C’est à tort que le premier juge a déclaré nulle la saisie litigieuse et ordonné sa mainlevée, dès lors que les seules pièces produites au dossier ne peuvent suffire à établir que le tiers est propriétaire des biens saisis.
Cour d’Appel d’Ab, 5ème Chambre Civile et Commerciale, Arrêt N° 639 du 27 novembre 2007 – Affaire : Dame R. c/ Ac et Autres. – Le Juris-Ohada n° 1/2010 (Janvier – Février – Mars), page 50.
La Cour,
Vu les pièces du dossier ; Ouï les partes en leurs demandes, fins et conclusions ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par exploit en date du 25 avril 2007, comportant ajournement au 08 mai 2007, Madame R. a relevé appel de l’ordonnance de référé n° 479 rendue le 10 avril 2007 par la Juridiction des Référés du Tribunal de Première Instance d’Ab Aa, qui a déclaré nulle la saisie conservatoire pratiquée sur les biens meubles corporels de Madame Ac, ainsi que tous les actes subséquents et en a ordonné la mainlevée ;
Il ressort des énonciations de la décision entreprise, que Madame Af, en exécution de l’arrêt n° 607 en date du 19 mai 2006 rendu par la Cour d’Appel d’Ab, qui condamnait Monsieur Ac à lui payer les sommes de 21.450,000 francs et 500.000 francs, faisait pratiquer une saisie conservatoire, le 06 novembre 2006, sur les biens situés dans le magasin de Madame Ac ;
Prétendant que lesdits biens appartenaient à son employeur dame Ac, Monsieur Ac saisissait le 02 mars 2007, la Juridiction des référés, en annulation de la saisie litigieuse ;
Le juge des référés, dans son ordonnance querellée en date du 10 avril 2007, faisait droit à sa demande, aux motifs que l’examen des pièces du dossier, notamment les bons de commande, faisait ressortir que les biens saisis n’appartenaient pas à Monsieur Ac, mais étaient la propriété de Madame Ac ;
En cause d’appel, Madame R. expose que la saisie qu’elle a fait pratiquer sur les biens litigieux est régulière parce que respectant les dispositions légales en la matière ;
Elle soutient que Monsieur Ac a confectionné des documents établissant une certaine Ac comme propriétaire des objets saisis, sans que celle-ci ne se soit à aucun moment de la procédure, personnellement manifestée pour attester de son droit de propriété ;
Elle ajoute qu’il est étonnant que Monsieur Ac, à qui elle a prêté la somme de 48.450.000 francs et qui reste encore lui devoir la somme de 21.450.000 francs, soit employé ainsi que son frère Ac, par Madame Ac ;
Elle fait valoir que la Cour devra infirmer la décision du premier juge, qui aurait dû vérifier les allégations de Monsieur Ac, ou se déclarer incompétente, alors surtout qu’il est établi que ce dernier a depuis 1998, date du prêt, usé de manœuvres dilatoires pour ne pas payer sa dette et a été à cet effet, déjà condamné à payer des dommages et intérêts par les juridictions ;
Elle fait remarquer d’une part, que l’analyse des pièces produites permet de constater que la fiche de déclaration fiscale de Madame Ac mentionne qu’elle est couturière, alors qu’aucun matériel de couture ne figure parmi les biens saisis ;
Qu’en outre, contrairement aux indications contenues dans cette fiche, le magasin de la couturière est situé à Adjamé ; d’autre part, qu’alors que dans la fiche de déclaration, le magasin et situé à Adjamé, rue Kaolin lot n° 288, la saisie a été pratiquée à Ae Ad A, lot n° 20 C ;
Qu’enfin, elle conclut à une fraude de la part de Monsieur Ac et sollicite l’infirmation de la décision querellée ;
Monsieur Ac expose par le canal de Maître FLAN G.-G. LAMBERT, Avocat à la Cour, que le contrat de bail produit au dossier est établi au nom de Madame Ac, qui est la propriétaire des biens saisis ;
Il fait valoir que lesdits biens portent sur des matières textiles qui ont un rapport direct avec le métier de couturière exercé par dame Ac, dont il gère le magasin ;
Il ajoute que Madame Ac ne rapporte pas la preuve de ce que Monsieur Ac est le propriétaire des biens saisis ;
Il sollicite dès lors, la confirmation de la décision querellée ;
DES MOTIFS
EN LA FORME :
Considérant que Monsieur Ac a conclu ;
Qu’il y a lieu de statuer contradictoirement ;
Considérant que l’appel de Madame Ac est conforme à la loi ; qu’il y a lieu de le recevoir.
AU FOND :
SUR LE BIEN-FONDE DE L’APPEL
Considérant qu’aux termes de l’article 141 du Traité OHADA portant voies d’exécution, « le débiteur peut demander la nullité de la saisie portant sur un bien dont il n’est pas propriétaire » ;
Considérant que s’il est établi au dossier, que les biens saisis sont présentés comme appartenant à Madame Ac, les pièces produites au dossier font ressortir que les factures produites ont été établies pour permettre à Monsieur Ac d’organiser son insolvabilité ;
Qu’en effet, il résulte des pièces versées au dossier, que ni Ac ni son frère Ac trouvés maintes fois sur les lieux de la saisie, n’ont à aucun moment indiqué qu’il n’était pas propriétaire des biens saisis ; qu’il ne fait ailleurs pas la preuve de sa qualité de simple gérant du magasin litigieux ;
Qu’ainsi, les seules pièces produites au dossier ne peuvent suffire à établir que Madame Ac est la propriétaire des biens saisis ;
Que c’est donc à tort que le premier juge a déclaré nulle la saisie litigieuse et ordonné sa mainlevée ; qu’il y a lieu d’infirmer la décision querellée et statuant à nouveau, de débouter Monsieur Ac de son action mal fondée.
SUR LES DEPENS
Considérant que Monsieur Ac succombe ;
Qu’il y a lieu de le condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile, en référé et en dernier ressort ;
- Reçoit Madame R. en son appel relevé de l’ordonnance n° 479 rendue le 10 avril 2007 par la Juridiction des Référés du Tribunal de Première Instance d’Ab ;
- L’y dit bien fondée ; - Infirme l’ordonnance entreprise ; - Déboute Monsieur Ac de son action en mainlevée de la saisie litigieuse ; - Condamne Monsieur Ac aux dépens.
PRESIDENT : KOUASSI BROU Bertin.
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