AFRICAN UNION UNION AFRICAINE AFRICAN COURT ON HUMAN AND PEOPLES” RIGHTS
COUR AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES
AFFAIRE
C AL ET X AK
RÉPUBLIQUE-UNIE DE TANZANIE
REQUÊTE N° 007/2016
ARRÊT
13 JUIN 2023 “ue Registre,
SOMMAIRE
SOMMAIRE
I LES PARTIES
Il OBJET DE LA REQUÊTE
A. Faits de la cause
B. Violations alléguées
IN. RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR DE CÉANS
IV DEMANDES DES PARTIES
SUR LA COMPÉTENCE
A. Exception d’incompétence matérielle
B. Autres aspects de la compétence
VI SUR LA RECEVABILITÉ 10
A. Exception tirée du dépôt de la Requête dans un délai non raisonnable … 11
B. Autres conditions de recevabilité 13
DIR SUR LE FOND 15
A. Allégation relative au renversement de la charge de la preuve et à la
condamnation fondée sur des preuves inappropriées 16
B. Allégation relative à l'impossibilité d’interjeter appel de la décision de
substitution des peines 18
VIII SUR LES RÉPARATIONS 20
IX SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE 21
DISPOSITIF 21 La Cour, composée de : Blaise TCHIKAYA, Vice-président ; Ben KIOKO, Rafaâ BEN
ACHOUR, Suzanne MENGUE, Tujilane R. CHIZUMILA, Chafika BENSAOULA, Stella
|. ANUKAM, Dumisa B. NTSEBEZA, Modibo SACKO et Dennis D. ADJEI — Juges ; et
de Robert ENO, Greffier.
Conformément à l’article 22 du Protocole relatif à la Charte africaine des droits de
l’homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l'homme
et des peuples (ci-après désigné le « Protocole ») et à la règle 9(2) du Règlement
intérieur de la Cour (ci-après désigné « le Règlement »),! la Juge Imani D. ABOUD,
Présidente de la Cour, de nationalité tanzanienne, s’est récusée.
En l’affaire
C AL et X AK
représentés par :
Ay Daniel Walyemera,
Cabinet Walyemera & Co. Advocates
contre
RÉPUBLIQUE-UNIE DE TANZANIE,
représentée par :
ii Bh Ck Ch Cm, Bv At, Bureau du Solicitor General ;
ii. Mme Bg By A, Bv At adjointe, Bureau du
Solicitor General ;
ii. M. Br AI, Ambassadeur, Directeur de l’Unité juridique, ministère
des Affaires étrangères et de la Coopération Est-africaine ;
+ Article 8(2) du Règlement intérieur de la Cour du 2 juin 2010.
iv. Mme Ax AJ, Directrice adjointe, Droits de l’homme, Principal
State Bp, Cabinet de l’Bp At ;
v. M. Bl AG, Bw State Bp, Cabinet de l’Bp At ;
vi. Mme Cj AM, Juriste, ministère des Affaires étrangères et de la
Coopération Est-africaine.
après en avoir délibéré,
rend le présent Arrêt :
I. LES PARTIES
1. Les sieurs C AL et X AK Yci-après dénommés « les
Requérants ») sont des ressortissants tanzaniens qui, au moment du dépôt
de la présente Requête, étaient incarcérés à la prison centrale de Butimba,
région de Ai, où ils purgeaient une peine d’emprisonnement à vie
après leur condamnation pour viol collectif et vol avec violence. Ils allèguent
la violation de leurs droits de l'homme dans le cadre des procédures
judiciaires nationales.
2. La Requête est dirigée contre la République-Unie de Tanzanie (ci-après
dénommée « l’État défendeur »), qui est devenue partie à la Charte
africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après désignée la «
Charte ») le 21 octobre 1986 et au Protocole le 10 février 2006. Elle a
également déposé, le 29 mars 2010, la Déclaration prévue à l’article 34(6)
du Protocole (ci-après désignée « la Déclaration »), par laquelle elle
accepte la compétence de la Cour pour recevoir des requêtes émanant
d'individus et des organisations non gouvernementales Le 21 novembre
2019 l’État défendeur a déposé auprès du président de la Commission de
l’Union africaine, un instrument de retrait de sa Déclaration. La Cour a
précédemment jugé que le retrait de la Déclaration n'avait aucune incidence
sur les affaires pendantes, ni sur les nouvelles affaires introduites devant elle avant sa prise d’effet un (1) an après le dépôt de l’instrument y relatif, à
savoir le 22 novembre 2020.?
Il. OBJET DE LA REQUÊTE
A. Faits de la cause
3. Il ressort de la Requête introductive d’instance que, le 3 décembre 2000,
les Requérants et un troisième accusé ont croisé une dame qui rentrait chez
elle à pied avec ses deux filles. Sur les entrefaites, l’un des Requérants a
violé la dame tandis que ses complices tenaient les filles en respect afin de
les empêcher d'appeler à l’aide.
