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18/03/1981 | CEDH | N°8737/79

CEDH | ZIMMERMANN et STEINER c. SUISSE


APPLICATION/REQUÉTE N° 8737/79 Werner ZIMMERMANN and Johann STEINER v/SWITZERLAN D Werner ZIMMERMANN et Johann STEINER c/SUISS E DECISION of 18 March 1981 on the admissibility of the application DÉCISION du 18 mars 1981 sur la recevabilité de la requête
Article 6, paragraph I of the Comention : Lerigth of appeal proceedings concerning civil riglrts and obligations . In particuler examination of the diligence shown by the applicant as wefl the question whether the court's overload constituted a relevant element (complaint declared admissible) .
Article 6, paragraphe l, de l

a Convention : Durée d'une procédure de recours portant sur d...

APPLICATION/REQUÉTE N° 8737/79 Werner ZIMMERMANN and Johann STEINER v/SWITZERLAN D Werner ZIMMERMANN et Johann STEINER c/SUISS E DECISION of 18 March 1981 on the admissibility of the application DÉCISION du 18 mars 1981 sur la recevabilité de la requête
Article 6, paragraph I of the Comention : Lerigth of appeal proceedings concerning civil riglrts and obligations . In particuler examination of the diligence shown by the applicant as wefl the question whether the court's overload constituted a relevant element (complaint declared admissible) .
Article 6, paragraphe l, de la Convention : Durée d'une procédure de recours portant sur des droits et obligatioru de caractère civil . En particulier, examen de la diligence rnunifestée par le requérant . ainsi que du point de savoir si la surcharge du tribunal constituerail un élérnern pertinent . (Requéte déclarée recevable) .
(English : see p. 224 )
EN FAIT
Le requérant Werner Zimmermann- citoyen suisse né en 1937, installateur, est donticilié à Uster (Zurich) . Le requérant Johann Steiner, citoyen suisse né en 1904, retraité, est domicilié à Bargen ( Berne) . Ils ont donné mandat à M . Ludwig Minelli, domicilié à Forch ( Zu ri ch), de les représenter devant la Commission ( les procurations sont jointes au dossier) et, par son intermédiaire, exposent ce qui suit : Antérieurement au 30 septembre 1976, chacun des requérants était locataire d'un appa rtement, le premier sis à Kloten, le second à Rümlang . Ces
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deux localités se trouvent à proximité de l'aéroport de Zurich-Kloten, qui appartient au Canton de Zurich et est exploité par lui . En 1974, les requérants ont demandé au Canton de Zurich une indemnisation du dommage résultant pour eux du bruit et de la pollution de l'air dûs à l'exploitation de l'aéroport . Le premier requérant réclamait 28 242 Fr . suisses en capital et le second 54 199 Fr . suisses en capital . Ce canton demanda le 17 juin 1974 l'ouverture d'une procédure d'estimation selon la loi fédérale sur l'expropriation du 20 juin 1930 . La commission fédérale d'estimation constituée à cet effet était présidée par un juge au tribunal cantonal de $aint-Gall, un architecte, un ingénieur et le greffier du tribunal cantonal de Saint-Gall . Par décision du 6 octobre 1976, notifiée aux requérants le 7 mars 1977, la comntission d'estimation rejeta la demande d'indemnité . Après avoir reconnu qu'à teneur de la jurisprudence et de la doctrine suisses les locataires peuvent en principe se prévaloir du droit de voisinage réglé par le code civil, elle a estimé que les requérants n'alléguaient qu'un tort moral et non un dommage patrimonial, lequel seul peut donner lieu à indemnisation aux termes de la loi fédérale sur l'expropriation . Le 18 avril 1977, les requérants introduisirent auprès du Tribunal fédéral un recours de droit adntinistratif contre la décision de la commission d'estintation . Le 18 mai 1977, la commission d'estimation déposa ses observations sur le recours et, le 24 mai 1977, l'administration du Canton de Zurich déposa les siennes . Celles-ci, toutefois, ne furent pas communiquées aux requérants, contrairement à la pratique du Tribunal fédéral . Le 8 septembre 1978, l'avocat des requérants s'informa auprès du Tribunal fédéral de l'état de la procédure . Par lettre du 21 septembre 1978 le Tribunal fédéral lui répondit qu'il n'avait pas encore été en mesure de traiter l'affaire en raison de son surcroit de travail . Il exprimait l'espoir de pouvoir statuer sur le recours au cours des mois suivants . Il joignit à sa réponse une copie des observations de la partie intimée, déposées seize mois plus tôt . Le 15 ntars 1979, les requérants revinrent à la charge auprès du Tribunal fédéral . Par lettre du 23 mars 1979, le juge rapporteur de la cour de droit public répondit aux requérants qu'une décision serait rendue, sauf imprévu, avant les vacances judiciaires . Le 29 juin 1980, l'avocat des requérants s'informa à nouveau auprès du Tribunal fédéral de l'état de la procédure . Par lettre du 11 juillet 1980, le juge rapporteur lui répondit que l'arrêt serait rendu après les vacances judiciaires . Par arrêt du IS octobre 1980, la première cour de droit public du 'rribunal fédéral rejeta le recours de droit administratif introduit par les requérants .
