APPLICATION/REQUETE N° 9777/8 2 T . v/BELGiU M T . c/BELGIQU E DECISION of 14 July 1983 on the admissibility of the application DECISION du 14 juillet 1983 sur la recevabilité de la requ8t e
Article 6, paragraph 1 of the Convention : The right of access to cou rt does not include a right to have criminal proceedings instituted against third persons.
Article 10 of the Convention : A criminal conviction for publishing a pamphlet, and the confiscation of copies thereof, constitutes an interference with the exercise of freedom of expression . Pamphlet published on behalf of someone prohibited from making political publications, and which pamphlet tended to justify Nazi atrocities . Criminal conviction and confiscation of the pamphlet deemed necessary in a democratic socie ty for the prevention of disorder and for the maintenance of the authority of the judiciary (Examination of the proportionality of the measures taken with their aim) . Article 25 of the Convention : The Commission cannot examine, in abstracto, the compatibility of a national law with the Convention, but only the application of that law to the applicant .
Article 6, paragraphe 1, de la Convention : Le droit d'accès à un tribunal ne s'étend pas au droit de provoquer l'ouverture de poursuites pénales contre des tiers.
Article 10 de la Convention : Une condamnation pénale pour avoir publié une brochure et la saisie des exemplaires de cette brochure est une ingérence dans l'exercice du droit à la liberté d'expression compte d'une personne interdite de publication en .Brochuepblié matière politique, et tendant à justifier certaines atrocités nazies . Condamnation pénale et saisie de la brochure jugées nécessaires, dans une société démocratique, à la défense de l'ordre et pour garantir l'autorité du pouvoir judiciaire (Examen de la proportionnalité des mesures prises au but visé) .
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Article 25 de la Convention : La Commission ne peut examiner in abstracto la cornpatibilité d'une loi nationale avec la Convention mais seulement l'application de cette loi au requérant .
EN FAIT
( English : see p . 166)
Les faits de la cause, tels qu'ils ont été présentés par la requérante, peuvent se résumer comme suit : La requérante, ressortissante belge, actuellement pensionnée, née en 1923, est domiciliée à Bruxelles . Au moment des faits, elle était ⢠auteur-éditeur responsable . aux Editions Europe Réelle . Elle est représentée devant la Commission par Maitre Guy Delfosse, avocat au Barreau de Bruxelles . Comme préliminaire, il y a lieu de relever que par jugement prononcé par le conseil de Guerre de Bruxelles le 27 décembre 1944, Léon Degrelle, ancien chef du Rexisme belge, condamné pour intelligence avec l'ennemi, fut frappé à perpétuité de la déchéance des droits énumérés à l'article 123 sexies du Code pénal . Cette disposition, dans son texte initial introduit par l'arrêté-loi du 6 mai 1944, permettait notamment de prononcer à l'encontre des personnes condamnées pour atteinte à la sGreté extérieure de l'Etat en temps de guerre la déchéance à perpétuité du ⢠droit de participer à quelque titre que ce soit à l'exploitation, à l'administration, à la rédaction, à l'impression ou à la diffusion d'un journal ou de toute publication ⢠. Cette disposition fut toutefois modifiée par la loi du 30 juin 1961 relative à l'épuration civique, adoptée par le Parlement belge à la suite de la requête (N° 214/56) introduite par Raymond De Becker devant la Commission et portée par celle-ci devant la Cour européenne des Droits de l'Homme . Depuis lors, l'article 123 sexies, 6°, prévoit la déchéance à perpétuité ⢠du droit de participer à quelque titre que ce soit à l'exploitation, à l'administration, à la rédaction, à l'impression ou à la diffusion d'un journal ou de toute autre publication dans le cas où cette participation a un caractère politique» . En 1978, la requérante accepta de prêter son nom et de figurer en qualité d' .auteur-éditeur responsable⢠d'une publication d'un texte d0 à L . Degrelle et présenté comme tel, intitulé â¢Lettre au Pape à propos d'Auschwitz⢠. Cet écrit, qui a été distribué aux abonnés des éditions pour lesquelles la requérante travaillait, contient un commentaire remettant en cause la réalité de l'extermination de six millions de juifs, notamment à Auschwitz et relativisant les atrocités nazies par rapport à d'autres atrocités guerrières .
