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11/10/2016 | CEDEAO | N°ECW/CCJ/JUD/25/16

CEDEAO | CEDEAO, Cour de justice de la communauté des etats de l'afrique de l'ouest, 11 octobre 2016, ECW/CCJ/JUD/25/16


Texte (pseudonymisé)
COMMUNITY COURT OF JUSTICE, € ECOWAS
COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNAUTE, CEDEAO
TRIBUNAL DE JUSTIÇA DA CEDEAO COMUNIDADE, Noa” No. 10 DAR ES SALAAM CRESCENT,
OFF AMINU KANO CRESCENT,
WUSE II, ABUJA-NIGERIA.
PMB 567 GARKI, Y
TEL: 09-6708210/5240781 Fax 09-5240780/5239425
Website: www. courtecowas.org ARRET
DE LA COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNAUTE
ECONOMIQUE DES ETATS DE L’AFRIQUE DE L’OUEST
(CEDEAO)
AFFAIRE N° ECW/CCJ/APP/33/15
AFFAIRE N° ECW/CCJ/APP/34/15
AG X Al & LEONCE SIMEON MARTINE

CONTRE
L'ETAT DU C AH
ARRÊT N° ECW/CCJ/JUD/25/16
A, 11 Octobre 2016
« ...

COMMUNITY COURT OF JUSTICE, € ECOWAS
COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNAUTE, CEDEAO
TRIBUNAL DE JUSTIÇA DA CEDEAO COMUNIDADE, Noa” No. 10 DAR ES SALAAM CRESCENT,
OFF AMINU KANO CRESCENT,
WUSE II, ABUJA-NIGERIA.
PMB 567 GARKI, Y
TEL: 09-6708210/5240781 Fax 09-5240780/5239425
Website: www. courtecowas.org ARRET
DE LA COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNAUTE
ECONOMIQUE DES ETATS DE L’AFRIQUE DE L’OUEST
(CEDEAO)
AFFAIRE N° ECW/CCJ/APP/33/15
AFFAIRE N° ECW/CCJ/APP/34/15
AG X Al & LEONCE SIMEON MARTINE
CONTRE
L'ETAT DU C AH
ARRÊT N° ECW/CCJ/JUD/25/16
A, 11 Octobre 2016
« Au nom de la Communauté »
La Cour de justice de la Communauté Economique des Etats de
l’Afrique de l’Ouest, (CEDEAO) siégeant à Y ZAj) le A 11
Octobre 2016 en formation ordinaire, composée de :
Honorable Juge Yaya BOIRO Président- Rapporteur
Honorable Juge Hamèye Founé MAHALMADANE Membre
-Honorable Juge Alioune SALL Membre
Assistés de Maître Athanase ATANNON Greffier A rendu l’arrêt dont la teneur suit :
Entre
I Les Parties
M. AG X Al demeurant à Ae et M. Ak Aa
B, agent de banque à la retraite, de nationalité burkinabé, actuellement
détenu à la prison militaire de Ae, ayant tous pour conseils :
- Maitre Yérim Thiam, avocat à la Cour, ancien Batônnier 68, rue Wagane Diouf,
Dakar, Sénégal ;
- Maitre Marc le Bihan, avocat à la Cour, ancien Bâtonnier, 86 Avenue du
Diamangou, Ad An ;
- Maitre Antoinette N. Ouédraogo, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de l’Ordre,
Ae, C AH ;
- Maitre Rustico LAWSON-BANKU, Avocat à la Cour, Bâtonnier de l’Ordre, 703,
Rue de France (Rue 18, Doulassamé), Lomé, Togo ;
- Maitre Alexandre VARAUT, avocat à la Cour d’Appel de Paris, rue de l’université-
75007 Paris, France ;
- La société civile professionnelle d'avocats (S.C.P.A Themis-B), avocats associés,
sise à Samandin, secteur 07, 161, Rue Ah Ap, BP 353 Ae, C
AH.
