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07/02/2019 | CEDH | N°001-189734

CEDH | CEDH, AFFAIRE PATSAKI ET AUTRES c. GRÈCE, 2019, 001-189734


PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE PATSAKI ET AUTRES c. GRÈCE

(Requête no 20444/14)

ARRÊT

STRASBOURG

7 février 2019

DÉFINITIF

07/05/2019

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Patsaki et autres c. Grèce,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

Ksenija Turković, présidente,
Linos-Alexandre Sicilianos,
Krzysztof Wojtyczek,
Armen Haru

tyunyan,
Pauliine Koskelo,
Jovan Ilievski,
Gilberto Felici, juges,
et de Renata Degener, greffière adjointe de section,

Après en avoir délibéré ...

PREMIÈRE SECTION

AFFAIRE PATSAKI ET AUTRES c. GRÈCE

(Requête no 20444/14)

ARRÊT

STRASBOURG

7 février 2019

DÉFINITIF

07/05/2019

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Patsaki et autres c. Grèce,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :

Ksenija Turković, présidente,
Linos-Alexandre Sicilianos,
Krzysztof Wojtyczek,
Armen Harutyunyan,
Pauliine Koskelo,
Jovan Ilievski,
Gilberto Felici, juges,
et de Renata Degener, greffière adjointe de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 15 janvier 2019,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 20444/14) dirigée contre la République hellénique et dont huit ressortissants de cet État et dont les noms figurent en annexe (« les requérants »), ont saisi la Cour le 28 février 2014 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Les requérants ont été représentés par Me S. Simos, avocat exerçant à Corinthe. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») a été représenté par la déléguée de son agent, Mme A. Dimitrakopoulou, assesseure au Conseil juridique de l’État.

3. Les requérants allèguent en particulier une violation des volets matériel et procédural de l’article 2 de la Convention.

4. Le 4 décembre 2017, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. D.V. est feu l’époux de la première requérante, le père de la deuxième, le fils des troisième et quatrième requérants et le frère des autres requérants.

6. Le 5 mai 2008, le tribunal correctionnel d’Héraklion condamna D.V. à une peine d’emprisonnement de huit mois pour vol et destruction de propriété d’autrui. Dans sa plaidoirie en défense devant le tribunal, D.V. déclara qu’il était toxicomane et consommateur d’héroïne, que le soir des faits il avait consommé de l’alcool, des cachets et de l’héroïne et qu’il ne savait pas ce qu’il faisait.

7. Le 10 septembre 2008, alors qu’il était détenu dans la prison de Neapoli en Crète, il fut présenté devant le juge d’instruction de la Canée pour répondre des accusations d’instigation à l’introduction de stupéfiants dans la prison et tentative de détention de stupéfiants dans la prison de la Canée où il avait été transféré. D.V. affirma qu’il était consommateur de stupéfiants et dépendant depuis quinze ans, qu’il consommait toute sorte de stupéfiants, même de l’héroïne par injection.

8. Lors de son incarcération dans la prison d’Héraklion, un médecin de l’hôpital public d’Héraklion avait prescrit à D.V. un traitement consistant en la prise de 10 cachets des médicaments psychotropes par jour. D.V. était aussi porteur d’hépatite C.

9. Le 18 septembre 2008, il fut transféré à la prison de l’île de Chios, avec son dossier médical.

10. Le 2 novembre 2008, la médecin de la prison, K.L. (qui effectuait son stage de médecin – « αγροτικό »), augmenta de 10 à 16 cachets par jour la posologie des médicaments que le médecin d’Héraklion avait prescrit.

11. Le 7 novembre 2008, D.V. et d’autres détenus entamèrent une grève de la faim pour se plaindre des mauvaises conditions régnant dans la prison.

12. À cette même date, le soir, D.V. demanda de se présenter devant la directrice adjointe de la prison, le directeur étant en congé. Lors de la rencontre, D.V. informa la directrice adjointe qu’un trafic de stupéfiants avait lieu dans la prison. Celle-ci n’exploita pas cette information, car comme elle déposa par la suite, l’heure était tardive et il n’y avait pas beaucoup d’agents de l’administration pénitentiaire dans la prison. Ce ne fut que le lendemain qu’elle ordonna une fouille dans la prison mais qui ne révéla pas l’existence de stupéfiants.

13. Le 8 novembre 2008, la direction de la prison informa les requérants que D.V. fut trouvé mort dans sa cellule.

14. Le 9 novembre 2008, l’épouse et un des frères de D.V. se rendirent à l’île de Chios, puis, sur les informations de la directrice adjointe de la prison, à un bureau des pompes funèbres pour récupérer le corps du défunt.

15. Selon les requérants, le même jour, les cinq détenus qui partageaient la cellule de D.V. furent tous transférés à l’improviste dans d’autres prisons sans qu’il leur soit demandé de faire une déposition au sujet du décès de D.V. Ils auraient été tous trouvés positifs à un test de dépistage de stupéfiants effectué le jour du décès de D.V. Selon le Gouvernement, un seul codétenu de D.V. fut transféré à la prison de Korydallos le 12 novembre 2008 et dont le transfert avait été décidé deux mois avant le décès de D.V. Deux des détenus mentionnés par les requérants ne figuraient pas dans les registres de la prison de Chios.

16. L’autopsie effectuée le 10 novembre 2008 révéla que le décès était causé par un œdème et une hémorragie pulmonaire suite à la consommation de substances psychotropes.

17. Le 10 novembre 2008, la médecin K.L. transmit au directeur de l’hôpital de Chios un rapport dans lequel elle critiquait l’insuffisance des soins médicaux dispensés dans la prison, le manque de personnel qualifié, de matériel médical et de médicaments, ainsi que l’absence d’espace propice à des examens médicaux.

18. Lors de sa déposition dans le cadre de l’enquête ouverte, la médecin de la prison justifia sa décision d’augmenter la dose des médicaments par le fait que D.V. avait allégué à plusieurs reprises qu’il était confronté à des problèmes personnels et par la réception d’un fax envoyé par un médecin généraliste de D.V. qui affirmait que ce dernier devait suivre le traitement qui y était indiqué. Comme D.V. pleurait et se plaignait qu’il avait mal aux os en raison du syndrome de manque, la médecin, craignant que D.V. allait se mutiler, contacta l’Organisme de lutte contre les stupéfiants basé à Athènes qui proposa une augmentation de la posologie des médicaments administrés.

19. De son côté, dans le cadre de l’enquête, la directrice adjointe de la prison indiqua que D.V. était consommateur de produits stupéfiants et que cela ressortait tant de son dossier médical que de ses propres déclarations faites à la médecin de la prison.

20. Le 14 novembre 2008, les requérants 6 et 8 portèrent plainte contre X auprès du parquet de Chios.

21. Peu après, la directrice adjointe de la prison informa les requérants que le décès de D.V. était causé par une utilisation excessive des médicaments psychotropes que lui avait prescrit la médecin de la prison.

22. Le 20 novembre 2008, le chef du service de lutte contre les stupéfiants confirma que le 8 novembre 2008, le service avait été appelé à fouiller la prison avec un chien.

