) Confirme ses Ordonnances du 15 mars 2013 et du 10 août 2015 et ordonne à l’État défendeur de s'y conformer ;
ii) Déclare qu’en vertu des articles 3 et 5(1)(a) du Protocole, elle a compétence pour connaître de la requête introduite par la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples ;
if) Déclare la requête recevable ;
iv) Dit que la Libye a violé et continue de violer les articles 6 et 7 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ;
v) Ordonne en conséquence, à l’État défendeur de protéger tous les droits du Détenu consacrés par les articles 6 et 7 de la Charte en mettant fin aux procédures pénales irrégulières engagées devant les juridictions internes.
vi) Ordonne à la Libye de faire rapport à la Cour dans les soixante (60) jours à compter de la notification du présent arrêt sur les mesures prises pour garantir les droits du Détenu.
Opinion individuelle : OUGUERGOUZ
1. J'ai voté en faveur du dispositif de l'arrêt mais considère insuffisants les motifs ayant conduit la Cour à conclure que « la Libye a violé et continue de violer les articles 6 et 7 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples » (point iv) du dispositif).
2. La requérante ayant prié la Cour de rendre un arrêt par défaut contre la Libye en vertu de l’article 55 du Règlement intérieur, il appartenait à la Cour de vérifier si toutes les conditions posées par cet article étaient réunies, et en particulier de « s'assurer non seulement qu’elle a compétence, mais également que la requête est recevable et que les conclusions sont fondées en fait et en droit ». La Cour a dûment reconnu l'importance de ces exigences aux paragraphes 39 et 40 de l'arrêt et elle a en conséquence procédé à un examen relativement

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exhaustif de sa compétence et de la recevabilité de la requête ;* elle n’a toutefois pas, selon moi, accordé toute l'attention qu’elle méritait à la question de savoir si les conclusions de la requérante étaient « fondées en fait et en droit ».
3. Je relèverais à cet égard que le libellé du paragraphe 2 de l’article 55 du Réglement est similaire à celui du paragraphe 2 de l’article 53 du Statut de la Cour internationale de Justice.? Cette dernière juridiction a eu plusieurs fois l’occasion de faire application de cette disposition et en a offert la plus complète de ses interprétations dans le tout dernier des arrêts qu’elle a rendu par défaut, à savoir son arrêt du 26 juin 1986 sur le fond de l'affaire des Activités militaires et paramilitaires au Aj et contre celui-ci (Aj c. Etats-Unis d’Amérique).*
4. L’organe judiciaire principal des Nations Unies a en particulier insisté sur la nécessité d'accorder un soin tout particulier à l'administration de la justice lorsqu'une des deux parties de comparaît pas“ et a rappelé les principes qui devaient le guider aux fins de s'assurer que les conclusions de la partie comparante étaient fondées en fait et en droit. La Cour interaméricaine des droits de l'homme s’est par exemple expressément référée à ces principes directeurs dans ses deux tout premiers arrêts rendus par défaut ;° il aurait été souhaitable que la présente Cour s'inspire également de ces principes dans son examen du bienfondé des conclusions de la requérante.
5. Aux fins de s'assurer que les conclusions de la requérante étaient fondées en droit, la Cour aurait dû faire un plus grand usage des
1. Je ferais toutefois observer que la Cour n’a pas examiné la condition prévue à l’article 40(7) de son Règlement, à savoir que la requête ne doit « pas concerner des cas qui ont été réglés conformément soit aux principes de la Charte des Nations Unies, soit de la Charte de l'Organisation de l'Unité africaine et soit des dispositions de la présente. Charte » (voir paragraphes 72 et 73 de l'arrêt). La question pourrait en particulier se poser en rapport avec les procédures mises en place par le Conseil des droits de l'homme des Cf Bu et en particulier avec les conclusions du Groupe de travail sur la détention arbitraire, voir infra, paragraphes 22 et 23
2 L'article 53 du Statut de la Cour internationale de Justice dispose comme suit : « 1. Lorsqu'une des parties ne se présente pas, ou s'abstient de faire valoir ses moyens, l’autre partie peut demander à la Cour de lui adjuger ses conclusions. 2. La Cour, avant d’y faire droit, doit s'assurer non seulement qu’elle a compétence aux termes des Articles 36 et 37, mais que les conclusions sont fondées en fait et en droit », cet article a également inspiré l’article 28 du Statut du Tribunal international du droit de la mer.
