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22/01/2019 | CEDH | N°001-189413

CEDH | CEDH, AFFAIRE RIVERA VAZQUEZ ET CALLEJA DELSORDO c. SUISSE, 2019, 001-189413


TROISIÈME SECTION

AFFAIRE RIVERA VAZQUEZ ET CALLEJA DELSORDO c. SUISSE

(Requête no 65048/13)

ARRÊT

STRASBOURG

22 janvier 2019

DÉFINITIF

22/04/2019

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Rivera Vazquez et Calleja Delsordo c. Suisse,

La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :

Vincent A. De Gaetano, président,
Branko Lubarda,
Helen Kel

ler,
Pere Pastor Vilanova,
Alena Poláčková,
Georgios A. Serghides,
María Elósegui, juges,
et de Stephen Phillips, greffier de section,

...

TROISIÈME SECTION

AFFAIRE RIVERA VAZQUEZ ET CALLEJA DELSORDO c. SUISSE

(Requête no 65048/13)

ARRÊT

STRASBOURG

22 janvier 2019

DÉFINITIF

22/04/2019

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Rivera Vazquez et Calleja Delsordo c. Suisse,

La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :

Vincent A. De Gaetano, président,
Branko Lubarda,
Helen Keller,
Pere Pastor Vilanova,
Alena Poláčková,
Georgios A. Serghides,
María Elósegui, juges,
et de Stephen Phillips, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 18 décembre 2018,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 65048/13) dirigée contre la Confédération suisse et dont deux ressortissants mexicains, M. Sergio Rivera Vazquez et Mme Katherine Danise Calleja Delsordo (« les requérants »), ont saisi la Cour le 9 octobre 2013 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Les requérants ont été représentés par Me P. Bosshard, avocat exerçant à Genève. Le gouvernement suisse (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, M. F. Schürmann de l’Office fédéral de la justice.

3. Les requérants allèguent la violation du principe du contradictoire dans une procédure devant le Tribunal fédéral suisse. Ils allèguent également la violation de leur droit à être jugés par un tribunal « établi par la loi » ainsi qu’une violation de leur droit à un recours effectif.

4. Le 3 octobre 2016, le grief concernant la violation du principe du contradictoire a été communiqué au Gouvernement et la requête a été déclarée irrecevable pour le surplus conformément à l’article 54 § 3 du règlement de la Cour.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. Les requérants sont nés respectivement en 1961 et 1973 et résident à The Woodlands, Texas, États-Unis d’Amérique.

6. Les 18 avril 2008 et 24 juillet 2009, les requérants conclurent des contrats de bail portant sur une maison d’environ 320 mètres carrés et prévoyant un loyer annuel de, respectivement, 96 000 et 72 000 francs suisses (CHF) (environ 83 800 et 62 800 euros (EUR)). Le bailleur ne leur remit pas le formulaire officiel prévu par la loi pour la fixation du loyer initial.

7. Le 1er septembre 2010, le bailleur requit l’évacuation des requérants auprès de la Commission genevoise de conciliation en matière de baux et loyers. Non conciliée, la cause fut portée devant le Tribunal des baux et loyers.

8. Le 27 octobre 2010, les requérants, représentés par l’Association genevoise des locataires (« ASLOCA »), agissant notamment par l’intermédiaire de P.S., ouvrirent une action en fixation du loyer initial.

9. Par jugement du 1er novembre 2011, le Tribunal des baux et loyers débouta les requérants, en admettant la validité des loyers fixés contractuellement.

10. Les requérants, toujours représentés par l’ASLOCA agissant sous la signature de P.S., interjetèrent appel.

11. Par arrêt du 3 décembre 2012, la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du Canton de Genève rejeta l’appel et confirma le jugement attaqué. Elle considéra pour l’essentiel que les requérants avaient commis un abus de droit en dénonçant l’omission du bailleur de notifier le loyer initial au moyen du formulaire officiel.

12. Les requérants, d’entente avec le bailleur, libérèrent l’objet loué le 15 décembre 2012.

13. Le 21 janvier 2013, les requérants, représentés par P.S., agissant désormais en qualité d’avocat, interjetèrent un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral. À titre principal, ils demandèrent que les loyers annuels fixés contractuellement soient déclarés nuls et qu’un nouveau loyer soit déterminé. Ils conclurent en outre à ce que le bailleur soit condamné à restituer le trop-perçu et, enfin, à ce que le montant de la garantie bancaire soit réduit à trois mois du loyer nouvellement fixé.

14. La procuration donnant pouvoir à P.S. de les représenter devant le Tribunal fédéral avait été signée par les requérants le 18 janvier 2013. P.S. avait déjà plaidé devant la haute juridiction dans une dizaine de procédures.

