Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 21 janvier 2020 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle de Roubaix-Tourcoing a autorisé la société Illochroma Haoneng France à procéder à son licenciement pour inaptitude physique.
Par un jugement n° 2002274 du 15 juin 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 août 2022 et un mémoire enregistré le 9 mai 2023, M. B... A..., représenté par Me Kappopoulos, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 15 juin 2022 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision de l'inspecteur du travail du 21 janvier 2020 ;
3°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat, ainsi que le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé en tant qu'il omet de se prononcer sur le moyen tiré de ce que le compte-rendu de la réunion des représentants du personnel du 4 décembre 2019 est un document falsifié et sur le moyen tiré de l'illégalité externe de la décision contestée ;
- ce jugement est entaché de deux erreurs de droit en tant que les premiers juges se sont prononcés sur le moyen tiré de l'omission, par l'inspecteur du travail, de son mandat de membre du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail, et sur le moyen tiré du non-respect de l'obligation de reclassement par l'employeur ;
- la décision contestée est entachée d'un vice de forme en tant que l'inspecteur du travail n'a pas contrôlé la régularité de la procédure de licenciement, le caractère réel et sérieux des efforts de reclassement et l'absence de lien entre le licenciement et ses mandats ;
- l'inspecteur du travail a omis de prendre en compte son mandat de membre du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail ;
- le comité d'entreprise n'a pas été consulté sur le projet de licenciement ;
- à supposer que le comité ait été réuni, il s'est prononcé dans des conditions irrégulières dès lors que les représentants du personnel n'ont pas été convoqués trois jours au moins avant la séance ; ils n'ont pas reçu l'ensemble des éléments permettant de se prononcer sur le projet de licenciement ; ils ont voté à main levée ;
- le compte-rendu du comité d'entreprise du 3 décembre 2019 est un document falsifié, révélant l'irrégularité de la procédure de licenciement ;
- l'employeur s'est abstenu de procéder à des recherches sérieuses de reclassement dès lors que le poste de contrôleur qualité, proposé le 3 décembre 2018, ne correspond pas à ses qualifications ; le poste de conducteur de machine offset proposé cinq mois plus tard ne répond pas aux restrictions médicales et implique une modification de son contrat de travail ; il n'est pas établi que l'ensemble des postes vacants au sein des établissements de l'employeur et répondant à ces restrictions lui auraient été proposés.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 avril 2023, la société Illochroma Haoneng France, représentée par Me Benoît, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge du requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 mai 2023, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.
Il s'en rapporte à son mémoire déposé en première instance et soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par une décision du 9 mai 2023, l'instruction a été close à la date du 29 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- les conclusions de M. Carpentier-Daubresse, rapporteur public,
- et les observations de Me Becourt, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., qui est né le 18 mai 1959, a été recruté en 1977 par la société Illochroma France, devenue depuis Illochroma Haoneng France, qui exerce une activité d'impression. Occupant, en dernier lieu, les fonctions de conducteur de machine offset au sein de la société, il a été placé en congé de maladie à compter du 1er septembre 2017, en raison d'une rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche, reconnue comme maladie professionnelle en 2015. Le 5 novembre 2018, le médecin du travail a rendu un avis le déclarant inapte à son poste de conducteur de machine tout en précisant que son aptitude résiduelle lui permettait d'exercer une activité sans effort physique. La société Illochroma Haoneng France a proposé des postes de reclassement à M. A..., que celui-ci a refusés. L'intéressé, élu au sein de la délégation unique du personnel le 22 septembre 2015 et bénéficiant de la protection prévue par l'article L. 2411-1 du code du travail, son employeur a sollicité, le 4 décembre 2019, l'autorisation de le licencier pour inaptitude physique auprès de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des Hauts-de-France. Par une décision du 21 janvier 2020, l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle de Roubaix-Tourcoing a accordé l'autorisation demandée à la société Illochroma Haoneng France. M. A... a présenté une demande tendant à l'annulation de cette décision devant le tribunal administratif de Lille, qui l'a rejetée par un jugement du 15 juin 2022. M. A... relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, M. A... soutenait, devant le tribunal administratif, que le comité d'entreprise avait été consulté sur le projet de licenciement dans des conditions irrégulières, en relevant notamment, à l'appui de son moyen, que le compte-rendu de la réunion du 4 décembre 2019 comportait une signature falsifiée. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments de M. A..., ont écarté son moyen après avoir notamment rappelé, au point 8 de leur jugement, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait une forme particulière pour recueillir l'avis des délégués du personnel composant le comité d'entreprise et que la circonstance que leurs signatures ne soient pas apposées sur le compte-rendu ou que l'une d'entre elles soit falsifiée était sans incidence sur la légalité de la décision autorisant le licenciement. Par suite, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir d'un défaut de motivation du jugement attaqué sur ce point.
3. En deuxième lieu, il ressort des écritures produites par M. A... en première instance que, sous couvert d'un moyen d'illégalité externe, il a entendu reprocher à l'inspecteur du travail une appréciation défaillante dans l'analyse d'un lien éventuel entre son licenciement et ses mandats, ainsi que dans la vérification de la réalité et du sérieux des efforts de reclassement entrepris par l'employeur et du respect par celui-ci de la procédure prévue pour les licenciements des salariés protégés. Contrairement à ce que soutient le requérant, et eu égard à l'argumentaire dont il était saisi, le tribunal administratif a suffisamment répondu à son moyen aux points 6, 8, 11 et 13 de son jugement, en confirmant la légalité de la décision de l'inspecteur du travail après avoir constaté que le licenciement ne présente aucun lien avec l'un des mandats de M. A..., que l'employeur a procédé à une recherche sérieuse et loyale de reclassement et que la procédure de licenciement n'est entachée d'aucune irrégularité.