23. Le 20 juin 2009, les requérantes 1 et 3 demandèrent, dans le cadre d’une déposition sous serment, l’engagement de poursuites contre toute personne responsable du décès de D.V. Cette demande était constitutive d’une plainte.

24. Le 14 avril 2010, les résultats de l’examen toxicologique effectué dans le cadre de l’autopsie du corps de D.V. furent annoncés : il était constaté que le décès était dû à la prise de plusieurs substances psychotropes.

25. Le 31 janvier 2011, le procureur près le tribunal correctionnel de Chios classa l’affaire au motif notamment que l’usage de stupéfiants par D.V. en prison ne suffisait pas pour établir un comportement pénalement répréhensible du personnel pénitentiaire (décision no 2/2011). Le procureur releva que D.V. consommait des stupéfiants et des antidépresseurs et était porteur d’hépatite C. Le fait que D.V. avait continué à consommer des stupéfiants à l’intérieur de la prison ne pouvait fonder un comportement répréhensible du directeur ou de la directrice adjointe car les analgésiques et les antidépresseurs auraient pu à eux seuls provoquer le décès, compte tenu de la déposition de la médecin de la prison qui avait affirmé que D.V. prenait tous ses cachets en une seule fois le soir.

26. Le 22 février 2011, les requérants 1, 3 et 6 saisirent le procureur près la cour d’appel d’Égée d’une demande en annulation de la décision no 2/2011. Ils se plaignaient aussi des lacunes de l’enquête préliminaire et demandaient que des mesures spécifiques soient ordonnées et que des pièces soient produites (dépositions des codétenus et du chef du service de lutte contre les stupéfiants, rapports disciplinaires, dossier médical du défunt, livre de distribution des médicaments, dépositions d’autres témoins etc.).

27. Par une décision no 34/2011, le procureur ordonna un complément d’enquête. En 2012 et 2013, il ordonna encore deux nouveaux compléments d’enquête (décisions no 13/2012 et 2/2013).

28. Le 27 février 2013, la première requérante écrivit au ministre de la Justice pour se plaindre de la longueur de l’enquête. Elle soutenait que l’écoulement d’une période de quatre ans et demi à partir du décès soulevait des soupçons quant à l’impartialité de l’enquête.

29. Le 15 juillet 2013, le procureur près la cour d’appel renvoya en jugement devant le tribunal correctionnel de Chios le directeur et la médecin de la prison de Chios du chef d’homicide involontaire commis par des personnes ayant des obligations légales particulières. Le procureur précisa que le comportement de la directrice adjointe de la prison, qui remplaçait le directeur du 20 octobre au 8 novembre 2008 qui était en congé, n’avait pas de lien de cause à effet avec le décès de D.V. Il classa les plaintes des requérants pour autant qu’elles visaient les autres membres du personnel pénitentiaire.

30. Le directeur de la prison était accusé de ne pas avoir exploité l’information que lui avait donné la directrice adjointe de la prison concernant le trafic de stupéfiants avec comme destinataire D.V. Plus particulièrement il lui était reproché de ne pas avoir activé les mécanismes de contrôle qui auraient permis de suivre les agissements de D.V., d’arrêter les auteurs du trafic et, de manière plus générale, d’avoir établi un mécanisme de contrôle des cellules préventif qui aurait permis d’éviter des situations comme celles ayant conduit au décès de D.V. La médecin de la prison était accusée d’avoir prescrit de nouveaux médicaments psychotropes sur simple présentation d’une ordonnance établi par un psychiatre qu’elle n’avait pas consulté et sans avoir demandé conseil à un spécialiste de l’hôpital de Chios. Elle était par ailleurs accusée d’avoir augmenté de sa propre initiative la dose des médicaments faisant partie du traitement déjà mis en place, ce qui combiné avec l’usage de stupéfiants, avait eu pour résultat de surcharger l’organisme de D.V. et de provoquer le décès de celui-ci.

31. Le 5 septembre 2013, le tribunal correctionnel tint audience. Les requérants 1, 3 et 6 se constituèrent partie civile. Par un jugement no 581/2013 rendu le jour même le tribunal acquitta les accusés.

32. Étaient déposés devant le tribunal le rapport d’autopsie et les rapports histologique, toxicologique et biologique, ainsi que différents certificats des hôpitaux d’Héraklion et de Chios dont lecture fut donnée. Le tribunal entendit treize témoins à charge, dont sept des requérants, deux psychiatres et la directrice adjointe de la prison. Quatre témoins à décharge, dont trois agents pénitentiaires et l’épouse du directeur de la prison, furent entendus.

33. Lors de sa déposition, la directrice adjointe de la prison indiqua qu’un détenu l’avait informée qu’un autre détenu, K., introduisait des stupéfiants dans la prison et que deux jours avant le décès de D.V. il en avait aussi introduit. Le lendemain du décès, de l’héroïne fut découverte dans l’anus de K. La directrice adjointe affirma qu’elle informait souvent le directeur que des détenus qui travaillaient dans la prison se livraient au trafic de stupéfiants. Ceux qui lui donnaient ce genre d’informations ne déposeraient car ils craignaient les trafiquants. L’administration savait qu’il y avait des filières mais ne faisait rien.

34. Le tribunal releva d’abord que le directeur de la prison n’avait aucune connaissance des informations données par D.V. pour qu’il eût pu prendre des mesures pour confisquer les stupéfiants. Étant lui-même en congé, il appartenait à la directrice adjointe d’agir, mais celle-ci tergiversa sous prétexte que l’heure était tardive, alors qu’elle devait savoir qu’en prison il n’y avait pas d’horaire pour procéder à une fouille. Quant à certaines omissions reprochées au directeur, elles n’avaient pas de lien de causalité avec le résultat, car il n’est pas certain que le décès de D.V. aurait été évité : même si la prison avait été équipée en moyens techniques pour détecter les produits stupéfiants, cela aurait pu limiter mais non empêcher totalement l’introduction de ces produits à l’intérieur de la prison. Le tribunal constata en outre que le directeur avait demandé, déjà en 2006, au ministère compétent de faire installer une machine de détection, mais qu’aucune suite n’avait été donnée à cette demande. Enfin, quant à d’autres omissions qui étaient reprochées au directeur, le tribunal nota que les prisons ne disposaient pas de chiens entraînés au dépistage et que la pose de caméras à l’intérieur des cellules constituerait une violation des droits des détenus.

35. En ce qui concerne la médecin de la prison, le tribunal releva que lorsque D.V. fut transféré à la prison de Chios, il demanda à la médecin de lui augmenter la posologie des médicaments qu’il prenait prétextant des problèmes psychologiques liés à des soucis familiaux. Après avoir reçu par fax la prescription émise par le médecin de l’hôpital d’Héraklion, la médecin de la prison augmenta la posologie de 10 à 16 cachets par jour. Le tribunal nota qu’il avait été établi que cette augmentation était tolérée par D.V. car elle ne lui avait pas causé des effets secondaires. Elle pourrait même être considérée comme justifiée puisque D.V. était un toxicomane dépendant et avait des symptômes intenses de manque. S’il devait y avoir des effets secondaires, ceux-ci se seraient manifestés immédiatement et non après l’écoulement de plusieurs jours. L’augmentation de la posologie, à elle seule, ne pouvait pas avoir été mortelle, même pour un organisme accablé comme celui du défunt. Il fallait par ailleurs tenir compte du fait que D.V. était porteur d’hépatite C même s’il n’avait pas développé une insuffisance rénale.