Requérants d’une part et,
L’Etat du C AH représenté par l’Agent judiciaire du Trésor (AJT) dont les
locaux sont sis au Ministère de l’économie et des finances et ayant pour conseils :
-M. SAVADOGO Mamadou, avocat au Barreau du C AH, 212, Avenue de
la Cathédrale, 01 BP 6042 Ae et
-La SCPA KAM & SOME, Société Civile Professionnelle d’Avocats, inscrite au
Barreau du C AH, 35, Rue 38, Ae,
Défendeur d'autre part,
La Cour
Vu le Traité révisé instituant la Communauté Economique des Etats de l'Afrique
de l’Ouest (CEDEAO) du 24 juillet 1993 ;
Vu le Protocole du 06 juillet 1991 et le protocole additionnel du 19 janvier 2005
relatifs à la Cour de justice de la CEDEAO ;
Vu le Règlement de la Cour de justice de la CEDEAO en date du 03 juin 2002 ;
Vu la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 ;
Vu la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 27 juin 1981 ;
Vu les Requêtes en date du 09 novembre 2015 présentées par M. AG X
Al et par M. Ak Aa Ab B, ensemble les pièces jointes ;
Vu les mémoires en défense datés des 14 et 22 décembre 2015 de l'Etat du C
AH;
Vu les pièces du dossier ;
Oui les parties par l’organe de leurs conseils respectifs ;
1- Suite à la requête en date du 21 mai 2015 présentée par un groupe de Partis
politiques et de citoyens du C AH, la Cour de justice de la CEDEAO rendait
l’arrêt N°’ECW/CC]/JUG/16/15 en date du 13 juillet 2015 dont le dispositif est
libellé comme suit :
« La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière de violations de droits de
l’homme, en premier et dernier ressort,
En la forme, rejette les exceptions d’incompétence et d’irrecevabilité soulevées par l’Etat du
C AH ;
Se déclare compétente pour examiner la requête qui lui est soumise ;
Déclare recevable la requête qui lui est soumise ;
Déclare également recevable le mémoire en défense de l’Etat du Burkina ;
Déclare ivrecevable la demande en intervention présentée par le cabinet « Ao and
Ao’s Chambers » ;
Au fond
- Dit que le Code électoral du C AH, tel que modifié par la loi N° 005-
2015/CNT du 07 avril 2015, est une violation du droit de libre participation aux
élections consécutifs à cette modification ;
- Ordonne en conséquence à l’Etat burkinabé de lever tous obstacles à une participation
aux élections consécutifs à cette modification
- Condamre l’Etat du Burkina aux entiers dépens » ;
2- A l’issue de cette décision, la Commission électorale nationale indépendante
(CENT) du C AH publiait, suivant arrêté N°2015-059/CC/CENI/SG du
12 août 2015, la liste des candidats aux élections présidentielles et législatives dans
laquelle figuraient les noms des requérants susnommés.
3- Non satisfaits, certains candidats, au mépris de la décision de la Cour de justice
de la CEDEAO, saisissaient la Cour constitutionnelle du C AH afin
d’obtenir une décision déclarant les requérants susnommés inéligibles en vertu de
la loi N°005-2015/CNT du 07 avril 2015 pour avoir soutenu un projet de réforme
de la Constitution burkinabé qui aurait permis à M. Ac Ar de briguer
un mandat supplémentaire.
4- Suite aux décisions du Conseil constitutionnel N°2025-21/CC/EL en date du
25 août 2015 et N°2015-26/CC/EPF du 10 septembre 2015 relatives auxdites
élections, les requérants susnommés se sont vus exclus des compétitions électorales.
5- Par les requêtes susvisées, les requérants saisissaient à nouveau la Cour de céans
pour la voir :
- Constater et dire que la décision N°2015-21/CC/EI du 25 août 2015 et celle
N°2015-26/CC/EPF du 10 septembre 2015 ont été rendues par le Conseil - constitutionnel du C AH au mépris du jugement
N°ECW/CC/JUG/16/15 du 13 juillet 2015 par la Cour de justice de la
CEDEAO ;
- Enjoindre à l’Etat du C AH de respecter l’autorité de la Cour de
justice et les Accords internationaux dont il est signataire ;
- Dire en conséquence que l’arrêt du 13 juillet 2015 entraine par lui-même
l’annulation des dispositions nouvelles du Code électoral qui prétendaient
interdire aux requérants de se présenter à l’élection présidentielle ;
- Dire que les élections organisées envers et contre les prescriptions de la
décision de la Cour de justice de la CEDEAO sont illégales, nulles et non
avenues;
- Déclarer nulle la liste publiée par l’arrêté N° 2015-062/CENI/SG du 20
octobre 2015 et d’en tirer toutes les conséquences de droit;
- Ordonner au C AH de se conformer sans réserve aux termes du
jugement susvisé rendu par ladite Cour de justice de la CEDEAO ;
- Condamner l’Etat du C AH aux frais et dépens de l’instance.
