Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite de rejet de son recours gracieux reçu le 5 septembre 2017 par laquelle le maire de la commune d'Halluin a refusé sa réaffectation sur un poste correspondant à son grade, la révision de sa notation de 2014, la réévaluation de son avancement de carrière et l'indemnisation des préjudices subis en conséquence d'agissements constitutifs de harcèlement moral, d'enjoindre à la même commune de la réintégrer sur un poste conforme à son grade et à son cadre d'emploi et de réviser sa notation au titre de l'année 2014 sous astreinte de 50 euros par jour de retard, d'enjoindre à cette commune de reconstituer sa carrière en tenant compte de ses droits à avancement, de condamner la commune à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des faits de harcèlement moral subis et de mettre à la charge de la commune d'Halluin la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1711038 du 26 janvier 2021 le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes et les conclusions présentées par la commune d'Halluin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 1er avril 2021, Mme A... B..., représentée par Me Kappopoulos, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant que le tribunal a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la commune d'Halluin à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des faits de harcèlement moral subis ;
2°) de condamner la commune d'Halluin à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des faits de harcèlement moral subis ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Halluin la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a été victime de faits de harcèlement de la part de la commune, qui constituent une faute et qui se sont traduits par son changement illégal d'affectation, des conflits avec sa hiérarchie, des sanctions disciplinaires injustifiées, son agression physique non sanctionnée par un agent de la mairie, la baisse de sa notation au titre de l'année 2014 ainsi que par le refus d'attribution d'une prime en 2018 et 2019 ;
- sa nouvelle affectation a entraîné une perte d'autonomie et de responsabilité, révélatrice d'une sanction déguisée, ce qui caractérise une erreur de droit ou un détournement de pouvoir, en l'absence de toute justification liée à l'intérêt du service ;
- sa notation au titre de l'année 2014 a été réalisée par une personne incompétente ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, est sans lien avec ses qualités professionnelles et a nécessairement eu des effets néfastes sur carrière.
La commune d'Halluin n'a pas produit, malgré une mise en demeure du 19 janvier 2022.
Par ordonnance du 10 mars 2022 la date de clôture de l'instruction a été fixée au 25 mars 2022 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 2011-558 du 20 mai 2011 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me Stienne-Duwez, représentant Mme A... B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B..., entrée au service de la commune d'Halluin le 1er avril 2009, y a été nommée animatrice territoriale le 1er septembre 2012. A la suite d'une réorganisation des services, le poste sur lequel elle était affectée a été supprimé. Le maire d'Halluin l'a informée, par courrier du 8 juillet 2014, qu'elle serait affectée à compter du 15 juillet suivant à la ferme du Mont Saint Jean, en qualité d'animatrice. Mme B... a, par courrier reçu le 5 septembre 2017, notamment demandé au maire d'Halluin de la réaffecter sur un poste correspondant à son grade, de réviser sa notation au titre de l'année 2014 et de l'indemniser à hauteur de 15 000 euros en réparation des préjudices subis en tant que victime de harcèlement moral. La commune a rejeté implicitement le 5 novembre 2017 sa demande. Mme B... relève appel du jugement du 26 janvier 2021 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des faits de harcèlement moral qu'elle estime avoir subis.
2. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issu de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : /1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. (...) ".
3. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement et il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé des agissements constitutifs d'un harcèlement moral et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral.
4. Aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant. ". Le juge administratif est tenu d'en tirer toutes les conséquences de droit, mais il lui appartient de vérifier que l'inexactitude des faits exposés dans les mémoires du requérant ne ressort d'aucune pièce du dossier.
5. En premier lieu, Mme B... soutient que la nouvelle municipalité a eu dès 2014 à son encontre un comportement se caractérisant par du harcèlement. Elle indique qu'alors qu'elle réalisait un travail de qualité en tant qu'animatrice, son poste a été supprimé sans que la commission technique n'ait été réunie, qu'elle a subi un changement d'affectation sur un poste d'adjoint d'animation au sein de la direction du développement territoriale et durable, à la ferme du Mont Saint-Jean, qu'elle occupe un poste d'adjoint d'animation de catégorie C, ce qui traduit une rétrogradation qui a engendré une dégradation de ses conditions de travail et des altercations avec la directrice de la ferme. Toutefois, il résulte de l'instruction et des éléments fournis en défense par la commune en première instance que la suppression du poste que l'appelante occupait s'inscrit dans le cadre d'une réorganisation des services municipaux. Les missions mentionnées dans la fiche de poste de Mme B... à la ferme du Mont Saint-Jean correspondent à celles susceptibles d'être exercées par un animateur territorial, telles que décrites à l'article 2 du décret du 20 mai 2011 portant statut particulier du cadre d'emploi. Aussi, ce changement d'affectation n'est pas de nature à faire présumer l'existence d'agissements constitutifs de harcèlement moral. Si Mme B... se prévaut de vices de légalité externe affectant la décision portant changement d'affectation, elle ne peut utilement s'en prévaloir à l'appui de ses conclusions indemnitaires fondées uniquement sur un prétendu harcèlement moral.
6. En deuxième lieu, il résulte également des éléments fournis en défense par la commune en première instance que Mme B... entretenait des relations difficiles avec l'ensemble de ses collègues, se montrait rétive envers sa hiérarchie et ne respectait pas certaines consignes, ce qui a contraint la commune à deux reprises, les 16 juin et 24 août 2015, à lui infliger des sanctions du premier groupe. Dans ces conditions de telles sanctions ne sauraient pas plus faire présumer l'existence d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral.
7. En troisième lieu, la notation de Mme B... au titre de l'année 2014 de 7/20 est nettement inférieure à celles de ses précédentes notations, toutes supérieures à 15/20. La commission administrative paritaire de catégorie B a émis le 21 janvier 2016 un avis favorable à la demande de révision de sa notation et de son appréciation en " s'étonnant de la baisse de la notation et que la déclinaison de la note par l'administration et l'autorité territoriale ne soit pas détaillée. ". Toutefois, il résulte de l'instruction que le comportement de l'appelante s'est détérioré à la suite de sa nouvelle affectation au sein de la ferme du Mont Saint Jean, que la commune a reçu des plaintes d'usagers et de partenaires la concernant, qu'elle ne respectait pas les horaires de présence et que son manque de coopération avec ses collègues a entraîné des difficultés dans l'organisation du service. Ainsi, la baisse de notation ne saurait pas plus faire présumer l'existence d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral, ni ne révèlent une volonté de lui nuire. Si Mme B... se prévaut de l'incompétence de son notateur, elle ne peut utilement s'en prévaloir à l'appui de ses conclusions indemnitaires fondées uniquement sur un prétendu harcèlement moral.
8. Enfin, Mme B... fait valoir que, le 9 septembre 2015, elle a subi une agression physique du directeur de communication et cabinet de la commune d'Halluin qui a fait l'objet d'un constat médical sans que la commune ne réagisse. Toutefois elle a obtenu le bénéfice de la protection fonctionnelle et l'exactitude de son récit de cette agression, pour laquelle elle a déposé plainte, n'est pas établie.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la commune d'Halluin et à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 26 janvier 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande indemnitaire relative à des faits de harcèlement moral. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune d'Halluin.
Délibéré après l'audience publique du 25 mai 2022 à laquelle siégeaient :
-Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- M. Denis Perrin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 juin 2022.
Le président-rapporteur,
Signé : M. C...
La présidente de chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : C. Huls-Carlier
La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
C. Huls-Carlier
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N° 21DA00741