36. Le tribunal conclut que la médecin ne pouvait pas prévoir que D.V. consommerait de l’alcool et des stupéfiants en même temps que les médicaments psychotropes. Un médecin n’avait pas l’obligation juridique de garantir l’usage rationnel des médicaments qu’il prescrivait. Une approche différente conduirait à élargir de manière inadmissible la responsabilité pénale des médecins qui prescrivaient des médicaments psychotropes, car ils seraient considérés comme responsables chaque fois que le patient consommerait ces médicaments avec de l’alcool et des drogues.

37. Enfin, le tribunal renvoya l’affaire au procureur pour examiner si des poursuites devaient être engagées contre la directrice adjointe de la prison, la seule selon lui qui savait et n’avait pas réagi pour vérifier les informations fournies par D.V. La directrice avait seulement essayé de se justifier par un argument incroyable, à savoir que « je ne pensais pas que D.V. allait mourir ; il ne présentait aucun signe pour que je prenne des mesures ». Toutefois, l’information selon laquelle il y avait trafic des stupéfiants dans la prison était suffisante pour déclencher une alerte au sein de celle-ci.

38. Le procureur ordonna une enquête préliminaire mais n’accomplit aucun acte de procédure. Il classa l’affaire sans donner de motifs et refusa de fournir aux requérants une copie du dossier qui avait été ouvert au motif que ceux-ci n’avaient pas intérêt pour agir.

39. Le 12 septembre 2013, la requérante 3 demanda au procureur près le tribunal correctionnel d’introduire un appel contre le jugement no 581/2013, mais ce dernier refusa.

40. Le 21 octobre 2013, les requérants 1, 3 et 6 demandèrent au procureur près la Cour de cassation de se pourvoir en cassation contre le jugement d’acquittement précité. Le 23 octobre 2013, le procureur rejeta la demande sans donner de motifs.

41. Le 31 juillet 2013, tous les requérants saisirent le tribunal administratif de Mytilène d’une action en dommages-intérêts fondée sur l’article 105 de la loi d’accompagnement du code civil. Ils demandaient diverses sommes en raison du comportement négligent du personnel pénitentiaire et médical de la prison. L’audience fut fixée au 19 septembre 2018.

II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

42. Les articles pertinents de la loi no 3458/2006, relative aux stupéfiants, prévoient :

Article 30 (consommateurs des produits stupéfiants qui sont
soumis à un traitement spécial)

« 1. Ceux qui ont acquis une accoutumance à la consommation de stupéfiants et ne peuvent pas se désaccoutumer par leurs propres forces sont soumis à un traitement spécial conformément aux dispositions de la présente loi.

2. La réunion des conditions mentionnées au paragraphe précédent à la personne d’un accusé ou d’un condamné est constatée par le tribunal. (...) le tribunal peut ordonner une expertise psychiatrique et un examen clinique afin de faire déterminer s’il y a accoutumance, ainsi que la nature et l’étendue de celle-ci (...)

3. Celui qui effectue l’instruction préparatoire ou l’instruction ordonne obligatoirement une expertise, si l’accusé allègue dans un délai de vingt-quatre heures à compter de son arrestation ou de la présentation de sa défense, qu’il est toxicomane (...) »

Article 32 (admission des consommateurs de stupéfiants
dans un établissement thérapeutique)

« 1. Si une personne qui réunit les conditions de l’article 30 § 1 est condamnée pour quelque infraction que ce soit, le tribunal peut, dans sa décision de condamnation, ordonner l’admission de celle-ci, aux fins de la désintoxication, dans un établissement thérapeutique spécial ou dans un service spécialisé d’un établissement de détention. Si le besoin de désintoxication apparaît lors de l’instruction, l’admission est ordonnée par le juge d’instruction, après avis concordant du procureur (...). Si l’auteur de l’infraction déclare qu’il souhaite suivre un programme thérapeutique de désintoxication, le tribunal peut dans sa décision de condamnation ordonner qu’une partie de la peine sera purgée dans un établissement thérapeutique spécial ou dans un service spécialisé d’un établissement de détention (...) »

43. L’avocat des requérants produit l’article d’un journal de l’île de Chios, daté du 20 septembre 2008, dans lequel le chef du service de lutte contre les stupéfiants de l’île déclarait qu’en 2007-2008 son service avait constaté cinq à six cas de trafic de stupéfiants au sein de la prison. Le fait que les stupéfiants étaient accessibles aux détenus qui déclaraient ouvertement en faire usage était souligné aussi dans le rapport du Comité pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) qui s’était rendu cette prison lors de sa visite en Grèce les 17-29 septembre 2009.

44. L’article 105 de la loi d’accompagnement du code civil prévoit que :

« L’État est tenu de réparer les dommages causés par les actes illégaux ou omissions de ses organes lors de l’exercice de la puissance publique, sauf si les actes ou omissions [en question] ont eu lieu en méconnaissance d’une disposition destinée à servir l’intérêt public. L’organe fautif est solidairement responsable avec l’État, sous réserve des dispositions spéciales sur la responsabilité des ministres. »

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 2 DE LA CONVENTION

45. Les requérants se plaignent que l’État n’a pas respecté son obligation positive de protéger la vie de D.V., toxicomane, atteint d’hépatite C et traité avec des médicaments psychotropes, qui est décédé pendant sa détention à la prison de Chios. Ils reprochent à l’État de ne pas avoir soumis D.V. à un programme de désintoxication et de ne pas l’avoir hospitalisé dans un établissement spécialisé pour toxicomanes. Ils se plaignent aussi du caractère lacunaire de l’enquête menée par le ministère public et du fait que les résultats de celle-ci ne se sont pas fondés sur une analyse objective, détaillée et impartiale de toutes les données disponibles. Ils se plaignent, en outre, que l’enquête a été menée par le ministère public et la police de Chios et non par le Corps d’inspection et de contrôle de la détention, institué en 2002 et compétent pour ce type d’enquête, afin d’offrir des garanties d’impartialité dans le déroulement de l’enquête de ce type.

Ils allèguent une violation des articles 2, 3, 6 § 1 et 8 de la Convention. Maîtresse de la qualification juridique des faits de la cause, la Cour estime approprié d’examiner la requête sous l’angle de l’article 2 de la Convention qui, dans sa partie pertinente en l’espèce, est ainsi libellé :

« 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi (...) »

A. Question préliminaire

46. Le Gouvernement soutient que la deuxième requérante n’a pas respecté la condition prévue par l’article 45 § 3 du Règlement de la Cour. Il souligne qu’alors que la requête inclut des pouvoirs signés de tous les requérants, la troisième requérante n’a pas signé le sien et aucun des pouvoirs des autres requérants ne mentionne qu’il couvre aussi le cas de cette requérante.