4. Le 31 août 2001, les Requérants ont été déclarés coupables de viol collectif
et de vol avec violence, puis condamnés à une peine d’emprisonnement à
perpétuité, par le Tribunal de district de Tarime, région de Musoma, dans
l’affaire pénale n° 26 de 2001.
5. Se sentant lésés par cette décision, les Requérants ont interjeté appel
devant la Haute Cour de Tanzanie siégeant à Ai dans l'affaire pénale
n° 135 de 2021. Toutefois, avant que l'examen de l’appel, le jugement du
Tribunal de district a été renvoyé à la Haute Cour pour confirmation de la
peine d’emprisonnement à vie. La Haute Cour l’a commuée en une peine
de trente (30) ans de réclusion. L'appel des Requérants devant la Haute
Cour a, par la suite, été rejeté le 18 février 2002 comme mal fondé.
6. Insatisfaits de l’arrêt de la Haute Cour, les Requérants ont formé un recours
devant la Cour d'appel de Tanzanie siégeant à Ai dans l'affaire
pénale n° 69 de 2002. Le 3 novembre 2004, la Cour d’appel a rejeté le
recours dans son intégralité, en annulant la peine de trente (30) ans de
? An Ad Ab c. République-Unie de Tanzanie (arrêt) (26 juin 2020) 4 RICA 219, 88 37 à 39.
3 République Unie de Tanzanie, Loi portant procédure pénale 1985, Chapitre 20, Article 172.
réclusion prononcée par la Haute Cour, et rétabli celle d'emprisonnement à
vie prononcée par le Tribunal de district.
B. Violations alléguées
7. Les Requérants allèguent :
ii Qu'ils ont été lésés par le verdict de la Cour d’appel car ils n’ont pas eu
la possibilité d’interjeter appel lorsque celle-ci a rejeté leur recours et a
substitué la peine de trente (30) ans de réclusion à celle
d'emprisonnement à perpétuité ;
i. Que le tribunal d'instance les a condamnés sur la base d’éléments de
preuve douteux, contradictoires et inopérants ;
ii. Que le tribunal d’instance a commis une erreur en acceptant les
éléments de preuve d’identification inopérants qui n’avaient aucun sens
qui sont restés muets sur les conditions d’une bonne identification ;
iv. Que la Cour d’appel a commis une erreur en accueillant des éléments
de preuve à charge alors qu’ils suscitaient un doute raisonnable qui
auraient profité aux Requérants.
v. Que les erreurs « tolérées » par la Cour d’appel étaient contraires à la
loi et ont engendré un déni de justice. Ainsi, dans sa décision, ladite
cour a violé les droits fondamentaux des Requérants et l’article 3(1) et
(2) de la Charte.
Il. RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR DE CÉANS
8. La Requête introductive d'instance a été reçue au Greffe le ''" février 2016
et communiquée à l’État défendeur le 23 février 2016.
9. À la demande des Requérants, la Cour a désigné Me Daniel Walyemera
comme conseil pour les représenter dans le cadre du système d’assistance
judiciaire de la Cour.
10. Après plusieurs prorogations de délai, les Parties ont soumis leurs
observations sur le fond. Toutefois, l’État défendeur n’a pas déposé sa
réponse aux observations des Requérants sur les réparations.
11. En application de la règle 64(1) du Règlement,* la Cour a initié une
procédure de règlement amiable à laquelle les Parties n’ont pas marqué
leur accord.
12. Les débats ont été clôturés le 20 janvier 2023 et les Parties en ont dûment
reçu notification.
IV. DEMANDES DES PARTIES
13. Les Requérants demandent à la Cour de :
i. Déclarer la Requête recevable.
ii. Dire qu’elle n’est pas compétente en l’espèce ;
ii. Dire que l’État défendeur a violé l’article 3(1) et (2) de la Charte.
14. Les Requérants demandent également à la Cour de :
i. Rétablir la justice et annuler la déclaration de culpabilité prononcée à
leur encontre ;
ii. Annuler la peine prononcée à leur encontre et ordonner leur remise en
liberté ;
iii. Leur accorder des réparations pour le préjudice subi ;
iv. Leur adjuger les dépens.
v. Ordonner toutes autres mesures ou réparations qu’elle juge
appropriées.
4 Article 57 du Règlement intérieur de la Cour du 2010.
15. L'État défendeur demande à la Cour de :
ii Se déclarer incompétente pour connaître de la présente Requête ;
ii. Rejeter la Requête au motif qu’elle ne satisfait pas aux conditions de
recevabilité énoncées à l’article 40(5) du Règlement intérieur ;
iii. Rejeter la Requête au motif qu’elle ne satisfait pas aux conditions de
recevabilité prévues à l’article 40(6) du Règlement intérieur ;
iv. Mettre les frais de procédure de la présente Requête à la charge des
Requérants.
16. L'État défendeur demande en outre à la Cour de :
i. Dire que l’État défendeur n’a pas violé l’article 3(1) et (2) de la Charte ;
ii. Rejeter la Requête conformément à l’article 38 du Règlement intérieur ;
iii. Rejeter les demandes des Requérants ;
iv. Rejeter la Requête dans son intégralité comme mal fondée ;
v. Mettre les frais de procédure à la charge des Requérants.