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Suite à ces faits et sur plainte d'organisations de défense des survivants et proches des victimes du régime nazi, la requérante fut citée devant le tribunal correctionnel pour avoir, en dépit de l'interdiction résultant de l'article 123 sexies, fait usage, en qualité de co-auteur, de l'un des droits dont L. Degrelle était déchu, à savoir celui stipulé au paragraphe 6° reproduit ci-dessus . Le directeur des Editions Europe Réelle fut poursuivi des mêmes faits. Le 8 janvier 1981, le tribunal correctionnel considéra que la prévention était établie et condamna de ce chef la requérante à un an d'emprisonnement et à 10 000 francs d'amende (amende portée à 400 000 francs par application de la loi sur les décimes additionnels) . Le directeur des dites Editions fut condamné à quinze mois d'emprisonnement et à une amende identique à celle imposée à la requérante . Le tribunal prononça également la confiscation des exemplaires saisis . La requérante interjeta appel et, dans ses conclusions, contesta le caractère politique de sa participation à la publication incriminée . Subsidiairement, e0e invoqua l'incompatibilité de l'article 123 sexies nouveau avec la Conven. tion européenne des Droits de l'Homme . Dans son arrêt du 24 juin 1981, la cour d'appel de Bruxelles estima que la participation de la requérante à la publication incriminée avait un caractère essentiellement politique aux motifs que â¢la lecture du pamphlet litigieux démontre que son auteur désire se servir de la personnalité du Pape pour essayer de convaincre l'opinion de ce que le régime nazi, auquel il a voué sa vie, a été calomnié lorsqû il a été accusé d'avoir assassiné des millions d'individus pour la raison unique de leur race ; que ce faisant cet auteur,qui voit dans la justification de ce régime sa propre justification pour les crimes politiques pour lesquels il fut condamné et déchu et pour tout son comportement politique, poursuit évidemment un but essentiellement politique ; que (la prévenue) en éditant cette brochure et en en assurant la diffusion (a) participé à cette o.uvre politique . . . . . En conséquence, la cour d'appel confirma intégralement le jugement attaqué sauf en ce qui conceme la peine d'emprisonnement prononcée à charge du directeur des Editions qui fut portée à deux ans . La requérante se pourvut en cassation et à l'appui de son pourvoi allégua que la cour d'appel n'avait pas légalement justifié l'application de l'article 123 sexies, 6°, en ce qui concernait le caractère politique de la participation visée par cette disposition . Elle allégua également que le caractère perpétuel de la déchéance du droit stipulé è l'article 123 sexies, 6°, était contraire à l'article 10 de la Convention . Statuant sur ces moyens, la Cour de cassation, dans son arrêt du 21 octobre 1981, considéra que l'arrêt avait légalement justifié l'application de l'article 123 sexies, 6°, et estima que les limitations à la liberté d'expressio n
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prévues par la loi du 30 juin 1961 ne dépassaient pas celles autorisées par l'article 10, paragraphe 2, de la Convention . Elle précisa .que, d'une part, cette loi ne (limitait) la liberté d'expression qu'en ce qui concerne le domaine politique, mesure nécessaire dans une société démocratique, notamment à la protection de la morale et des droits d'autrui, ainsi qu'à la défense de l'ordre, dans les cas de condamnation indiqués dans l'article 123 sexies du Code pénal ; d'autre part, elle (permettait), à certaines conditions, la restitution des droits dont le condamné avait été déchu» .
GRIEF S 1 . La requérante se plaint principalement de l'incompatibilité de l'article 123 sexies, 6°, du Code pénal belge avec l'article 10 de la Convention . Subsidiairement, à supposer que la disposition litigieuse soit in abstracto conforme à la Convention, elle se plaint de l'application qui lui a été faite du susdit article 123 sexies . Elle soutient que les juridictions belges ont donné une interprétation abusivement extensive à la notion de .participation à caractère politique+ introduite par la loi du 30 juin 1961 . 2 . Elle se plaint également que sa cause n'a pas été entendue équitablement, au sens de l'article 6 de la Convention, vu l'absence de poursuites et de l'absence au procès de Léon Degrelle, auteur principal du délit .
