DECISION N° 23/CE/CC/2018 DU 13 SEPTEMBRE 2018
AFFAIRE :
Sieur KISOB Bertin
C/
- ELECAM
- FTAT DU CAMEROUN
(PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE ET MINISTERE DE LA JUSTICE)
OBJET :
(Annulation du décret portant convocation du corps électoral pour l’élection du
Président de la République et annulation de l’élection du Président de la
République du 07 octobre 2018).
---L’an deux mille dix-huit ;
---Et le treize du mois de septembre ;
---Le Conseil Constitutionnel, siégeant en audience publique au Palais des Congrès a rendu la décision dont la teneur suit :
---Le Conseil Constitutionnel,
---Vu la Constitution ;
---Vu la loi n° 2004/004 du 21 avril 2004 portant organisation et fonctionnement du
Conseil Constitutionnel, modifiée et complétée par la loi n° 2012/015 du 21
décembre 2012 ;
---Vu la loi n° 2012/001 du 19 avril 2012 portant Code Electoral, modifiée et
complétée par la loi n° 2012/017 du 21 décembre 2012 ;
---Vu le décret n° 2018/104 du 07 février 2018 portant organisation et
fonctionnement du Secrétariat Général du Conseil Constitutionnel ;
---Vu le décret n° 2018/015 du 07 février 2018 portant nomination des Membres du
Conseil Constitutionnel ;
---Vu le décret n° 2018/106 du 07 février 2018 portant nomination du Président du Conseil Constitutionnel ;
---Vu le décret n° 2018/170 du 23 février 2018 portant nomination du Secrétaire
Général du Conseil Constitutionnel ;
---Vu le décret n° 2018/391 du 09 juillet 2018 portant convocation du corps électoral
en vue de l’élection du Président de la République le 07 octobre 2018 ;
---Vu le décret n° 2018/445 du 31 juillet 2018 portant nomination de responsables au
Secrétariat Général du Conseil Constitutionnel ;
---Vu le recours de sieur KISOB Bertin ;
---Attendu que par requête sans date enregistrée le 09 août 2018 au Conseil
Constitutionnel sous le n°16, sieur KISOB Bertin, Président National et candidat du
« Cameroon Party for Social Justice -CPSJ » à l’élection du Président de la
République du 07 octobre 2018, a saisi ledit Conseil d’un recours en annulation du
décret n° 2018/391 du 09 juillet 2018 portant convocation du corps électoral pour
ladite élection et en annulation de cette élection ;
---Attendu que ledit recours est articulé comme suit :
« Prophète BERTIN KISOB
« Président National et candidat du Cameroon Party for Social Justice -CPSJ » à la
Présidentielle du 07 octobre 2018. S/C Régisseur Prison Principale de Ab
Ai ;
« A: Monsieur le Président du Conseil Constitutionnel du Cameroun sis au Palais de
congrès de Yaoundé.
« REQUETE POUR L'ANNULATION DU DECRET DE CONVOCATION DU
CORPS ELECTORAL POUR LA PRESIDENTIELLE DU 07 OCTOBRE 2018.
« Monsieur le Président,
« J'ai l'honneur de venir par la présente solliciter l’annulation par votre cour du
décret de convocation du corps électoral pour la Présidentielle du 07 octobre 2018.
« En effet, comment comprendre qu’une élection présidentielle puisse avoir lieu
pendant que 06 régions sur 10 sont une insécurité totale ou partielle. Les régions du
Nord-Ouest et du Sud-Ouest sont à ce jour totalement hors du contrôle des autorités
de Yaoundé, alors que celles du Nord, Littoral, Est et l'Ouest sont dans une
insécurité inquiétante.
« Comment peut-on proroger le mandat des Députés et des conseillers municipaux
pour des raisons entre autres d'insécurité, mais en même temps vouloir tenir une
élection présidentielle avec un arbitre ELECAM complètement noyauté par des
membres du RDPC? Comment peut-on en plus, organiser en 2018 une élection
présidentielle à un seul tour ? C’est de la dictature pure et dure ! Car cela revient à
faire triompher la minorité sur la majorité. Ce qui est totalement anti-démocratique.
