Arrêt Civil n°179 du 10 Juin 2011, BPMC C. Consorts MEYA 2
Cour d’appel de BANGUI, chambre civile et commerciale, arrêt civil n°179 du 10 juin 2011, affaire BPMC (Me KOMENGUE) contre Consorts MEYA (Me GBANGOLO) Répertoire n° 179, Année 2011 La Cour d’Appel de Bangui, siégeant en chambre des appels civils et commerciaux en son audience ordinaire tenue au Palais de Justice de ladite ville le 10 Juin 2011 à 11 heures du matin et à laquelle siégeaient Messieurs : Arsène SENDE, Président de la Chambre Civile et Commerciale ; PRESIDENT Alexis-Georges PIALO, Conseiller à la Cour d’Appel de Bangui ; Maurille-Fulbert NGALHY, Conseiller à la Chambre Civile et Commerciale ; MEMBRES Assistés de Maître Robert Bertrand KINGO, Greffier à ladite Chambre ; A été rendu l’arrêt civil suivant : ENTRE : Banque Populaire Maroco-centrafricaine, dont le siège social est à Bangui représentée par son Directeur Général Monsieur B C Y, agissant es qualité, ayant élu domicile au Cabinet de Me Roch-Joachim KOMENGUE, Avocat à la Cour ; APPELANTE D’UNE PART ET : Consorts MEYA, de nationalité Centrafricaines, domiciliés à Bangui, ayant pour Conseil, Me GBANGOLO, Avocat à la Cour ; INTIMES D’AUTRE PART Sur requête reçue au Greffe de la Cour d’Appel de Bangui, le 29 septembre 2010, enregistrée sous le numéro 401/10, la Banque Ac Ab Ad a déclaré interjeter appel du jugement rendu le 14 Septembre 2010 par le Tribunal de Grande Instance de Bangui, dont le dispositif est rappelé ci–haut et qui fait l’objet du présent appel ; A l’audience du 13 Mai 2011, l’affaire a été appelée, retenue et débattue ; Me Roch-Joachim KOMENGUE a plaidé pour l’appelante ; Me GBANGOLO a également plaidé pour les intimés ; les débats clos, la Cour a mis l’affaire en délibéré pour arrêt être rendu le 3 Juin 2011 puis prorogé au 10 Juin 2011 date à laquelle la Cour a rendu l’arrêt contradictoire suivant :
LA COUR Oui, M. le Conseiller en son rapport ; Ouï, Me Roch-Joachim KOMENGUE en sa plaidoirie pour l’appelante ; Ouï, Me GBANGOLO en la sienne pour les intimés ; Vu les pièces du dossier ;
APRES EN AVOIR DELIBERE CONFORMEMENT A LA LOI
Attendu qu’il résulte des faits et de procédure que par exploit d’agent d’exécution en date du 04 décembre 2009, les enfants MEYA représentés par Marie Ag X, ont fait assigner sieur Af X devant le Tribunal de Grande Instance de Bangui aux fins de s’entendre ordonner la reddition de compte de gestion de la succession MEYA Martin assurée par le sieur Af X, homologuer la nouvelle délibération du conseil de famille du 28 octobre 2009, désignant dame Vidal née Aa X, administratrice légale de la succession Ae X ;
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Que suite à la requête aux fins d’intervention forcée de la BPMC, dame Marie Ag X et autres ont fait une tierce opposition au jugement d’adjudication du 12 Mars 2007 et ont assigné à nouveau la BPMC devant le Tribunal de Grande Instance de Bangui à l’effet de déclarer nuls les actes d’hypothèque consentie par le sieur Af X A au profit de la BPMC ; Qu’en date du 14 Septembre 2010, le Tribunal de Céans, par jugement réputé contradictoire a homologué la nouvelle délibération du Conseil de famille du 28 Octobre 2009, désignant dame Vidal née Aa X administratrice de la succession Ae X, ordonné la reddition des comptes de gestion de Af X, rétracté le jugement d’adjudication du 12 Mars 2007 et a déclaré nuls les actes d’hypothèque consentie par Af X A au profit de la BPMC ; Que par acte du 29 Septembre 2010, la BPMC a déclaré relever appel de ce jugement avant toute signification ; Que cet appel est recevable en la forme ; Attendu qu’au soutien de son appel, la Banque Ac Ab Ad expose que l’action en tierce opposition formée contre le jugement d’adjudication du 12 Mars 2007 par les Consorts MEYA ne saurait prospérer ; Qu’en effet la procédure de tierce opposition est prévue par les articles 541 à 551 du Code de Procédure Civile qui est une loi nationale ; Que l’article 10 du Traité OHADA a consacré la force obligatoire des actes uniformes dans les Etats parties ainsi que leur substitution aux règles de forme et de fond existantes et futures ; Qu’aux termes de l’article 336 de l’Acte Uniforme relatif à la procédure simplifiée de recouvrement des créances et des voies d’exécution : « Le Présent acte uniforme abroge toutes les dispositions relatives aux matières qu’il concerne dans les Etats » ; Que les actions de revendication de propriété en matière de saisie immobilière sont réglées par l’Acte Uniforme relatif à la procédure simplifiée de recouvrement des créances et des voies d’exécution, notamment l’action en distraction ou en nullité de l’adjudication, confinées dans des délais assez brefs ; Qu’ainsi en raison de leur supranationalité, le Juge ne saurait, sans violer les normes communautaires de l’OHADA susvisées, déclarer recevable une action en tierce opposition contre un jugement d’adjudication ; Qu’elle sollicite l’infirmation du jugement entrepris dans toutes ses dispositions en ce qui la concerne ; Attendu qu’en réplique, les enfants MEYA fondent la recevabilité de leur action sur les dispositions des articles 541 alinéa 1 et 542 alinéa 1 du Code de Procédure Civile relatives à la tierce opposition ;