15. Par un arrêt du 12 avril 2013, notifié aux requérants le 9 mai 2013, le Tribunal fédéral admit partiellement le recours et renvoya la cause à l’instance précédente pour une nouvelle décision.

Par ailleurs, il mit la moitié des frais de justice, soit 2 000 CHF (environ 1 840 EUR), à la charge des requérants et l’autre moitié à la charge de l’intimé. Il condamna en outre les requérants à verser à l’intimé une indemnité de 2 500 CHF (environ 2 300 EUR) à titre de dépens mais ne leur octroya aucune indemnité pour leurs propres frais d’avocat, considérant qu’ils n’avaient pas été valablement représentés.

Les extraits pertinents de cet arrêt se lisaient comme suit :

« 1. Le Tribunal fédéral examine d’office la recevabilité des recours (ATF 137 III 417 consid. 1 ; cf. art. 29 al. 1 LTF, concernant la compétence).

L’art. 40 al. 1 LTF énonce qu’en matière civile et pénale, les seules personnes habilitées à agir comme mandataires devant le Tribunal fédéral sont les avocats autorisés à pratiquer la représentation en justice en vertu de la loi du 23 juin 2000 sur les avocats (LLCA, RS 935.61) ou en vertu d’un traité international. Si l’avocat titulaire d’un brevet d’avocat cantonal veut pratiquer la représentation en justice, il doit demander son inscription au registre du canton dans lequel il a son adresse professionnelle (art. 6 al. 1 LLCA). Pour être inscrit, il doit notamment être en mesure de pratiquer en toute indépendance ; il ne peut être employé que par des personnes elles-mêmes inscrites dans un registre cantonal (art. 8 al. 1 let. d LLCA). Une exception à cette exigence existe pour l’avocat employé par une organisation reconnue d’utilité publique ; il peut demander son inscription au registre à condition de limiter son activité de défenseur à des mandats concernant strictement le but visé par cette organisation (art. 8 al. 2 LLCA). L’avocat qui ne remplit plus l’une des conditions d’inscription est radié du registre (art. 9 LLCA).

La loi ne précise pas la notion "d’organisation reconnue d’utilité publique". Au cours des travaux législatifs, il a été question d’introduire une définition plus large telle que "l’association à but non lucratif", qui devait inclure clairement les associations de défense des locataires ou des travailleurs ; le Parlement n’a pas accepté cette proposition. Dans un arrêt de 2004, le Tribunal fédéral a souligné qu’un tel historique pourrait signifier que les avocats employés par une association de défense des locataires sont empêchés de représenter les membres de leur employeuse dans les procédures où s’applique le monopole des avocats (ATF 130 II 87 consid. 5.1.1 p. 100). La doctrine est plus catégorique (STAEHELIN/OETIKER, in Kommentar zum Anwaltsgesetz, 2011, no 57 ad art. 8 LLCA ; MEIER/REISER, in Commentaire romand, 2010, no 69 ad art. 8 LLCA ; BOHNET/MARTENET, Droit de la profession d’avocat, 2009, p. 277 s. n. 625).

En l’occurrence, [P. S.] est d’une part employé de l’ASLOCA, et partant dans un rapport de subordination avec cette organisation. Il est d’autre part inscrit au registre des avocats genevois. L’adresse et la case postale de son étude sont les mêmes que celles de l’ASLOCA/Genève. Le site Internet de cette association contient une rubrique "Collaborateurs", dans laquelle figure le précité, ainsi que les autres membres de son étude.

Le fait d’être employé par une association vouée à défendre les intérêts des locataires n’exclut pas d’être inscrit au registre cantonal des avocats pour exercer parallèlement une activité d’avocat ; l’intéressé doit toutefois satisfaire aux exigences d’indépendance. En l’occurrence, les intérêts des locataires ont été défendus devant les instances cantonales par l’ASLOCA, pour laquelle agissait [P. S.] ; ils le sont désormais par [P. S.] lui-même, en qualité d’avocat. L’avocat [P. S.] a ainsi repris le mandat de son employeur, mandat qu’il avait jusqu’alors géré en qualité d’employé de l’ASLOCA. Dans une telle constellation, l’avocat ne satisfait pas à l’exigence légale d’indépendance, car il ne peut guère conseiller les recourants dans un sens différent de celui voulu par son employeur ; l’avocat ne saurait accepter un mandat de la part des clients de son employeur (ATF 130 II 87 consid. 4.3.3 et 6.3.1 ; STAEHELIN/OETIKER, op. cit., nos 40 et 45 ad art. 8 LLCA ; WALTER FELLMANN, Anwaltsrecht, 2010, p. 124 s. n. 290 ; BOHNET/MARTENET, op. cit., p. 561 ss n. 1349 ss ; Kaspar Schiller, Schweizerisches Anwaltsrecht, 2009, p. 227 n. 915). Il faut en déduire que les recourants ne sont pas valablement représentés.