47. Les requérants affirment que le défaut de signature de la deuxième requérante est le résultat d’un oubli et non d’un défaut de pouvoir.

48. La Cour note que la deuxième requérante était mineure à la date de l’introduction de la requête et que le pouvoir était signé par sa mère, la première requérante. Elle note aussi que cette dernière produit avec ses observations un nouveau pouvoir, en tant que représentante légale de la troisième requérante, par lequel elle déclare autoriser Me S. Simos à représenter la deuxième requérante dans l’examen de la présente requête par la Cour et approuver toutes les démarches que cet avocat a entreprises jusqu’à présent à l’égard de la deuxième requérante.

49. Dans ces circonstances, la Cour considère que la deuxième requérante fut valablement représentée devant elle par l’avocat précité.

50. Dès lors, l’exception que le Gouvernement tire de l’invalidité dudit pouvoir doit être rejetée.

B. Sur la recevabilité

51. Le Gouvernement invite la Cour à rejeter la requête pour nonépuisement des voies de recours internes. En ce qui concerne le volet matériel, ni le défunt, ni les requérants n’ont alerté les autorités sur les problèmes liés à la toxicomanie de celui-ci, ni déposé des demandes de transfert à une autre prison ou de prise en charge médicale. Quant au volet procédural, le Gouvernement soutient que : a) les requérants n’ont pas invoqué la violation de l’article 2 lors des procédures nationales faute pour les autorités d’avoir placé D.V. dans un établissement thérapeutique ; b) les requérants 2, 4, 5 et 7 n’ont jamais participé aux procédures nationales ; c) le requérant 8, quoiqu’il figure parmi ceux qui ont porté plainte, n’a participé à aucune autre procédure devant les autorités internes ; d) les requérants 1 et 6 n’ont pas demandé au procureur de faire appel contre la décision du tribunal correctionnel ; e) les requérants n’ont pas introduit une action en dommages-intérêts contre l’État sur le fondement de l’article 105 de la loi d’accompagnement du code civil.

52. Les requérants affirment qu’ils ont épuisé les voies de recours internes dans leurs efforts de faire découvrir les causes du décès de D.V. et de faire déterminer les responsabilités à ce sujet. Ils précisent aussi que le 8 août 2013, ils ont saisi le tribunal administratif de Mytilène d’une action en dommages-intérêts sur le fondement de l’article 105 de la loi d’accompagnement du code civil dont l’audience a été fixée au 19 septembre 2018. Il est certain que la décision définitive relative à cette action n’interviendra pas avant dix ans à compter de son introduction.

53. La Cour rappelle que l’obligation d’épuiser les recours internes impose aux requérants de faire un usage normal des recours disponibles et suffisants pour leur permettre d’obtenir réparation des violations qu’ils allèguent. Ces recours doivent exister à un degré suffisant de certitude, en pratique comme en théorie, sans quoi leur manquent l’effectivité et l’accessibilité voulues. Cependant, rien n’impose d’user de recours qui ne sont ni adéquats ni effectifs. Selon les « principes de droit international généralement reconnus », certaines circonstances particulières peuvent dispenser le requérant de l’obligation d’épuiser les recours internes qui s’offrent à lui. Pour pouvoir être jugé effectif, un recours doit être susceptible de remédier directement à la situation incriminée et présenter des perspectives raisonnables de succès. Le simple fait de nourrir des doutes quant aux perspectives de succès d’un recours donné qui n’est pas de toute évidence voué à l’échec ne constitue pas une raison propre à justifier la nonutilisation du recours en question. Cela étant, la Cour a fréquemment souligné qu’il faut appliquer la règle de l’épuisement des recours internes avec une certaine souplesse et sans formalisme excessif (Vučković et autres c. Serbie [GC], no 17153/11 et suiv., §§ 71, 73-74 et 76 ainsi que la jurisprudence citée).

54. En l’espèce, la Cour note que quatre des requérants ont été considérés comme ayant porté plainte pour le décès de D.V. : la requérante 1, épouse de D.V., la requérante 3, mère de D.V., et les requérants 6 et 8, frères de D.V. Trois d’entre eux, à savoir les requérants 1, 3 et 6 ont saisi le procureur près la cour d’appel d’Égée d’un recours contre la décision no 2/2011 du procureur près le tribunal correctionnel de Chios. Ces mêmes requérants se sont aussi constitués parties civiles lors de la procédure devant le tribunal correctionnel de Chios et ont par la suite saisi le procureur compétent de la demande l’invitant à se pourvoir en cassation contre le jugement d’acquittement no 581/2013. Quant aux requérants 4, 5 et 7, la Cour constate avec le Gouvernement qu’ils n’ont participé à aucune de ces procédures.

55. En revanche, les requérants 4, 5 et 7 ont introduit une action en dommages-intérêts contre l’État sur le fondement de l’article 105 de la loi d’accompagnement du code civil, action introduite également par tous les autres requérants.

56. Or, cet article, qui a un objet purement indemnitaire, prévoit que l’État est tenu de réparer les dommages causés par les actes illégaux ou omissions de ses organes lors de l’exercice de la puissance publique.

57. La Cour rappelle qu’il est de jurisprudence constante que, dans les cas où il n’est pas allégué que la mort a été infligée intentionnellement, l’obligation positive découlant de l’article 2 de la Convention n’exige pas nécessairement un recours de nature pénale ; dès lors, il peut y être satisfait par l’offre d’un recours devant les juridictions civiles, à condition qu’il soit efficace (voir, en dernier lieu, Lopes de Sousa Fernandes c. Portugal[GC], no 56080/13, §§ 137 et 215, 19 décembre 2017). De même, lorsqu’une voie de recours a priori effective a été utilisée, l’article 35 § 1 n’exige pas l’usage d’une autre voie dont le but est pratiquement le même (voir, par exemple, Kolonja c. Grèce, no 49441/12, § 36, 19 mai 2016).

58. La Cour note que sur le fondement de l’article 105 précité, les requérants demandaient à l’État l’octroi de certaines indemnités en raison, comme ils l’exposaient dans leur action, du comportement négligent du personnel pénitentiaire et médical de la prison. La Cour relève, d’autre part, que devant le tribunal correctionnel les requérants s’étaient constitués parties civiles pour soutenir les accusations pesant sur le directeur et la médecin de la prison : le premier était accusé de ne pas avoir mis en œuvre des mécanismes de contrôle pour empêcher l’introduction de stupéfiants dans la prison, qui ont causé le décès de D.V. et la seconde d’avoir prescrit des médicaments psychotropes et augmenté la dose, sans avoir de formation de psychiatre et sans avoir fait précéder cette prescription et augmentation d’un examen par un médecin spécialiste. En arrière-plan des deux actions, celle en tant que partie civile et celle fondée sur l’article 105 précité, il y avait donc identité des faits et des griefs. L’arrêt d’acquittement du tribunal correctionnel laissait présager que l’État n’avait commis aucune illégalité et ne serait donc redevable d’aucune indemnité envers les requérants. Eu égard à ces considérations, la Cour estime que l’action prévu à l’article 105 ne pouvait pas constituer en l’espèce un recours effectif. Qui plus est, la Cour constate que cette action a été introduite par les requérants le 31 juillet 2013 et l’audience a été fixée au 19 septembre 2018, soit plus de cinq ans plus tard.