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Qu’ils soutiennent qu’en dehors de Af X A, les autres enfants MEYA n’ont jamais été parties, ni représentés au jugement d’adjudication du 12 Mars 2007 ; Que c’est à bon droit que la premier Juge a déclaré recevable la procédure de tierce opposition des enfants MEYA et a rétracté ledit jugement d’adjudication qui leur est inopposable ; Qu’en outre, le sieur Af X A, administrateur de la succession Ae X au sens de l’article 750 du Code de la famille, a violé les dispositions de l’article 856 du Code précité en faisant la mutation du Titre Foncier de l’immeuble litigieux en son nom et en l’hypothéquant ; Qu’ils sollicitent la confirmation pure et simple du jugement querellé dans toutes ses dispositions ; Attendu qu’il est fait grief au jugement déféré d’avoir déclaré recevable la tierce opposition formée par les consorts MEYA alors que les dispositions des articles 299 et 308 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution règlementent rigoureusement les contestations relatives à la procédure de saisie immobilière et que la procédure en tierce opposition en l’espèce est inopérante ; Attendu qu’il ressort clairement de l’analyse des articles susvisés que le tiers a une procédure de vente sur saisie immobilière dispose de deux actions comme voies de recours à savoir l’action en distraction et l’action en nullité ; Que l’article 299 susvisé dispose que « les contestations ou demandes incidentes doivent à peine de déchéance, être soulevées avant l’audience éventuelle. Toutefois, les demandes fondées sur un fait ou un acte survenu ou révélé postérieurement à cette audience et celles tendant à faire prononcer la distraction de tout ou partie des biens saisis, la nullité de tout ou partie de la procédure suivie à l’audience éventuelle ou la radiation de la saisie, peuvent encore être présentées après l’audience éventuelle, mais seulement, à peine de déchéance, jusqu’au huitième jour avant l’audience d’adjudication» ; Que l’article 308 du même acte renchérit que «le tiers qui se prétend propriétaire d’un immeuble saisi et qui n’est tenu ni personnellement de la dette, ni réellement sur l’immeuble, peut, pour le soustraire à la saisie, former une demande en distraction avant l’adjudication dans le délai prévu à l’article 299 alinéa 2 ci-dessus. Toutefois, la demande en distraction n’est recevable que si le droit foncier de l’Etat partie dans lequel est situé l’immeuble consacre l’action en revendication ou toute autre action tendant aux mêmes fins » ; Attendu qu’aux termes de l’article 10 du Traité OHADA : « les actes Uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats Parties nonobstant toute dispositions contraire du droit interne, antérieur ou postérieur » ; Qu’ainsi, les articles 451 et 452 du code de procédure civile ne peuvent être applicables dans une matière réglementée par le droit communautaire qui fixe des délais précis en matière d’action en distraction ou en nullité ; Qu’en outre, la procédure de saisie immobilière astreint le créancier saisissant à diverses mesures de publicité avant l’adjudication ;
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Qu’ayant attendu plus de deux ans pour introduire une action en revendication de la propriété, donc en distraction de l’immeuble saisi et déjà adjugé, alors que l’article 299 a indiqué un délai de 8 jours avant l’adjudication, les consorts MEYA ne sont plus fondés à exercer une quelconque action ; Attendu qu’en statuant comme il l’a fait pour rétracter le jugement d’adjudication du 12 Mars 2007, suite à une tierce opposition, le premier juge a violé les dispositions communautaires susvisées et sa décision mérite infirmation dans toutes ses dispositions. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement et contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort : En la forme : Déclare l’appel recevable ; Au fond : Infirme le jugement querellé dans toutes ses dispositions ; Statuant à nouveau : Déclare irrecevable la requête en tierce opposition des Consorts MEYA contre le jugement d’adjudication du 12 Mars 2007 ; Dit que ledit jugement sortira son plein et entier effet. Met les dépens à la charge des intimés. Ainsi jugé et prononcé en audience publique les jour, mois et an que dessus ; En foi de quoi, le présent Arrêt a été signé après lecture faite par Monsieur le Président et le Greffier. Le Greffier Le Président