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GRIEFS Les requérants, qui allèguent une violation de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention, se plaignent de la durée de la procédure devant le Tribunal fédéral . Ils estiment que cette procédure a pour objet des droits de caractère civil, au sens de l'article précité . Le fait qu'elle se déroule selon les règles de la procédure administrative est sans influence sur le caractère civil des droits en question . De l'avis des requérants . l'article 6, paragraphe l, s'applique aux litiges entre un particulier et une autorité publique lorsque celle-ci crée des conditions qui portent directement atteinte à l'exercice de droits privés existants, en I'espèce, le droit de se défendre contre les immissions d'un voisin (nachbarliches Abwehrrecht) .
EN DROIT Les requérants se plaignent de la durée de la procédure d'examen de leur recours de droit administratif au Tribunal fédéral, qui a débuté le 18 avril 1977 et qui s'est terminée le 1 5 octobre 1980 . L'article 6, paragraphe 1 de la Convention, invoqué par les requérants, prévoit notamment que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable par un tribunal qui décidera des contestations sur des droits et obligations de caractère civil . Les parties s'accordent à admettre que la procédure visée par la présente requête portait sur des droits et obligations de caractère civil des requérants et que l'article 6, paragraphe 1, lui était ainsi applicable . La procédure devant le Tribunal fédéral a duré un peu moins de trois ans et demi . Dans son arrét Ktinig du 28 juin 1978, la Cour européenne des Droits de l'Homme s'est exprimée comme suit :«Le caractère raisonnable de la durée d'une procédure relevant de l'article 6, paragraphe 1 de la Convention doit s'apprécier dans chaque espèce suivant les circonstances de la cause . En recherchant si la durée d'un procès pénal a été raisonnable, la Cour européenne des Droits de l'Homme a pris en considération les trois éléments principaux suivants : la complexité de l'affaire, le comportement du requérant, et la manière dont l'affaire a été conduite par les autorités administratives et judiciaires •(Série A, N° 27, paragraphe 99, p . 34) . Elle a appliqué les mêmes critères à des procédures intentées devant . les tribunaux administratifs et impliquant une décision sur des contestations relatives à des droits et obligations de caractère civil (ibidem) . La Commission considère que la même approche doit être adoptée en l'espèce pour apprécier la durée de la procédure devant le Tribunal fédéral . - 222 -
D'autre part, la procédure litigieuse était une procédure de recours . La question que le Tribunal fédéral était appelé à examiner était de savoir si les requérants faisaient valoir un dommage susceptible d'indemnisation en droit suisse . De l'avis de la Commission, cette question n'était pas d'une extrême complexité . D'un autre côté, la Commission considère que le droit, protégé par l'article 6, paragraphe 1 de la Convention, d'être entendu dans un délai raisonnable est t ri butaire, particulièrement dans les affaires civiles, du componement de l'intéressé, qui doit faire preuve de la diligence nécessaire (cf . Rapport de la Commission du 14 mai 1980 . requête N° 7759/77 . Buchholz c/R .F .A ., paragraphe 101, p . 17) . En l'espèce, la Commission relève que les requérants ont adressé trois lettres au Tribunal fédéral, les 8 septembre 1978, 15 ntars 1979 et 29 juin 1 980 pour s'informer de l'état de la procédure . Le Gouvernement a affirmé lui-même que les requérants ne disposaient pas, en droit suisse, de quelque autre moyen pour hâter l'issue de la procédure du Tribunal fédéral . Quant à la manière dont l'affaire a été conduite par le Tribunal fédéral, la Commission constate qu'aucun acte de procédure ne semble avoir été accompli depuis le 24 mai 1977, date du dépôt du mémoire de la partie intimée, jusqu'au ( S octobre 1980 . date de l'arrêt du T ri bunal fédéral . Le Gouvernement défendeur a fait valoir que la surcharge du T ri bunal fédéral s'est régulièrement accrue depuis 1969, que la liquidation des dossiers ne parvenait plus à suivre le rythme des entrées, mais que l'Assemblée fédérale a pris des mesures urgentes relatives à l'organisation, à la procédure et au personnel en 1978 . Ces mesures ont quelque peu attenué les effets de la surcharge du Tribunal, mais elles ne sont pas parvenues à résoudre les problèmes posés par l'abondance croissante du travail . La Commission estime nécessaire d'établir au cours d'un examen du fond de l'affaire dans quelle mesure la surcharge du Tribunal fédéral, d'une part, les dispositions prises par lui-même et par l'Assemblée fédérale, d'autre part, sont pertinentes pour apprécier la durée de la procédure, dans la présente affaire, au regard de l'article 6, paragraphe 1 de la Convention . Elle considère . à la lumière des circonstances de la présente affaire . d'un examen prélintinaire de l'argumentation des parties, de la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Hontme et de sa propre ju ri sprudence, que le grief formulé par les requérants pose des problèmes suffisamment impo rt ants pour que leur solution doive relever d'un examen du bien-fondé de l'affaire . Par ailleurs, l'examen de la requête n'a mis en lumiè re aucun motif d'irrecevabilité de celle-ci . Par ces motifs, la Commission DÉCLARE LA REQUÈTE RECEVABLE tout moyen de fond étant réservé .