Lorsqu’une partie agit par un mandataire non autorisé, il y a lieu de lui fixer un délai pour remédier à l’irrégularité (art. 42 al. 5 LTF). Les recourants ayant signé une procuration en faveur de l’avocat [P. S.], il ne fait aucun doute qu’ils contresigneraient l’acte de recours reprenant les conclusions déjà prises en appel. Par économie de procédure, il peut être renoncé à cette formalité. En revanche, les recourants ne sauraient prétendre à l’indemnisation de leurs frais d’avocat, dans la mesure où ils ne sont pas valablement représentés (infra, consid. 4).

2. Le litige porte d’abord sur la validité du loyer convenu dans le premier bail du 18 avril 2008. Il n’est pas contesté que l’utilisation de la formule officielle était obligatoire pour ce contrat (art. 270 al. 2 CO), et que la clause fixant le loyer est frappée de nullité à défaut d’avoir été notifiée au moyen d’une telle formule (cf. art. 20 al. 2 CO ; ATF 120 II 341 consid. 5). Est en revanche discuté le point de savoir si les recourants commettent un abus de droit en se prévalant du vice de forme ; ces derniers le contestent.

2.1. (...) En l’occurrence, il n’apparaît pas que les recourants auraient eu connaissance du vice de forme longtemps avant de s’en prévaloir. La Cour de céans statuant sur la base des faits constatés par l’autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), elle ne saurait retenir un abus de droit découlant d’un retard à invoquer le vice de forme.

2.2. (...)

2.3. En bref, c’est à tort que l’autorité précédente a admis un abus de droit. Il lui appartiendra dès lors de fixer le loyer dû pour la période du 15 avril 2008 au 31 juillet 2009, période de validité du premier contrat de bail.

3. Subsiste la question de la validité du loyer fixé dans le second bail. L’autorité précédente a considéré qu’en vertu de l’avis exprimé en appel par les locataires eux‑mêmes, elle n’avait pas à examiner s’il existait une obligation légale de notifier un avis officiel de fixation du loyer pour le second contrat de bail. Les recourants se plaignent d’arbitraire (art. 9. Cst.) et de contravention à diverses dispositions procédurales (art. 56, 57, 58 et 221 CPC).

3.1. (...)

3.2. (...) L’autorité précédente n’a dès lors pas violé les règles fédérales de procédure régissant l’appel en considérant que la question n’était plus discutée et, partant, que l’analyse du juge de première instance était acquise.

Au vu de ce qui précède, c’est à bon droit que l’autorité précédente a nié la nullité du loyer fixé dans le second contrat. Le recours doit être rejeté sur ce point.

4. En définitive, le recours est partiellement fondé. L’arrêt attaqué est annulé et la cause renvoyée à l’autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants (supra, consid. 2.3). Dans un tel cas de figure, il se justifie en principe de répartir les frais et dépens par moitié entre les parties (art. 66 et 68 LTF). Les recourants n’étant toutefois pas valablement représentés, ils ne sauraient se voir allouer des dépens (supra, consid. 1). »

16. Dans une autre procédure, sans lien avec la cause des requérants, le Tribunal fédéral s’était déjà prononcé sur la question de l’indépendance de P.S. vis-à-vis de l’ASLOCA. La question avait été soulevée par la partie adverse et P.S. avait pu y répondre, au nom de ses clients, par une duplique du 3 janvier 2013 qui contestait l’existence d’un conflit d’intérêt.

Dans un arrêt du 26 février 2013, le Tribunal avait relevé un conflit d’intérêt et conclu à l’incapacité de P.S. à représenter valablement ses clients. Par économie de procédure, il avait renoncé à permettre aux clients de P.S. de remédier à cette irrégularité et avait admis leurs conclusions comme recevables.

II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

17. La Loi sur le Tribunal fédéral (« LTF ») du 17 juin 2005, dans sa teneur alors en vigueur, dispose en ses parties pertinentes ce qui suit :

Art. 40 Mandataires

« 1 En matière civile et en matière pénale, seuls ont qualité pour agir comme mandataires devant le Tribunal fédéral les avocats autorisés à pratiquer la représentation en justice en vertu de la loi du 23 juin 2000 sur les avocats ou d’un traité international.

2 Les mandataires doivent justifier de leurs pouvoirs par une procuration. »

Art. 41 Incapacité de procéder

« 1 Si une partie est manifestement incapable de procéder elle-même, le Tribunal fédéral peut l’inviter à commettre un mandataire. Si elle ne donne pas suite à cette invitation dans le délai imparti, il lui attribue un avocat.

