APPLICATION/REQUETE N° 9116/8 0 Alparslan TEMELTASCH v/SWITZERLAND Alparslan TEMELTASCH c/SUISS E DECISION of 12 October 1981 on the admissibility of the application DÃCISION du 12 octobre 1981 sur la recevabilité de la requêt e
Arllcle 6, paragraph 3 (e) of the Convention : Acquitted person liable for interpreters' jeer . Scope of the interpretative declaration rnade by Switzerland . Article 64 of the Convention : Does the interpretative declaration made by Switzerland in respect of Article 6, paragraph 3(e) of the Convention have the same effect as a reservation ? (Application declared admissible) .
Article 6, paragraphe 3, litt . e), de la Conventlon : Frais d'interprète mis à la charge d'une personne acquittée . Portée de la déclaration interprétative faite par la Suisse. Article 64 de la Convention : La déclaration interprétative de la Suisse sur l'anicle 6, paragraphe 3 (e), de la Convention a-t-elle les mêmes effets qu'une réserve ? (Requête déclarée recevable).
(English : see p. 228)
EN FAIT
Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par le requérant, peuvent se résumer comme suit : Le requérant est un ressortissant néerlandais d'origine turque né en . 11 est étudiant à Rotterdam . Devant la Commission il est représenté par 1941 MaYtre Pierre Bauer, avocat au barreau de La-Chaux-de-Fonds (Canton de Neuchâtel) . Le 6 décembre 1978 il a été arrêté par les autorités suisses alors qu'il traversait la frontière venant de France car la voiture dans laquelle il se trouvait avec un ressortissant turc contenait de la drogue .
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Le 5 juin 1979 le tribunal correctionnel du district du Val-de-Travers ( Canton de Neuchâtel) a condamné ce dern ier à tre nte-deux mois de réclusion . En revanche, le re quérant fut libéré des rins de la pou rsuite pénale, le t ri bunal ayant considéré qu'il était de bonne foi, lorsqu'il prétendait avoir ignoré la présence de drogue dans son véhicule. If fut toutefois, en applicati on de l'article 90 du code de procédu re pénale neuchâtelois, condamné à payer une pa rtie des frais de justice, fixée à 500 FS⢠. Dans ce tte somme é taient compris les frais d'interprète, ni le requérant ni son co- inculpé ne comp renant le français . Le 4 juillet 1979 le requérant s'est pourv u en cassa tion auprès de la Cour de cassati on pén ale de la République et Canton de Neuchâtel . Il a fait valoir que le jugement le condamnant à payer des frais judiciaires dans lesquels étaient inclus les frais d'interprète devait être annulé, dans la mesure où il violait l'a rticle 6, paragraphe 3 (e), de la Conven tion, puisqu'il lui faisait suppo rter une par tie des frais d'interprète . Le 10 octob re la Cour de cassati on pénale de la République et Canton de Neuchâtel a rejeté le pou rv oi . Elle a considéré que, quant à l'article 6, paragraphe 3 (e), de la Conven tion, il y avait lieu de s'en tenir à la déclara ti on interprétati ve du Consell fédéral, selon laquelle ⢠la garan ti e de l'assistance d'un interprète ne libère pas définitivement le bénéficiai re du paiement des frais qui en résultent » . Le 14 novemb re 1979 le re quérant a formé un re cours de d roit public à u Tribunal fédéral . Il a soutenu que c'était en violati on de l'article 6, paragraphe 3 ( e), de la Conven tion qu'il avait é té condamné à payer une partie des frais d'interprète . Il a souligné en outre que même s'il existait une déclara ti on interpréta ti ve de cette disposition p ar le Conse il fédéral, une telle déclarati on ne consti tuait pas une rése rv e au sens de l'ar ti cle 64 de la Conven tion, dans la mesure où elle ne se référait pas expressément à une loi en vigueur, comme il est prévu dans le paragraphe 2 de cette disposi tion . Il conclut donc que la Suisse é tait liée par l'article 6, paragraphe 3 (e), de la Conventi on et par l'arrét de la Cour européenne des Dtoits de l'Homme du 28 novembre 1978 dans l'Affai re Luedicke, Belkacem et Koç . Le 30 avril 1980 le T ri bunal fédéral a rejeté le recours . Ayant constaté que la Suisse n'avait pxs fait de rése rv e propre ment dite à l'ar ticle 6, paragraphe 3 (e), de la Convention, invoqué par le requérant, le T ri bunal fédéral a examiné si la déclaration interpréta tive du Conseil fédéral pouvait en l'occurrence avoir la même portée qu'une rése rve . A cet ég ard, il a estimé que les déclarations interpréta ti ves devaient étre en p ri ncipe assimilées à des rése rv es ,
⢠Cette disposition stipule qu' . En cas de non-lieu ou d'acquittement, le juge peut exceptionnellement, si l'équité l'exige, mettre tout ou partie des frais à la charge de celui qui a donné lieu à une poursuite pénale ou en a rendu l'instruction difficile ⢠.
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dans la mesure où cela correspondait à la volonté de l'Etat signataire et qu'elles avaient été formulées conformément à cette volonté . Il a souligné que les motifs qui avaient inspiré le Conseil fédéral à émettre la déclaration -essentiellement la non-conformité du droit interne fédéral et cantonal avec les exigences possibles de l'article 6, paragraphe 3(e), de la Convention permettaient d'affirmer que . pour les autorités suisses, la déclaration interprétative avait le sens d'une réserve . Par ailleurs, il a relevé que lors du débat au sujet de la ratification de la Convention devant le Conseil national, alots qu'il n'y avait pas encore de jurisprudence de Strasbourg au sujet de l'article 6, paragraphe 3 (e) . de la Convention, le Conseiller fédéral Graber avait déclaré : . Là où il y a incompatibilité entre la Convention et notre droit interne, nous faisons des réserves, là où il s'agit d'une question d'interprétation, une déclaration interprétative . . Et le Tribunal fédéral de conclure sur ce point qu'il était évident que la Suisse entendait limiter la portée de cette disposition et que si elle avait adhéré à la Convention après l'arrêt Luedicke, elle aurait émis une réserve formelle . Le Tribunal fédéral a ensuite examiné la question de savoir si la déclaration interprétative remplissait ou non les exigences prévues par l'article 64 de la Convention, notamment pour ce qui concerne l'obligation d'exposer brièvement en quoi consiste la loi interne visée par la réserve . Il a estimé qu'une telle obligation n'était qu'une simple prescription de forme, car on ne saurait exiger d'un Etat fédéral qu'il fasse l'énumération détaillée de toutes les sources de droit cantonal et, le cas échéant, de droit communal . Par ailleurs, il a relevé que les autorités suisses auraient eu certaines difficultés à faire un exposé systématique des divers codes cantonaux de procédure pénale ou des règlements cantonaux fixant le tarif des frais en matière pénale . De toute manière, le rapport aux Chambres fédérales énumérait quelques lois cantonales et mentionnait au moins sommairement leur contenu . Une plus longue présentation n'était pas nécessaire, dès lors qu'il s'agissait seulement d'exprimer que, d'après les lois concernées, la prise en charge des frais d'interprète par l'Etat ne pouvait être définitive . Le Tribunal fédéral a ainsi conclu que la déclaration interprétative du Conseil fédéral respectait les conditions de forme prévues par l'article 64 de la Convention et qu'elle avait donc les mêmes effets qu'une réserve proprement dite .