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(TRANSLATION) THE FACTS The applicant Werner Zimmermann is a Swiss citizen born in 1937 . He is a fitter and resides at Uster (Zurich) . The applicant Johann Steiner is a Swiss citizen born in 1904 . He is retired and resides at Bargen (Bern) . They appointed Mr Ludwig Minelli, domiciled at Forch (Zurich) to represent them before the Commission (the authorities are appended to the case-file) and through him make the following statement : Prior to 30 September 1976, each of the applicants was the tenant of a flat, the first located at Kloten and the second at Riimlang . These two sites are near Zurich-Kloten airport which is in the Canton of Zurich and administered by it . In 1974 the applicants claimed compensation from the Canton of Zurich for damaged caused to them by the noise and air pollution resulting from the operation of the airport . The first applicant claimed a lump sum of 28,242 Swiss francs and the second a lump sum of 54,199 Swiss francs . On 17 lune 1974 the Canton applied for the commencement of assessment proceedings under the Federal Expropriation Act of 201une 1930 . The Federal Assessntent Commission created for that purpose was presided over by a judge of the Saint-Gall Cantonal Court, and comprised an architect, an engineer and the registrar of the Saint-Gall Cantonal Court . In a decision of 6 October 1976, served on the applicants on 7 March 1977 . the Assessment Commission rejected the application for compensation . Having recognised that under Swiss case-law and legal doctrine tenants may as a rule rely on the law of nuisance as regulated by the Civil Code, it held that the applicants only alleged a non-material wrong and not damage to property . which is the only head that can give rise to compensation under the Federal Expropriation Act . On 18 April 1977, the app)icants brought an administrative law appeal to the Federal Court against the Assessment Commission's decision : On 18 May 1977, the Assessment Commission lodged its observations on the appeal and on 24 May 1977 the administrative authorities of the Canton of Zurich lodged theirs . However, contrary to the usual practice of the Federal Court, these observations were not sent to the applicants . On 8 September 1978 the applicants' lawyer wrote to the Federal Court for information about the state of the proceedings . In a letter of 21 September 1978 the Federal Court replied that it had not yet been able to deal with the case because of its excessive work-load . It hoped to be able to take a decision on the appeal during the following months .
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It attached to its reply a copy of the respondent's observations which had been lodged 16 months earlier. On 15 March 1979 . the applicants addressed themselves again to the Federal Court . In a letter of 23 March 1979 the Judge Rapporteur of the Public Law Court (Cour de droit public) replied that, subject to unforeseen circumstances, a decision would be given before the court vacation . On 29 June 1980 the applicants' lawyer again wrote to the Federal Court about the state of the proceedings . In a letter of 11 July 1980, the Judge Rapporteur replied that judgment would be delivered after the court vacation . In a judgment of 15 October 1980 the first Public Law Court of the Federal Court rejected the administrative law appeal brought by the applicants .
COMPLAINT S 'Fhe applicants, who allege a violation of A rt icle 6, paragraph I . of the Convention, complain of the length of the proceedings before the Federal Cou rt . They argue that these proceedings deal with civil rights within the meaning of the said provision . The fact that they are conducted in accordance with the rules of adniinistrative procedure docs not affect the civil nature of the rights in question . In the applicants' opinion . A rt icle 6 . paragraph 1, applies to disputes between an individual and a public authority wherever the latter creates conditions which directly interfere with the exercise of existing private rights, as in this instance , the right to rely on the law of nuisance ( nachbarliches Abwehrrecht) .