3 C.l.J. Recueil 1986, voir les pages 23-26, paragraphes 26-31.
4 « La vigilance que la Cour est à même d'exercer lorsqu'elle bénéficie de la présence des deux parties à l'instance a pour corollaire le soin tout particulier qu’elle doit apporter à bien administrer la justice dans une affaire où l’une d’elles seulement participe à l'instance », /bid., p. 26, paragraphe 31.
5 Case ofthe Constitutional Court v. Peru (Merits, Reparations and Costs), Arrêt du 31 janvier 2001, pp. 33-35, paragraphes 58-62, et Case of AK Y Bm (Merits, Reparations and Costs), Arrêt du 6 février 2001, pp. 39-41, paragraphes 78- 82. Ni la Convention américaine, ni le Statut de la Cour interaméricaine ne contient de disposition relative à la noncomparution d’une des parties à l'instance ; seul le Règlement de la Cour interaméricaine l’envisage à son article 29(1) libellé comme suit : « Quand la Commission, les victimes, les victimes présumées, ou ses représentants, l’Etat défendeur ou, le cas échéant, l'Etat demandeur ne participent pas ou plus à l'instance, la Cour, ex officio, poursuit la conduite du procès jusqu’à son terme ».

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pouvoirs inhérents à sa fonction judiciaire et décider en application du principe jura novit curia (« La cour connaît le droit »).
6. Selon la Cour internationale de Justice, « le principe jura novit curia signifie que, pour décider que les conclusions sont fondées en droit, la Cour ne doit pas s'appuyer uniquement sur les exposés des parties relativement au droit applicable ». Elle a notamment rappelé ce qui suit :
« en tant qu’organe judiciaire international (elle est] censée constater le droit international et, dans une affaire relevant de l'article 53 du Statut comme dans toute autre, est donc tenue de prendre en considération de sa propre initiative toutes les règles de droit international qui seraient pertinentes pour le règlement du différend, La Cour ayant pour fonction de déterminer et d'appliquer le droit dans les circonstances de chaque espèce, la charge d’établir ou de prouver les règles de droit international ne saurait être imposée à l’une ou l’autre partie, car le droit ressortit au domaine de la connaissance judiciaire de la Cour ».8
7. Aux paragraphes 81, 82, 83, 88 et 89 de l'arrêt, la Cour a mentionné à la fois les articles 6 et 7 de la Charte africaine et les articles 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; elle n’a toutefois pas explicité l’articulation qu’elle faisait entre ces deux instruments. Les articles 9 et 14 du Pacte ont manifestement été mentionnés aux seules fins d'interprétation des articles correspondants de la Charte comme l’autorisent implicitement les articles 60 et 61 de ce dernier instrument, relatifs aux « principes applicables ».
8. Les articles 3 (« Compétence ») et 7 (« Droit applicable ») du Protocole autorisent cependant la Cour à « appliquer les dispositions susmentionnées du Pacte, de même que celles relativement détaillées de la Charte arabe des droits de l'homme de mai 2004, à laquelle la Libye est également partie depuis le 15 janvier 2008 » (voir ses articles 12,7 13,8 14° et 16, ° 20," 23°?)
6 C.l.J. Recueil 1986, pp. 24-25, paragraphe 29.
7 « Toutes les personnes sont égales devant la justice. Les Etats parties garantissent l'indépendance de la justice et la protection des juges contre toute ingérence, pression ou menace. Ils garantissent également à tous les individus relevant de leur compétence l'accès aux juridictions de tous les degrés ».
8 « a) Chacun a droit à un procès équitable dans lequel sont assurées des garanties suffisantes et conduit par un tribunal compétent indépendant et impartial établi préalablement par la loi qui décidera du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre lui ou se prononcera sur ses droits et ses obligations. Chaque Etat partie garantit à ceux qui n’ont pas les ressources nécessaires une aide juridictionnelle pour leur permettre de défendre leurs droits ; b) Le procès est public sauf dans des cas exceptionnels lorsque l'exige l'intérêt de la justice dans une société respectueuse des libertés et droits de l'homme ».
