Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler la décision du 28 juin 2019 par laquelle la maire du Morne-Rouge a refusé de renouveler son contrat de travail à durée déterminée, d'enjoindre à la maire de lui proposer un contrat de travail à durée indéterminée et de reconstituer sa carrière, enfin de condamner la commune à lui verser la somme de 78 122 euros à titre de dommages et intérêts.
Par un jugement n° 1900690 du 12 avril 2021, le tribunal a annulé la décision du 28 juin 2019, a enjoint à la maire du Morne-Rouge de réexaminer la situation de Mme A... et, avant-dire droit, a ordonné la production par Mme A... de ses déclarations de revenus des années 2018 et 2019 et de tout justificatif de ses revenus du travail ou de remplacement perçus postérieurement au 11 janvier 2018.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 mai 2021, la commune du Morne-Rouge, représentée par Me Nicolas, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1900690 du tribunal ;
2°) de rejeter les demandes de première instance de Mme A... ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- Mme A... était titulaire de contrats de travail à durée déterminée conclus successivement et elle n'avait aucun droit au renouvellement du dernier en date ; le refus de renouveler un contrat de travail à durée déterminée n'a pas à être motivé ;
- dans la décision en litige, la maire a précisé à l'intéressée que le refus de lui renouveler son contrat de travail n'est pas pris en considération de sa personne et pas davantage en raison de son éventuelle inaptitude professionnelle ;
- dans ces conditions, cette décision ne peut être regardée comme ayant été prise pour des motifs étrangers à l'intérêt du service, comme l'ont retenu à tort les premiers juges ;
- de plus, la commune compte 5 000 habitants seulement et elle n'était plus en mesure de maintenir le nombre actuel d'agents contractuels en fonction dans la crèche municipale compte tenu de la baisse importante du nombre des enfants à garder ; il s'agit bien d'un motif fondé sur l'intérêt du service qui justifiait la décision en litige.
Par ordonnance du 13 octobre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 17 novembre 2022 à 12h.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Faïck,
- les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique,
Considérant ce qui suit :
1. A compter du 1er septembre 2010, Mme A... a été employée par la commune du Morne-Rouge comme agent de crèche puis auxiliaire de puériculture dans le cadre de contrats de travail à durée déterminée renouvelés successivement. Elle n'a pas été reconduite dans ses fonctions au terme de son dernier contrat intervenu le 11 janvier 2018. Par un jugement n° 18000344 du 13 mai 2019, le tribunal administratif de la Martinique a annulé la décision par laquelle la maire du Morne-Rouge a refusé le renouvellement du contrat d'engagement de Mme A... et a enjoint à cette autorité de réexaminer la situation de cette dernière.
2. Par une décision du 28 juin 2019, la maire du Morne-Rouge a maintenu son refus de renouveler le contrat d'engagement de Mme A..., laquelle a de nouveau saisi le tribunal administratif de la Martinique de demandes tendant à l'annulation de cette décision du 28 juin 2019, à ce qu'il soit enjoint à la maire de lui proposer un contrat de travail à durée indéterminée et de reconstituer sa carrière, et enfin à la condamnation de la commune à lui verser une indemnité de 78 122 euros en réparation des préjudices qu'elle estimait avoir subis.
3. Par un jugement rendu le 12 avril 2021, le tribunal administratif de la Martinique a annulé la décision du 28 juin 2019, a enjoint à la maire du Morne-Rouge de réexaminer la situation de Mme A... et, avant-dire droit, a ordonné la production par cette dernière de ses déclarations de revenus des années 2018 et 2019 ainsi que tout justificatif des revenus du travail ou des revenus de remplacement qu'elle a le cas échéant perçus postérieurement au 11 janvier 2018. La commune du Morne-Rouge relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie d'aucun droit au renouvellement de son contrat. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent.
5. Pour annuler la décision en litige du 28 juin 2019, par laquelle la maire du Morne-Rouge a refusé de renouveler le contrat de travail de Mme A..., les premiers juges ont relevé que la commune se bornait à rappeler qu'une telle décision n'avait pas à être motivée et qu'elle n'avait été prise ni en considération de la personne ni en raison de l'aptitude professionnelle de cet agent. Ils en ont déduit qu'en s'abstenant ainsi d'indiquer les motifs, tirés des besoins du service, pouvant justifier le refus de renouvellement du contrat de travail de Mme A..., la commune devait être regardée comme s'étant fondée sur des motifs étrangers à l'intérêt du service.
6. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties.
7. En appel, la commune, après avoir rappelé qu'elle compte moins de 5 000 habitants, allègue que le non-renouvellement du contrat de Mme A... était justifié par la perspective d'une fermeture prochaine de la crèche résultant de la " baisse drastique " du nombre d'enfants à garder. Toutefois, pas plus en appel qu'elle ne l'a fait en première instance, la commune ne produit des éléments permettant d'établir la réalité de ses allégations alors qu'il lui était loisible de produire tous justificatifs utiles en ce sens. Dans ces conditions, la commune du Morne Rouge n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a annulé la décision en litige au motif qu'elle n'était pas justifiée par l'intérêt du service.
Sur les frais d'instance :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle aux conclusions présentées par l'appelante tendant à ce que Mme A..., qui n'est pas la partie perdante à l'instance, lui verse une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE
Article 1er : La requête n° 21BX02322 de la commune du Morne-Rouge est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune du Morne-Rouge et à Mme B... A....
Délibéré après l'audience du 22 mai 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Florence Demurger, présidente,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
M. Anthony Duplan, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023.
Le rapporteur,
Frédéric Faïck
La présidente,
Florence Demurger
La greffière,
Catherine Jussy
La République mande et ordonne au ministre de la transformation et de la fonction publiques, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX02322 2