THE LA W The applicants complain of the duration of the examination of their administrative law appeal in the Federal Court, which began on 18 April 1977 and ended on 15 October 1980. Article 6 . paragraph 1 . of the Convention, which the applicants relied on . provides inter ulin that in the determination of his civil rights and obligations everyone is entitled to a court hearing within a reasonable time . The parties agree that the proceedings in question in this application concerned the applicants' civil rights and obligations and that therefore Article 6, paragraph 1, was applicable . Proceedings before the Federal Court lasted just under three and a half years . In the Kilnig Judgment of 28 June 1978, the European Court of Human Rights held as follows :"The reasonableness of the duration of proceeding s
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covered by Article 6, paragraph 1, of the Convention must be assessed in each case according to its circumstances . When enquiring into the reasonableness of the duration of criminal proceedings, the Cou rt has regard, inter alia, to the complexity of the case, to the applicants' conduct and to the manner in which the matter was dealt with by the administrative and judicial autho rities" ( Se ri es A, No . 27, para . 99, p . 34) . It applied the same c riteria to proceedings instituted before administrative Cou rt which resulted in a determination of civil rights and obligations (ibide,n) . The Commission holds that the same approach must be adopted in the instant case in assessing the duration of the proceedings before the Federal Court . Secondly , the proceedings complained of were appeal proceedings . The question which the Federal Cou rt was required to consider was whether the loss which the applicants claimed they had suffered entitled them to damage under Swiss law . In the Commission's opinion, this question was not exceptionally complex . Furthermore the Commission considers that the ri ght protected by A rt icle 6 . paragraph 1, of the Convention to be heard within a reasonable time depends- particularly in civil cases, on the behaviour of the person concerned who must act with the required diligence ( cf . Commission's Report of 14 May 1980 . Application No . 7759/77 . Buchholz v . Federal Republic of Germany, para . 101 . p . 17) . In the instant case the Commission notes that the applicants wrote three letters to the Federal Court, on 8 September 1978, 15 March 1979 and 29 June 1980 enqui ring about the state of the proceedings . The Government itself stated that the applicant, under Swiss law, had no other means of expediting the proceedings before the Federal Cou rt . The Commission notes with regard to the manner in which the case was conducted by the Federal Court that no procedural steps seem to have been taken between 24 May 1977, the date on which the respondent lodged his memorial, and 15 October 1980 when the Federal Court delivered its judgment . The respondent Government argued that the Federal Court's excessive work-load had gradually accumulated since 1969, that the rate at which cases were dealt with could no longer keep up with the number of new cases, but that the Federal Assembly had taken urgent measures relating to organisation . procedure and staff in 1978 . Such measures had somewhat mitigated the effects of the court's excessive work-load but did not solve the problems created by the increasing volume of work . The Commission considers it necessary to establish in an examination of the merits of the case to what extent, firstly, the Federal Court's excessive work-load, and secondly, the measures taken by the court and the Federal Assembly are relevant in assessing the duration of the proceedings, in this case, from the point of view of Article 6, paragraph 1, of the Convention .
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It considers in the light of the circumstances of this case, a preliminary examination of the parties' submissions, the case-law of the European Court of Human Rights and its own case-law, that the complaint made by the applicants raises problems of such importance that their determination should depend upon an examination of the merits . An examination of the application has, moreover, disclosed no ground o f inadmissibility . Therefore, the Commissio n
DECLARES THE APPLICATION ADMISSIBL E without in any way prejudging the merits of the case .
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Synthèse
Formation : Commission (plénière)
Numéro d'arrêt : 8737/79
Date de la décision : 18/03/1981
Type d'affaire : Decision
Type de recours : Partiellement recevable ; Partiellement irrecevable

Analyses

(Art. 41) PREJUDICE MORAL


Parties
Demandeurs : ZIMMERMANN et STEINER
Défendeurs : SUISSE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;1981-03-18;8737.79 ?

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