EN DROI T I . La requérante se plaint p ri ncipalement de l'incompatibilité in abstracto de l'article 123 sexies, 6°, du Code pénal belge avec l'article 10 de la Convention et, subsidiairement, de l'application qui lui a é té faite de la disposition critiquée . L'article 10 est ainsi libellé : . 1 . Toute personne a droit à la liberté d'expression . Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées, sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontières . Le présent article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisation . 2 . L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions, prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire . . - 161 -
a . La Commission examine tout d'abord le grief de la requérante selon lequel l'article 123 sexies, 6°, du Code pénal est in abstracto contraire à l'article 10 de la Convention . L'article 123 sexies, 6°, tel qu'il a été modifié par la loi du 30 juin 1961 relative à l'épuration civique prévoit la déchéance à perpétuité « du droit de participer à quelque titre que ce soit à l'exploitation, à l'administration, à la rédaction, à l'impression ou à la diffusion d'un journal ou de toute publication dans le cas où cette participation a un caractère politique . . Toutefois, il résulte de l'article 25, paragraphe 1, de la Convention qu e la Commission ne peut recevoir une requête émanant d'un particulier, d'une organisation non gouvernementale ou d'un groupe de particuliers que si ceuxci se prétendent victimes d'une violation, par une Haute Partie Contractante, d'un des droits et libertés énoncés dans la Convention . A cet égard, la Commission rappelle sa jurisprudence constante selon laquelle elle n'est compétente que pour examiner la compatibilité d'une loi nationale avec la Convention que dans l'application à un cas concret, mais qu'elle ne l'est pas pour examiner in abstracto la compatibilité de cette loi avec la Convention (voir notamment Requête N° 7045/75, D .R . 7, p . 87-89) . Il s'ensuit que le grief, sous cet aspect, doit être rejeté pour incompatibilité ratione personae avec les dispositions de la Convention conformément à l'article 27, paragraphe 2, de la Convention . b . Par ailleurs, la requérante se plaint de l'application qui lui a été faite de l'article 123 sexies, 6°, du Code pénal et plus particulièrement du fait que les juridictions belges ont donné une interprétation abusivement extensive à l'expression .participation à caractère politique . . La question se pose de savoir s'il y a eu ingérence dans l'exercice du droit à la liberté d'expression de la requérante et, dans l'affirmative, si cette ingérence trouve sa justification dans le paragraphe 2 de l'article 10 de la Convention . La Commission considère sans difficulté que la condamnation pénale infligée à la requérante et la confiscation des brochures constituent des ingérences d'autorités publiques dans l'exercice de la liberté d'expression de l'intéressée . - Ele doit maintenant rechercher si cet e ingérence se concile avec le pa-
ragraphe 2 de l'article 10 . A cet égard, adoptant la démarche de la Coureuropéenne dans de s affaires similaires (voir notamment, nmtatis matandis, l'arrêt Dudgeon, 2 octobre 1981, paragraphe 43), la Commission cherchera à établir si l'ingérence était . prévue par la loi+, inspirée par un ou des buts légitimes d'après le paragraphe 2 et . nécessaire dans une société démocratique . à la poursuite de ces buts . .
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La Commission considère que l'ingérence est assurément prévue par la loi . En effet, elle découle de l'article 123 nonies qui stipule que . . . . celui qui, en dépit de la déchéance résultant de l'application de l'article 123 sexies fait, soit directement, soit par interposition de personne, usage de l'un des droits énumérés à cet article, est puni d'un emp ri sonnement d'un an à trois ans et d'une amende de 10 000 à 100 000 francs . . En second lieu, pour ce qui est de l'objectif de la législation mise en cause, la Commission rappelle que la Cour de cassation, dans son arrêt du 21 octobre 1981, a estimé que l'ingérence litigieuse était nécessaire notamment à la protection de la morale et des droits d'autrui ainsi qu'à la défense de l'ordre . La Commission souligne que la requérante n'a pas été poursuivie et condamnée pour avoir, comme coauteur, participé à la publication d'un écrit exprimant une pensée délictueuse, mais, pour avoir, en qualité de coauteur, participé à la publication d'un écrit en dépit de la déchéance frappant L . Degrelle, auteur de l'écrit litigieux . En d'autres terrnes, la requérante a été condamnée en raison de la personnalité de L . Degrelle qui, suite à sa condamnation pour incivisme a été frappé, le 27 décembre 1944, de la déchéance à perpétuité des droits énumérés à l'article 123 sexies du Code pénal belge . La Commission remarque que la législation