GRIEF S Le requérant se plaint d'avoir été condamné par les juridictions suisses à payer une partie des frais d'interprète, dont la présence était nécessaire car il ne comprenait pas la langue employée à l'audience . Il allègue à cet égard la violation de l'article 6, paragraphe 3 (e) de la Convention, disposition que l e
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Gouvernentent suisse serait tenu de respecter . la déclaration interprétative formulée par lui ne pouvant pas être considérée comme une réserve valable au sens de l'article 64 de la Convention .
PROCEDURE DEVANT LA COMMISSIO N La requête fut introduite le 16 septembre 1980 et enregistrée le 18 septembre 1980. Le 20 mars 1981 la Commission décida, conformément à l'article 42, paragraphe 2 (b) de son Règlement intérieur, d'inviter le Gouvernement suisse à lui présenter des observations écrites sur la recevabilité et le bien-fondé de la requête . Ces observations, datées du 3 juin 1981 . furent soumises au conseil du requérant, Maitre Bauer, qui y répondit le 8 juillet 1981 .
RESUMà DE L'ARGUMENTATION DES PARTIE S A . Le Gouvernemen t 1 . Ponée des réserves et des déclarationr interprétatives en droit international généra l Le Gouvernement rappelle en premier lieu, que la Cour a admis que la Convention de Vienne sur le droit des traités du 23 mai 1969 constituait une source d'inspiration pour l'interprétation de la Convention, dans la mesure où elle énonçait des règles de droit international généralement admises (Cour eur . D .H ., affaire Golder, arrèt du 21 février 1975, Série A, vol . 18, p . 14) . Or, s'agissant de l'interprétation de la notion de réserve, qui figure à l'article 64 de la Convention, l'article 2, paragraphe 1 (d) de la Convention de Vienne prévoit ce qui suit : . l'expression 'réserve' s'entend d'une déclaration unilatérale, quel que soit son libellé ou sa désignation, faite par un Etat quand il signe, ratifie, accepte ou approuve un traité ou y adhère, par laquelle il vise à exclure ou à modifier l'effet juridique de certaines dispositions du traité dans leur application à cet Etat - . A propos de cet a rticle le Gouvemement relève que le commentaire du projet d'articles de la Commission du droit inte rn ational sur le droit des traités précise ce qui suit (Conférence des Na ti ons Unies sur le droit des traités, documents officiels, New York 1971, p . 10) : . La nécessité de ce tte dé fini tion ( des rése rves) vient de ce qu'il n'est pas rare que les Etats, lorsqu'ils signent, ratifient, acceptent ou approuvent un traité, ou y adhèrent, fassent des déclara ti ons sur la manière dont ils comprennent telle ou telle question ou sur leur interprétation d'une dis-
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position pa rt iculière . Ces déclarations peuvent se bortter à préciser la position d'un Etat ou, au contraire, avoir la valeur d'une rése rv e, selon qu'elles ont ou non pour effet de modifier ou d'exclure l'application des clauses du traité, telles qû elles resso rt ent du texte adopté . ⢠Selon le Gouve rnement il n'est pas douteux qu'en formulant une déclaration interprétative de l'a rt icle 6, paragraphe 3 (c) et (e) de la Convention, la Suisse avait entendu exclure l'application à son é gard d'une interprétation de cette disposition qui ne serait pas conforme à cette déclaration . Les travaux préparatoi res seraient à cet égard éloquents . En outre, l'arrêté fédéral adopté le 3 octobre 1974 par les Chambres fédérales mettait sur le même pied les rése rves et les déclarations interprétatives, toutes deux ayant été des conditions d'approbation de la Convention par les Chambres fédérales . Enfin, le Gouvemement se rallie sur ce point à une théorie soutenue par le Professeur McRae, selon laquelle il faut faire une distinction entre les ⢠déclarations interprétatives simples ⢠( mere interpretative declarations) et les ⢠déclarations interprétatives qualifiées . ( qualified interpretative declarations) ( ⢠the legal effect of interpretative declarations, BYIL, 49, 1978, p . 155-173) . Les premières auraient pour simple but pour l'Etat de préciser l'interprétation qu'il donne au traité ou à une pa rt ie de celui-ci, alors que par les secondes un Etat ferait d'une interprétation pa rticulière du traité ou d'une partie de celui-ci une condition de sa ratification ou de son adhésion . Les effets qu'il convient d'attacher à ces deux types de déclarations interprétatives ne sont pas les mêmes : alors que la po rtée de la déclaration interprétative simple vari e selon l'attitude adoptée par les autres Pa rt ies contractantes, la déclaration interprétative qualifiée doit, quant à elle, étre assimilée à une rése rve. 2 . Réserves et déc(arations interprétatives dans la pratique de la Convention
a) La pratique des Etats Le Gouvernement souligne que près de la majorité des Etats parties à la Convention ont formulé des réserves et que celles-ci n'ont provoqué aucune réaction de la part des autres Parties contractantes . Ce libéralisme s'expliquait par le fait que la préoccupation principale des Etats parties à la Convention était que les réserves ou les déclarations interprétatives faites par certains d'entre eux ne soient pas incompatibles avec l'objet et le but de la Convention - situation qui serait contraire au droit international général, article 19 de la Convention de Vienne - ni ⢠de caractère général . . conformément à l'article 64, paragraphe 1 de la Convention . Afin d'illustrer d'une part le caractère flou de la frontière entre les réserves et les déclarations interprétatives et d'autre part la tolérance des Etats parties à la Convention en ce qui concerne le respect des exigences de forme de l'article 64 . paragraphe 2 de la Convention, le Gouvernement cite deux exemples . Premièrement, la position du Gouvernement d'Irlande qui, en rati-
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fiant la Convention en 1953, l'a fait ⢠sous la réserve qu'il n'interprète pas l'article 6, paragraphe 3 (c) de la Convention comme requérant l'octroi d'une assistance judiciaire gratuite dans une mesure plus large qu'il n'est actuellement prévu en Irlande - ; deuxièmement, la position du Gouvernement de Malte qui, dans une ⢠déclaration d'interprëtation . faite en 1967, a . déclaré interpréter le paragraphe 2 de l'article 6 de la Convention en ce sens que ledit paragraphe n'interdit pas qu'une loi particuGère impose à toute personne accusée en vertu de cette loi la charge de faire la preuve de faits particuliers ⢠. Le Gouvemement défendeur relève que dans un aucun de ces cas la loi nationale visée n'était nommément mentionnée, et il est malaisé, à priori, de dire en quoi la portée de la réserve du Gouvernement irlandais va plus loin que la déclaration interprétative qualifiée du Gouvemement de Malte . b) La pratique des organes de la Convention relative à l'article 64 De l'avis du Gouvernement il est significatif que jusqu'ici la Commission se soit montrée large dans l'interprétation des réserves forrnulées par les Etats . Quant à la Cour, elle ne semble pas avoir eu, jusqu'ici, l'occasion de se prononcer sur la validité et la portée des réserves ou déclarations interprétatives formulées en application de l'article 64 de la Convention .