(...) »

Art. 42 Mémoires

« (...)

5 Si la signature de la partie ou de son mandataire, la procuration ou les annexes prescrites font défaut, ou si le mandataire n’est pas autorisé, le Tribunal fédéral impartit un délai approprié à la partie pour remédier à l’irrégularité et l’avertit qu’à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.

(...) »

Art. 68 Dépens

« 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.

2 En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige.

(...) »

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION

18. Les requérants se plaignent de la décision du Tribunal fédéral déniant à leur avocat la capacité d’agir devant lui, sans leur avoir donné la possibilité de se prononcer à ce sujet, et leur refusant l’octroi de dépens malgré qu’ils aient eu partiellement gain de cause. Ils allèguent une violation du principe du contradictoire tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :

« 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »

A. Sur la recevabilité

1. Sur l’applicabilité de l’article 6 § 1 de la Convention

19. La Cour rappelle que l’article 6 § 1 de la Convention ne vaut que pour l’examen des « contestations sur [des] droits et obligations de caractère civil » et du « bien-fondé de toute accusation en matière pénale » (Le Compte, Van Leuven et De Meyere c. Belgique, 23 juin 1981, § 41, série A no 43).

20. En l’espèce, la Cour note que le litige qui opposait les requérants à leur bailleur et sur lequel s’est prononcé le Tribunal fédéral dans son arrêt du 12 avril 2013 concernait des droits de nature clairement patrimoniale résultant d’une relation contractuelle entre personnes privées. Il s’agit donc de droits « à caractère civil » au sens de l’article 6 de la Convention.

2. Article 35 § 3 b) de la Convention

a) Thèses des parties

21. Le Gouvernement soutient que les requérants n’ont subi aucun préjudice important et considère que la requête est donc irrecevable au sens de l’article 35 § 3 b) de la Convention. A titre subsidiaire, il appelle la Cour à rejeter le grief des requérants pour défaut manifeste de fondement, en application de l’article 35 § 3 a) de la Convention.

22. En premier lieu, le Gouvernement explique que, même si lorsqu’une partie agit devant le Tribunal fédéral par un mandataire non autorisé il y a lieu de lui fixer un délai pour remédier à l’irrégularité, c’est à juste titre qu’en l’espèce le Tribunal fédéral, par économie de procédure, a décidé de renoncer à cette formalité, dans la mesure où les requérants avaient signé une procuration en faveur de P.S. et donc « il ne faisait aucun doute qu’ils auraient contresigné l’acte de recours reprenant les conclusions déjà prises en appel ».

23. En ce qui concerne l’impact monétaire de cette décision, le Gouvernement rappelle que les requérants, dont le premier était gestionnaire de fortune, louaient une maison de 320 mètres carrés pour laquelle ils payaient des loyers annuels de 96 000 CHF (environ 83 800 EUR), dans le cadre du premier bail, puis de 72 000 CHF (environ 62 800 EUR). Il souligne également qu’au vu de la situation économique des requérants, il ne ressortait pas du dossier que l’issue du litige aurait eu des répercussions importantes sur leur vie personnelle. Le Gouvernement en conclut que la condamnation à s’acquitter des 2 500 CHF ne constitue pas un préjudice financier important.

24. Les requérants considèrent que la décision du Tribunal fédéral de les priver de représentation soulève des questions de principe.

Se référant à la jurisprudence de la Cour, ils rappellent qu’un tribunal, fût-ce la Cour suprême d’un État, ne doit pas prendre au dépourvu les parties à un litige en examinant ex officio des points de droit ou de fait importants que celles-ci n’avaient pas soulevés. Le juge lui-même doit respecter le principe du contradictoire, qui constitue un principe fondamental du droit à un procès équitable, garantit par l’article 6 § 1 de la Convention.

Les requérants soulignent en outre que la décision du Tribunal fédéral n’était pas susceptible de recours devant une autre instance nationale et ne pouvait donc être remédiée que par le juge international.

Ils indiquent, par ailleurs, que l’affaire met en jeu le bon fonctionnement des institutions judiciaires, dans la mesure où elle concerne la capacité d’agir d’un avocat, auxiliaire de justice.