belge incriminée perdrait toute portée si les juridictions belges n'avaient pas eu la possibilité de poursuivre et condamner la requérante qui, en éditant l'écrit, a apporté à la commission du délit une aide telle qu'il n'aurait pu être commis sans son existence . La Commission rappelle que, dans l'affaire De Becker, suite à la modification législative du 30 juin 1961, elle a soumis à la Cour européenne des Droits de l'Homme un mémoire dans lequel elle demandait à la Cour de constater que les limitations maintenues par la loi du 30 juin 1 961 dans le domaine de la libe rté d'expression ne dépassaient pas le cadre des rest ri ctions aux sanctions auto ri sées par l'article 10, paragraphe 2, de la Convention . Elle reconnaissait toutefois que la distinction entre participation de caractère politique et non politique, introduite par la loi précitée, pouvait faire surgir ce rt ains problèmes d'interprétation . A ses yeux, il incombait aux tribunaux belges de préciser le sens et la portée du concept en question . Au demeurant, ajoutait-elle, ceux qui se prétendraient victimes d'une extension abusive, par la ju risprudence belge, du concept de par ti cipation .politique » auraient, après épuisement des voies de recours internes, toute latitude pour s'adresser à la Commission ( Requête N° 2144/56, Publ . Cour eur . D .H ., sé rie B, Vol . 2, 1962, pp . 273, 274) . En l'espèce, les juridictions belges ont estimé que l'auteur de l'écrit litigieux, L . Degrelle, poursuivait un but politique au motif que, désirant se se rvir de la personnalité du pape, il essayait, en minimisant et justifiant le s - 163 -
atrocités n az ies, de convaincre l'opinion de ce que le régime nazi avait été calomnié du fait de sa condamnation pour des crimes politiques . Les juridictions belges en ont déduit que la participation de la requérante à ce tt e o°uvre poli ti que avait é galement ce caractère . Pour cette raison, la Commission es time que la re st ri c tion dans l'exercice du droit à la libe rt é d'expression de la requérante était nécessaire à la défense de l'ordre, qui implique notamment que toute infraction à une disposition légale soit réprimée, ainsi que pour garantir l'autori té du pouvoir judiciaire .
Enfin, l'a rticle 10 . paragraphe 2, de la Convention, exige que l'ingérence soit nécessaire dans une société démocra ti que . D'après la ju ri sprudence de la Cour, pour se révéler .nécessaire » dans une telle société, dont tolérance et esp ri t d'ouverture constituent deux des caracté ri stiques, une atteinte à un droit protégé par la Convention doit notamment ê tre propo rtionnée au but légitime poursuivi (arrêt Dudgeon précité, paragraphe 53 et références) . D'une pa rt, la Commission relève que l'ingére nce dont se plaint la re quérante est doublement limitée, puisqu'elle ne touche que les é c ri ts de personnes condamnées pour a tt einte à la sûreté exté rieure de l'Etat en temps de guerre et, parmi ces écrits, exclusivement ceux qui ont un caractère poli ti que . Nonobstant le fait que la dis tinction opérée par l'a rticle 123 sexies du Code pénal entre pa rticipation à caractère politique et non politique ne figure pas dans le texte de l'a rt icle 10 de la Conven ti on, la Commission est amenée, dans l'appréciation du caractère nécessaire de la rest riction en cause, à examiner si les limites de la déchéance frappant L. Degrelle n'ont pas été dépassées . En d'autres termes, la question se pose de savoir si les ju ridicitons belges, en interprétant d'une manière prétend û ment abusive le terme .politique ., n'ont pas imposé à la requérante une re st riction disproportionnée aux buts recherchés . La Commission ne voit pas de raison de s'éca rter de l'opinion des ju ridicti ons belges. En outre, elle estime que c'est en vain qu'on objecterait que les atrocités d'Auschwitz appa rt iennent désormais au seul domaine des sciences histori ques et que leurs surv ivants sont peu nomb re ux car les familles de ces surv ivants con ti nuent à avoir droit à une protection de la mémoire de leurs parents . Plus généralement, elle obse rve que des événements actuels mont rent que les idéologies anti-démocratiques voisines de celles qui ont inspiré ces atrocités n'ont pas disparu en Europe . D'autre pa rt, sans son arrêt Handyside, du 7 décemb re 1976, la Cour européenne des Droits de l'Homme a p ri s soin de préciser que si la liberté d'expression vaut aussi pour les informations ou les idées qui heu rtent, choquent ou inquiètent l'Etat ou une frac ti on quelconque de la population, c'est sous réserve du paragraphe 2 de l'article 10 (arrét cité, paragraphe 49) . L a -164-