6- Pour sa part, l’Etat du C AH sollicite de la Cour de décider comme suit:
- A titre principal, se déclarer incompétente pour connaitre de l'affaire ;
- à titre subsidiaire, déclarer irrecevable la requête présentée par les
requérants ;
- À titre très subsidiaire, dire que les décisions du Conseil constitutionnel du
C AH relatives aux élections législatives et présidentielles ne sont pas
rendues au mépris de la décision susvisée de la Cour de justice de la
CEDEAO ;
- constater les particularités politiques de l’affaire en cause en prenant comme
acquis démocratiques les résultats des élections présidentielles et législatives
du 29 novembre 2015 ;
- rejeter en conséquence toutes les demandes des requérants comme étant mal
fondées et mettre les dépens à leur charge.
II Moyens des parties
7- Les requérants estiment que la décision de la Cour de justice de la CEDEAO
N°ECW/CC/JUG/16/15 en date du 13 juillet 2015 ayant consacré le droit de
tous à participer aux élections et ordonné au C AH de lever tous obstacles y
afférents, doit s'imposer de plein droit à celui-ci et à tous ses démembrements,
notamment sa Cour constitutionnelle.
8- Qu'ainsi, selon les requérants, l’Etat du C AH refuse manifestement de
se soumettre à la décision de ladite Cour de justice et viole non seulement ses
obligations découlant du Traité de la CEDEAO, mais aussi les principes de droit
découlant des instruments internationaux auxquels il est partie.
9- L’Etat du C AH soulève de prime à bord l’incompétence ratione materiae
de la Cour de céans à connaitre de l'affaire. Il rappelle à cet égard, au soutien de sa
demande, la jurisprudence antérieure de ladite Cour selon laquelle celle-ci n’a
vocation à sanctionner que la méconnaissance d’obligations résultant de textes
communautaires et internationaux opposables aux Etats.
10- Ensuite, l’Etat burkinabé a soulevé d’autres exceptions tirées de l’irrecevabilité
du recours exercé par les requérants et du défaut de qualité de ceux-ci. Pour soutenir
ses prétentions, le défendeur fait valoir que la procédure initiée tend à permettre
aux requérants de participer à l’élection présidentielle. Or, cette élection a déjà eu
lieu depuis le 29 novembre 2015 et les résultats proclamés sont crédibles et acceptés
à la fois par la classe politique du C AH et par la Communauté
internationale, d’où le manque d’objet dudit recours.
11- L’Etat du C AH soutient en outre que les requérants relèvent à son
encontre - précisément à l’encontre de son Conseil constitutionnel des manquements à une obligation communautaire en ce qu’il aurait méconnu la
décision susvisée de la Cour de justice. Or, selon le défendeur, les requérants n’ont
pas la qualité pour introduire un recours en manquement, mais seuls les Etats en
ont cette possibilité selon l’article 10 du Protocole additionnel relatif à la Cour de
céans.
TV- Analyse de la Cour
En la forme
1- Sur la jonction des deux procédures
12- A l’audience publique du 08 juin 2016 de la Cour de céans, les requérants
susnommés ont sollicité, par l’entremise de leurs conseils, la jonction des deux
procédures par eux initiées séparément et l’Etat du C AH a déclaré sur-le-
champ qu’il ne s’y oppose pas.
13- Après analyse des pièces du dossier, la Cour a constaté qu’il existe une connexité
entre les demandes des requérants et qu’il est de l’intérêt d’une bonne
administration de la justice, de prononcer la jonction desdites procédures en
application des dispositions de l’article 38 du Règlement de la Cour.
2- Sur les exceptions soulevées par l’Etat du C AH
14- Considérant qu’il convient au prime abord de se pencher sur l’exception
d’incompétence soulevée par l’Etat du C AH avant d’examiner, s’il y a lieu,
les autres exceptions tirées de l’irrecevabilité de la requête introductive d’instance
et du défaut de qualité des requérants.
15- S'agissant de l’exception d’incompétence, la Cour, après examen des pièces de
la procédure, relève que les requérants sollicitent qu’elle se prononce sur les
conditions dans lesquelles fut exécuté l’arrêt susvisé par elle rendu le 13 juillet 2015.