9 «a) Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l’objet d’une arrestation, d’une perquisition ou d’une détention arbitraire et sans mandat AI ;
b) Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n’est pour les motifs et dans les cas prévus préalablement par la loi et conformément à la procédure qui y est fixée ; c) Tout individu arrêté sera informé, au moment de son arrestation, dans une langue qu’il comprend, des raisons de cette arrestation, recevra immédiatement notification de toute accusation portée contre lui et a le droit de prendre contact avec ses proches ;

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9. Les articles 9 et 14 du Pacte ayant fait l’objet d’une interprétation par le Comité des droits de l'homme des Cf Bu dans ses observations générales, ‘* il aurait par ailleurs été utile de se référer à celles-ci aux fins d’expliciter les garanties prévues par ces deux articles.
d) Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit de demander d’être soumis à un examen médical et doit être informée de ce droit ; e) La personne arrêtée ou détenue du chef d’une accusation pénale est présentée dans les plus brefs délais à un juge ou un fonctionnaire habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires, et devrait être jugée dans un délai raisonnable ou libérée. Sa libération peut être subordonnée à des garanties assurant sa comparution à l'audience. La détention provisoire ne doit en aucun cas être la règle ;
f) Quiconque est privé de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal compétent afin que celui-ci statue sans délai sur la légalité de cette arrestation ou détention et ordonne sa libération si l'arrestation ou la détention est illégale ;
g) Toute personne victime d’une arrestation ou d’une détention arbitraire ou illégale a droit à réparation ».
10 « Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie par un jugement définitif conformément à la loi et a droit au cours de l'instruction et durant le procès au moins aux garanties suivantes :
a) Droit d'être informée immédiatement de façon détaillée et dans une langue qu’elle comprend de la nature des accusations portées contre elle ;
b) Droit de disposer d’un temps et de facilités suffisants pour préparer sa défense et de prendre contact avec ses proches ;
c) Droit d’être jugée en sa présence devant son juge naturel et de se défendre elle- même ou avec l'assistance d’un avocat de son choix avec lequel elle peut communiquer en toute liberté et confidentialité ;
d) Droit de bénéficier gratuitement de l'assistance d’un avocat pour la défendre si elle ne peut pas le faire elle-même ou si l'intérêt de la justice l'exige et droit de se faire assister gratuitement d’un interprète si elle ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience ;
e) Droit d'interroger elle-même ou de faire interroger par son défenseur les témoins à charge et d'obtenir la comparution de témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ;
f) Droit de ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s’avouer coupable ;
g) Droit, si elle est déclarée coupable d’une infraction, de faire appel conformément à la loi devant une instance judiciaire supérieure ;
h) Droit à ce que la sécurité de sa personne et sa vie privée soient respectées en toutes circonstances »).
11 « a) Toute personne privée de sa liberté est traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine ; b) Les prévenus sont séparés des condamnés et sont traités de manière compatible avec leur condition de personne non condamnée ; c) Le régime pénitentiaire a pour but l'amendement et la réinsertion sociale des prisonniers ».
12 « Chaque Etat partie à la présente Charte garantit un moyen de recours utile à toute personne dont les droits ou les libertés reconnus dans la présente Charte ont été violés même si la violation a été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles ».
13 Observation générale n° 35, Article 9 (Liberté et sécurité de la personne), 16 décembre 2014, Nations Unies, Doc. CCPR/C/GC/35, 22 pages, et Observation générale 11° 32, Article 14 (Droit à l'égalité devant les tribunaux et les cours de justice et à un procès équitable), 23 août 2007, Nations Unies, Doc. CCPR/C/GC/ 32, 24 pages.

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10. L'article 7 de la Charte aurait pour sa part gagné à être lu en conjonction avec l’article 26 de ce même instrument qui prévoit l'obligation des Etats parties « de garantir l'indépendance des tribunaux ». L'article 2(3)'* du Pacte aurait également pu être mentionné au côté des articles 9 et 14 de cet instrument.