c) La pratique doctrinale en la matièr e Le Gouvemement fait observer qu'au récent Colloque intemational de Francfort sur la Convention, en avril 1980, de nombreuses voix se sont exprimées en faveur d'un renforcement du contrôle, par les organes de la Convention, des réserves et déclarations interprétatives, faites par les Etats . Il est toutefois significatif qu'une voix représentative du point de vue d'un de ces Etats, celle de Sir Vincent Evans, ait mis en gardé les participants au colloque contre cette tendance, en soulignant que si les Etats ne pouvaient pas se prémunir, par le biais des réserves, avec une sécurité suffisante, ils pourraient se montrer réticents à l'avenir à ratifier de nouveaux instruments . 3 . Portée de la déclaration interprétative de la Suisse relative à l'article 6, paragraphe 3 (e) de la Convention Le Gouvernement soutient que pour trancher la question de savoir si cette déclaration interprétative du Conseil fédéral a la même portée qu'une réserve, il convient d'attacher une importance déterminante à l'intention du législateur et aux prises de position gouvernementales qui ont précédé les débats législatifs . La clarté des déclarations faites en 1974 devant le parlement suisse (notamment celles de M . Graber, conseiller fédéral : .là où il y a incompatibilité entre la Convention et notre droit interne, nous faisons des réserves, là où il s'agit d'une question d'interprétation, une déclaration interprétative â¢, et de M . Hefti, rapporteur de la commission du Conseil des Etats : . les déclarations interprétatives sont assimilées aux réserves conformément à l'article 64 de la Convention â¢) s'explique par la constance de s
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prises de position gouvernementales qui, depuis 1968, ont attiré l'attention du législateur sur l'opportunité et la nécessité de faire une déclaration interprétative . Ainsi, le Conseil fédéral dans son rapport du 9 décembre 1968 soulignait que dans plusieurs cantons, l'indemnité versée à un interprète était considérée comme faisant partie des frais de la cause, lesquels étaient mis à la charge du condamné . Les passages pertinents de ce rapport sont ainsi rédigés : . Afin d'éviter toute contestation possible et vu l'absence de jurisprudence de la Commission sur ce point, nous pensons cependant que la Suisse pourrait, en adhérant à la Convention, déposer une déclaration interprétative de l'article 6, paragraphe 3( . . .) (e), tenant compte de la pratique consistant à mettre à la charge du condamné les frais découlant de l'assistance ( . . .) d'un interprète ⢠. ( . . .) ⢠Quant à la question de la gratuité de l'assistance ( . . .) d'un interprète, il nous paraitrait préférable, aussi longtemps que la Commission ou la Cour européenne des droits de l'homme n'aura pas eu l'occasion de se prononcer à ce sujet, de préciser dans l'instrument de ratification l'interprétation que la Suisse entendrait donner aux dispositions dont il s'agit . ⢠Il releva en outre que la question de la gratuité de l'interprétatio n soulevait pour la Suisse des problèmes complexes . en raison notamment de l'existence, reconnue par l'article 116 de la Constitution fédérale, de quatre langues nationales et de la présence sur notre sol d'un grand nombre d'étrangers . . Par ailleurs, dans son message du 4 mar : 1974, le Conseil fédéral soulignait que : - quant à la gratuité de l'assistance d'un interprète, elle n'est pas expressément reconnue en droit suisse . Le plus souvent, l'indemnité versée à l'interprète suit les frais de la cause et peut être mise à la charge du condamné ⢠. Et le Gouvernement défendeur de conclure que ⢠la clarté de ces travaux préparatoires montre, sans doute possible, que la déclaration interprétative du Conseil fédéral est une déclaration interprétative qualifiée assimilable à une réserve proprement dite ⢠. Il souligne que seule l'incertitude existant encore en 1974 au sujet de l'interprétation de l'article 6, paragraphe 3 (e) de la Convention avait conduit le Conseil fédéral et les Chambres fédérales à préférer la forme d'une déclaration interprétative à celle d'une réserve proprement dite . Le choix eût été inverse si la Suisse avait ratifié la Convention après que la Cour eut rendu son arrbt du 28 novembre 1978 . . Mais, comme l'a relevé l'Office fédéral de la justice dans son avis de droit, à l'époque de la ratification de la Convention par la Suisse, la formulation d'une réserve formelle, au sens de l'article 64 CEDH, ⢠eût même été inopportune, dans la mesure o ù
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elle eût paru préjuger un point d'interprétation sur lequel la Cour européenne des droits de l'homme a, dans le système international de garantie collective des droits de l'homme instauré par la Convention, le dernier mot - . 4 . Conformité de la déclaration interprétative de la Suisse avec les exigences de forme de l'article 6 4 Le Gouvernement soutient que l'exigence de forme qui figure à l'a rticle 64, paragraphe 2( . toute rése rve . . . compo rt e un bref exposé de la loi en cause â¢) ne saurait être prise à la lettre, compte tenu de la pratique, assez souple en la matière, des Etats pa rties contractantes à la Convention .