25. En ce qui concerne l’aspect pécuniaire, ils considèrent que le préjudice financier qu’ils ont subi, soit 2 500 EUR, est largement supérieur à la limite que la Cour considère généralement comme un préjudice important. Ils se réfèrent à l’arrêt Živić c. Serbie (no 37204/08, 13 septembre 2011), où la Cour avait rejeté une exception d’irrecevabilité similaire portant sur un montant de 1 800 EUR.

b) Appréciation de la Cour

26. La Cour rappelle que la condition du préjudice important renvoie à l’idée que la violation d’un droit, quelle que soit sa réalité d’un point de vue strictement juridique, doit atteindre un seuil minimum de gravité pour justifier un examen par une juridiction internationale. L’appréciation de ce seuil est, par nature, relative et dépend des circonstances de l’espèce (Korolev c. Russie (déc.), no 25551/05, CEDH 2010). Cette appréciation doit tenir compte tant de la perception subjective du requérant que de l’enjeu objectif du litige (Gagliano Giorgi c. Italie, no 23563/07, § 55, CEDH 2012 (extraits)). Elle renvoie ainsi à des critères tels que l’impact monétaire de la question litigieuse ou l’enjeu de l’affaire pour le requérant (Grande Stevens et autres c. Italie, nos 18640/10, 18647/10, 18663/10, 18668/10 et 18698/10, § 73, 4 mars 2014).

27. En l’espèce, la Cour relève que le Tribunal fédéral a soulevé d’office la question de la capacité de PS à représenter les requérants, sans les en informer et sans leur permettre de remédier à cette irrégularité.

Aux yeux de la Cour, cette décision, indépendamment des conséquences financières qui en ont découlé pour les requérants, et qui ne sont pas insignifiantes, portait sur une question objectivement de principe : le droit des requérants à défendre leurs intérêts de manière contradictoire devant une juridiction de dernière instance, dont les décisions n’étaient pas susceptibles de recours.

Au surplus, la question soulevée d’office par le Tribunal fédéral et sur laquelle les requérants n’ont pas pu se prononcer portait sur leur capacité à être valablement représentés par un avocat de leur choix et touchait donc à la nature même de leur droit d’ester en justice sur un plan d’égalité avec la partie adverse.

28. Par conséquent, la Cour estime que la première condition de l’article 35 § 3 b) de la Convention, à savoir l’absence de préjudice important pour les requérants, n’est pas remplie et qu’il y a lieu de rejeter l’exception du Gouvernement.

3. Conclusion sur la recevabilité

29. Constatant que le grief des requérants n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’il ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

a) Thèses des parties

i. Thèse des requérants

30. Les requérants rappellent qu’ils avaient signé la procuration en faveur de leur avocat, P.S., le 18 janvier 2013, alors que ce dernier avait déjà participé à plus d’une dizaine de procédures devant le Tribunal fédéral, sans que sa capacité à représenter ses clients n’ait jamais été mise en cause. En lui confiant leur mandat de représentation, ils ne pouvaient donc s’attendre à ce que le Tribunal fédéral lui dénie la capacité à les représenter et par conséquent les priver du droit à l’indemnisation de leurs dépens. Après le dépôt de leur recours, le 21 janvier 2013, ils n’ont pas été amenés à intervenir dans la procédure et n’ont pas été interpelés sur la capacité de P.S. à les représenter ou mis en condition de confier leur défense à un autre avocat.

31. Les requérants rappellent que ce n’est qu’à réception de l’arrêt du Tribunal fédéral qu’ils ont pris connaissance de la question de la capacité de leur avocat à les représenter et des conséquences que cela aurait sur leur droit à être indemnisés. Selon eux, cette décision n’était pas prévisible au moment de la signature de la procuration car l’arrêt du Tribunal fédéral du 26 février 2013, dans une procédure parallèle, qui avait conclu à l’incapacité de P.S. à représenter des locataires en raison de ses liens de subordination avec l’ASLOCA, n’avait pas encore été prononcé.

32. Les requérants en déduisent une violation du principe du contradictoire et soulignent que, s’agissant d’une procédure devant le Tribunal fédéral, qui statue en dernière instance, cette violation ne pouvait pas être réparée devant un autre degré de juridiction au niveau national.

ii. Thèse du Gouvernement

33. Le Gouvernement rappelle que le droit à une procédure contradictoire ne revêt pas un caractère absolu et son étendu peut varier en fonction notamment des spécificités de la procédure en cause. Il souligne que, dans plusieurs affaires, la Cour a jugé que la non-communication d’une pièce de la procédure et l’impossibilité pour le requérant de le discuter n’avaient pas porté atteinte à l’équité de la procédure, dans la mesure où cette faculté n’aurait eu aucune incidence sur la solution du litige et où la solution juridique retenue ne prêtait guère à discussion. Le Gouvernement indique également que, dans d’autres affaires, la Cour a considéré que le principe du contradictoire avait été violé car il n’avait pas été permis aux requérants de s’exprimer sur une « question essentielle » pour l’issue de la procédure.

34. Selon le Gouvernement, la capacité à agir de P.S., n’a eu aucune incidence sur la recevabilité du recours des requérants devant le Tribunal fédéral ainsi que sur le fond du litige mais uniquement sur le droit des requérants à prétendre à l’indemnisation de leurs frais d’avocat.