11. En outre, la Cour aurait dû mettre l’accent sur les obligations de l’État défendeur au titre de l’article premier de la Charte africaine (paragraphes 49 et 50 de l'arrêt). Aux termes de cette disposition, en effet, les Etats parties « reconnaissent les droits, devoirs et libertés énoncés dans cette Charte et s'engagent à adopter des mesures législatives ou autres pour les appliquer ».
12. Cette disposition fait obligation aux États parties d'adopter toutes les mesures appropriées pour assurer la protection effective des droits de tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant ainsi de leur souveraineté. L'obligation de mise en œuvre dont il s'agit doit s'entendre à la fois comme une obligation négative (« de ne pas faire ») et une obligation positive (« de faire »); en d’autres termes, la violation de la Charte africaine par un Etat partie peut résulter tant de ses actions que de ses omissions, lorsqu'il fait par exemple preuve d’un
14 L'article 2(3) dispose comme suit : « Les Etats parties au présent Pacte s'engagent à:
a) Garantir que toute personne dont les droits et libertés reconnus dans le présent Pacte auront été violés disposera d’un recours utile, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles ;
b) Garantir que l'autorité compétente, judiciaire, administrative ou législative, ou toute autre autorité compétente selon la législation de l'Etat, statuera sur les droits de la personne qui forme le recours et développer les possibilités de recours juridictionnel ;
c) Garantir la bonne suite donnée par les autorités compétentes à tout recours qui aura été reconnu justifié ».
15 L'article 2(1) du Pacte prévoit pour sa part l'obligation des Etats parties de « de respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur compétence les droits reconnus dans le présent Pacte, sans distinction aucune [...] ». Le Comité des droits de l'homme a indiqué que les Etats parties ne pourront pleinement s'acquitter de leur obligation « de garantir les droits reconnus dans le Pacte que si les individus sont protégés par l'État non seulement contre les violations de ces droits par ses agents, mais aussi contre des actes commis par des personnes privées, physiques ou morales, qui entraveraient l'exercice des droits énoncés dans le Pacte dans la mesure où ils se prêtent à une application entre personnes privées, physiques ou morales. Dans certaines circonstances, il peut arriver qu’un manquement à l'obligation énoncée à l’article 2 de garantir les droits reconnus dans le Pacte se traduise par une violation de ces droits par un Etat partie si celui-ci tolère de tels actes ou s’abstient de prendre des mesures appropriées ou d'exercer la diligence nécessaire pour prévenir et punir de tels actes commis par des personnes privées, physiques ou morales, enquêter à leur sujet ou réparer le préjudice qui en résulte en sorte que lesdits actes sont imputables à l'État partie concerné » (c'est moi qui souligne), Observation générale No. 31 [80] La nature de l'obligation juridique générale imposée aux Etats parties au Pacte, Nations Unies, Doc. CCPR/C/21/Rev.1/Add.13, 26 mai 2004, p. 4, paragraphe 8.

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manque de diligence.'° L'engagement des États parties d’ « appliquer les droits garantis par la Charte comprend ainsi non seulement celui de les respecter », en ne leur portant pas eux-mêmes atteinte, mais également celui de les « protéger », ce qui inclut la protection contre toute atteinte dont ils pourraient faire l’objet de la part d’acteurs non étatiques.
13. Enfin, étant donnée la situation de conflit armé non international qui prévaut en Libye depuis 2011, il aurait été nécessaire que la Cour examine de manière plus approfondie l’applicabilité de la Charte africaine dans la présente espèce. La Charte africaine ne contenant pas de clause dérogation, contrairement au Pacte international (article 4) et à la Charte arabe des droits de l'homme (article 4), 7 la question méritait en effet d’être posée et de recevoir une réponse plus élaborée que celle qui figure aux paragraphes 76 et 77 de l'arrêt.
14. Je me contenterais ici de relever que les droits garantis par les articles 13, 14 et 20 de la Charte arabe ne sont pas susceptibles de dérogation. Pour leur part, les droits garantis par les articles 9 et 14 du Pacte ne figurent pas parmi les droits non-dérogeables visés par l’article 4, mais leur caractère fondamental peut-être dérivé de la relation qu’ils peuvent entretenir avec des droits non-dérogeables.!ê Quoiqu'il en soit, la Libye ne s’est pas prévalu du droit de dérogation prévu par l’article 4 du Pacte.