Commission estime dès lo rs qu'en présence d'une publication qui, par son contenu pa rticuGèrement odieux, est de nature à choquer une part ie importante de la population, les auto rités nationales peuvent à bon droit tenir pour insuffisante une mesure d'interdiction même accompagnée de la confiscation des écrits ( confiscation dont la requérante ne se plaint pas en l'espèce) si des poursuites et une condamnation pénales ne viennent pas sanctionner les infractions à cette interdiction . Compte tenu des considérations précédentes, la Commission estime que la mesure qui a frappé la re quérante n'était pas disproportionnée au but re cherché . Il s'ensuit que le grief, sous le second aspect, doit étre rejeté comme manifestement mal fondé au sens de l'art icle 27, paragraphe 2, de la Convention . 2 . La requérante se plaint que sa cause n'a pas été entendue équitablement, au sens de l'a rticle 6 de la Convention, vu l'absence de pou rs uites et de présence au procès de L . Degrelle, auteur pri ncipal du délit . Elle invoque l'art icle 6, paragraphe 1, de la Convention . L'article 6, paragraphe l, de la Convention garantit à toute personne le droit à ce que sa cause soit entendue é quitablement par un tribunal qui décidera du bien-fondé de toute accusation en matière pénale . En ce qui concerne l'absence de poursuites contre L . Degreile, la Commission rappelle sa jurisprudence constante selon laquelle le droit d'accès à un tribunal, contenu dans l'a rticle 6, paragraphe 1, ne s'étend pas au droit de provoquer contre un tiers l'exercice de poursuites pénates (Voir Requête N° 7116/75, D .R . N° 7, pp . 91, 94) . Il s'ensuit que cette pa rt ie du grief est incompatible avec les dispositions de la Conven tion, au sens de l'art icle 27, paragraphe 2. Pour le surplus, la Commission constate que la requérante n'a pas soulevé ce grief devant les ju ri dictions internes saisies, de so rt e qu'elle n'a pas satisfait à la condition de l'épuisement des voies de recours inte rnes posées à l'article 26 de la Convention . La requête doit être rejetée sur ce point, quoi qu'il en soit, conformément à l'article 27, paragraphe 3, de la Convention . Pour ces motifs, la Commissio n
DECLARE LA REQUÃTE IRRECEVABLE .
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(TRANSLATION)
THE FACT S The facts, as presented by the applicant, may be summa ri sed as follow s The applicant, a Belgian national, at present in receipt of a pension, was born in 1923 and is domiciled in Brussels . When the events in question occurred, she had a senior editorial post ("auteur-éditeur responsable") with the publishing house Europe Réelle . She is represented before the Commission by Mr Guy Delfosse . a lawyer practising in Brussels .
A preliminary point to be noted is that Léon Degrelle, former head of the Belgian "Rexisme" movement, had been sentended on 27 December 1944 by the Brussels Conseil de guerre to life forfeiture of the rights listed in Article 123 (1) sexies, of the Penal Code, for collusion with the enemy . The original text of this provision was introduced by a legislative decree of 6 Mav 1944, and it made it possible to pass sentence on persons found guilty of activities dantaging to the external security of the State in time of war depriving them for life of the "right to have a proprietary interest or to take part, in any capacity whatsoever, in the administration, editing, printing or distribution of a newspaper or any other publication" . The above provision was amended, however, by the Civic Screening Law of 30 June 1961 (loi relative à l'épuration civique), adopted by the Belgian Parliament, l'ollowing the application brought by Raymond De Becker before the Commission and referred by the Commission to the European Court of Human Rights (Application No . 214/56) . Under the terms of Article 123 (I) sexies 6°, duly amended, "the right to have a proprietary interest, or take part . in any capacity whatsoever, in the administration, editing, printing or distribution of a newspaper or any other publication, where such activities are oj a political character" may be lorf'eited for life . The applicant agreed in 1978 that her name was to appear, as "auteuréditeur responsable" in connection with a text by and published as the work of L . Degrelle, entitled "Letter to the Pope concerning Auschwitz ." The text was distributed to subscribers to the publications for which she worked, and contained a comntentary which cast doubt on the reality of the extermination of six million Jews, particularly at Auschwitz, and putting the Nazi atrocities into relative terms vis-à -vis other warlime atrocities . Subsequently, and following the lodging of a complaint by organisations defending the iuterests of survivors and relatives of victims of the Nazi regime, the applicant was suntmoned to appear before a summary court for availing herself, as co-author, notwithstanding the prohibition laid down in Article 123 (1) sexies, ot' one of the rights fortèited by L . Degrelle namely that indicated in Article 123 (1) sexies 6° reproduced above . The same charge was brought against the director of the Europe Réelle publishing house .