V. SUR LA COMPÉTENCE
17. La Cour relève que l’article 3 du Protocole dispose :
1. La Cour a compétence pour connaître de toutes les affaires et de
tous les différends dont elle est saisie concernant l'interprétation
et l’application de la Charte, du [...] Protocole, et de tout autre
instrument pertinent relatif aux droits de l’homme et ratifié par les
États concernés.
2. En cas de contestation sur le point de savoir si la Cour est
compétente, la Cour décide.
18. En outre, aux termes de la règle 49(1) du Règlement, la Cour « procède à
un examen préliminaire de sa compétence [.…] conformément à la Charte,
au Protocole et au [.…] Règlement ».°
19. Sur le fondement des dispositions précitées, la Cour doit, pour chaque
requête, procéder à un examen préliminaire de sa compétence et statuer,
le cas échéant, sur les exceptions d’incompétence.
20. La Cour note qu’en l’espèce, l’État défendeur soulève une exception
d’incompétence matérielle. La Cour statuera sur ladite exception avant de
se prononcer, si nécessaire, sur les autres aspects de sa compétence.
A. Exception d’incompétence matérielle
21. L'État défendeur fait valoir que la Cour n’a pas une compétence d’appel sur
les questions de fait et de droit qui ont été tranchées, de manière définitive,
par sa Cour d’appel. L’État défendeur soutient que la compétence de la
Cour de céans ne peut s'étendre à la question de l’identification des
Requérants dans le cadre de l’affaire pénale nationale.
22. L'État défendeur affirme, en outre, que la Cour ne peut faire droit aux
demandes des Requérants tendant à annuler la déclaration de culpabilité
ainsi que la condamnation prononcée à leur encontre et à ordonner leur
mise en liberté.
23. Les Requérants concluent au rejet de l’exception. Ils soutiennent, à cet
effet, que la Requête est relative à des droits protégés par la Charte, un
instrument que la Cour a compétence pour interpréter et appliquer. Les
Requérants font également valoir que la Cour est compétente pour
examiner les questions relatives aux erreurs alléguées qui ont entaché les
procédures internes pour déterminer si celles-ci étaient conformes aux
5 Article 39(1) du Règlement intérieur de la Cour du 2 juin 2010.
dispositions de la Charte et des autres instruments auxquels l’État
défendeur est partie.
24. La Cour rappelle que, conformément à l’article 3(1) du Protocole, elle est
compétente pour connaître de « toutes les affaires et de tous les différends
dont elle est saisie concernant l’interprétation et l’application de la Charte,
du [...] Protocole et de tout autre instrument pertinent relatif aux droits de
l'homme et ratifié par l’État concerné ».$
25. La Cour rappelle également que, conformément à sa jurisprudence
constante, elle n’a pas compétence d’appel pour recevoir et examiner des
recours portant sur des questions tranchées par les juridictions internes.”
Toutefois, cela ne l’empêche pas d’examiner la conformité des procédures
nationales aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme
ratifiés par l’État concerné.
26. En l'espèce, les Requérants demandent à la Cour d’apprécier si la
procédure devant les juridictions nationales est conforme aux obligations
de l’État défendeur découlant de la Charte. En vertu de l’article 3(1) du
Protocole, la Cour est habilitée à veiller au respect de ces obligations et,
lorsqu’elle estime nécessaire, à ordonner des mesures appropriées.
27. À lalumière de ce qui précède, la Cour rejette l’exception soulevée par l’État
défendeur et conclut qu’elle a la compétence matérielle, en l’espèce.
Cl Am Be c. République-Unie de Tanzanie, CATDHP, Requête n° 052/2016, Arrêt du 1 décembre 2022 (fond et réparations), 8 23 à 27 ; Bs Aj c. République-Unie de Tanzanie (arrêt) (26 juin 2020), 4 RICA 265 8 18.
7 Ernest Bm Bd c. République du Malawi (compétence) (15 mars 2013), 1 RICA 197, 88 14 à 16.
8 As Bb c. République-Unie de Tanzanie (fond et réparations) (7 décembre 2018), 2 RICA 493, 8 33 ; Ah Au Ah et un autre c. République-Unie de Tanzanie (fond) (7 décembre 2018), 2 RICA 539, 8 29 et Av Cf c. République-Unie de Tanzanie (fond) (20 novembre 2015), 1 RICA 482, 8130.
B. Autres aspects de la compétence
28. La Cour observe qu'aucune exception n’a été soulevée quant à sa
conformément à la règle 49(1) du Règlement,® elle doit s'assurer que les
exigences relatives à tous les aspects de sa compétence sont remplies
avant de poursuivre l’examen de la Requête.