59. Compte tenu de ces considérations, la Cour estime que dans les circonstances de l’espèce, l’action introduite par les requérants 4, 5 et 7 n’avait pas des chances de succès et n’était donc pas effective au sens de la jurisprudence précitée.

60. En conclusion, la Cour considère que seuls les requérants 1, 3, 6 et 8 ainsi que la requérante 2, fille de D.V. et de la requérante 1 et mineur au moment des faits, ont épuisé les voies de recours internes. La Cour rejette donc l’exception du Gouvernement en ce qui concerne ces requérants et l’accueille quant aux requérants 4, 5 et 7 qui n’ont introduit que l’action prévue à l’article 105 précité.

61. Constatant que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’elle ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour la déclare recevable.

C. Sur le fond

62. Sensible à la nature subsidiaire de sa mission, la Cour reconnaît qu’elle ne peut sans de bonnes raisons assumer le rôle de juge du fait de première instance lorsque cela n’est pas rendu inévitable par les circonstances de l’affaire dont elle se trouve saisie. Par conséquent, elle se penchera tout d’abord sur le grief de la requérante relatif à la non-réalisation d’une enquête effective à la suite du décès de D.V. dans la prison (McKerr c. Royaume-Uni (déc.), no 28883/95, 4 avril 2000, Dzhulay c. Ukraine, no 24439/06, § 69, 3 avril 2014, Chinez c. Roumanie, no 2040/12, § 57, 17 mars 2015, Yaroshovets et autres c. Ukraine, no 74820/10, 71/11, 76/11, 83/11, et 332/11, § 77, 3 décembre 2015, et Sadkov c. Ukraine, no 21987/05, § 90, 6 juillet 2017).

1. Sur l’absence d’une enquête effective

a) Arguments des parties

63. Les requérants soulignent qu’il a fallu quatre ans et onze mois aux autorités pour mener à terme les dépositions des témoins et engager des poursuites contre le directeur et la médecin de la prison. Par ailleurs, celui qui a conduit l’instruction préparatoire a négligé de prendre les mesures suivantes :

– citer à comparaître devant le tribunal correctionnel l’expert qui a effectué l’examen toxicologique pour exposer les causes du décès et l’incidence des médicaments psychotropes sur celui-ci ;

– entendre les cinq codétenus de D.V. qui ont été transférés dans une autre prison immédiatement après le décès ;

– entendre le chef du service de lutte contre les stupéfiants de Chios pour que celui-ci décrive les résultats de son enquête à l’intérieur de la prison pendant l’année ayant précédé le décès ;

– demander à la direction de la prison d’expliquer les mesures qu’elle avait prises pour empêcher l’introduction des stupéfiants dans celle-ci ;

– entendre les agents de la prison qui en collaboration avec le pharmacien avaient distribué à D.V. les médicaments prescrits ;

– entendre le médecin qui selon la médecin de la prison lui avait envoyé un fax avec les médicaments à prescrire à D.V. ;

– demander la production du livre de distribution des médicaments au sein de la prison pour constater quels médicaments avaient été livrés à D.V. ;

– joindre au dossier de l’affaire le dossier médical de D.V., le traitement prescrit, ainsi que le résultat de l’enquête disciplinaire effectuée par le parquet après le décès.

64. Le Gouvernement souligne que les autorités nationales ont examiné les circonstances de la cause avant même que la procédure pénale contre le directeur et la médecin de la prison soit engagée. Cette procédure a pris fin devant le tribunal correctionnel de Chios suite à un examen approfondi des éléments de preuve recueillis et soumis aux autorités. Tant le jugement no 581/2013 de ce tribunal que la décision du procureur près le tribunal correctionnel, qui concluaient à l’absence de toute responsabilité pénale des deux accusés, étaient suffisamment motivés. L’affaire a, du reste, été réexaminée à l’occasion de la demande des requérants d’introduire un appel et de se pourvoir en cassation contre le jugement d’acquittement. Les requérants ont eu la possibilité de participer à la procédure et d’exercer tous les droits que le code de procédure pénal confère aux parties civiles.

65. Le Gouvernement souligne aussi que les autorités ont réagi d’office dès qu’elles ont été informées de l’affaire, que l’enquête était approfondie, compte tenu du nombre des éléments de preuve recueillis et que la participation des proches de D.V. était effective. Le fait que le résultat de l’enquête n’a pas satisfait les requérants car il n’y a pas eu condamnation du directeur et de la médecin de la prison ne signifie pas que l’enquête était défaillante.

66. Enfin, le Gouvernement, rappelle que la Cour ne constitue pas un quatrième degré de juridiction et ne peut pas examiner l’affaire de la même manière que les autorités judiciaires nationales.

b) Appréciation de la Cour

i) Principes généraux

67. L’obligation de protéger le droit à la vie qu’impose l’article 2 de la Convention, combinée avec le devoir général incombant à l’État en vertu de l’article 1 de « reconna[ître] à toute personne relevant de [sa] juridiction les droits et libertés définis [dans] la (...) Convention », requiert également, par implication, que soit menée une forme d’enquête officielle et effective lorsque le recours à la force a entraîné mort d’homme. Il s’agit essentiellement, au travers d’une telle enquête, d’assurer l’application effective des lois internes qui protègent le droit à la vie et, dans les affaires où des agents ou organes de l’État sont impliqués, de garantir que ceux-ci aient à rendre des comptes au sujet des décès survenus sous leur responsabilité. Quant au type d’enquête devant permettre d’atteindre ces objectifs, il peut varier selon les circonstances. Toutefois, quelles que soient les modalités de l’enquête, les autorités doivent agir d’office, dès que l’affaire est portée à leur attention. Elles ne sauraient laisser aux proches du défunt l’initiative de déposer une plainte formelle ou d’assumer la responsabilité d’une procédure d’enquête (McKerr c. Royaume-Uni, no 28883/95, § 111, CEDH 2001-III).

68. Encore faut-il préciser qu’en la matière les exigences procédurales de l’article 2 s’étendent au-delà du stade de l’instruction préliminaire lorsque, comme en l’espèce, celle-ci a entraîné l’ouverture de poursuites devant les juridictions nationales : c’est l’ensemble de la procédure, y compris la phase de jugement, qui doit satisfaire à l’interdiction posée par cet article. En particulier, les instances judiciaires internes ne doivent en aucun cas s’avérer disposées à laisser impunies des atteintes à l’intégrité physique et morale des personnes. Cela est indispensable pour maintenir la confiance du public et assurer son adhésion à l’État de droit ainsi que pour prévenir toute apparence de tolérance d’actes illégaux, ou de collusion dans leur perpétration (voir, mutatis mutandis, Okkalı c. Turquie, no 52067/99, § 65, CEDH 2006-XII).