35. Il est vrai que le Tribunal fédéral avait rappelé que lorsqu’une partie agissait par un mandataire non autorisé, il y avait lieu de lui fixer un délai pour remédier à cette irrégularité. Toutefois, c’est à juste titre que le Tribunal a renoncé à cette formalité, par économie de procédure car les requérants avaient signé une procuration en faveur de P.S. et il ne faisait pas de doute qu’ils auraient contresigné l’acte de recours reprenant les conclusions déjà prises en appel.

36. Le Gouvernement considère que l’impossibilité de se prononcer sur la qualité à agir de P.S. ne leur a pas empêchés de se défendre et n’a pas porté atteinte à l’équité d’une procédure au bout de laquelle, par ailleurs, les requérants ont eu partiellement gain de cause.

37. Par ailleurs, le Gouvernement indique que selon la jurisprudence de la Cour, lorsque le juge tranche un litige sur la base d’un motif invoqué d’office ou d’une exception soulevée d’office, il n’y aurait pas de violation du droit à un procès équitable si la partie concernée avait effectivement pu prévoir la requalification. L’élément déterminant est la question de savoir si cette partie a été « prise au dépourvu » et ce principe s’applique également aux décisions en matière de frais et dépens.

38. Le Gouvernement souligne en outre que l’indépendance de P.S. et sa capacité à représenter, en tant qu’avocat, devant le Tribunal fédéral, des locataires pour le compte desquels il avait déjà agi devant les instances cantonales en qualité de collaborateur de l’ASLOCA avaient déjà été mises en cause dans une autre affaire jugée en séance publique le 26 février 2013 et à l’occasion de laquelle P.S. avait pu s’exprimer par duplique du 3 janvier 2013.

39. Enfin, le Gouvernement accepte qu’à la date du 26 février 2013, le recours des requérants avait déjà été déposé mais souligne que P.S. s’était déjà prononcé sur la question de son indépendance, le 3 janvier 2013, dans le cadre de la procédure parallèle, et devait donc s’attendre à ce que, même dans l’affaire des requérants, sa capacité à agir serait discutée et, le cas échéant, contestée.

b) Appréciation de la Cour

i. Principes généraux

40. En ce qui concerne le droit à une procédure contradictoire, la Cour renvoie aux principes généraux rappelés dans l’arrêt Čepek c. République tchèque (no 9815/10, §§ 44 à 50, 5 septembre 2013).

41. Elle rappelle en particulier que le juge doit lui-même respecter le principe du contradictoire, notamment lorsqu’il tranche un litige sur la base d’un motif invoqué d’office ou d’une exception soulevée d’office (ibid. § 45).

Certes, comme le souligne le Gouvernement, le droit à une procédure contradictoire ne revêt pas un caractère absolu et son étendue peut varier en fonction notamment des spécificités de la procédure en cause (ibid. § 46).

L’élément déterminant est donc la question de savoir si une partie a été « prise au dépourvu » par le fait que le tribunal a fondé sa décision sur un motif invoqué d’office. Une diligence particulière s’impose au tribunal lorsque le litige prend une tournure inattendue, d’autant plus s’il s’agit d’une question laissée à la discrétion du tribunal. Le principe du contradictoire commande que les tribunaux ne se fondent pas dans leurs décisions sur des éléments de fait ou de droit qui n’ont pas été discutés durant la procédure et qui donnent au litige une tournure que même une partie diligente n’aurait pas été en mesure d’anticiper (ibid. § 48).

42. Les principes rappelés ci-dessus s’appliquent notamment aux décisions en matière de frais. Certes, il s’agit d’un aspect subsidiaire du procès, ce qui peut justifier que le tribunal ne soit pas obligé de soumettre à discussion tous les éléments de fait ou de droit déterminants pour sa décision sur cet aspect du litige. Le principe du contradictoire ne saurait toutefois être mis à l’écart complètement. Même si la possibilité pour les parties de présenter leur point de vue sur la question des frais peut être limitée, il n’en demeure pas moins qu’elles ne doivent pas être surprises par une tournure inattendue et imprévisible (ibid. § 49).

43. Enfin, la Cour rappelle que le principe du contradictoire et celui de l’égalité des armes, étroitement liés entre eux, sont des éléments fondamentaux de la notion de « procès équitable » au sens de l’article 6 § 1 de la Convention. Ils exigent un « juste équilibre » entre les parties : chacune doit se voir offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son ou ses adversaires Regner c. République tchèque [GC], no 35289/11, § 146, 19 septembre 2017).

ii. Application en l’espèce

44. La Cour rappelle que l’article 40 LTF donnait aux requérants le droit d’être représentés par un avocat de leur choix (paragraphe 17 ci-dessus), ce qu’ils ont fait en signant une procuration en faveur de P.S. le 18 janvier 2013 (paragraphe 14 ci-dessus).