« Je vous prie dès lors d'annuler cette élection présidentielle du 07 octobre 2018
pour permettra au pays de retrouver la paix civile avant toute consultation
électorale. Cela permettre à notre beau pays d'éviter le chaos généralisé. Car, ce
sont les 04 autres régions aujourd’hui en relative paix qui risqueront de basculer
aussi dans la violence après la proclamation des résultats de cette présidentielle-
déjà truquée à cause de ce mauvais code électoral et des violences dans certaines
régions.
« Je continuerais malgré tous ces obstacles à sensibiliser le peuple CAMEROUNAIS
SUR MON OFFRE POLITIQUE, Panafricain-Le KEMATIANISME- qui est du reste
diamétralement opposée au concept de pouvoir néocolonial du RDPC. Changer le
nom du pays de Cameroun — qui veut dire crevettes en portugais pour le remplacer
par KEMATI- qui veut dire Noir en kematien, la nouvelle langue officielle que nous
donnerons à notre pays après notre victoire. Noter que le kematien est en fait une
compilation harmonieuse de toutes nos grandes langues officielles traditionnelles
plus le camfranglais. Résoudre le problème anglophone par un retour unilatéral au
fédéralisme de 1961 et ensuite ouvrir des négociations pour une nouvelle
confédération Camerounaise à 02 Etats confédérés avec 08 régions, francophones et
02 régions anglophones.
« Cette solution pacifique est de loin meilleur au génocide que prépare actuellement
Mr. Biya du RDPC en zone anglophone.
« Je vous prie enfin de faire parvenir au moins 02 jours avant l'audience publique un
mandat d’extraction de votre juridiction électorale aux autorités de la Prison
Principale de Ab Ai où je suis actuellement injustement incarcéré
depuis plus d’un an sous des fausses accusations de sécession anglophone par un
system judiciaire aux ordres du RDPC. Comment peut-on être sécessionniste et en
même temps malgré tous les risques se présenter par 02 fois aux élections
présidentielles du Cameroun. Il faut absolument que je puisse défendre ma cause
personnellement à l'audience.
« Tous contre Biya, le véritable gouverneur Noir du Cameroun et si cela ne suffit
pas, tous derrière l'offre orange de Mr. Ad AM, l’unique voie de sortie
contre cette dictature néocoloniale de Biya. La francophonie du franc CFA
néocolonial c’est fini ! Notre peuple n’en veut plus. Plus de 02 mandats présidentiels
c’est de la dictature car le Président ne pensera plus au bonheur du peuple, mais
plutôt à sa survie au pouvoir. D'où le fait que tôt ou tard, le peuple prendra ses
responsabilités malgré tous les dégâts que cela entrainera.
« Vive le kematianisme la seule idéologie et projet de société panafricain de
libération du peuple noir ! Il ne faut jamais confondre un Tigre avec un gros Chat. II
n’a pas de vivre-ensemble sans justice sociale.
« Prophète BERTIN KISOB
« é».
---Attendu que par correspondances n°° 198/SG/CC du 09 août 2018, 220/GC/CC du
28 août 2018 et 243/SG/CC du 05 septembre 2018, le Secrétaire Général du Conseil
Constitutionnel a communiqué cette requête au Ministre, Secrétaire Général de la
Présidence de la République, au Ministre d’Etat, Ministre de la Justice, Garde des
Sceaux et au Directeur Général de ELECTIONS CAMEROON, conformément aux
dispositions conjointes des articles 130 alinéa 5 du Code Electoral, et 60 alinéa 4 de la loi n° 2004/004 du 24 avril 2004 portant organisation et fonctionnement du
Conseil Constitutionnel, modifiée et complétée par la loi n° 2012/015 du 21
---Que suite à ces correspondances, ELECTIONS CAMEROON a produit par
l’intermédiaire de ses conseils Maîtres MBUFUNG Marcel KUMFA et
ATANGANA AMOUGOU Joseph, Avocats au Barreau du Cameroun, son mémoire
en réponse du 07 septembre 2018 dont la teneur suit :
« PLAISE AU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
« Attendu que suivant requête non datée, enregistrée le 09 août 2018 au Greffe du
Conseil Constitutionnel sous le n° 16, Monsieur B Y a sollicité
l’annulation du décret n° 2018/391 du 09 juillet 2018 portant convocation du corps
électoral en vue de l'élection du Président de la République ;
« Qu’au soutien de son recours, Monsieur B Y fait valoir que l'élection
présidentielle envisagée ne saurait se tenir dans le contexte actuel du Cameroun où
l’insécurité a fait son lit dans plusieurs régions ;
« Que cette requête ne peut cependant prospérer dans la mesure où le Conseil
Constitutionnel est incompétent à connaitre de l’objet de ladite requête.