69. Il ne faut nullement déduire de ce qui précède que l’article 2 peut impliquer le droit pour un requérant de faire poursuivre ou condamner au pénal des tiers ou une obligation de résultat supposant que toute poursuite doit se solder par une condamnation, voire par le prononcé d’une peine déterminée. En revanche, les juridictions nationales ne doivent en aucun cas s’avérer disposées à laisser impunies des atteintes à la vie. Cela est indispensable pour maintenir la confiance du public et assurer son adhésion à l’État de droit ainsi que pour prévenir toute apparence de tolérance d’actes illégaux, ou de collusion dans leur perpétration. La tâche de la Cour consiste donc à vérifier si et dans quelle mesure les juridictions, avant de parvenir à telle ou telle conclusion, peuvent passer pour avoir soumis le cas devant elles à l’examen scrupuleux que demande l’article 2 de la Convention, pour que la force de dissuasion du système judiciaire mis en place et l’importance du rôle que celui-ci se doit de jouer dans la prévention des violations du droit à la vie ne soient pas amoindries (Öneryıldız c. Turquie [GC], no 48939/99, § 96, CEDH 2004-XII et la jurisprudence citée).

ii) Application des principes en l’espèce

70. En ce qui concerne le caractère rapide de l’enquête, la Cour note que le 14 novembre 2008, soit six jours après le décès de D.V., certains des requérants déposèrent une plainte contre X auprès du parquet de Chios. Le 31 janvier 2011, le procureur près le tribunal correctionnel de Chios a classé l’affaire. Le 22 février 2011, certains des requérants ont saisi le procureur près la cour d’appel d’Égée d’une demande en annulation de la décision de classement. Par trois décisions successives en 2011, 2012 et 2013, ce dernier a ordonné un complément d’enquête. Le 27 février 2013, la requérante 1 a écrit au ministère de la Justice pour se plaindre de la longueur de l’enquête. Le 15 juillet 2013, le procureur près la cour d’appel a renvoyé le directeur et la médecin de la prison en jugement.

71. La Cour considère qu’une période d’instruction de quatre ans et huit mois pour déterminer les responsabilités et décider s’il fallait renvoyer en jugement des personnes impliquées dans une affaire concernant le décès par overdose d’un détenu ne correspond pas aux exigences de diligence et célérité pour qu’une enquête soit effective au sens de l’article 2.

72. Quant au caractère approfondi de l’enquête, la Cour rappelle que lorsque l’enquête officielle mène à l’ouverture d’une procédure devant les juridictions nationales, cette procédure dans son ensemble, y compris au stade du procès, doit respecter l’obligation positive de protéger juridiquement le droit à la vie. Ainsi, les juridictions nationales ne doivent en aucun cas se montrer disposées à laisser impunies des atteintes à la vie. La tâche de la Cour consiste donc à vérifier si et dans quelle mesure ces juridictions, avant de parvenir à telle ou telle conclusion, peuvent passer pour avoir soumis l’affaire à l’examen scrupuleux qu’exige l’article 2 de la Convention, de manière que la force de dissuasion du système judiciaire mis en place et l’importance du rôle que celui-ci doit jouer dans la prévention des violations du droit à la vie ne soient pas amoindries (Armani da Silva c. Royaume-Uni [GC], no 5878/08, § 239, 30 mars 2016).

73. La Cour note d’abord que le tribunal correctionnel de Chios qui a jugé le directeur et la médecin de la prison disposait du rapport d’autopsie, des rapports histologique, toxicologique et biologique relatifs au décès, ainsi que de différents certificats des hôpitaux d’Héraklion et de Chios. La Cour note aussi que le tribunal a entendu treize témoins à charge, dont sept des requérants, deux psychiatres et la directrice adjointe de la prison, et quatre témoins à décharge, dont trois agents pénitentiaires et l’épouse du directeur de la prison. Il est évident que sa décision acquittant le directeur et la médecin de la prison a été fondée sur les dépositions des témoins à décharge et les dépositions des accusés. Toutefois, la Cour relève qu’il y avait d’autres personnes dont la déposition pouvait être déterminante pour l’issue de l’affaire et qui n’ont pas été cités à comparaître devant le tribunal.

74. En premier lieu, les détenus qui partageaient la cellule de D.V. ne furent entendus par aucune autorité impliquée dans l’enquête et n’ont pas été non plus cités à comparaître devant le tribunal correctionnel. De même, n’ont été entendus ni l’expert qui a effectué l’examen toxicologique du défunt, ni les agents pénitentiaires qui avaient distribué les médicaments les jours précédant le décès.

75. En deuxième lieu, le tribunal a renvoyé l’affaire au procureur pour examiner si des poursuites devaient être engagées contre la directrice adjointe de la prison, la seule selon lui qui savait et n’avait pas réagi pour vérifier les informations fournies par D.V. Le procureur a ordonné une enquête préliminaire mais il n’a accompli aucun acte de procédure. Il a classé l’affaire sans donner de motifs et a refusé de fournir aux requérants une copie du dossier qui avait été ouvert au motif que ceux-ci n’avaient pas intérêt pour agir.

76. Eu égard à ces éléments, la Cour considère que les autorités n’ont pas soumis le cas de D.V. à l’examen scrupuleux requis par l’article 2 de la Convention et qu’elles n’ont donc pas mené une enquête effective sur les circonstances de son décès.

77. En conséquence, elle conclut à la violation de l’article 2 de la Convention en son volet procédural.

2. Sur la prétendue responsabilité de l’État dans le décès de D.V.

a) Arguments des parties

78. Les requérants soutiennent que D.V. avait en temps utile fait part aux autorités de sa toxicomanie et de sa dépendance aux stupéfiants et, par conséquent, le juge d’instruction et le tribunal auraient dû ordonner une expertise et son admission dans un établissement thérapeutique ou dans un établissement pénitentiaire disposant d’une unité thérapeutique, comme le prévoient les articles 30 et 32 de la loi no 3458/2006. En outre, le dossier médical de D.V. avait été transmis à la prison de Chios. Dans leurs dépositions, dans le cadre de l’enquête préliminaire, la médecin de la prison et la directrice adjointe de la prison ont affirmé qu’elles étaient au courant de l’état de D.V.

79. Les requérants affirment que les autorités n’ont pris aucune mesure pour protéger la vie de D.V. alors qu’elles étaient dans l’obligation de demander au procureur d’ordonner une expertise et en fonction de la conclusion de celle-ci de l’intégrer dans un programme de désintoxication de l’hôpital Skylitsio de Chios dans lequel fonctionnait une unité des soins spécialisée.