16- Qu’en d’autres termes, les requérants visent à amener la Cour à apprécier la
manière par laquelle les autorités du C AH ont interprété et/ou appliqué ledit arrêt. Or, la Cour considère qu’en se livrant à un tel exercice, elle serait … amenée, contrairement à sa vocation, à s’ingérer dans le processus d’exécution de ses arrêts, ce qui inciterait les plaideurs à la saisir à chaque fois qu’il s’agira d’apprécier les suites réservées à ses décisions.
17- La Cour relève également qu’elle n’est pas saisie dans l’hypothèse d’une sollicitation aux fins d’éclairage d’une de ses décisions pour une exécution adéquate de celle-ci, auquel cas on serait dans le cadre d’un simple recours en interprétation, mais bien dans un cas inédit où il lui est demandé de suivre ou de contrôler le processus d'exécution de son arrêt susvisé.
18- Aussi, importe-til de rappeler qu’en ce qui concerne l’exécution de ses décisions, la Cour est toujours guidée par certaines dispositions légales qui gouvernent sa jurisprudence. Il s’agit notamment de :
1- L'article 15 alinéa 4 du Traité révisé de la CEDEAO qui prévoit que « les arrêts de la Cour de justice ont force obligatoire à l’égard des Etats membres, des Institutions de la Communauté, et des personnes physiques et morales ». 2- L'article 24 du Protocole additionnel du 19 janvier 2005 relatif à la Cour de justice de la CEDEAO qui prévoit entre autres que «… l’exécution forcée
est régie par les règles de procédure civile en vigueur dans ledit Etat ; que les
Etats membres désigneront l'autorité nationale compétente pour recevoir ou
exécuter la décision de la Cour et notifieront cette décision à la Cour ».
19- En vertu de ses dispositions légales, il apparait clairement que l'exécution des
arrêts rendus par la Cour de justice est de la compétence exclusive des Etats
membres de la Communauté. D’où l’absence d’une formule exécutoire sur lesdites
décisions, (voir dans ce sens, l’arrêt Am Ag contre le Niger en date du
08 novembre 2010, &20 autres).
20- Ainsi, tout refus ou résistance d’un Etat face à une exécution d’une décision de
la Cour rendue à son encontre dans le cadre d’une violation des droits de l’homme,
constitue un manquement à une obligation découlant du Traité et d’autres normes
régissant la CEDEAO et expose à des sanctions judiciaires et politiques telles que
prévues par les articles 5 à 21 de l’acte additionnel A/SA en date du 13 février 2012
portant régime des sanctions à l’encontre des Etats membres de ladite
Communauté.
21- Au surplus, la Cour fait observer que le recours en manquement fait l’objet de
dispositions spécifiques et qu’il ne saurait donc être question qu’une personne
privée utilise le recours en violation de droits humains pour faire constater un
manquement éventuel commis par un Etat membre ainsi que la Cour l’a déjà
déclaré dans ses arrêts « H. Aq contre l’Etat du Sénégal » et « Af Ai
contre le Sénégal ».
22- Au regard de ce qui précède, la Cour considère que l’exception soulevée par le
défendeur est fondée et qu’il y a lieu de se déclarer incompétente pour connaitre
de l’affaire.
3- Sur les dépens
23- Considérant que les requérants ont succombé et qu’il y a lieu de les condamner
aux dépens en application des dispositions de l’article 66 du Règlement de la Cour.
Par ces motifs
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de violation des droits de
l’homme, en premier et dernier ressort,
En la forme
Prononce la jonction des deux procédures initiées séparément par les requérants;
Reçoit le C AH en son exception tirée de l’incompétence de la Cour de
justice de la CEDEAO pour connaitre de l’affaire ;
Dit que cette exception est fondée ;
Se déclare incompétente pour connaitre de l'affaire ;
Met les dépens à la charge des requérants.
Ainsi fait et jugé à Y les jour, mois et an que dessus,
Et ont signé :
- Honorable Juge Yaya BOIRO Président-Rapporteur
- Honorable Juge Hamèye Founé MAHALMADANE Membre
- Honorable Juge Alioune SALL Membre
Maitre Athanase ATANNON Greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : ECW/CCJ/JUD/25/16
Date de la décision : 11/10/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;cedeao;cour.justice.communaute.etats.afrique.ouest;arret;2016-10-11;ecw.ccj.jud.25.16 ?
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