«IN _ LIMINE LITIS: SUR L'INCOMPETENCE RATIONAE MATERIAE DU
CONSEIL CONSTITUTIONNEL A CONNAITRE DU RECOURS DE MONSIEUR
B Y.
« Attendu que l’article 3 alinéa 2 de la loi n° 2004/004 du 21 avril 2004 portant
organisation et fonctionnement du Conseil Constitutionnel dispose que «(…) Il veille
à la régularité de l’élection présidentielle, des élections parlementaires, des
consultations référendaires et en proclame les résultats(…) » ;
« Qu'’ainsi, outre la prérogative de la proclamation des résultats de l'élection
présidentielle, le Conseil Constitutionnel assure la fonction de régulateur des
opérations électorales ;
« Que dans le cadre de cette régulation, l'assiette de la compétence rationae
materiae du Conseil Constitutionnel est fixée par les articles 129 et 132 alinéa 2 du
Code Electoral ;
« Que ces articles disposent respectivement que :
« Les contestations ou les réclamations relatives au rejet ou à l’acceptation des
candidatures, ainsi que celles relatives à la couleur, au sigle ou au symbole
adoptés par un candidat sont soumises à l’examen du Conseil Constitutionnel par
tout candidat, tout parti politique ayant pris part à l’élection ou toute personne
ayant qualité d’agent du Gouvernement pour ladite élection, dans un délai
maximum de deux (02) jours suivant la publication des candidatures » ;
« (.…) II statue sur toute requête en annulation totale ou partielle des opérations
électorales introduite par tout candidat, tout parti politique ayant pris part à
l’élection, ou toute personne ayant qualité d’agent du Gouvernement pour cette
élection » ;
« Qu'ainsi, le Conseil Constitutionnel n’est compétent que pour connaitre des :
-contestations ou des réclamations relatives au rejet ou à x l'acceptation des
candidatures ;
-contestations ou des réclamations relatives à la couleur, au sigle ou au symbole
adoptés par un candidat ;
-requêtes en annulation totale ou partielle des opérations électorales ;
« Que le domaine d'intervention du Conseil Constitutionnel ainsi explicité est
d’ailleurs précisé par les articles 43, 44 et 45 de la loi n° 2004/004 du 21 avril 2004
portant organisation et fonctionnement du Conseil Constitutionnel ;
« Qu'il n’est nulle part prévu que le Conseil Constitutionnel connaisse de la
régularité ou non de l'acte portant convocation du corps électoral ;
« Qu'il s’en suit dès lors que faute de compétence, le Conseil Constitutionnel ne
saurait statuer sur l'annulation du décret n° 2018/391 du 09 juillet 2018 portant convocation du corps électoral en vue de l'élection du Président de la République
prévue le 07 octobre 2018.
« PAR CES MOTIFS
« Et tous autres à déduire, à ajouter ou à suppléer même d'office s’il y a lieu ;
« IN LIMINE LITIS :
« Se déclarer incompétent rationae materiae à statuer sur la demande d'annulation
du décret n° 2018/391 du 09 juillet 2018 portant convocation du corps électoral en
vue de l'élection du Président de la République.
« ET CE SERA JUSTICE
« SOUS TOUTES RESERVES
« Yaoundé, le 07 septembre 2018
« POUR ELECTIONS CAMEROON(ELECAM)
« Am AQ Af C (é)
«Maître ATANGANA AMOUGOU Joseph (é) ».
