La partie qui se prévaut d’une cession d’actions en sa faveur doit en rapporter la preuve. A défaut, ses prétentions sont privées de fondement.
Cour d’Appel du Littoral, arrêt N°020/C du 19 Février 2010, Affaire Mme X Ap Ag & autres contre Sté Total, Mr Z Ac Ao
La Cour, Vu le jugement civil n°071 rendu le 05 novembre 2004 du Tribunal de Grande Instance du Wouri, statuant en matière civile et commerciale ; Vu la requête d’appel en date du 18 Janvier 2005 de Me DIKA NGANA, Avocat au Barreau du Cameroun, agissant au nom et pour le compte des dames X Ap Ag, NGO NTOMA Catherine, NGO TOM Louise, NGO TOM IV Rose Madeleine et des sieurs Bell Luc et Ap Ah, cohéritiers de Monseigneur Ae B, Archevêque Emérite, décédé à Aj, le 22 Février 1997 ; Vu les conclusions des parties ; Vu les lois et règlements en vigueur ; Vu les pièces du dossier de la procédure ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ; Considérant que par requête en date du 18 janvier 2005 reçue et enregistrée au Greffe de la Cour d’Appel de céans le même jour sous le numéro 391, Me DIKA NGANA, Avocat au Barreau du Cameroun, agissant au nom et pour le compte des co-héritiers de Monseigneur Ae B, Archevêque Emérite décédé à Aj le 22 février 1997, a relevé appel du jugement civil n°071 rendu le 05 Novembre 2004 par le Tribunal de Grande instance du Wouri statuant en matière civile et commerciale ; Considérant que ce recours introduit dans les forme et délai prescrits par la loi, en tout cas avant signification, est régulier ; Qu’il y a lieu de le recevoir,
Au fond Considérant que Me DIKA NGANA, Avocat concluant fait grief à la décision attaquée d’avoir, d’une part rejeté l’exception d’irrecevabilité de la constitution de Me TALLA Victor motif pris de ce que ce dernier a été radié du Barreau du Cameroun par une décision de la Cour d’Appel de céans rendue le 28 Novembre 2002, d’autre part attribué la propriété des actions litigieuses à sieur Z Ac Ao ;
Qu’il demande à la Cour d’infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et statuant à nouveau : 1) Sur la constitution de Me TALLA Victor et par arrêt avant- dire droit ; (…) 2) A titre principal, déclarer le transfert de propriété des actions litigieuses allégué par
Z Ac Ao inexistant et à titre subsidiaire, au cas où par extraordinaire la Cour venait à valider le transfert de propriété des actions alléguées ;
Dire qu’il s’agit d’une gratification constituant une donation entre vifs et soumise aux formalités de l’article 931 du code civil ;
Dire qu’à défaut de produire un acte notarié de cession des actions litigieuses, les allégations de Z Ac Ao sont sans objet ; Dire bon et valable tout paiement de dividendes effectué à la succession B Ae ;
Condamner Z Ac Ao aux dépens distraits à son profit ; Que pour conclure ainsi, l’Avocat sus-dénommé fait valoir que feu Monseigneur Ae B était titulaire de 500 actions à la Total ; Que retiré à Edéa après son admission à la retraite, il décida de se faire représenter à l’assemblée générale des actionnaires par sa nièce NGO TOM Rose Madeleine ; Qu’en 1995, il ne reçut pas comme par le passé de convocation pour l’assemblée générale qui devait se tenir et connaissant la date de la tenue de celle-ci, il se fit néanmoins représenté par sa nièce ; Que rendu au siège de la Total à la date des assises, Dame NGO TOM Rose Madeleine eu la désagréable surprise de constater que son cousin Z Ac Ao, chauffeur du prélat, était en salle et c’est ainsi qu’elle fut informé de ce qu’elle n’avait plus qualité pour représenter l’archevêque, ce dernier ayant cédé ses actions à Z Ac Ao ; Qu’instruit de la situation, Monseigneur Ae B se transporta personnellement au siège de la Total pour constater la cession alléguer et sur les conseils du Secrétaire général de ladite structure, il déposa au siège de la Total un acte notarié dressé le 07 Décembre 1995 par Mme Marcelline ENGANALIM, dans lequel il renonçait au legs de ses 500 actions dont le transfert a été réalisé au profit de Z Ac Ao ; Que dans une première correspondance en date du 27 Décembre 1995 adressée au Directeur Général de Total Ak, il dénonça les agissements de son chauffeur Z Ac Ao et précisa que toutes les correspondances supposées émaner de lui devaient obligatoirement être contresignées par l’un des témoins, en l’occurrence l’An Ai C ou l’Abbé Af A ; Que dans une seconde correspondance datée du 26 Février 1996 et contresignée par l’abbé Af A ayant pour objet retrait de mes dividendes, le prélat Ae B déclara qu’en cas de disparition subite de sa personne, toutes ses actions revenaient à Monsieur Am Aa, époux de Dame X Y Al, père de 6 enfants légitimes ;