Il est vrai que plusieurs Etats (Allemagne, France, Norvège . Autriche, Portugal, Espagne), parmi lesquels figure un Etat fédéral, ont pris le soin de viser expressément les dispositions de droit national prises en considération lors de la formulation des réserves . Il est cependant significatif que rares sont toutefois les réserves qui comportent un . bref exposé de la loi en cause . . En ratifiant, en 1974, la Convention européenne des Droits de l'Homme, la Suisse pouvait de bonne foi s'appuyer sur cette pratique souple, d'autant plus que, comme déjà mentionné, l'Irlande et Malte avaient, à propos de l'article 6, paragraphe 3 (c) et 6 paragraphe 2 CEDH, fait une réserve et une déclaration d'interprétation formulées en termes généraux . A fortiori la Suisse, Etats fédéral au droit de procédure non unifié - situation non comparable à celle de la République fédérale d'Allemagne - pouvait-elle se fonder sur cette pratique souple pour renoncer à dresser la liste, et à la tenir à jour, des dispositions cantonales de procédure pertinentes au regard de l'article 64, paragraphe 2 CEDH . Le Gouvernement se réfère sur ce point à l'arrét du Tribunal fédéral statuant sur le recours de droit public du requérant, où il est dit que - l'on ne saurait exiger d'un Etat fédéral qu'il fasse l'énumération détaillée de toutes ses sources de droit cantonal et, le cas échéant, de droit communal » . Enfin, et compte tenu du fait que le rapport du Conseil fédéral de 1968 et les messages de 1972 et 1974 mentionnent, à titre exemplatif, certaines dispositions de procédures cantonales, le Gouvernement suisse est d'avis que l'objet et le but, sinon la lettre, de l'article 64, paragraphe 2 CEDH sont respectés, et que la déclaration interprétative de la Suisse est conforme à cet égard à la Convention . B . Le requérant Le requérant soutient que tant le jugement du tribunal correctionnel du 5 juin 1979 que les arrêts de la Cour de cassation pénale du 10 octobre 1979 et du Tribunal fédéral du 30 avril 1980 violent l'article 6, paragraphe 3 (e) de la Convention . En effet, la Cour européenne des Droits de l'Homme dans son arrêt Luedicke, Belkacem et Koç du 28 novembre 1978 a établi de manièr e
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très stricte que cette disposition de la Convention garantit une ⢠exonération définitive ⢠du paiement des frais d'interprète . II est vrai que la Suisse a fait figurer dans les - réserves et déclarations . la remarque selon laquelle le Conseil fédéral déclare interpréter l'article 6, paragraphe 3 (e) de la Convention comme ne libérant pas de manière définitive le bénéficiaire du paiement des frais d'interprète . Cependant, de l'avis du requérant, cette déclaration interprétative ne saurait constituer une réserve au sens bien précis de l'article 64 de la Convention ; elle serait sans effet et les conclusions de la Cour dans l'affaire Luedicke, Belkacem et Koç auraient force obligatoire en Suisse . Selon le requérant la déclaration interprétative de la Suisse ne serait pas une réserve valable, dans la mesure où elle ne se référait pas expressément à une loi en vigueur conformément à l'article 64, paragraphe 2 de la Convention . « Cette déclaration ne déploie aucud effet et ne diminue en rien les obligations de la Suisse dérivées de l'article 6, paragraphe 3(e) de la Convention . . Citant à cet égard une partie de la doctrine, le requérant fait valoir que depuis l'affaire Luedicke, Belkacem et Koç, le Conseil fédéral a contre lui, sur ce point, les organes de Strasbourg et qu'en pratique, il n'est donc plus possible à un tribunal de mettre à la charge d'un condamné les frais de traduction ou d'interprétation rendus nécessaires par son ignorance de la langue de la procédure . Par ailleurs, comme le Conseil fédéral l'a admis lui-même dans son avi s de droit du 8 juin 1979 . . il est certain que la place privilégiée qu'occupe la Cour européenne des Droits de l'Homme dans le système de garantie collective qu'instaure la Convention confère aux arrêts qu'elle rend une autorité qui dépasse largement le cas d'espèce . . Le requérant souligne qu'il soutient justement cette thèse : en l'absence d'une réserve formelle au sens de l'article 64 de la Convention et en présence d'une simple déclaration interprétative, un justiciable est, en Suisse, autorisé, depuis le 28 novembre 1978, à invoquer le bénéfice de la jurisprudence Luedicke .
Il souligne, en outre, que le Conseil fédéral avait reconnu également que ⢠l'adaptation de notre droit à la Convention selon l'interprétation qu'en donnent les organes de Strasbourg, ne peut être évitée - (Message de 1977 à l'appui d'un projet d'arrêté fédéral modifiant d'urgence le Code pénal militaire) . A son avis, le Gouvernement ne saurait invoquer la ju ri sprudence du T ribunal fédéral pour justifier son point de vue . Il relève d'ailleurs que l'arrêt rendu par ce dernier dans la cause du requérant est lui-même peu conforme aux principes généraux posés par sa ju risprudence récente . En effet, dans un arrêt du 4 avril 1979, le Tribunal fédéral avait rappelé qu'il devait, pour interpréter les garanties constitutionnelles, tenir compte des dispositions correspondantes de la Convention . avec les précisions apportées par la jurisprudence des organes ju ri dictionnels institués par cette Convention ⢠.
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EnFin, le requérant conteste - l'interprétation souple ⢠de l'article 64 de la Convention avancée par le Gouvernement . Il estime qu'il y a assurément quelque artifice à isoler cette disposition du reste de la Convention . En effet, celle-ci constitue un instrument très formaliste ainsi qu'en témoigne abondamment la jurisprudence de la Commission et de la Cour . On ne saurait, raisonnablement et malgré les différences intrinsèques de ses dispositions, invoquer d'un côté le caractère très formaliste des articles S et 6 de la Convention, et de l'autre, soutenir que l'article 64 est une disposition de pure forme .