29. En ce qui concerne sa compétence personnelle, la Cour rappelle, comme
indiqué au paragraphe 2 du présent Arrêt, que le 21 novembre 2019, l’État
défendeur a déposé auprès du Président de la Commission de l’Union
africaine un instrument de retrait de sa Déclaration faite en vertu de l’article
34(6) du Protocole. La Cour rappelle, en outre, qu’elle a décidé que le retrait
de la Déclaration n’avait aucun effet rétroactif sur les affaires introduites
avant le dépôt de l'instrument de retrait, ni aucune incidence sur les
nouvelles affaires dont elle a été saisie avant la prise d’effet du retrait,
comme c’est le cas en l’espèce.!° La présente Requête, introduite avant le
retrait de la Déclaration, n’en est donc pas affectée. À la lumière de ce qui
précède, la Cour estime qu’elle a la compétence temporelle, en l’espèce.
30. S’agissant de sa compétence temporelle, la Cour relève que les violations
alléguées par les Requérants sont survenues après la ratification par l’État
défendeur de la Charte mais avant sa ratification du Protocole. Toutefois,
les violations alléguées ont un caractère continu dans la mesure où la
condamnation des Requérants est maintenue sur la base de ce qu’ils
considèrent comme étant une procédure inéquitable.!! Au vu de ce qui
précède, la Cour conclut qu’elle a la compétence temporelle pour examiner
la présente Requête.
© Article 39(1) du Règlement intérieur de la Cour du 2 juin 2010.
19 Ab c. Tanzanie, supra, 88 35 à 39 ; Bq Ce Bu c. République-Unie du Rwanda (compétence) (3 juin 2016), 1 RICA 585, 8 67.
11 Voir Be B Ca AH, 8 30 ; Commission africaine des droits de l'homme et des peuples c. République du Kenya (fond) (26 mai 2017), 2 RICA 9, 88 64 et 65 ; Bt Bk et autres c. Cd Ar (exceptions préliminaires) (25 juin 2013), 1 RICA 204, 88 71 à 77 et 83.
31. Pour ce qui est de sa compétence territoriale, la Cour relève que les
violations alléguées par les Requérants se sont produites sur le territoire de
l’État défendeur. La Cour en conclut qu’elle a la compétence territoriale.
32. Au regard de tout ce qui précède, la Cour conclut qu’elle est compétente
pour connaître de la présente Requête.
VI. SUR LA RECEVABILITÉ
33. Aux termes de l’article 6(2) du Protocole, « [Ja Cour statue sur la
recevabilité des requêtes en tenant compte des dispositions énoncées à
l’article 56 de la Charte ».
34. Conformément à la règle 50(1) du Règlement, « [a Cour procède à un
examen de la recevabilité des requêtes introduites devant elle
conformément aux articles 56 de la Charte et 6, alinéa 2 du Protocole, et au
présent Règlement ».
35. La règle 50(2) du Règlement, qui reprend en substance les dispositions de
l’article 56 de la Charte, est libellée comme suit :
Les Requêtes introduites devant la Cour doivent remplir toutes les
conditions ci-après :
a. Indiquer l’identité de leur auteur même si celui-ci demande à la
Cour de garder l’anonymat ;
b. Être compatibles avec l’Acte constitutif de l’Union africaine et la
Charte ;
c. Ne pas être rédigées dans des termes outrageants ou insultants à
l'égard de l’État concerné et ses institutions ou de l’Union
africaine ;
d. Ne pas se limiter à rassembler exclusivement des nouvelles
diffusées par les moyens de communication de masse ;
e. Être postérieures à l’épuisement des recours internes s'ils
existent, à moins qu’il ne soit manifeste à la Cour que la procédure de ces recours se prolonge de façon anormale ;
f. Être introduites dans un délai raisonnable courant depuis
l'épuisement des recours internes ou depuis la date retenue par la
Cour comme faisant commencer à courir le délai de sa saisine ;
g. Ne pas concerner des affaires qui ont été réglés par les États
concernés, conformément aux principes de la Charte des Nations
Unies, de l’Acte constitutif de l’Union africaine ou des dispositions
de la Charte.
36. La Cour note que l'État défendeur soulève une exception d’irrecevabilité
tirée du dépôt de la Requête dans un délai non raisonnable après
l’épuisement des recours internes. La Cour examinera ladite exception (A)
avant de se prononcer sur les autres conditions de recevabilité (B), si
nécessaire.
A. Exception tirée du dépôt de la Requête dans un délai non raisonnable
37. L'État défendeur fait valoir que les Requérant sont forclos dans la mesure
où leur Requête ne répond pas aux exigences de l’article 56(6) de la Charte
et de la règle 50(2)(f) du Règlement"? selon lesquelles une requête doit être
déposée dans un délai raisonnable courant depuis l’épuisement des
recours internes.
38. Les Requérants, quant à eux, concluent au rejet de l’exception et affirment
que la Charte ne définit pas ce qu’est un délai raisonnable. Selon eux, pour
évaluer si le délai est raisonnable, la Cour devrait prendre en compte le fait
qu’ils sont incarcérés.