16 La Cour interaméricaine des droits de l'homme est, par exemple, parvenue à la même conclusion concernant la Convention américaine dans son fameux arrêt relatif à l'affaire Velasquez-Rodiguez c. Honduras : « Thus, in principle, any violation of rights recognized by the Convention carried out by an act of public authority or by persons who use their position of authority is imputable to the State. However, this does not define all the circumstances in which a State is obligated to prevent, investigate and punish human rights violations, nor all the cases in which the State might be found responsible for an infringement of those rights. An illegal act which violates human rights and which is initially not directly imputable to a State (for example, because it is the act of a private person or because the person responsible has not been identified) can lead to international responsibility of the State, not because of the act itself, but because of the lack of due diligence to prevent the violation or to respond to it as required by the Convention » (c’est moi qui souligne), Case of Velésquez-Rodriguez v. Honduras (Merits), arrêt du 29 juillet 1988, Ser. C, No. 4, p. 30, paragraphe 72.
17 Article 4 (Dérogation) ; « b) Aucune dérogation aux dispositions ci-après n’est autorisée, en cas de situation d’urgence exceptionnelle : article 5, article 8, article 9, article 10, article 13, article 14, article 15, article 18, article 19, article 20, article 22, article 27, article 28, article 29 et article 30. En outre, les garanties judiciaires nécessaires pour la protection de ces droits ne peuvent être suspendues ».
18 Le Comité s’est en effet prononcé comme suit sur cette question : « Même si l’article 14 n’est pas cité au paragraphe 2 de l’article 4 du Pacte parmi les articles non susceptibles de dérogation, tout Etat qui décide de déroger aux procédures normales prévues par l’article 14 en raison d’une situation de danger public doit veiller à ce que ces dérogations n’aillent pas au-delà de celles qui sont strictement requises par les exigences de la situation réelle. Les garanties inhérentes au droit à un procès équitable ne peuvent jamais faire l’objet de mesures qui détourneraient la protection des droits auxquels il ne peut pas être dérogé. Par exemple, étant donné que l’article 6 du Pacte, dans sa totalité, ne souffre aucune dérogation, tout procès conduisant à l'imposition de la peine capitale pendant un état d'urgence doit être conforme aux dispositions du Pacte et notamment respecter l’ensemble des obligations énumérées à l'article 14 », Observation générale n° 32, op.cit., p. 2, paragraphe 6. Il a développé un raisonnement similaire en ce qui concerne l’article 9 du Pacte, voir Observation générale n° 35, op.cit., pp. 20-21, paragraphes 64-67.

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15. Appelée à statuer sur des allégations de violation de droits de l’homme, la Cour se devait d'examiner de manière plus détaillée les questions juridiques susmentionnées ; elle devait surtout s'assurer que la réalité des faits constitutifs des violations alléguées de la Charte africaine est établie par des preuves convaincantes.
16. Je considère que la Cour n’a pas suffisamment démontré que les conclusions de la requérante étaient également fondées en fait. Pour montrer le caractère arbitraire de la détention de Monsieur Am C et la violation de son droit à un procès équitable, la Cour se contente en effet d'indiquer que ce sont là des faits établis (voir les paragraphes 85,90, 91 (in fine) et 96 de l'arrêt).
17. Or, il appartenait à la Cour de s'assurer de la véracité des allégations de la requérante et ce en recourant à tout moyen de preuve qu’elle jugerait approprié Elle aurait pu à cet égard faire usage des ressources offertes par l’articles 45 (« Mesures d’instruction ») et 46 (« Témoins, experts et autres personnes ») de son Règlement.
18. La Cour internationale de Justice a souligné cette exigence procédurale en des termes non équivoques.'? Elle a par exemple indiqué que « (q)uant aux faits de la cause, en principe la Cour n’est pas tenue de se limiter aux éléments que lui soumettent formellement les parties » et qu’en cas d'absence de l’une des parties « il [lui] incombe tout particulièrement [...] de s'assurer qu’elle est bien en possession de tous les faits disponibles ».?°
19. Elle a toutefois relativé[sic] cette exigence dans les termes qui suivent :
« Néanmoins la Cour ne saurait totalement pallier, par ses propres recherches, les conséquences de l'absence de l’une des parties qui limite nécessairement l'information de la Cour dans une affaire soulevant comme celle-ci de multiples questions de fait ».2!