EN DROI T 1 . Le requérant se plaint d'avoir été condamné par les autorités judiciaires suisses à payer une partie des frais d'interprète, dans la procédure pénale dirigée contre lui devant le tribunal correctionnel du Val-de-Travers, la présence de cet interprète ayant été rendue nécessaire par son ignorance de la langue utilisée à l'audience . Il allègue de ce fait la violation de l'article 6, paragraphe 3 (e) de la Convention et se réfère à cet égard à l'interprétation donnée à cette disposition par la Cour européenne des Droits de l'Homme dans l'Affaire Luedicke . Belkacem et Koç, (arrêt du 28 novembre 1978) . L'article 6, paragraphe 3 (e) de la Convention est ainsi libellé : . Tout accusé a droit notamment à : (. . . ) e) se faire assister gratuitement d'un interprète, s'il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience » . La Cour a considéré dans l'affaire susmentionnée que le droit protégé par cette disposition . comporte pour quiconque ne parle ou ne comprend pas la langue employée à l'audience, le droit a être assisté gratuitement d'un interprète sans pouvoir se voir réclamer après coup le paiement des frais résultant de cette assistance â¢(arrêt précité, paragraphe 46) . La Commission constate, en premier lieu, que le re quérant fut effectivement condamné le 5 juin 1979 par le t ri bunal correctionnel du dist ri ct du Val-de-Travers (Canton de Neuchâtel) à payer une pa rt ie des frais de justice, fixée à 500 FS, dans laquelle était comprise une part ie des frais d'interprète . Les recours qu'il a formés en vue d'être libéré de cette obligation fu re nt rejetés par les auto ri tés judiciai res compétentes . Toutefois, le Gouvemement défendeur - qui par ailleurs admet que le requérant a satisfait à la condition de l'épuisement des voies de recours internes - soutient que les obligations qu'il a assumées au tit re de l'a rticle 6, paragraphe 3 (e) ne sont pas aussi étendues que celles définies par la Cour européenne des Droits de l'Homme dans l'arrêt précité . Il fait valoir à cet égard que, lors de la rati fication de la Convention, il a formulé au sujet d e
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l'article 6, paragraphe 3 (e) une déclaration interprétative aux termes de laquelle : ⢠Le Conseil fédéral suisse déclare interpréter la garantie de la gratuité de l'assistance d'un avocat d'office et d'un interprète figurant à l'article 6, paragraphe 3 (c) et (e) de la Convention comme ne libérant pas définitivement le bénéficiaire du paiement des frais qui en résultent ⢠. Il considère que cette déclaration interprétative doit être considérée comme une réserve, au sens de l'article 64 de la Convention, ⢠vu l'intention du législateur et les prises de position gouvernementales qui ont précédé les débats législatifs ⢠. Le requérant, quant à lui, estime que ladite déclaration ne saurait être assimilée à une ⢠réserve ., au sens de la disposition précitée, notamment parce qu'elle n'aurait pas respecté l'exigence formelle prévue à son paragraphe 2 . L'article 64 de la Convention est ainsi libellé : . I . Tout Etat peut, au moment de la signature de la présente Convention ou du dépôt de son instrument de ratification, formuler une réserve au sujet d'une disposition particulière de la Convention, dans la mesure où une loi alors en vigueur sur son territoire n'est pas conforme à cette disposition . Les réserves de caractère général ne sont pas autorisées aux termes du présent article . 2 . Toute réserve émise conformément au présent article comporte un bref exposé de la loi en cause ⢠. La Commission est ainsi amenée à se prononcer sur la nature, au regard de l'article 64 de la Convention, de la déclaration interprétative précitée du Gouvernement suisse, puis l'étendue des obligations effectivement assumées par la Suisse aux termes de l'article 6, paragraphe 3 (e) de la Convention . Ce n'est qu'à la suite de l'examen de ces problèmes que la Commission pourra se prononcer sur le grief du requérant concernant la violation alléguée de l'article 6, paragraphe 3(e) de la part des autorités suisses . Après un premier examen des faits et arguments soumis par les parties, la Commission estime qu'à ce stade elle ne saurait déclarer la requéte manifestement mal fondée, au sens de l'article 27, paragraphe 2 de la Convention, compte tenu de la complexité des problèmes d'interprétation à résoudre . Aucun autre motif d'irrecevabilité n'ayant été retenu, la requ2te doit être déclarée recevable . Par ces motifs, la Commission ,
DÃCLARE LA REQUÃTE RECEVABLE, tous moyens de fond rése rvés
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(T2ANSLATJON ) THE FACT S The facts of the case as submitted by the applicant may be summarised as follows : The applicant is a Dutch national of Turkish origin, who was born in 1941 . He is a student in Rotterdam . He was represented before the Commission by Mr Pierre Bauer, a lawyer practising at the La-Chaux-de-Fonds (Canton of Neuchâtel) bar . On 6 December 1978, he was arrested by the Swiss authorities while crossing the border from France because there were drugs in the car in which he was travelling with a Turkish national . On 5 June 1979, the Criminal Court of Val-de-Travers (Canton of Neuchâtel) sentenced the latter to 32 months imprisonment . On the other hand, the applicant was acquitted as the Court accepted his defence that he was genuinely unaware of the presence of drugs in his car . He was, however, ordered, pursuant to Article 90 of the Neuchâtel Code of Criminal Procedure, to pay 500 Swiss Francs as part of the court costs* . This sum included the interpreter's costs, as neither the applicant nor his co-defendent understood French . On 4 July 1979, the applicant appealed on a point of law to the Criminal Court of Cassation of the Republic and Canton of Neuchâtel . He alleged that the decision ordering him to pay court costs, which included the interpreter's costs, should be set aside as being in breach of Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention, because he had thereby incurred part of the interpreter's costs . On 10 October 1979, the Criminal Court of Cassation of the Republic and Canton of Neuchâtel disallowed the appeal . It held in respect of Article 6, paragraph 3(e) of the Convention that one had to abide by the Federal Côuncil's interpretative declaration, whereby the guarantee of the assistance of an interpreter could not be regarded as "permanently absolving the beneficiary from payment of the resulting costs" .
⢠This provision reads :'-tn the eveni of discontinuance or acquittal, the Coun may, as an exceptional measure and where the interests of faimess so require, order all or part of the costs to be bome by the person who gave rise to the prosecution or made the investigation difficult" .
