Le bailleur qui modifie unilatéralement l’objet du contrat de bail commercial et offre de conclure un nouveau contrat avec le preneur ne saurait, sans l’avoir fait, saisir la juridiction compétente aux fins de résiliation du bail initial et d’expulsion du preneur.
Article 133 AUDCG
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE YAOUNDE-EKOUNOU, ORDONNANCE N°190 DU 14 MAI 2013, MAGZI C/ SOCIETE BUILDING AND BUSINESS CORPORATION)
Nous, juge des référés,
- Vu l’ordonnance n°79/13 du 05 février 2013 autorisant à assigner à bref délai ;
- Vu l’exploit introductif d’instance ;
- Vu l’Acte uniforme OHADA sur le droit commercial général ;
- Vu la loi n° 2006/015 du 29 décembre 2006 et ses textes modificatifs subséquents, portant organisation judiciaire ;
- Vu les articles 182 et suivants du Code de procédure civile et commerciale ;
- Vu les pièces du dossier de la procédure ;
- Oui les parties en leurs fins, moyens et conclusions ;
- Attendu que suivant exploit non encore enregistré du 06 février 2013 du ministère de Maître BILOA Marie Fidelia, Huissier de Yaoundé et, en vertu de l’ordonnance susvisée, La Mission d’Aménagement et de Gestion des Zones Industrielles « MAGZI » a fait assigner devant monsieur le Président du Tribunal de première instance de céans, juge des référés, la société BUILDING AND BUSINESS CORPORATION BBC aux fins de voir prononcer la résiliation du contrat conclu par les parties et d’expulsion de la BCC, tant de biens que de tous occupants de son chef ;
- Attendu qu’au soutien de son action, la MAGZI fait valoir qu’elle a cédé, par bail emphytéotique, à la société BBC, une parcelle de terrain sise au lieu dit NSAM MVAN d’une superficie de 18002 m2 ;
- Que cette parcelle n’a pas été effectivement occupée par la BBC qui, en outre, n’honore pas son obligation de payer les loyers ;
- Que la défenderesse a ainsi violé les clauses contractuelles notamment, l’article 14 de la convention de bail ;
- Qu’elle sollicite la résiliation de la convention ainsi que l’expulsion de la défenderesse, en application des dispositions des articles 16 de la convention et 133 de l’Acte uniforme OHADA sur le droit commercial général ;
- Attendu que la société BBC réplique que par correspondance n°382/14/07/MAGZI/DG/DCM/SM/ENAV du 14 mai 2007, elle a été invitée par la MAGZI à payer les frais de bornage et d’établissement de documents contractuels, pour une superficie de 1800 m2 ;
- Qu’après avoir versé à cette fin, la somme de 1 192 500 FCFA, il a été donné à la BBC de constater qu’à l’initiative de la MAGZI, la superficie initiale a réduite de 1800 m2 à 12000 m2 ;
- Que par ailleurs, en application des articles 4 et 5 la convention, les travaux doivent être effectués dans les six mois, à compter de la signature et s’achever trois ans plus tard ;
- Que par lettre n°00433/03/2012/MAGZI/DG/LAA du 19 mars 2012 la MAGZI a résilié la convention initiale et, a promis de conclure avec la BBC un nouveau contrat, tenant compte de la superficie de 12000 m2 ;
- Que la demanderesse depuis lors n’a pas honoré son engagement ;
- Que ces éléments témoignent de la mauvaise foi de la MAGZI ;
- Qu’il y a contestation sérieuse justifiant l’incompétence du juge des référés ;
- Attendu que toutes les parties concluent ;
- Qu’il y a lieu de statuer contradictoirement à leur égard ;
EN LA FORME
- Attendu que les argumentaires présentés en la cause par la demanderesse ne constituent que des répliques aux allégations de la MAGZI ;
- Qu’en cela, ces arguments ne peuvent hypothéquer l’appréciation du bien fondé de la demande ;
- Qu’il ne saurait avoir lieu à contestation sérieuse dès lorsque la BBC s’appuie sur les correspondances initiées par la MAGZI elle-même ;
- Que le moyen manque de pertinence ;
- Qu’il convient de le rejeter et de nous déclarer compétent à statuer ;
AU FOND
- Attendu que par lettre n°00433/03/2012/MAGZI/DG/LAA du 19 mars 2012 de la MAGZI a informé la BBC de sa volonté de résilier la convention initiale n°017/C131/2008/MAGZI ;
- Que la demanderesse y envisage de conclure un nouveau contrat avec la défenderesse sur la base de 12000 m2 au lieu de 18002 m2 ;
- Qu’il s’agit d’une modification de l’objet du contrat conclu initialement par les parties ;
- Que la MAGZI n’a pas honoré son engagement ;
- Attendu que la défenderesse ne saurait, sans l’avoir fait, solliciter la résiliation du contrat de bal dont l’objet initial a été modifié et, subséquemment l’expulsion de la BBC ;
- Qu’en reconnaissant cette modification, la MAGZI ne pourrait prospérer qu’en convenant d’un nouveau contrat tenant compte de la modification de l’objet ;
- Que ne l’ayant pas fait, la demanderesse ne peut être fondée à solliciter, en l’état, la résiliation du contrat de bail conclu encore moins l’expulsion de la défenderesse ;
- Qu’il convient de débouter la MAGZI de sa demande ;
- Attendu que la partie qui succombe est condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
- Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en premier ressort ;
- Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais dès à présent, vu l’urgence :
Par provision
En la forme
- Rejetons comme non justifiée, l’exception d’incompétence du juge des référés soulevée par la défenderesse ;
- Nous déclarons compétent ;
Au fond
- Disons la MAGZI non fondée en son action ;
- Déboutons icelle de sa demande aux fins de résiliation du contrat de bail et d’expulsion de la société BBC ;
- Condamnons la demanderesse aux dépens dont distraction au profit Me NKANA, Avocat aux offres de droit ;
- Condamnons la défenderesse aux dépens ;
- (…)