39. La Cour observe que ni la Charte, ni le Règlement ne définissent le délai
exact dans lequel les Requêtes doivent être déposées après épuisement
des recours internes. L'article 56(6) de la Charte et la règle 50(2)(f) du
Règlement indiquent uniquement que les requêtes doivent être introduites
12 Article 40 du Règlement intérieur de la Cour du 2 juin 2010.
« … dans un délai raisonnable courant depuis l'épuisement des recours
internes ou depuis la date retenue par la Cour comme faisant commencer
à courir le délai de sa saisine ».
40. La Cour note que la question à trancher est celle de savoir si le délai dans
lequel les Requérants ont introduit la présente Requête après épuisement
des recours internes est raisonnable. En l'espèce, la Cour relève que les
recours internes ont été épuisés le 3 novembre 2004 lorsque la Cour
d’appel a rejeté le recours des Requérants. Or, le point de départ du
décompte du délai est le 29 mars 2010, c’est-à-dire la date à laquelle l’État
défendeur a déposé sa Déclaration, dans la mesure où ce n’est qu’à partir
de cette date que les individus pouvaient attraire l’État défendeur devant la
Cour.
41. La Cour estime que la période comprise entre 2007 et 2013 correspond à
ses premières années d'activités et que le grand public, et a fortiori les
personnes se trouvant dans des situations particulières telles que
l’incarcération, ne pouvaient être présumées avoir une connaissance
suffisante de l'existence de la Cour.!® En l'espèce, les Requérant sont
profanes en matière de droit et purgent une peine privative de liberté depuis
les années sus-indiquées. Par conséquent, la période à prendre en compte
est celle comprise entre 2014 et le dépôt de la Requête le 1°" février 2016,
soit deux (2) ans et un (1) mois. La question à trancher est, donc, celle de
savoir si la période sus-indiquée constitue un délai raisonnable au sens de
l’article 56(6) de la Charte.
42. La Cour rappelle que, pour apprécier le caractère raisonnable du délai, il
convient de tenir compte de la situation du Requérant, notamment, s’il était
incarcéré, profane en droit et indigent, n’a pas bénéficié d’une assistance
13 Bo Ag c. République-Unie de Tanzanie, CAfDHP, Requête n° 020/2017, Arrêt du 1 décembre 2022, 8 34 ; Af Ac Bi c. République-Unie de Tanzanie, CAfDHP, Requête n° 005/2016, Arrêt du 2 décembre 2021, 8 52 ; Bj Cc c. République-Unie de Tanzanie (fond) (3 juin 2016), 1 RICA 624, 88 91 à 93 ; Bk et autres c. Cd Ar (exceptions préliminaires), supra, 8 122.
judiciaire** ou s’il avait une connaissance limitée des procédures devant la
Cour de céans.!5
43. En l’espèce, la Cour note que les Requérants sont des profanes en droit. Il
ressort également du dossier qu’au moment du dépôt de la Requête, ils
étaient incarcérés et qu’en conséquence, leurs déplacements et l’accès à
l'information étaient limités ; situation que la Cour a, par le passé,
considérée comme constituant une justification légitime du dépôt tardif des
44. La Cour considère que les circonstances susmentionnées justifient
valablement le délai dans lequel les Requérants ont introduit leur Requête
après l’arrêt de la Cour d’appel. La Cour en conclut que ce délai est
raisonnable au sens de l’article 56(6) de la Charte.
45. À la lumière de ce qui précède, la Cour rejette l’exception d’irrecevabilité
tirée du dépôt allégué de la Requête dans un délai non raisonnable.
B. Autres conditions de recevabilité
46. La Cour note que les Parties ne contestent pas la conformité de la Requête
aux exigences des alinéas (1), (2), (3), (4) et (7) de l’article 56 de la Charte,
reprises aux sous-alinéas (a), (b), (c), (d) et (g) de la règle 50(2).
Néanmoins, la Cour doit s'assurer que ces exigences sont satisfaites.
47. En l'espèce, la Cour constate que la condition prévue à la règle 50(2)(a) du
Règlement est remplie, les Requérants s'étant clairement identifiés.
14 Ag c. Tanzanie, supra, 8 35 ; Cf B Ca, supra, 8 73 ; Ap Bn c. République- Unie de Tanzanie (fond) (28 septembre 2017), 2 RICA 105, 8 54 ; Amir Aq c. République-Unie de Tanzanie (fond) (11 mai 2018), 2 RICA 356, 8 83.
15 Ag c. Tanzanie, ibid ; Bj Ak Ac c. République-Unie de Tanzanie, CAfDHP, Requête n° 014/2016, Arrêt du 2 décembre 2021, 8 61 ; Bc Aq c. République-Unie de Tanzanie (fond) (11 mai 2018), 2 RICA 356, 8 83.
16 [guna c. Tanzanie, supra, 8 37 ; Cf B Ca, supra 8 73 ; Bn B Ca, supra, 8 54.