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On 14 November 1979, the applicant brought a public law appeal to the Federal Court, maintaining that he had been ordered to pay part of the interpretation costs in breach of Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention . He further contended that, although the Federal Council had made an interpretative declaration on that provision, this did not amount to a reservation within the meaning of Article 64 of the Convention insofar as it did not expressly refer to a law in force as laid down in paragraph 2 . He concluded accordingly that Switzerland was bound by Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention and by the judgntent of the European Court of Human Rights of 28 November 1978 in the case of Luedicke, Belkacem and Koc . On 30 April 1980, the Federal Court rejected the appeal . Having found that Switzerland had not made an actual reservation to Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention, on which the applicant relied, the Federal Court considered whether the Federal Council's interpretative declaration could, in this case, be attributed the same scope as a reservation . It decided that interpretative declarations had in principle to be assimilated to reservations, to the extent that they corresponded to the intention of the signatory State and had been formulated in accordance with that intention . It further held that it was possible to infer from the reasons that had led the Federal Council to make the declaration essentially the non-compliance of domestic federal and cantonal law with the potential requirements of Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention-that as far as the Swiss authorities were concerned, that interpretative declaration had the effect of a reservation . Moreover, it noted that when the ratification of the Convention was being debated in the National Council, although there did not yet exist any case-law from Strasbourg on Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention, a federal councillor, Mr Graber, stated that "where the Convention and domestic law are incompatible, we shall make reservations and on a question of interpretation we shall make an interpretative declaration" . The Federal Court concluded that Switzerland had clearly intended to restrict the scope of that provision and that had it acceded to the Convention after the Luedicke judgment, it would have made a formal reservation . The Federal Court then examined the question of whether or not the interpretative declaration complied with the requirements of Article 64 of the Convention, particularly as regards the obligation to set out briefly the domestic law concerned by the reservation . It held that such an obligation was merely a formal requirement, as a Federal State cannot be required to provide a detailed list of all its sources of cantonal and, where appropriate, municipal law . It further held that the Swiss authorities would have had certain problems in giving a systematic account of the various Codes of Criminal Procedure and Cantonal Regulations rixing the costs in criminal proceedings . In any case, the report to the Federal Chambers listed some Cantonal laws and gave at least a
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summary of their contents . A more detailed account was not necessary, since it was merely a matter of stating that, under the laws concerned, inter pretation costs could not be permanently borne by the State . The Federal Court therefore concluded that the Federal Council's interpretative declaration complied with the formal requirement of Article 64 of the Convention and had the same effects as a forntal reservation .
GRIEFS The applicant complains of having been ordered by the Swiss courts to pay part of the interpretation costs, which were necessarily incurred because he did not understand the language used in court . In this respect, he alleges a violation of Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention, which the Swiss Government was obliged to comply with as the interpretative declaration it made could not be regarded as a valid reservation within the meaning of Article 64 of the Convention .
PROCEEDINGS BEFORE THE COMMISSIO N The application was lodged on 16 September 1980 and registered on 18 September 1980 . On 20 March 1981, the Commission decided, in accordance with Rule 42 (2) (b) of its Rules of Procedure, to invite the Swiss Government to submit written observations on the admissibility and me ri ts of the application . These observations, dated 3 June 1980, were transmitted to the applicant's lawyer, Mr Bauer, who replied on 8 July 1981 .
SUMMARY OF THE SUBMISSIONS OF THE PARTIES A . The Governmen t 1 . Scope of reservations and interpretative declarations international la w
in general
The Government recalls firstly that the Court acknowledged that the Vienna Convention on the Law of Treaties of 23 May 1969 was a source of guidance in the interpretation of the Convention insofar as it stated generally accepted principles of international law (European Court of Human Rights, Golder Case, judgment of 21 February 1975, Series A, p . 14) . However, with regard to the interpretation of the concept of reservation, which appears in Article 64 of the Convention, Article 2, paragraph 1(d) of the Vienna Convention provides that : "'reservation' means a unilateral statement, however phrased or named, made by a State, when signing, ratifying, accepting, approving o r
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acceding to a treaty, whereby it purports to exclude or to modify the legal effect of certain provisions of the treaty in their application to that State" . Concerning this a rt icle, the Government refers to the commenta ry on the draft articles of the International Law Commission on the law of treaties which states as follows :( United Nations Conference on the Law of Treaties, official records, New York, 1971, p . 10) for this definition (of rese rvations) arises from the fact tha t :"Thend States, when signing, ratifying, acceding to, accepting or approving a treaty, not infrequently make declarations as to their understanding of sonte matter or as to their interpretation of a pa rt icular provision . Such a declaration may be a mere clarification of the State's position or it may amount to a rescrvation, according as it does or does not vary or exclude the application of the terms of the treaty as adopted" . The Government considers it beyond question that when Switzerland drew up an interpretative declaration of Article 6, paragraph 3 (c) and (e) of the Convention, it intended to exclude itself from an interpretation of that provision that was inconsistent with that declaration . The travaux préparatoires amply bears out this point . Furthermore, the federal decree adopted on 3 Oclober 1974 by the Federal Chambers placed reservations on an equal footing with interpretative declarations, both of which were conditions of the Federal Chamber's approval of the Convention . Finally . the Government agrees with a theory put forward by Professor McRae, whereby a distinction must be drawn between "mere interpretative declarations" and "qualified interpretative declarations" ("The legal effect of interpretative declarations", BYIL . 49, 1978, p . 155-173) . The object of the former is simply that the State sets out its interpretation of the treaty or part thereof, whereas in the latter case, a State makes a specific interpretation of the (reaty or part thereof a condition of its ratification or accession . The effects that should be attributed to the two types of interpretative declarations are not the same : whereas the scope of a mere interpretative declaration differs according to the attitude adopted by the other Contracting Parties, a qualified interpretative declaration must on the other hand be assimilated to a reservation . 2 . Reservation and in(erpretative declarations in the Convention system a) State practice The Government notes that almost half of the States parties to the Convention have made reservations which have not produced any reaction from other Contracting Parties . This liberal attitude is due to the fact that the principal concern of States partiesto the Convention has been that reservation s
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and interpretative declarations made by some of them should not be incompatible with the object and purpose of the Convention-this would be contrary to general international law, Article 19 of the Vienna Convention-or be "of a general character" in accordance with Article 64 . paragraph I of the Convention . In order to illustrate firstly, the vague boundary between reservations and interpretative declarations and secondly, the tolerance of States parties to the Convention as regards compliance with the technical requirements of Article 64 . paragraph 2 . the Government cites two examples : firstly, the position of the Irish Government, which ratified the Convention in 1953 "subject to the reservation that they do not interpret Article 6, paragraph 3 (c) of the Convention as requiring the provision of free legal assistance to any wider extent that is now provided in [reland" ; secondly, the position of the Maltese Government . which in a declaration of interpretation made in 1967 stated that "it interprets paragraph 2 of Article 6 of the Convention in the sense that it does not preclude any particular law from imposing upon any person charged under such law the burden of proving particular facts" .
