Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision référencée " 48 SI " du 27 janvier 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul, ainsi que les six décisions individuelles de retrait de points qui y étaient récapitulées. Par un jugement n° 2210875 du 2 avril 2024, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif a donné acte à M. A... du désistement de ses conclusions dirigées contre la décision du 27 janvier 2022 et contre cinq des décisions qui y étaient récapitulées et annulé la décision de retrait de trois points consécutive à l'infraction commise le 12 avril 2020.
Par un pourvoi, enregistré le 26 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions de M. A....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- le code de la route ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'à la suite d'une infraction au code de la route relevée le 12 avril 2020 par procès-verbal électronique, le ministre de l'intérieur a retiré trois points du capital de points du permis de conduire de M. A.... Par un jugement du 2 avril 2024, contre lequel le ministre de l'intérieur et des outre-mer se pourvoit en cassation, la magistrate désignée du tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision au motif que le ministre n'apportait pas la preuve, qui lui incombait, de la délivrance à l'intéressé, préalablement à ce retrait de points, de l'information prévue par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route.
2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, dans le cadre de sa défense devant le tribunal administratif, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a fait valoir que l'infraction du 12 avril 2020 avait été constatée par procès-verbal électronique, qu'un avis de contravention avait par suite été adressé à la titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule, que cette dernière avait désigné M. A... comme le conducteur, que celui-ci avait reçu un avis de contravention par lettre recommandée avec avis de réception et qu'il avait formé la requête en exonération prévue par l'article 529-2 du code de procédure pénale au moyen du formulaire attaché à l'avis de contravention. Pour justifier de ces circonstances, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a produit la transcription du procès-verbal d'infraction et un document intitulé " dossier transmis à Monsieur l'officier du ministère public ". Celui-ci faisait apparaître que l'officier du ministère public avait été saisi de la requête en exonération de M. A... le 26 octobre 2020 et précisait que cette requête, formée au moyen du formulaire attaché à l'avis de contravention, avait été envoyée par lettre recommandée avec avis de réception. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer a soutenu que, dès lors que ce formulaire de requête en exonération constituait l'un des volets de l'avis de contravention, ces circonstances étaient de nature à établir que M. A... avait nécessairement reçu cet avis et devait dès lors être regardé comme ayant bénéficié de l'information préalable prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route dont ce document est revêtu, faute pour lui de soutenir qu'il aurait reçu un avis incorrect ou incomplet. M. A..., qui ne soutenait pas avoir reçu un avis incorrect ou incomplet, ne contestait pas utilement le commencement de preuve du dépôt d'une requête en exonération ainsi rapporté, en se bornant à nier l'avoir formée. Par suite, en jugeant que le ministre de l'intérieur n'apportait pas la preuve de la délivrance de l'information préalable prévue par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route à M. A..., la magistrate désignée du tribunal administratif de Montreuil a dénaturé les pièces du dossier. Il y a lieu, dès lors, d'annuler son jugement, en tant qu'il statue sur le retrait de points consécutif à l'infraction du 12 avril 2020.
3. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette mesure l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
4. En premier lieu, il résulte de ce qui est dit au point 2 ci-dessus que M. A..., qui a formé le 26 octobre 2020 une requête en exonération auprès de l'officier du ministère public au moyen d'un formulaire attaché à l'avis de contravention relatif à l'infraction du 12 avril 2020, n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas bénéficié, préalablement à la décision individuelle de retrait de points en litige, de l'information prévue par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route dont cet avis était revêtu.
5. En second lieu, il résulte de la combinaison des articles L. 223-1 et L. 225-1 du code de la route et des articles 529, 529-1, 529-2 et 530 du code de procédure pénale que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention, ou, en cas d'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, avoir formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation de ce titre. Il ressort du relevé intégral des informations relatives au permis de conduire de M. A... que l'infraction constatée le 12 avril 2020 a donné lieu le 18 janvier 2021 à l'émission d'un titre exécutoire d'amende forfaitaire majorée. M. A..., qui ne soutient pas avoir formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation de ce titre, n'est par suite pas fondé à soutenir que la réalité de l'infraction ne serait pas établie.
6. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. A... aux fins d'annulation de la décision de retrait de trois points du capital de points de son permis de conduire consécutive à l'infraction qu'il a commise le 12 avril 2020 doivent être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Montreuil du 2 avril 2024 est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Montreuil tendant à l'annulation de la décision de retrait de trois points consécutive à l'infraction du 12 avril 2020 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. B... A....
Délibéré à l'issue de la séance du 18 octobre 2024 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat et M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 20 novembre 2024.
Le président :
Signé : M. Jean-Philippe Mochon
Le rapporteur :
Signé : M. Christophe Barthélemy
Le secrétaire :
Signé : M. Bernard Longieras