48. La Cour relève également que les demandes formulées par les Requérants
visent à protéger leurs droits garantis par la Charte. Elle note, en outre, que
l’un des objectifs de l’Acte constitutif de l’Union africaine, tel qu’énoncé en
son article 3(h), est la promotion et la protection des droits de l'homme et
des peuples. Par ailleurs, la Requête ne contient aucun grief et aucune
demande qui soit incompatible avec une disposition dudit Acte. La Cour en
conclut que la Requête satisfait à l'exigence de la règle 50(2)(b) du
Règlement.
49. La Cour observe, en outre, que la Requête ne contient aucun terme
outrageant ou insultant à l’égard de l’État défendeur, de ses institutions ou
de l’Union africaine, ce qui la rend conforme à l’exigence de la règle 50(2)(c)
du Règlement.
50. En ce qui concerne la condition énoncée à la règle 50(2)(d) du Règlement,
la Cour note que la Requête contient les allégations des Requérants
étayées par des documents officiels émanant des autorités judiciaires de
l’État défendeur. Elle est donc conforme à cette exigence dans la mesure
où elle ne se limite pas à rassembler exclusivement des nouvelles diffusées
par les moyens de communication de masse.
51. La Cour relève également que la condition de l'épuisement des recours
internes prévue à l’article 50(2)(e) du Règlement est remplie dans la mesure
où la Cour d’appel, organe judiciaire suprême de l’État défendeur, a statué
sur les questions soulevées par les Requérants par un arrêt rendu le 3
novembre 2004.
52. S’agissant, enfin, de la condition énoncée à la règle 50(2)(g) du Règlement,
la Cour constate que la présente Requête ne concerne pas une affaire qui
a déjà été réglée conformément aux principes de la Charte des Nations
Unies, de l’Acte constitutif de l'Union africaine ou des dispositions de la
Charte. La Requête satisfait donc à cette exigence.
53. La Cour en conclut que la Requête remplit toutes les conditions de
recevabilité énoncées à l’article 56 de la Charte, reprises à la règle 50(2) du
Règlement, et la déclare recevable.
VII. SUR LE FOND
54. Les Requérants allèguent que l’État défendeur a violé leurs droits à l’égalité
devant la loi et à l’égale protection de la loi, protégés par l’article 3 de la
Charte lorsque les juridictions nationales les ont déclarés coupables et
condamnés sur la base de preuves qui ne répondaient pas aux normes
requises.
55. L'article 3 de la Charte dispose : « 1. Toutes les personnes bénéficient
d’une totale égalité devant la loi. 2. Toutes les personnes ont droit à une
égale protection de la loi. ».
56. La Cour rappelle que, conformément à sa jurisprudence, l’égale protection
de la loi suppose que la loi protège toute personne sans discrimination.!”
S'agissant, en particulier, de ce droit protégé par l’article 3 de la Charte, la
Cour a jugé que la violation est établie lorsqu’il existe des preuves que le
requérant a été traité différemment par rapport à d’autres personnes se
trouvant dans une situation similaire à la sienne.!8
57. En cas de violation alléguée du droit à un procès équitable, il incombe au
requérant de prouver que l'appréciation par la juridiction nationale
compétente des éléments de preuve révèle une erreur apparente ou
17 Ci Bz Bx c. République du Malawi, CAfDHP, Requête n° 022/2017, Arrêt du 23 juin 2022 (fond et réparations), 8 81 ; Action pour la protection des droits de l'homme c. Côte d’Ivoire (fond) (18 novembre 2016) 1 RICA 697, 8 146.
18 Al Ae c. République-Unie de Tanzanie (fond), (28 mars 2019), 3 RICA 87, 8 73 ; Cg AL Aw c. République-Unie de Tanzanie (fond) (7 décembre 2018), 2 RICA 570, 8 69.
manifeste ayant entraîné un déni de justice à son égard, par rapport à
d’autres justiciables dans la même situation.!°
58. La Cour note que l’argument des Requérants porte sur deux points
principaux, à savoir que la Cour d’appel a, d’une part, fondé la
condamnation sur des preuves erronées et, d’autre part, rejeté leur appel
et rétabli la peine d’emprisonnement à vie prononcée par le tribunal
A. Allégation relative au renversement de la charge de la preuve et à la
condamnation fondée sur des preuves inappropriées
59. Les Requérants allèguent que la Cour d'appel a commis une erreur en
exigeant d’eux qu’ils fassent état d’un doute raisonnable sur les éléments à
charge en prouvant qu’ils n’étaient pas présents sur le lieu du crime, alors
que la charge de la preuve, selon la loi, incombe au ministère public et non
à la défense.
60. Ils soutiennent, également, que la Cour d’appel a fondé leur condamnation
sur une identification visuelle inappropriée, laissant ainsi subsister des
doutes qui auraient pu être résolus en leur faveur. Selon les Requérants, la
Cour d'appel n’aurait pas dû prendre en compte l'identification faite grâce
aux phares du véhicule qui passait, sans aucune preuve de sa vitesse. Les
Requérants affirment, du reste, que la Cour d’appel n’a pas tenu compte de
la contradiction des témoins concernant la source de lumière, à savoir les
phares du véhicule qui passait ou le clair de lune.