The respondent Government notes that in neither of these cases was the domestic law concerned mentioned by name and it is difficult a priori to state in what respect the scope of the Irish Government's reservation is wider than the qualified interpretative declaration of the Government of Malta . b) The practice of the organs of the Convention relating to Article 64 The Government considers it significant that the Commission has to date been liberal in its interpretation of reservations made by States . The Court does not appear to have yet had an opportunity to decide the validity and scope of reservations or interpretative declarations made pursuant to Article 64 of the Convention . c) Trends in legal opinio n The Government notes that at the recent international colloquy in Frankfurt on the Convention in April 1980, there was considerable support for stronger supervision by the organs of the Convention of reservations and interpretative declarations made by States . However, it is significant that Sir Vincent Evans . representative of opinion in one of these States, warned the participants at the colloquy against this tendency, emphasising that if States could not protect themselves by reservations with sufficient certainty, they might be reluctant to ratify new instruments in the future . 3 . Scope of Switzerland's interpretative declaration on Article 6, paragraph J(e) of the Conventio n The Government argues that in order to decide the question of whether the Federal Council's interpretative declarations has the same scope as a
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reservation, the intention of the Legislature and the positions adopted by the Government before the parliamentary debates must be of decisive importance . The clarity of the statements made in 1974 in the Swiss Parliament (in particular, Mr Graber, Federal Councillor :"where the Convention and domestic law are incompatible, we shall make reservations and on a question of interpretation, we shall make interpretative declarations" ; and Mr Hefti, Rapporteur of the Committee of the Council of States, "interpretative declarations must be assimilated to reservations made in accordance with Article 64 of the Convention") can be explained by the consistent position adopted by the Government, which since 1968 had drawn the Legislature's attention to the advisability and need to make an interpretative declaration . In its report of 9 December 1968, the Federal Council noted that in several cantons, the payment of an interpreter was regarded as part of the costs of the case, which were borne by the convicted person . The relevant passages of this report are as follows : "In order to avoid any possible dispute and in view of the lack of caselaw in the Commission on this point, we consider however, that Switzerland could, in acceding to the Convention, make an interpretative declaration of Article 6, paragraph 3 (e), taking account of the practice of ordering the costs resulting from the assistance ( . . .) of an interpreter to be borne by the convicted person" .( . . .) "As to the question of the free assistance ( . . .) of an interpreter, it seems preferable as long as the European Commission and Court of Human Rights has not had an opportunity to rule on this question, to specify in the instrument of ratification the interpretation that Switzerland intends to give the provisions in question" . It further noted that free interpretation raised complex problems for Switzerland "particularly on account of the existence of four national languages recognised by Article 166 of the Federal Constitution and the presence of a large number of aliens on our territory" . Moreover, the Federal Council, in its message of 4 March 1974, noted that "the free assistance of an interpreter is not expressly recognised in Swiss law . The payment of the interpreter is usually part of the costs of the case and may be ordered against the person convicted" . The respondent Government concludes that "it is clear beyond any possible doubt from the travaux préparatoires that the Federal Council's interpretative declaration is qualified interpretative declaration that can be assimilated to a formal reservation" . It emphasised that it was only the uncertainty which still existed in 1974 on the question of the interpretation of Article 6 . paragraph 3 (e) of the Convention that led the Federal Council an d
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the Federal Chambers to opt for an interpretative declaration rather than a formal reservation . They would have chosen the latter had Switzerland ratified the Convention after the Court had delivered its judgment of 28 November 1978 . However, as the Federal Justice Office noted in its legal opinion, when the Convention was ratified by Switzerland, the formulation of a formal reservation within the meaning of Article 64 of the Convention "might have been inadvisable, insofar as it might have appeared to prejudge a question of interpretation on which the European Court of Human Rights is the ultimate authority under the international system of the collective supervision of human rights set up by the Convention" .
4 . Compliance of Switzerland's interpretative declaration with the formal requirements of Article 64 The Government maintains that the formal requirement in Article 64, paragraph 2("any reservation . . . shall contain a brief statement of the law concerned") cannot be taken literally, in view of the fairly flexible practice adopted in this matter by the Contracting States Parties to the Convention . Admittedly, several States (the Federal Republic of Germany, France, Norway . Austria . Portugal, Spain) including a Federal State, have been careful to expressly refer to the provisions of domestic law that were taken into consideration when formulating reservations . It is . however significant that reservations containing "a brief statement of the law concemed" are rare . When ratifying the European Convention on Human Rights, in 1974, Switzerland could in good faith rely on this flexible practice particularly since, as has already been mentioned . Ireland and Malta had drawn up a reservation and a declaration of interpretation on Articles 6 . paragraph 3 (c) and 6, paragraph 2 of the ECHR in general terms . A fortiori, Switzerland, being a Federal State without a standard law of procedure-not comparable to the situation in the Federal Republic of Germany-could rely on this flexible practice to excuse itself from drawing up and maintaining an up-to-date list of the relevant cantonal procedural provisions under Article 64, paragraph 2 of the ECHR . The Government refers here to the judgment of the Federal Court in the public law appeal brought by the applicant, which stated that "a Federal State cannot be required to provide a detailed list of all its sources of cantonal and, where appropriate, municipal law" . Finally, and taking account of the fact that the Federal Council's report of 1968 and the messages of 1972 and 1974 refer by way of example to certain cantonal procedural provisions, the Swiss Government considers that the object and purpose, if not the letter, of Article 64, paragraph 2 of the ECHR have been complied with and that Switzerland's interpretative declaration is in this respect in accordance with the Convention .