45. Il ressort de l’arrêt du Tribunal fédéral du 13 avril 2013 que P.S. était inscrit au registre des avocats genevois (paragraphe 15 ci-dessus).

S’il est vrai que sa capacité à représenter des locataires dans des procédures devant le Tribunal fédéral avait déjà été mise en cause dans une procédure parallèle, en raison d’un conflit d’intérêt avec l’ASLOCA, la Cour relève que, dans cette procédure parallèle, P.S. avait contesté l’existence d’un conflit d’intérêt et, en tout état de cause, l’arrêt du Tribunal fédéral concluant à son incapacité avait été prononcé plus d’un mois après le dépôt du recours des requérants dans le cadre de leur propre procédure (paragraphes 13 et 16 ci-dessus).

46. La Cour en déduit que, en ce qui concerne le litige qui les opposait à leur bailleur devant le Tribunal fédéral, les requérants avaient remis la défense de leurs intérêts entre les mains d’un avocat qui paraissait apte à les représenter devant cette instance. Ils ont donc été pris au dépourvu par la tournure imprévisible et inattendue que la décision du Tribunal fédéral de disqualifier leur avocat a donnée à la procédure (Čepek, précité, § 49).

47. Le fait que, au moment du dépôt du recours des requérants, P.S. savait déjà que la question de sa qualité à agir avait été soulevée dans le cadre de la procédure parallèle (paragraphe 16 ci-dessus) ne change rien à ce constat.

D’une part, ne pouvant préjuger de la décision que le Tribunal fédéral aurait prise dans la procédure parallèle, P.S. n’était pas tenu de conseiller à ses clients de changer d’avocat au moment du dépôt de leur recours.

D’autre part, comme le Tribunal fédéral l’a lui-même relevé, P.S. ne représentait pas valablement les requérants car il se trouvait dans une situation de conflit d’intérêts, logiquement à leur détriment. Au moment de déposer leur recours, les requérants, à leur insu, ne bénéficiaient donc pas des conseils d’un avocat qualifié pour les représenter et on ne peut pas leur tenir rigueur de ne pas avoir eux-mêmes relevé cette circonstance.

48. La Cour rappelle que le principe du contradictoire commande que les tribunaux ne se fondent pas dans leurs décisions sur des éléments de fait ou de droit qui n’ont pas été discutés durant la procédure et qui donnent au litige une tournure que même une partie diligente n’aurait pas été en mesure d’anticiper (paragraphe 41 ci-dessus). Ce principe s’applique notamment aux décisions en matière de frais (paragraphe 42 ci-dessus).

49. Elle rappelle également que le principe du contradictoire et celui de l’égalité des armes exigent que chacune des parties à un litige se voit offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son ou ses adversaires (paragraphe 43 ci-dessus).

50. En l’espèce, le Tribunal fédéral a privé les requérants de représentation après avoir soulevé d’office la question de la capacité de P.S. à agir et sans que les requérants en aient été informés, qu’ils aient été entendus et mis en condition de remédier à l’irrégularité, comme prévu expressément par l’article 42 al. 5 LTF (paragraphe 17 ci-dessus).

51. Le Tribunal fédéral a lui-même rappelé que, lorsqu’une partie agissait par un mandataire non autorisé, il y avait lieu de lui fixer un délai pour remédier à l’irrégularité. Toutefois, par économie de procédure, en l’espèce, il a renoncé à cette formalité (paragraphe 15 ci-dessus). Pour justifier cette décision, le Tribunal fédéral a présumé que, puisque les requérants avaient signé une procuration en faveur de P.S., il ne faisait « aucun doute qu’ils contresigneraient l’acte de recours reprenant les conclusions déjà prises en appel » (paragraphe 15 ci-dessus).

52. Par ailleurs, comme le relève le Gouvernement, malgré sa décision de ne pas reconnaitre la qualité de P.S. à agir en tant que mandataire autorisé des requérants, le Tribunal fédéral n’a pas rejeté comme irrecevable le mémoire présenté par cet avocat au nom et pour le compte des requérants et, sur la base de ce mémoire, s’est prononcé sur le fond du litige en donnant partiellement gain de cause aux requérants. Selon le Gouvernement, la seule conséquence de cette décision pour les requérants a été de les priver de l’indemnité pour frais d’avocat.