61. L'État défendeur réfute ces allégations et soutient que le ministère public a
prouvé sa cause contre les Requérants au-delà de tout doute raisonnable.
19 Ae c. Tanzanie, supra, 8 60.
62. L’État défendeur ajoute que la Cour d’appel a pris acte de la contradiction
soulevée par les Requérants et a, donc, ignoré tous les éléments de preuve
y relatifs.
63. L’État défendeur affiime, en outre, que les allégations relatives à une
identification incorrecte ne sont pas fondées dans la mesure où la Cour
d’appel a évalué de manière approfondie les preuves présentées devant
elle concernant l'identification des Requérants et a, finalement, conclu qu’ils
ont été correctement identifiés sur le lieu du crime.
64. La Cour relève que les Requérants soulèvent une question des preuves
retenues par les juridictions internes, mais qu’ils font valoir également que
la manière dont les questions de preuves ont été examinées a entrainé la
violation de leur droit à l’égalité devant la loi et à l’égale protection de la loi.
65. En ce qui concerne le droit à une égale protection de la loi, la Cour note que
les articles 12 et 13 de la Constitution de l’État défendeur protègent ce droit
dans les mêmes termes que la Charte. Il convient de relever que les
Requérants n’ont pas apporté la preuve de l’application, dans la procédure
interne les concernant, d’une autre loi contraire au droit à une égale
protection de la loi. La Cour note également, qu’en l’espèce, s'agissant de
la charge ou des moyens de preuve, il n’existe aucun élément indiquant que
la procédure interne était fondée sur une loi ou un règlement qui comportent
des dispositions différentes pour les Requérants par rapport aux autres
parties au litige.
66. En ce qui concerne le droit à l’égalité devant la loi, la Cour note qu’il ressort
du dossier que la Cour d’appel a examiné tous les éléments de preuve
soumis par le ministère public mais les a écartés, dans la mesure où ils
semblaient être contradictoires. La Cour d'appel a également évalué tous
les éléments de preuve présentés dans l’affaire contre les Requérants et a
conclu que le ministère public avait prouvé sa cause au-delà de tout doute raisonnable, comme l’exigent les normes applicables dans de telles
circonstances. Par conséquent, le seul fait que la Cour d’appel ait écarté
des preuves contradictoires qui, selon les Requérants, auraient pu être en
leur faveur n’entraîne pas la violation du droit à l’égalité devant la loi.
67. Compte tenu de ce qui précède, la Cour rejette l’allégation des Requérants
selon laquelle l’État défendeur a violé l’article 3 de la Charte en ce qui
concerne le traitement, par la Cour d’appel, de la charge et des moyens de
preuve.
B. Allégation relative à l’impossibilité d’interjeter appel de la décision de
substitution des peines
68. Les Requérants allèguent que la décision de la Cour d’appel de rejeter leur
recours, d'annuler la peine de trente (30) ans de réclusion et de lui
substituer une peine d'emprisonnement à perpétuité les a lésés et privés de
toute possibilité d'appel.
69. L'État défendeur conclut au rejet de cette allégation et soutient que la Cour
d’appel a simplement abordé la question du caractère illégal de la peine
prononcée contre les Requérants et lui a substitué la peine appropriée
prévue par la loi pour le délit de viol collectif, puni, aux termes de l’article
131A(2) du Code pénal, par l’emprisonnement à vie.
70. L'État défendeur fait également valoir que, bien que la Cour d’appel soit la
plus haute juridiction du pays, les Requérants avaient toujours la possibilité
d'introduire un recours en révision de sa décision.
71. La Cour note que la question soulevée par les Requérants concerne
l’absence de recours contre la substitution des peines. Elle note que la manière dont cette question a été examinée a entraîné une violation de
leurs droits à l'égalité devant la loi et à une égale protection de la loi.
72. La Cour observe que quand bien même les Requérants allèguent la
violation du droit à une égale protection de la loi, il est nécessaire de faire
des éclaircissements préliminaires en ce qui concerne le droit d’interjeter
appel. À cet égard, la Cour rappelle que, comme elle l’a déjà conclu, le droit
d’interjeter appel implique que les États mettent en place des mécanismes
compétents, mais également qu'ils en facilitent l’accès.° La Cour a
également conclu que l’exigence d’un double degré de juridiction est
absolue en matière pénale.?!
73. La question qui se pose dans la présente Requête est celle de savoir si le
droit à l’égalité devant la loi et le droit à l’égale protection de la loi ont été
violés du fait de l'impossibilité pour les Requérants d’interjeter appel de
l’arrêt de la Cour d’appel qui a substitué la peine de trente (30) ans de
réclusion prononcée par la Haute Cour à celle de l’emprisonnement à vie.
74. La Cour observe que, conformément au système judiciaire de l’État
défendeur, les affaires pénales telles que celle qui concerne les Requérants
sont jugées, en premier ressort, par le tribunal de district, à charge pour les
parties d’interjeter appel devant la Haute Cour. Les contestations de la
décision de la Haute Cour sont portées devant la Cour d’appel.