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On 8 Jauuary 1981 the summary court found the charge proved and sentenced the applicant to one year's imprisonment and a fine of 10,000 francs (the liue was raised to 400,000 francs by virtue of the legislation on additional tenths) . The director ot the publishing house was given a 14 months' prison sentence and ordered to pay a tine of the same amount as the applicant . The court also ordered that the copies seized should be contiscated . The applicant lodged an appeal, and in her submissions disputed the political character ot her participation in the publication at issue, maintaining as a subsidiary argument that Ihe amended Article 123 (I) sexies was incompatible with the Europeau Convention on Human Rights . In its decision of 24 June 1981, the Brussels Court of Appeal found that the applicant's participation in the publication in question was essentially of a political character, on the grounds that "it was clear to anyone reading the pamphlet that Ihe author wished to make use ot'the personality of the Pope in an attempt to persuade the public that the Nazi regime, of which he was a lifelong devotee, had beeu calumnied in being accused of murdering millions of iudividuals solely on account of their race ; that in so doing the author, who saw in the justification of the regime his own justilication for the political crimes of which he had been convicted and for which he had been deprived of his rights, and for his whole political line of conduct, was clearly pursuing an essentially political goal ; that in publishing the pamphlet and arranging for it to be distributed (the accused had) taken part in [his political exercise . . ." The Appeal Court consequently contirmed in full the verdict in question, with the exception of the prisou sentence passed on the director of the publishing house, which was increased to two years .
The applicant appealed to the Court of Cassation and maintained, in support ot her appeal . that the Appeal Court had not legally justitied the application of Article 123 (I) sexies 6° in relation to the political character of the participation envisaged by this provision . She also maintained that to be deprived for lite ot' the right iudicated in Article 123 (I) sexies 6° was contrary to Article 10 of the Convenlion . In its judgntent of 21 October 1981, the Court of Cassation found that the decision iu questiou had legally justitied the application of Article 123 (1) sexies 6° and considered that the restrictions on freedom of expression laid down in the Law of 30 lune 1961 did not ge beyond those authorised by Article 10, paragraph 2, ot the Convention . In particular it held that "the Law only (restricted) l'reedom ot expression in the political lield, a measure which is necessary in a democratic society especially for the protection of morals and rights of others, and for the prevention of disorder, in those cases of conviction listed in Article 123 (I) sexies of the Penal Code ; moreover, under certain conditions, it (permitted) the restitution of the rights of which the convicted person had beeu deprived ."
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COMPLAINTS 1 . The applicaut's principal complaint is that Article 123 (1) sexies 6°, of the Belgian Penal Code is incompatible with Article 10 of the Convention . Alternatively, even assuming that the provision at issue is, in abstracto, in conformity with the Convention, she complains of the way in which that Article 123 (1) sexies has been applied to her . She maintains that the Belgian courts have given au improperly extensive interpretation of the concept of "participation of a political character" introduced by the Law of 30 June 1961 . 2 . She also contplains that she was not given a fair hearing, within the meaning ot'Article 6 of the Convention, given the absence of proceedings against, and the absence from the trial of Léon Degrelle, the principal author of the ot'fence .
THE LA W 1 . The applicant's principal complaint is of the incompatibility, in abstracto, ot Article 123 (I) sexies 6° of the Belgian Penal Code with Article 10 of the Couvention, her subsidiary complaint being the way in which the provision in question has been applied to her . Article 10 reads as follows : "I . Everyone has the right to freedom of expression . This right shall include freedom to hold opinions and to receive and impart information and ideas without interference by public authority and regardless of frontiers . This article shall not prevent States from requiring the licensing of broadcasting, televisiou or cinema enterprises . 2 . The exercise of these freedoms, since it carries with it duties and responsibilities, may be subject to such formalities, conditions, restrictions or penalties as are prescribed by law and are necessary in a democratic society, in the interests of national security, territorial integrity or public safety, for the prevention of disorder or crime, for the protection of health or morals, for the protection of the reputation or rights of others, for preventing the disclosure of information received in confidence, or for maintaining the authority and impartiality of the juduciary . " a . The Commission considered the applicant's claim that Article 123 (1) sexies 6° of the Penal Code is, in abstracto, contrary to Article 10 of the Convention . Under the terms of Article 123 (1) sexies 6° as amended by the Law of 30 June 1981 on Civic Screening, "the right to have a proprietary interest or to take part in any capacitv whatsoever in the administration, editing, printing or distribution of a newspaper or any other publication, where such participation is of a political character" may be forfeited for life .