La Cour internationale de Justice avait déjà posé comme suit les limites d’une telle exigence en 1949 dans son arrêt relatif à l'affaire du Détroit de Corfou :
« Tout en prescrivant ainsi à la Cour de procéder à un examen des conclusions de la Partie comparante, l’article 53 n’a pas pour effet de lui imposer la tâche d’en vérifier l’exactitude dans tous les détails - tâche qui, dans certains cas et en raison de l'absence de contradiction, pourrait s'avérer pratiquement impossible ».22
19 « Même en cas de comparution des deux parties, la Cour veille a donner a chacune d'elles les mêmes possibilités et les mêmes chances quant a la présentation de leurs preuves ; à plus forte raison lorsque la situation est compliquée par une non- comparution croit-elle indispensable d'assurer entre les parties une égalité aussi parfaite que possible. L'article 53 du Statut fait donc obligation à la Cour d'employer tous les moyens et méthodes susceptibles de lui permettre de s'assurer réellement du bien-fondé en fait et en droit des conclusions de l'Etat demandeur et de sauvegarder du même coup les principes essentiels d’une bonne administration de la justice », C.l.J. Recueil 1986, p. 40, paragraphe 59.
20 /bid, p. 25, paragraphes 30-31.
21 Ibid, p. 25, paragraphe 30.
22 Détroit de Corfou, arrêt du 15 décembre 1949, C.1.J. Recueil 1949, p. 248.

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20. Même si la présente Cour n’était pas tenue de s'assurer du bien- fondé des conclusions de la requérante avec le même degré de certitude que pour le bienfondé en droit desdites conclusions, et ce en raison de la relative complexité qui caractérise généralement l'établissement des faits, il lui appartenait de faire un effort minimum de recherche en la matière.
21. Le 9 juillet 2013 et le 17 mai 2014, la Cour avait reçu un certain nombre de documents de l'Etat défendeur (voir paragraphes 19 et 27 de l'arrêt); bien que pouvant être considérés comme soumis par une voie non prévue par le Règlement, ces documents exprimaient les vues de cette Partie sur les faits de l’espèce et il appartenait à la Cour de les
examiner "arrêt. ou, à tout le moins, de les mentionner dans les motifs de
22. La Cour aurait également pu se référer utilement aux rapports produits par l'Organisation des Cf Bu, comme par exemple :
« le rapport final de la « Commission d'enquête sur les violations alléguées du droit international des droits de l'homme en Ai Ak Cg » établie par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies23 (pour le contexte factuel général et la question de la détention arbitraire jusqu’à la fin de l’année 2011),
« les rapports du Haut-Commissaire aux droits de l'homme de 201424 et
. la compilation26 et le résumé?” établis par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, aux fins de l’'Examen périodique universel de la Libye tenu en mai 2015 ; ou encore
« le rapport conjoint du Haut-Commissaire et de la Mission d’Appui des Nations Unies en Libye sur les décès en détention.28
23. La Cour aurait surtout pu tirer profit des conclusions et recommandations relatives à la détention de Monsieur Am C,
23 Report of the International Commission of Inquiry to investigate all alleged violations of international human rights law in the Ac Ak Ai, Bk Cf, Doc. A/HRC/17/44, 12 February 2012, 78 pages (sur la détention arbitraire, voir pp. 28-32, paragraphes 90-110).
24 Assistance technique à la Libye dans le domaine des droits de l'homme, Rapport du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Nations Unies, Doc. A/ HRC/25/42, 13 janvier 2014, 19 pages.
25 Enquête du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme sur la Libye - Rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, Cf Bu, Doc. A/HRC/31/47, 15 février 2016, 21 pages (pp. 7-8, paragraphes 26-30).
26 Compilation établie par le Haut-Commissariat aux droits de l'homme, conformément au paragraphe 15 b) de l'annexe à la résolution 5/1 du Conseil des droits de l'homme et au paragraphe 5 de l’annexe à la résolution 16/21 du Conseil — Libye, Nations Unies, Doc. HRC/WG.6/22/LBY/2, 27 février 2015, pp. 9-12 paragraphes 23-49.