80. Enfin, les requérants dénoncent d’abord les négligences commises par le personnel pénitentiaire et la médecin de la prison. La responsabilité du personnel pénitentiaire était d’autant plus grande qu’un trafic de stupéfiants dans la prison avait été constaté à plusieurs reprises. Par ailleurs, comme cela ressort de leurs dépositions lors de l’enquête préliminaire, tant la directrice de la prison que la médecin connaissaient l’historique et l’état de D.V. Or, les autorités n’ont pas pris les mesures nécessaires pour empêcher l’introduction de stupéfiants dans la prison et la consommation de ceux-ci par D.V. En ce qui concerne la médecin de la prison, elle n’a pas demandé, comme elle était obligée, que D.V. soit examiné par un psychiatre de l’hôpital public de Chios qui se prononcerait sur le besoin de prescrire des médicaments psychotropes et leur posologie, mais elle a décidé elle-même d’augmenter les doses déjà prescrites, de sorte que le requérant prenait 16 cachets par jour. Les arguments qu’elle a invoqués lors de l’enquête pour se justifier de sa manière de procéder allaient à l’encontre de toute déontologie médicale.

81. Le Gouvernement soutient que les requérants ne produisent aucun élément antérieur au décès de D.V. qui établirait l’état de toxicomanie de celui-ci. Par ailleurs, D.V. n’a pas fait état de son addiction, ni au moment de son arrestation, ni après, lors de la présentation de sa défense, n’a pas demandé sa mise en liberté sous condition en raison de son état ou d’un risque pour sa vie qu’il encourait au sein de la prison.

82. Le Gouvernement affirme que les tribunaux ont constaté que les soins médicaux dispensés à D.V. n’étaient pas inappropriés. Son état de santé n’a jamais été considéré comme inquiétant ou critique pour que son transfert à un hôpital ou à un autre établissement pénitentiaire soit requis. Le 10 octobre 2008, D.V. a été transféré à l’hôpital de Chios, mais il n’a rien dit par rapport à son addiction ou à la prise des psychotropes dans la prison. En revanche, alors qu’il souffrait d’hépatite C, il a entamé le 7 novembre 2008 une grève de la faim, ce qui a aggravé son état de santé.

83. Les autorités ne pouvaient pas être au courant du trafic des stupéfiants à l’intérieur de la prison, eu égard à l’inventivité dont font preuve les détenus et à la multitude des manières qui existent pour faire entrer de telles substances en prison. Un contrôle absolu est impossible en la matière.

84. Quant à l’allégation des requérants selon laquelle le décès de D.V. était dû à une posologie excessive des médicaments que lui avait prescrits la médecin de la prison, elle a été examiné par les juridictions internes. À cet égard, la psychiatre E.B. avait déposé que la prise des médicaments ne pouvait pas à elle seule provoquer le décès. En outre, le rapport d’autopsie a précisé que le décès était dû à un œdème et une hémorragie pulmonaires. En plus, dans le jugement no 581/2013 du tribunal correctionnel de Chios il est mentionné que D.V. avait lui-même demandé à la médecin de lui augmenter la posologie.

85. Enfin, et de manière générale, un traitement de désintoxication ne peut pas avoir lieu sans la volonté de la personne concernée que celle-ci soit ou non détenue. En l’occurrence, D.V. avait refusé de se soumettre à un tel traitement.

b) Appréciation de la Cour

i) Principes généraux

86. La Cour rappelle que la première phrase de l’article 2 § 1 de la Convention astreint l’État non seulement à s’abstenir de provoquer la mort de manière volontaire et irrégulière, mais aussi à prendre les mesures nécessaires à la protection de la vie des personnes relevant de sa juridiction (L.C.B. c. Royaume-Uni, 9 juin 1998, § 36, Recueil des arrêts et décisions 1998-III, Osman c. Royaume-Uni, 28 octobre 1998, § 115, Recueil 1998‑VIII, et Centre de ressources juridiques au nom de Valentin Câmpeanu c. Roumanie [GC], no 47848/08, § 130, CEDH 2014).

87. La Cour rappelle également que l’article 2 de la Convention peut, dans certaines circonstances bien définies, mettre à la charge des autorités l’obligation positive de prendre préventivement des mesures d’ordre pratique pour protéger l’individu contre autrui ou, dans certaines circonstances particulières, contre lui-même. Cependant, il faut interpréter cette obligation de manière à ne pas imposer aux autorités un fardeau insupportable ou excessif, sans perdre de vue, en particulier, l’imprévisibilité du comportement humain et les choix opérationnels à faire en matière de priorités et de ressources. Pour qu’il y ait obligation positive, il doit être établi que les autorités savaient ou auraient dû savoir sur le moment qu’un individu donné était menacé de manière réelle et immédiate dans sa vie, et qu’elles n’ont pas pris, dans le cadre de leurs pouvoirs, les mesures qui, d’un point de vue raisonnable, auraient sans doute pallié ce risque (voir, parmi beaucoup d’autres, Nencheva et autres c. Bulgarie, no 48609/06, § 108, 18 juin 2013, Van Colle c. Royaume-Uni, no 7678/09, § 88, 13 novembre 2012, A. et autres c. Turquie, no 30015/96, §§ 44-45, 27 juillet 2004, et Ilbeyi Kemaloğlu et Meriye Kemaloğlu, précité, § 36).

88. S’agissant encore des personnes privées de liberté, la Cour rappelle par ailleurs que la Convention impose à l’État l’obligation positive de veiller, entre autres, à ce que la santé et le bien-être du prisonnier soient assurés de manière adéquate (voir, sous l’angle de l’article 3 de la Convention, Kudła c. Pologne [GC], no 30210/96, § 94, CEDH 2000‑XI, Riviere c. France, no 33834/03, § 62, 11 juillet 2006, et Marro et autres c. Italie (déc.), no 29100/07, § 42, 8 avril 2014) et de dispenser avec diligence des soins médicaux, lorsque l’état de santé de la personne le nécessite, afin de prévenir une issue fatale (Maslova c. Russie, no 15980/12, § 69, 14 février 2017, et Scavuzzo-Hager et autres c. Suisse, no 41773/98, § 65, 7 février 2006).

89. Plus particulièrement, la Cour a reconnu que les autorités, afin de protéger la santé et la vie des citoyens, étaient tenues d’adopter des mesures pour contrer le trafic de drogue, et ce à plus forte raison lorsque ce fléau a lieu ou pourrait avoir lieu dans un endroit sécurisé, tel qu’une prison ; il n’en demeure pas moins qu’elles ne sauraient pour autant garantir de manière absolue un arrêt total du trafic de drogue et qu’elles jouissent d’un large pouvoir d’appréciation dans le choix de la méthode à utiliser en la matière. À cet égard, la Cour rappelle qu’elles sont liées par une obligation de moyens et non de résultat (Marro et autres, précitée, § 45).

ii) Application des principes en l’espèce

90. La Cour doit alors examiner si les autorités savaient ou auraient dû savoir sur le moment qu’il existait un risque réel et immédiat pour la vie de D.V. et, dans l’affirmative, si elles ont pris les mesures que l’on pouvait raisonnablement attendre d’elles pour empêcher la matérialisation dudit risque à cet égard.

