SUR LA RECEVABILITÉ de la requête N° 18167/95 présentée par Mario MONI contre l'Italie _____________ La Commission européenne des Droits de l'Homme (Première Chambre), siégeant en chambre du conseil le 26 février 1997 en présence de Mme J. LIDDY, Présidente MM. E. BUSUTTIL A. WEITZEL C.L. ROZAKIS L. LOUCAIDES B. MARXER B. CONFORTI N. BRATZA I. BÉKÉS G. RESS A. PERENIC C. BÎRSAN K. HERNDL M. VILA AMIGÓ Mme M. HION M. R. NICOLINI Mme M.F. BUQUICCHIO, Secrétaire de la Chambre ; Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ; Vu la requête introduite le 5 mai 1995 par Mario MONI contre l'Italie et enregistrée le 8 août 1995 sous le N° de dossier 28167/95 ; Vu les rapports prévus à l'article 47 du Règlement intérieur de la Commission ; Vu les observations présentées par le Gouvernement défendeur le 28 octobre 1996 et les observations en réponse présentées par le requérant le 18 décembre 1996 ; Après avoir délibéré, Rend la décision suivante :
EN FAIT Le requérant est un citoyen italien né en 1945 et résidant à Catane. Il est sous-officier des carabiniers. Devant la Commission, le requérant est représenté par Me Enzo Di Filpo, avocat à Palerme. Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit. Le 25 juin 1983 le parquet de Pise délivra une communication judiciaire contre le requérant dans le cadre d'une enquête ouverte pour extorsion, menaces, prise illégale d'intérêts, usure et incitation à la corruption. Le 9 juin 1984, le juge d'instruction de Pise se déclara incompétent au profit de son homologue de Lucques. Le 24 novembre 1984, le juge d'instruction de Lucques informa le requérant qu'une information avait été ouverte contre lui et l'invita à nommer un avocat de son choix. Le 14 juin 1988, ce même juge ordonna un non-lieu car le "fait n'existait pas". Le 7 juillet 1988 le procureur général près la cour d'appel de Florence attaqua cette décision. Le 14 février 1989, la section d'instruction de la cour d'appel de Florence ordonna le renvoi en jugement du requérant pour les seuls chefs de prise illégale d'intérêts, usure et d'incitation à la corruption. Le 29 novembre 1994, le tribunal de Lucques acquitta le requérant des chefs de prévention parce que "le fait n'existait pas". Le jugement devint définitif le 30 décembre 1994 avec l'expiration dont disposait le procureur général près la cour d'appel de Florence pour interjeter appel.
GRIEF Le requérant se plaint de la durée excessive de la procédure dont il a fait l'objet. Il allègue la violation de l'article 6 par. 1 de la Convention.
EN DROIT Le requérant se plaint, sous l'angle de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention, de la durée de la procédure pénale ouverte à son encontre. L'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention dispose notamment : "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle." La procédure litigieuse a débuté le 25 juin 1983, par la notification au requérant de la communication judiciaire, et s'est terminée le 30 décembre 1994, lorsque le jugement d'acquittement devint définitif. Selon le requérant, cette durée, qui dépasse les onze ans et six mois pour l'instruction et un degré de jugement, ne répond pas à l'exigence du "délai raisonnable" tel qu'énoncé à l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention. Le Gouvernement s'oppose à cette thèse. La Commission estime qu'à la lumière des critères dégagés par la jurisprudence des organes de la Convention en matière de "délai raisonnable" (complexité de l'affaire, comportement du requérant et des autorités compétentes), et compte tenu de l'ensemble des éléments en sa possession, ce grief doit faire l'objet d'un examen au fond. Par ces motifs, la Commission, à l'unanimité, DECLARE LA REQUETE RECEVABLE, tous moyens de fond réservés. M.F. BUQUICCHIO J. LIDDY Secrétaire Présidente de la Première Chambre de la Première Chambre