27 Résumé établi par le Haut-Commissariat aux droits de l'homme conformément au paragraphe 15(c) de l'annexe à la résolution 5/1 du Conseil des droits de l'homme et au paragraphe 5 de l'annexe à la résolution 16/21 du Conseil — Libye, Nations Unies, Doc. HRC/WG.6/22/LBY/3, 23 février 2015, 19 pages (voir en particulier p. 8, paragraphes 52-53).
28 Torture and deaths in detention in Libya, Joint Report, Bk Cf Ap Mission in Libya and Office of the Bk Cf As Bg for Bp An, October 2013, 18 pages.

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adoptées le 14 novembre 2013 par le Groupe de Travail des Nations Unies sur la détention arbitraire.” Ces conclusions étaient les suivantes :
« 43. En violation grave de ses droits fondamentaux, M, C est privé de liberté depuis deux ans, au secret, sans avoir pu se présenter devant les autorités judiciaires pour contester la légitimité de sa détention, sans avoir accès à un avocat, et sans bénéficier des facilités nécessaires pour préparer sa défense ; cette détention a été prolongée bien au-delà de la période maximum autorisée et en violation de la procédure définie par le droit libyen.
44. La gravité des violations, leur nature en l’espèce, et l'incapacité dans laquelle se trouve le Gouvernement d’y remédier, font qu’il est impossible de garantir à M. C le droit à un procès équitable en Libye. À cet égard, le Groupe de travail souscrit à l'opinion selon laquelle « [[Jorsque les violations des droits de l'accusé sont telles qu’il lui est impossible d'assurer sa défense dans le cadre des droits qui lui sont reconnus, aucun procès équitable ne peut se tenir. Un traitement injuste du suspect ou de l'accusé peut perturber la procédure à tel point qu’il devient impossible de réunir les éléments constitutifs d’un procès équitable »,
45. Le Groupe de travail considère que l’inobservation, dans l’affaire à l'examen, des normes internationales relatives au droit à un procès équitable établies dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, à savoir l’article 10 de la Déclaration et l’article 14 du Pacte, est d’une gravité telle qu’elle confère à la privation de liberté de M. C un caractère arbitraire ».30 24. Le Groupe de travail avait en conséquence prié « le Gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation de M. C de façon à la rendre compatible avec les normes et principes énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques » et estimé que « la réparation appropriée consisterait à mettre fin à la fois aux procédures engagées au plan interne contre M. C et à la détention de celui-ci [...] ».*
25. Les documents susmentionnés témoignent de ce qu’il existe d’abondantes sources objectives d’information dans lesquelles la Cour aurait pû utilement puiser pour s'assurer que les conclusions de la requérante étaient fondées en fait,
26. || est indéniable que la non-comparution de l’une des parties à l'instance a nécessairement un impact négatif sur une bonne administration de la justice et qu’elle complique singulièrement la tâche de la présente Cour dans l'exercice de sa mission. Les exigences posées par le paragraphe 2 de l’article 55 du Règlement de la Cour ont précisément pour objet d'assurer une bonne administration de la justice
29 Avis No 41/2013 (Libye), Communication adressée au Gouvernement le 21 août 2013 concernant Am AJ C, Avis adopté par le Groupe de travail sur la détention arbitraire à sa soixante-huitième session (13-22 novembre 2013), Conseil des droits de l'homme, Nations Unies Doc. A/HRC/WGAD/2013/41, 7 avril 2014, 8 pages.
30 Ibid, pp. 7-8.
31 Ibid., p. 8, paragraphes 48-49

186 RECUEIL DE JURISPRUDENCE DE LA COUR AFRICAINE VOL 1 (2006-2016)
dans de telles circonstances. Comme l’a souligné la Cour internationale de Justice à propos de l’article 53 de son propre règlement,
« l’emploi du mot « s'assurer » (en anglais « satisfy itself ») dans le Statut implique que la Cour doit, tout autant que dans une autre instance, acquérir la conviction que les conclusions de la partie comparante sont fondées en droit et, pour autant que la nature de l'affaire le permette, que les faits sur lesquels ces conclusions reposent sont étayés par des preuves
27. L'article 55(2) du Règlement vise ainsi à sauvegarder, autant que faire se peut, le principe d'égalité des parties en matière d'établissement des violations alléguées, par un examen exaustif des faits rapportés et du droit applicable. Tenue par cette disposition de s'assurer du bien-fondé en fait et en droit des conclusions de la requérante, la Cour avait donc l’obligation d'employer tous les moyens et méthodes à sa disposition pour le faire.