91. La Cour note d’emblée que D.V n’a jamais fait part aux autorités de son souhait d’être soumis à un programme de désintoxication, ou d’être suivi par un médecin de son choix ou qu’il soit placé dans une autre prison ayant une unité des soins spécialisés.

92. Par la suite et, en premier lieu, la Cour note que lorsqu’il est arrivé à la prison de Chios, D.V. s’était déjà fait prescrire, alors qu’il était détenu dans la prison d’Héraklion, un traitement consistant en la prise de 10 cachets de médicaments psychotropes par jour. Avant de prendre la décision d’augmenter la posologie des cachets prescrits à D.V., la médecin de la prison a consulté l’Organisme de lutte contre les stupéfiants basé à Athènes. Elle avait aussi reçu un fax envoyé par un médecin généraliste de D.V. qui affirmait que ce dernier devait suivre le traitement qui y était indiqué et qui consistait à augmenter la posologie. Il en ressort que l’on ne saurait raisonnablement reprocher à la médecin de la prison d’avoir agi de manière négligente.

93. En deuxième lieu, une négligence ne saurait non plus être reprochée à la directrice adjointe de la prison que D.V. avait prévenue la veille de son décès qu’un trafic de stupéfiants avait lieu dans la prison. Compte tenu de l’heure tardive de cet entretien et du manque de personnel pénitentiaire suffisant dans la prison à cette heure, la directrice adjointe n’a pu ordonner une fouille des cellules que le lendemain qui n’a cependant pas révélé l’existence de stupéfiants (paragraphe 12 ci-dessus).

94. En troisième lieu, il ne ressort d’aucun élément du dossier que la veille de son décès, D.V. avait consommé, en sus de ses médicaments, des stupéfiants dont la présence dans la prison était bien connue des autorités. L’examen toxicologique effectué sur D.V. après son décès a démontré que le décès était dû à la prise de plusieurs substances psychotropes (paragraphe 24 ci-dessus), mais ne faisait pas état de dépistage de stupéfiants dans le sang.

95. Dans ces conditions, la Cour estime que les autorités pénitentiaires ne disposaient pas d’éléments suffisants pouvant les amener à croire qu’à la veille de son décès, D.V. se trouvait dans une situation de danger particulier et qu’il encourait, par rapport à tout autre détenu toxicomane, un risque potentiellement plus élevé d’en subir des conséquences mortelles.

96. À la lumière de ce qui précède, la Cour considère que les circonstances du décès de D.V. dans la prison de Chios ne permettent pas d’établir la responsabilité de l’État quant au décès en cause.

97. Partant, la Cour estime qu’il n’y a pas eu violation de l’article 2 dans son volet matériel.

II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

98. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

99. En premier lieu, les requérantes 1 et 3 réclament certaines sommes au titre du préjudice matériel qu’elles estiment avoir subi. Plus particulièrement, l’épouse de D.V. réclame 63 000 euros (EUR), somme correspondant à des revenus familiaux qu’elle estime avoir perdu du 8 novembre 2008 au 31 décembre 2015, à cause du décès de son mari. De son côté, la fille de D.V. demande 104 400 EUR au titre de la perte des subsides en raison du décès. En outre, tous les requérants demandent différentes sommes pour dommage moral : la requérante 1 : 300 000 EUR ; la requérante 2 : 500 000 EUR ; chacun des requérants 3 et 4 : 200 000 EUR ; chacun des requérants 5, 6, 7 et 8 : 100 000 EUR.

100. Le Gouvernement soutient que les arguments par lesquels les requérantes 1 et 2 tentent de fonder leurs prétentions pour dommage matériel sont incompréhensibles, hypothétiques et dépourvus de logique. Quant aux prétentions relatives au dommage moral, elles sont excessives et injustifiées.

101. La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation procédurale constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. En revanche, au titre du préjudice moral, elle considère qu’il y a lieu d’octroyer à chacune des requérantes 1 et 2, soit l’épouse et la fille du défunt, la somme de 15 000 EUR et à chacun des requérants 3, 6 et 8 la somme de 13 000 EUR.

B. Frais et dépens

102. Les requérants demandent également conjointement 8 000 EUR pour les frais et dépens engagés devant la Cour.

103. Le Gouvernement souligne que les requérants ne produisent pas de facture qui établirait qu’ils ont versé cette somme à leur avocat ou qu’ils seront obligés de la verser. En outre, la somme réclamée est excessive et injustifiée, compte tenu du fait qu’il y a eu une requête et des observations communes pour tous les requérants.

104. La Cour ne doute pas qu’en introduisant la requête et en présentant des observations, le conseil des requérants leur a fourni l’assistance juridique nécessaire. Elle estime donc raisonnable de leur accorder conjointement 2 000 EUR à ce titre (voir, parmi d’autres, Adiele et autres c. Grèce, no 29769/13, 25 février 2016).

C. Intérêts moratoires

105. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable en ce qui concerne les requérants 1, 2, 3, 6 et 8 et irrecevable quant aux requérants 4, 5 et 7 ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 2 de la Convention dans son volet procédural ;

3. Dit qu’il n’y a pas eu violation de l’article 2 de la Convention dans son volet matériel ;

4. Dit

a) que l’État défendeur doit verser aux requérants, dans les trois mois, à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes :

i. 15 000 EUR (quinze mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, à chacune des requérantes 1 et 2 pour dommage moral ;

ii. 13 000 EUR (treize mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, à chacun des requérants 3, 6 et 8 pour dommage moral ;

iii. 2 000 EUR (deux mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par les requérants, pour frais et dépens ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

5. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 7 février 2019, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.

Renata DegenerKsenija Turković
Greffière adjointePrésidente

ANNEXE

1. Eleftheria PATSAKI est une ressortissante grecque née en 1982, résidant à Héraklion (Crète)
2. Antigoni-Panagiota VOUVAKI-PATSAKI est une ressortissante grecque née en 2003, résidant à Héraklion (Crète)
3. Athina VOUVAKI est une ressortissante grecque née en 1952, résidant à Héraklion (Crète)
4. Antonis VOUVAKIS est un ressortissant grec né en 1949, résidant à Héraklion (Crète)
5. Giannis VOUVAKIS est un ressortissant grec né en 1973, résidant à Héraklion (Crète)
6. Georgios VOUVAKIS est un ressortissant grec né en 1971, résidant à Héraklion (Crète)
7. Stavros VOUVAKIS est un ressortissant grec né en 1977, résidant à Héraklion (Crète)
8. Alexandros VOUVAKIS est un ressortissant grec né en 1974, résidant à Héraklion (Crète)


Synthèse
Formation : Cour (premiÈre section)
Numéro d'arrêt : 001-189734
Date de la décision : 07/02/2019
Type d'affaire : au principal et satisfaction équitable
Type de recours : Violation de l'article 2 - Droit à la vie (Article 2-1 - Enquête effective) (Volet procédural);Non-violation de l'article 2 - Droit à la vie (Article 2-1 - Vie) (Volet matériel)

Parties
Demandeurs : PATSAKI ET AUTRES
Défendeurs : GRÈCE

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SIMOS S.

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2021
Fonds documentaire ?: HUDOC

Source

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