---Attendu que l’Etat du Cameroun auquel les correspondances susvisées sont
parvenues le 10 et 28 août 2018 n’y a pas répondu ;
---Qu’il échet de statuer contradictoirement à son égard ;
SUR L’ANNULATION DU DECRET N° 2018/391 DU 09 JUILLET 2018
PORTANT CONVOCATION DU CORPS ELECTORAL
---Attendu qu’aux termes de l’article 86(1) du Code Electoral :
« Le corps électoral est convoqué par décret du Président de la République. » ;
---Qu’il s’agit d’un acte de Gouvernement insusceptible de recours, et à tout le
moins, d’un acte administratif qui ne relève pas de la compétence du Conseil
Constitutionnel ;
---Qu’il y a lieu pour celui-ci de se déclarer incompétent sur ce point ;
SUR L’ANNULATION DE L’ELECTION PRESIDENTIELLE DU
07 OCTOBRE 2018
---Attendu que l’article 132 du susdit code dispose :
« (1) Le Conseil Constitutionnel veille à la régularité de l’élection présidentielle.
« (2) II statue sur toute requête en annulation totale ou partielle des opérations
électorales introduite par tout candidat, tout parti politique ayant pris part à
l’élection, ou par toute personne ayant qualité d’agent du Gouvernement pour
cette élection. ».
---Que l’article 133(1) suivant ajoute :
« Toute contestation formulée en application des dispositions de l’article 132 ci-
dessus doit parvenir au Conseil Constitutionnel dans un délai maximum de
soixante-douze (72) heures à compter de la date de clôture du scrutin ».
---Qu’il résulte de l’ensemble de ces dispositions que le contentieux en annulation
totale ou partielle du scrutin s’ouvre à la clôture de celui-ci ;
---Que dès lors, le recours de KISOB Bertin introduit le 09 août 2018, soit avant le
scrutin prévu le 07 octobre 2018, est irrecevable sur cet autre point, comme
prématuré ;
---Attendu que la procédure devant le Conseil Constitutionnel étant gratuite en vertu
de l’article 57 de la loi n° 2004/004 du 21 avril 2018, modifiée, portant organisation
et fonctionnement du Conseil Constitutionnel, il convient de laisser les dépens à la
charge du Trésor Public ;
---Qu’en application de l’article 15(2) de la même loi et de l’article 131 alinéa 3 du
Code Electoral, il y a lieu d’ordonner la notification immédiate de la présente 273 décision au Conseil Electoral et aux autres parties intéressées, ainsi que sa
publication au Journal Officiel ;
PAR CES MOTIFS
---Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties, en matière
électorale, en dernier ressort et à l’unanimité des Membres :
---Se déclare incompétent sur la demande d’annulation du décret de convocation du
corps électoral ;
---Déclare la demande d’annulation de l’élection du Président de la République du 07
octobre 2018 irrecevable ;
---Laisse les dépens à la charge du Trésor Public ;
---Ordonne la notification immédiate de la présente décision au Conseil Electoral et
aux autres parties intéressées, ainsi que sa publication au Journal Officiel ;
---Ainsi jugé et prononcé en audience publique par le Conseil Constitutionnel, les
mêmes jour, mois et an que dessus, en la salle des audiences dudit Conseil où
siégeaient :
M. Clément ATANGANA, Président du Conseil Constitutionnel,
PRESIDENT ;
MM.
Jean FOUMAN AKAME,
BAH OUMAROU SANDA,
Ae AT AI,
Al Af X AH,
Ao AG,
Mme AW Ah Ak AV,
MM : Ag Aa A AP,
AR AO,
An AK,
Emile ESSOMBE,
CONSEILLERS ;
---Avec l’assistance de Maître Longin MAKA EYOUM, Greffier en Chef ;
---Et de Ac Aj AJ épouse NOAH AMBASSA, Greffier ;
---En présence de Monsieur AS Al AL, Secrétaire Général ;
---En foi de quoi la présente décision a été signée par le Président et le Secrétaire
Général, puis contresignée par le Greffier en Chef./-
LE PRESIDENT LE Z AU
Clément ATANGANA MALEGHO Joseph ASEH
LE GREFFIER EN CHEF
Longin MAKA EYOUM