75. En l’espèce, la Haute Cour a annulé la peine d’emprisonnement à vie
prononcée par le tribunal de district et l’a substituée par une peine de trente
(30) ans de réclusion. Lorsque l’affaire a fait l’objet d’un appel devant la
Cour d'appel, celle-ci a estimé que la peine substituée par la Haute Cour
n’était pas appropriée au regard de la loi et a rétabli celle prononcée par le
tribunal d’instance comme étant celle prévue par la loi.
2 Cg AL Aw c. République-Unie de Tanzanie (fond), (7 décembre 2018), 2 RICA 570, 8 57 ; Cb Az Bf c. République-Unie de Tanzanie (fond et réparations) (26 septembre 2019), 3 RICA 504, 8 43.
21 Ba Aa Ao c. République de Bénin (fond) (29 mars 2019), 3 RICA 136, 8 212.
76. La Cour note que, conformément à l’article 131A (1) et (2) du Code pénal
de l’État défendeur, la peine d’emprisonnement à vie est obligatoire pour
l'infraction de viol collectif. C’est donc en application de ladite disposition
que la Cour d’appel a rétabli la peine d’emprisonnement à vie initialement
prononcée par le tribunal de district.
77. Il est primordial de souligner que la Cour d’appel n’a pas connu de l'affaire
en premier ressort lors de la détermination de la peine et n’a pas prononcé
la peine initiale d’emprisonnement à vie. En outre, les Requérants ne
fournissent pas la preuve qu’une disposition de la loi applicable les visait
personnellement ou que la Cour d’appel a statué différemment à leur égard
par rapport à d’autres justiciables se trouvant dans une situation identique
ou similaire.
78. Au regard de ce qui précède, la Cour rejette l'argument des Requérants et
conclut que l’État défendeur n’a pas violé les droits protégés par l’article 3
de la Charte.
VIII. SUR LES RÉPARATIONS
79. Les Requérants demandent à la Cour de leur accorder des réparations pour
les violations qu’ils ont subies, notamment en annulant l’arrêt de la Cour
d'appel et ordonnant leur remise en liberté.
80. L'État défendeur, quant à lui, demande à la Cour de rejeter la demande de
réparations formulée par les Requérants.
81. L'article 27(1) du Protocole dispose :
Lorsqu'elle estime qu’il y a eu violation d’un droit de l'homme ou des
peuples la Cour ordonne toutes les mesures appropriées afin de remédier à la situation, y compris le paiement d’une juste
compensation ou l’octroi d’une réparation.
82. En l’espèce, la Cour n’ayant constaté aucune violation, la demande de
réparation n’est pas justifiée. La Cour rejette donc la demande de
réparations formulée par les Requérants.
IX. SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE
83. Les Requérants demandent à la Cour de mettre les frais de procédure à la
charge de l’État défendeur.
84. L'État défendeur demande, pour sa part, à la Cour de mettre les frais de
procédure à la charge des Requérants.
85. La Cour relève qu’aux termes de la règle 32(2), « à moins que la Cour n’en
décide autrement, chaque partie supporte ses frais de procédure ».
86. La Cour constate que rien, dans les circonstances de l’espèce, ne justifie
qu’elle déroge à cette disposition. En conséquence, la Cour ordonne que
chaque Partie supporte ses frais de procédure.
DISPOSITIF
87. Par ces motifs
LA COUR,
Sur la compétence ii. Dit qu’elle est compétente.
Sur la recevabilité
À la majorité de sept (7) voix pour et trois (3) voix contre, les Juges Ben KIOKO, Tujilane R. CHIZUMILA et Dennis D. ADJEI étant dissidents ,
iii. Rejette l'exception d’irrecevabilité de la Requête ;
iv. Dit que la Requête est recevable.
Sur le fond
À la majorité de sept (7) voix, les Juges Ben KIOKO, Tujilane R. CHIZUMILA et Dennis D. ADJEI étant dissidents conjointe sur la recevabilité,
v. Dit que l’État défendeur n’a pas violé le droit des Requérants à l’égalité devant la loi et leur droit à une égale protection de la loi garantis à l’article 3 de la Charte.
À l’unanimité,
Sur les réparations
vi. Rejette la demande de réparations.
Sur les frais de procédure
vii. Ordonne que chaque Partie supporte ses frais de procédure.
Ont signé :
Blaise TCHIKAYA, Vice-président gs
Ben KIOKO, Juge RSS Tujilane R. CHIZUMILA, Juge as ipousi ay
Chafika BENSAOULA, Juge A ; EC
Stella |. ANUKAM, Juge ; Eur am ;
Dumisa B. NTSEBEZA, Juge Jp Æ a.
Dennis D. ADJEI, Juge ;
et Robert ENO, Greffier.
Conformément à l’article 28(7) du Protocole et à la règle 70(1) du Règlement, l’opinion dissidente conjointe des Juges Ben KIOKO, Tujilane R. CHIZUMILA et Dennis ADJEI est jointe au présent Arrêt.
Fait à Arusha, ce treizième jour du mois de juin de l’an deux mille vingt-trois, en