Considérant que venant aux débats au soutien de ses intérêts, l’intimé Z Ac Ao a soulevé la nullité de l’intervention forcée des appelants au motif que certaines personnes citées en intervention à l’instar de Dame X Z Ag étaient décédées depuis Mars 1963 ;
Que s’expliquant sur la propriété des actions litigieuses, le défunt prélat lui avait cédé à titre onéreux lesdites actions, et s’agissant d’un contrat synallagmatique entre deux parties, il ne peut être révoqué par la seule volonté de l’une des parties ; Qu’il ajoute que la société Total a tiré toutes les conséquences de la cession intervenue entre les deux parties en délivrant au concluant le certificat d’action nominative N°440 duquel il résulte que sieur Z Ac Ao est inscrit au registre de la société comme propriétaire de 500 actions ; Qu’en conséquence il demande à la Cour de confirmer dans toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
Considérant que le prélat décédé en sa qualité de pasteur de l’église catholique romaine n’avait pas de décédant en ligne directe ; que le générique cohéritiers désigne l’ensemble des collatéraux privilégiés ayant vocation à venir à la succession du défunt ;
Qu’il s’ensuit que l’indication du nom de X Z Ag décédée en Mars 1963 au rang des cohéritiers ne saurait constituée une cause de nullité de l’action engagée dès lors que les descendants légitimes de celle-ci ont vocation par le mécanisme de la
représentation à recueillir dans le patrimoine du prélat décédé la part successorale revenant à leur défunte mère ; Qu’il en découle que ce moyen de nullité tel que proposé ne peut prospérer ; Qu’il sied de débouter Z Ac Ao de ce chef de demande comme non fondée ; (…)
Considérant que par jugement n°066/C rendu le 27 juillet 1997 par le Tribunal de Premier degré d’Edéa, dûment signifié à Z Ac Ao le 16 Décembre de la même année par exploit du ministère de Maître BALENG MAH Célestin, Huissier de justice près la Cour d’appel du Littoral, Bell Luc a été déclaré administrateur des biens de la succession de feu B Ae ;
Qu’au rang des biens de ladite succession figurait ses actions dans les sociétés Total, Ad Ab, CHOCOCAM, SAGA et une parcelle de terrain sis au quartier PK14 ; Que Z Ac Ao ayant acquiescé ledit jugement lequel a acquis l’autorité de la chose jugée, ce dernier n’est plus fondé à revendiquer la propriété des actions litigieuses qu’à la date dudit jugement faisait partie intégrante des biens constituant le patrimoine de l’Archevêque ;
Considérant que la cession d’action suppose un accord de volonté des parties matérialisé soit dans un acte authentique ou sous seing privé lequel emporte remise du titre par le cédant au cessionnaire ;
Qu’en l’espèce, non seulement les titres prétendument perdus par Z Ac Ao étaient en possession décédé mais encore les agissements du prélat de son vivant dès la découverte de la supercherie matérialisée tant par l’acte notarié dressé le 07 Décembre 1995 par Me Marcelline ENGANALIM que par les correspondances adressées à la direction de la société Total et les mesures de précaution prises pour se prémunir de tels errements à l’avenir dénote de la part du défunt une absence totale de la volonté de céder ses actions ; Qu’il échet en conséquence d’infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau de débouter Z Ac Ao de sa demande comme non fondée ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale, en appel et en dernier ressort, en formation collégiale et à l’unanimité des voies ;
EN LA FORME Reçoit l’appel interjeté ;
AU FOND Infirme partiellement le jugement entrepris ; Statuant à nouveau ; Déclare une inopportune la mesure de transport judiciaire demandée par le conseil des appelants ; Déclare feu Ae B propriétaire de 500 actions à la Total ; Déboute Z Ac Ao de toutes ses demandes comme non fondées ; Confirme ledit jugement pour le surplus ;
(…)