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B . The applicant The applicant notes that both the decision of the Criminal court of S June 1979 and the judgments of the Criminal Court of Cassation of 10 October 1979 and of the Federal Court of 30 April 1980 violated Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention . Indeed, the European Court of Human Rights in its judgment of 23 November 1978 in the case of Luedicke, Belkacem and Koc held very specifically that this provision of the Convention guaranteed to everybody appearing before a court a "once and for all . . . exoneration" from payment of interpretation costs . Admittedly, Switzerland had noted in the "reservations and declarations" that the Federal Council declared it was interpreting Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention as not permanently absolving the beneficiary from the interpretation costs . However, the applicant considers that this interpretative declaration cannot be regarded as a reservation within the very specific meaning of Article 64 of the Convention ; it is without effect and the findings of the Court in the case of Luedicke, Belkacem and Koc are binding on Switzerland . Switzerland's interpretative declaration is not a valid reservation insofar as il does not expressly refer to a law in force in accordance with Article 64, paragraph 2 of the Convention . "The declaration produces no effect and in no respect lessens Switzerland's obligations under Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention" . Citing some of the legal theory on this point, the applicant argues that since the case of Luedicke, Belkacem and Koc, the Federal Council has been in opposition to the Strasbourg organs and that, in practice, it is no longer possible for a court to order a convicted person to bear translation or interpretation costs made necessary by his lack of knowledge of the language used in the proceedings . As the Federal Court has itself admitted, in a legal opinion of 8 June 1979, "it is certain that the privileged place of the European Court of Human Rights in the system of collective supervision established by the Convention confers on ils judgments an authority going well beyond the particular case in queslion" . The applicant is simply contending that in the absence of a formal reservation within the meaning of Article 64 of the Convention and where a mere interpretative declaration has been made, a person involved in proceedings in Switzerland is entitled to rely on the Luedicke decision after 28 November 1978 . He notes further that the Federal Court has also conceded that "th eadptionfurlwheCvntioacrdewhtinpao thereof by the Strasbourg organs is unavoidable" (Message in 1977 in support of an emergency draft federal decree amending the Military Criminal Code) . The Government cannot, he maintains, rely on the Federal Court's caselaw in support of ils submissions ; The judgment deliveredby the latter in th e
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applicant's case is itself inconsistent with the general principles established by its recent case-law . Indeed, in a judgment of 4 April 1979, the Federal Court recalled that in interpreting constitutional guarantees, it was obliged to take the corresponding provisions of the Convention into account, "including the developments brought about by the decisions of the judicial organs established by the Convention" . Finally, the applicant challenges the liberal interpretation of Article 64 of the Convention put forward by the Government . There is surely something devious in isolating this provision from the rest of the Convention . The latter is a very formalist instrument as the case-law of the Commission and the Court amply bears out . It would not be reasonable, despite the intrinsic differences of the provisions of the Convention, to rely on the one hand on the very technical nature of Articles 5 and 6 while maintaining on the other hand that Article 64 is a purely procedural provision . THE LA W 1. The applicant complains of having been ordered by the Swiss judicial authorities to pay part of the interpretation costs in the criminal proceedings against him before the Criminal Court of Val-de-Travers, an interpreter having been necessary because he did not know the language used in court . He alleges accordingly a violation of Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention and refers in this respect to the interpretation of this provision by the European Court of Human Rights in the case of Luedicke, Belkacem and Koc Qudgment of 28 November 1978) . Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention reads as follows : "Everyone charged with a criminal offence has the following minimum rights : ( . . . ) e) to have the free assistance of an interpreter if he cannot understand or speak the language used in court" . The Court decided in the above-mentioned case that the right protected by this provision "entails, for anyone who cannot speak or understand the language used in court . the right to receive the free assistance of an interpreter, without subsequently having claimed back from him payment of the costs thereby incuffed" (above-mentioned judgment, para . 46) . The Commission finds firstly, that the applicant was in fact ordered on 25 June 1979 by the Criminal Court of Val-de-Travers (canton of Neuchâtel) to pay 500 Swiss francs as part of the court costs, which included part of the interpretation costs . The appeals he brought to set aside this order were disallowed by the competent judicial authorities . However, the respondent Government-which moreover acknowledges that the applicant has complied with the requirement of exhaustion of domesti c
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remedies-argues that its obligations under Article 6, paragraph 3 (e) are not as wide as was detined by the European Court of Human Rights in the abovementioned judgment . It points out that when ratifying the Convention, it drew up an interpretative declaration on Article 6, paragraph 3 (e) as follows : "The Swiss Federal Council declares that it interprets the guarantee o frelgasitncdhefrasitnco erp,iAtcl6 paragraph 3 (c) and (e) of the Convention, as not permanently absolving the beneticiary from payment of the resulting costs" . This interpretative declaration must be regarded as a resérvation within the meaning of Article 64 of the Convention "in view of the intention of the legislature and the position adopted by the Government before the parliamentary debates" . The applicant considers that this declaration cannot be assimilated to a"reservation" within the meaning of the above-mentioned provision, in particular because it did not comply with the formal requirement laid down in paragraph 2 . Article 64 of the Convention reads as Iollows : "I . Any State may, when signing this Convention or when depositing its instrument of' ratification, make a reservation in respect of any particular provision of the Convention to the extent that any law then in force in its territory is not in conformity with the provision . Reservations of a gcneral character shall not be permitted under this a rt icle .
2 . Any reservation made under this a rt icle shall contain a brief statement ofthelaw concerned" . The Commission is thus required to decide, in the light of Article 64 of the Convention, the nature of the interpretative declaration made by the Swiss Government, and subsequently the scope of the obligations actually undertaken by Switzerland under Article 6, paragraph 3 (e) of the Convention . Only after a consideration of Ihese problems will the Commission be able to rule on the applicant's complaint concerning the alleged violation of Article 6, paragraph 3 (e) by the Swiss authorities . After a preliminary examination of the facts and submissions of the parties, the Commission considers that at this stage, it cannot declare the application manifest]y ilblbunded within the meaning of Article 27, paragraph 2 of the Convention, in view of the complexity of the problems of interpretation to be resolvcd . As no other ground of inadmissibility has been Iound to exist, the application ntust be declared admissible . Fur these reasons, the Commission . DECLARES THE APPLICATION ADMISSIBLE, without prejudice to the nterits,
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