53. La Cour n’est pas convaincue par ces arguments.

54. Sans vouloir spéculer sur quelle aurait été l’issue du litige sur le fond si les requérants avaient été mis en condition d’être valablement représentés, la Cour considère que la décision du Tribunal fédéral de les priver de représentation, prise en l’absence de contradictoire, les a ipso facto objectivement placés dans une situation de net désavantage par rapport à la partie adverse, laquelle était valablement représentée et a pu par conséquent bénéficier des dispositions de l’article 68 LTF (paragraphe 17 ci-dessus).

55. Enfin, la Cour souligne que, malgré le renvoi du litige sur le fond aux instances cantonales, la décision du Tribunal fédéral concluant à l’absence de représentation valable des requérants et les condamnant à indemniser la partie adverse, est intervenue en dernière instance et ne pouvait donc plus être redressée au niveau national (Čepek, précité, §§ 50 et 59).

56. Ces éléments suffisent à la Cour pour conclure qu’une atteinte a été portée au droit des requérants à un procès équitable. Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.

II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

57. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

58. Les requérants réclament 2 334 EUR au titre du préjudice matériel, correspondant à la somme de 2 500 CHF qu’ils ont été condamnés à verser à la partie adverse, bien qu’ayant obtenu partiellement gain de cause.

59. Le Gouvernement considère que rien ne permet de spéculer sur la décision que le Tribunal fédéral aurait adopté concernant la capacité de P.S. de représenter les requérants si ces derniers avaient été entendus et que, par conséquent, il n’y a pas lieu de faire droit à leur demande.

60. La Cour note que, selon l’article 42 LTF, lorsqu’une partie agit par un mandataire non autorisé, le Tribunal fédéral lui impartit un délai pour remédier à l’irrégularité (paragraphe 17 ci-dessus). Ces dispositions ont été rappelées par le Tribunal fédéral lui-même dans son arrêt du 12 avril 2013 (paragraphe 15 ci-dessus).

61. Il en découle que si les requérants avaient été informés de la décision du Tribunal fédéral de soulever d’office la question de la capacité de P.S., ils auraient non seulement pu y répondre mais, au cas où le Tribunal fédéral n’aurait pas été convaincu par leurs arguments et aurait quand même conclu à l’incapacité de P.S., ils auraient pu prétendre à un « délai approprié » pour régulariser leur position en désignant un autre avocat et n’auraient donc pas été privés des bénéfices prévus à l’article 68 LTF (paragraphe 17 ci-dessus).

62. Au vu de ce qui précède, la Cour considère qu’il y a lieu d’octroyer aux requérants, solidairement, 2 334 EUR au titre du préjudice matériel pour la violation constatée.

B. Frais et dépens

63. Les requérants demandent également 10 000 EUR pour les frais et dépens engagés devant la Cour. Ils présentent deux factures d’honoraires pour des montants respectifs de 8 833.35 CHF (environ 7 700 EUR), dont 5 400 CHF (environ 4 700 EUR) à déduire au titre d’une provision déjà versée, et 2 160 CHF (environ 1 880 EUR). Ces montants ont été calculés sur la base de, respectivement, 35 heures et huit heures, à un taux horaire de 250 CHF (environ 218 EUR).

64. Le Gouvernement considère que ces factures ne sont pas suffisamment détaillées et ne remplissent par conséquent pas les conditions prévues à l’article 60 du Règlement de la Cour. Il souligne par ailleurs que la facture pour le montant de 8 833.35 CHF semble avoir été établie pour des services rendus, outre aux requérants, également à P.S.

65. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce, compte tenu des documents dont elle dispose et de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable la somme de 7 000 EUR pour la procédure devant la Cour et l’accorde aux requérants.

C. Intérêts moratoires

66. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;

3. Dit

a) que l’État défendeur doit verser aux requérants, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes, à convertir dans la monnaie de l’État défendeur au taux applicable à la date du règlement :

i. 2 334 EUR (deux mille trois cent trente-quatre euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage matériel ;

ii. 7 000 EUR (sept mille euros), plus tout montant pouvant être dû par les requérants à titre d’impôt, pour frais et dépens ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

4. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 22 janvier 2019, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.

Stephen PhillipsVincent A. De Gaetano
GreffierPrésident


Synthèse
Formation : Cour (troisiÈme section)
Numéro d'arrêt : 001-189413
Date de la décision : 22/01/2019
Type d'affaire : au principal et satisfaction équitable
Type de recours : Violation de l'article 6 - Droit à un procès équitable (Article 6 - Procédure civile;Article 6-1 - Procès équitable);Dommage matériel - réparation (Article 41 - Dommage matériel;Satisfaction équitable)

Parties
Demandeurs : RIVERA VAZQUEZ ET CALLEJA DELSORDO
Défendeurs : SUISSE

Composition du Tribunal
Avocat(s) : BOSSHARD P.

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2021
Fonds documentaire ?: HUDOC

Source

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