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Under the terms ot Article 25, paragraph I . of the Convention, however, the Commission can only receive an application from an individual, a nongovernmental organisation or a group of individuals claiming to be victims of a violation by a High Contracting Party of one of the rights and freedoms listed in the Convention . In this connection the Commission recalls its constant case-law, that it is only contpeteut to examine the compatibility of national legislation with the Conventiou in respect of its application to a specific case . It is not competent to examine, in abstracto, the compatibility of that legislation with the Convention (see, iateratia, Application No . 7045/75, D .R . 7, pp . 87-89) . It tollows that this aspect of her complaint must be rejected as being incompatible rarioue personae with the provisions of the Convention, in accordance with Article 27, paragraph 2 . of the Convention . b . The applicant also complains about the way in which Article 123 (1) sexies 6° ot'the Penal Code has been applied to her, and more particularly about the fact that the Belgian courts have given an improperly extensive interpretation of the expression "participation of a political nature" . The question arises whether there has been an interference in the exercise ot the applicant's freedom of expression and, if so, whether it is justified under Article 10, paragraph 2, of the Convention . The Commission tinds that the applicant's conviction and the confiscation of the pamphlets was a clear interference by the public authorities with the exercise of the applicant's freedom of expression . It must now⢠consider whether such interference can be reconciled with Article 10, paragraph 2 . Following the approach of the European Court in similar cases (see notably, muratis uturandis, the Dudgeon Case, judgment of I October 1981, par . 43), the Commission will here seek to establish whether such interference was "in accordance with the law", had an aim or aims that was or were legitimate under paragraph 2 and "necessary in a democratic societe" for the aforesaid aim or aims . The Commission is of the opinion that the interference is certainly in accordance with the law since Article 123 (1) nonies states that "anyone exercising one of the rights listed in this article, despite the forfeiture resulting from the application of Article 123 (I) sexies, either directly or through somebody else, shall be liable to a sentence of between one and three years' imprisonment and a fine of between 10,000 and 100,000 francs . " Secondly, as regards the aim of the legislation in question, the Commission notes that in its judgment of 21 October 1981 the Court of Cassation found that the interterence at issue was necessary, especially for the protection of morals and the rights of others and the prevention of disorder .
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The Commission emphasises that the applicant was not prosecuted and convicted for taking part, as co-author, in the publication of a work expressing a line of thought that constituted an offence, but for taking part, as co-author, in the publication of a work despite the fact that its author, L . Degrelle, was deprived of his right to public . In other words, the applicant was convicted because ot'the personality of L . Degrelle, who on 27 December 1947 had been deprived for life, following his conviction for incivism, of the rights listed in Article 123 (1) sexies of the Belgian Penal Code . The Commission observes that the Belgian legislation in question would become meauingless if the Belgian courts had been unable to prosecute and convict the applicant who, by publishing the pamphlet, aided the commission of the ottence, which otherwise could not have occurred .