28. J’estime que dans la présente affaire, la Cour n’a pas employé tous les moyens et méthodes disponibles pour s'assurer du bien-fondé en fait des conclusions de la requérante. Elle a considéré les faits allégués comme des faits établis sans avoir procédé à un examen de leur véracité (voir les paragraphes 85, 90,91 (in fine) et 96 de l'arrêt). La Cour apparaît ainsi comme ayant purement et simplement endossé les conclusions de la requérante en la matière ; ce faisant, elle semble s'être prononcée automatiquement en faveur de cette dernière, ce que visent précisément à éviter les prescriptions de l’article 55 du
29. Je relèverais à cet égard que la motivation sommaire du présent arrêt contraste fortement avec celle très élaborée contenue dans trois arrêts récemment rendus par la Cour dans des affaires concernant également le droit à un procès équitable et où les deux parties avaient participé à l'instance.“
30. Dans ses deux premiers arrêts rendus par défaut, la Cour interaméricaine des droits de l'homme avait pour sa part procédé à une évaluation très minutieuse des preuves avancées par la partie comparante relativement à la violation du droit à un procès équitable par l’État défendeur. Dans un arrêt récent rendu par défaut, la Cour de Justice de la Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest avait
32 C.l.J. Recueil 1986, p. 24, paragraphe 29.
33 Comme l’a indiqué la Cour internationale de Justice : « Il est [...] hors de question que la Cour se prononce automatiquement en faveur de la partie comparante, puisque, comme indiqué précédemment, elle a l'obligation de s'assurer que les conclusions de cette partie sont fondées en fait et en droit », C.l.J. Recueil 1986, p. 24, paragraphe 28.
34 Bq Bv c. République Unie de Tanzanie, arrêt du 20 novembre 2015 (voir pp. 34-54, paragraphes 81-131), Ao By Br & 9 autres c. République Unie de Tanzanie, arrêt du 18 mars 2016 (voir pp. 36-53, paragraphes 117-184) et Ah Bt AN Bz Bu de Tanzanie, arrêt du 3 juin 2016 (voir pp. 27-56, paragraphes 95-227).
35 Case of the Constitutional Court v. Peru (Merits, Reparations and Costs), pp. 19-22, paragraphes 43-55, et pp. 35.42, paragraphes 64-85 ; voir également l'appréciation des faits que la Cour considère comme prouvés, pp. 22-32, paragraphe 56 ; voir

AH c. Libye (fond) (2016) 1 RICA 158 187
également consacré des développements relativement élaborés à la violation de l’article 7 de la Charte africaine par l’État défendeur.°°
31. S'agissant du tout premier arrêt rendu par défaut par la Cour, il aurait été souhaitable voire nécessaire que celle-ci pose clairement les principes qui doivent la guider pour s'acquitter effectivement de ses obligations au titre de l’article 55 du Règlement et qu’elle les applique scrupuleusement dans la présente espèce.
également, Case of/vcherBronstein v. Peru (Merits, Reparations and Costs), pp. 27- 29, paragraphes 63-75, pp. 30-39, paragraphe 76, et pp. 45-49, paragraphes 100- 116.
36 Ah Z Ar Ae v. Republic of Aw Ax, Judgement of 4 May 2015, No. ECW/CCJIJUD/11/15, pp. 9-18. L'article 90(4) du Règlement de 2002 de la Cour de justice de la CEDEAO prévoit la procédure par défaut dans les termes qui suivent :
« Before giving judgment by default the Court shall, after considering the circumstances of the case consider :
(a) Whether the application initiating proceedings is admissible,
(b) Whether the appropriate formalities have been complied with,and
(c) Whether the application appears well founded ».


Synthèse
Numéro d'arrêt : 002/2013
Date de la décision : 03/06/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2022
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