The Commission recalls that it submitted a memorial to the European Court of Human Rights in the De Becker case, further to the legislative amendmeut of 30 June 1961, calling on the Court to rule that the limitations maintained by the Law of 30 June 1961 as regards freedom of expression did not go beyond the restrictions or sanctions authorised in Article 10, paragraph 2, of the Conveution . It recognised however that the distinction between political and non-political participation drawn in the Law in question might raise problems o fiuterpao . In the view of the Commission it was up to the Belgian courts t o detiue the nieaning and scope of the concept in question . It added that persons claiming to be victints of an abusive application by the Belgian courts of the concept ot "political" participation could, after exhausting all domestic remedies, have every right to apply to the Commission (Application No . 214/56, Publications of the European Court of Human Rights . Series B, Volume 2, 1962, pp . 273-274) . The Belgian courts found in the present case that the author of the work in question, L . Degrelle, was pursuing a political aim on the ground that, wishing to use the personality of the Pope . by minimising and justifying Nazi atrocities he sought to couvince the general public that the Nazi regime had been calumnied through his conviction for political crimes . The Belgian courts inferred from this that the applicant's participation in the political work in question was of a similar character . For this reason, the Contmission considers that the restriction on the exercise of the applicant's freedoni o(expression was necessa ry for the prevention ot' disorder (which nteans, inter alia, that any infringement of a legal provision shall be punished) as well as for the maintenance of the authority of the judicia ry . Lastly, Article 10, paragraph 2 . of the Convention requires that the intertérence be uecessa ry in a democratic society . According to the Cou rt 's caselaw, a restriction ou a Convention right cannot be regarded as "necessa ry in a democratic society", two hallmarks of which are tolerance and broadmindedness, uuless amout other things, it is propo rt ionate to the legitimate aim pursued (atorementioned Dudgeon judgment, para . 52 and references) . - 170 -
On the one hand, the Commission notes that the interf'erence complained ot bv the applicaut is lintited by two points since it only affects the writings of persous convicted for endangering the external security of the State in wartime, aud, of those writings, only those which are political in character . Notwithstandiug the absence from the text of Article 10 of the Convention of the distinction in Article 123 (I) sexies of the Penal Code between participation ot a political character and participation of' a non-political character, the Commission, in assessiug the necessity of the restriction in question, has to consider whether the limits of the forfeiture applied to L . Degrelle have not been exceeded . In other words, the question arises whether the Belgian courts intlicted on the applicaut a restriction which was disproportionale to the aims pursued . by interpreting the term "political" in an allegedly abusive manner . The Contmissiou sees no reason for ditfering from the opinion of the Belgian courts . It also rejects the contention that the Auschwitz atrocities are a ntatter of ntere historical interesl and that there are few survivors, because the fantilies ol' those survivors continue to be entitled to the protection of their relatives' memorv . In more general terms, it observes that present events demoustrate that anti-democratic ideologies, resembling those which inspired such atrocities, have uot disappeared from Europe . Ou the other hand, in its judgment in the Handyside case of 7 December 1976, the European Court ot Human Rights was careful to point out that while freedoni otexpression is applicable to inforniation and ideas which offend, shock or disturb Ihe State or any sector ot'the population, it is subject to paragraph 2 of Article 10 (para . 49 of'thejudgment in question) . The Comntission is accordingly of the opinion that in the case of' a publication which is likely to offend a cousiderable section of the population because of its particularly odious contents, the nalional authorities may rightly conclude that an interdiction, even accompanied by couliscatiou ol'publicalions (although the applicant does not complain of such conliscation in the present case), is inadequate if violations of that iulerdiction are not sanctioned by criminal proceedings and conviction .
In Ihe light ot'the above considerations, the Contntission considers that the nteasure applied to the applicant was not out of proportion to the aim pursued . It follows that Ihe second aspect of this complaint is to be rejected as bein g ntauifestlv ill-fouuded . within the meaning of Article 27, paragraph 2 . of the Conveution . 2 . The applicant coniplains that the case did not receive a fair hearing, within the meaning of Article 6 ot the Convention, given the failure to prosecute L . Degrelle . the principal author of the offence, and his absence from the trial . She invokes Article 6 . paragraph I, of the Convention . Uuder Article 6, paragraph I, of the Convention everyone is entitled, in the deterntinatiou of any crintiual charge against him, to a fair hearing by a tribunal . - 171 -
As regards the failure to prosecute L . Degrelle, the Commission recalls its constant case-law, that the right of access to the cou rt s afforded by Article 6, paragraph 1, of the Convention does not include a ri ght to have c ri minal proceedings instituted against a third person (see Application No . 7116/75, D .R . 7, pp . 91 and 93) . It follows that this aspect of the complaint is incompatible raioae materiae with the provisions of the Convention, within the meaning of Article 27, paragraph 2 . Fu rt hermore, the Commission finds that the applicand did not raise this complaint before the domestic cou rt s to which the matter was referred, and has thereby failed to observe the exhaustion of domestic remedies requirement laid down in A rt icle 26 of the Convention . The application is, therefore, also to be rejected on this point under Art icle 27, paragraph 3, of the Convention . For these reasons, the Commissio n DECLARES THE APPLICATION INADMISSIBLE .
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