4. En dernier lieu, le fait, pour le juge de première instance, d'écarter à tort un moyen comme inopérant ou non fondé ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner l'annulation du jugement par le juge d'appel saisi d'un moyen en ce sens. Il appartient seulement à ce dernier, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel qui est résulté de l'introduction de la requête, et après avoir, en répondant à l'argumentation dont il est saisi, relevé cette erreur, de se prononcer sur le bien-fondé du moyen écarté à tort. Dans ces conditions, les erreurs de droit reprochées par M. A... au tribunal administratif sont sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2326-1 du code du travail, dans sa version issue de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, applicable lors de la désignation du requérant dans des fonctions de représentant du personnel : " Dans les entreprises de moins de trois cents salariés, l'employeur peut décider que les délégués du personnel constituent la délégation du personnel au comité d'entreprise et au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Il prend cette décision après avoir consulté les délégués du personnel et, s'ils existent, le comité d'entreprise et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. / La faculté de mettre en place une délégation unique est ouverte lors de la constitution de l'une des institutions mentionnées au premier alinéa ou du renouvellement de l'une d'entre elles. / La durée du mandat des délégués du personnel, des membres du comité d'entreprise et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut être prorogée ou réduite dans la limite de deux années, de manière à ce que leur échéance coïncide avec la date de mise en place de la délégation unique (...) ". Aux termes du VI de l'article 13 de la loi du 17 août 2015, entré en vigueur le 19 août suivant : " Pour les entreprises ayant mis en place une délégation unique du personnel à la date d'entrée en vigueur du présent article, l'employeur peut décider, après avoir recueilli l'avis de ses membres, de maintenir la délégation unique du personnel exerçant les seules attributions des délégués du personnel et du comité d'entreprise, conformément aux règles applicables avant l'entrée en vigueur du présent article, dans la limite de deux cycles électoraux suivant la fin des mandats en cours à la date d'entrée en vigueur du présent article (...) ".
6. Pour opérer les contrôles auxquels elle est tenue de procéder lorsqu'elle statue sur une demande d'autorisation de licenciement, l'autorité administrative doit prendre en compte chacune des fonctions représentatives du salarié. Lorsque l'administration a eu connaissance de chacun des mandats détenus par l'intéressé, la circonstance que la demande d'autorisation de licenciement ou la décision autorisant le licenciement ne fasse pas mention de l'un de ces mandats ne suffit pas, à elle seule, à établir que l'administration n'a pas, comme elle le doit, exercé son contrôle en tenant compte de chacun des mandats détenus par le salarié protégé.
7. La demande d'autorisation de licenciement présentée par la société Illochroma Haoneng France le 4 décembre 2019 mentionne que M. A... est membre suppléant de la délégation unique du personnel depuis le 22 septembre 2015. Le requérant n'apporte aucun élément au dossier, se rapportant notamment à la désignation des membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, qui laisserait supposer que, contrairement à ce que soutient la société, celle-ci aurait pris la décision de maintenir une délégation unique du personnel exerçant les seules attributions des délégués du personnel et du comité d'entreprise dans les conditions prévues par les dispositions précitées du VI de l'article 13 de la loi du 17 août 2015. Dès lors que la fonction de membre de la délégation unique du personnel intègre, aux termes de l'article L. 2326-1 du code du travail, alors en vigueur, celles de délégué du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, l'inspecteur du travail n'était pas tenu de mentionner expressément cette dernière qualité dans sa décision du 21 janvier 2020. A cet égard, la circonstance que cette décision se borne à viser " son ancien mandat de délégué du personnel et représentant au comité d'entreprise en qualité de suppléant " sans préciser les fonctions exercées par M. A... en tant que membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ne permet pas d'établir que l'administration aurait omis de prendre en compte l'ensemble des attributions résultant de son élection comme membre de la délégation unique du personnel. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'inspecteur du travail aurait commis une irrégularité sur ce point.
8. En deuxième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 2421-3 du code du travail que le licenciement envisagé par l'employeur d'un membre élu à la délégation du personnel est soumis pour avis au comité d'entreprise. Saisie par l'employeur d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé auquel s'applique l'article L. 2421-3, il appartient à l'administration de s'assurer que cette procédure de consultation du comité d'entreprise a été régulière. Elle ne peut légalement accorder l'autorisation demandée que si le comité d'entreprise a été mis à même d'émettre son avis en toute connaissance de cause, dans des conditions qui ne sont pas susceptibles d'avoir faussé sa consultation.
9. D'une part, il ressort des pièces du dossier que les délégués du personnel ont été convoqués le mercredi 27 novembre 2019, en application de l'article L. 2421-3 du code du travail, afin de constituer, le mardi 3 décembre suivant, le comité d'entreprise chargé de se prononcer sur le projet de licenciement de M. A.... Si l'un des délégués atteste ne pas être l'auteur de la signature constituée par son seul prénom et figurant au bas du procès-verbal de la séance du 3 décembre 2019, ce délégué ne conteste ni sa présence au comité d'entreprise, ni les autres mentions du procès-verbal. Il n'est donc pas établi que ces mentions seraient mensongères et que la procédure de licenciement serait irrégulière en l'absence, notamment, de réunion du comité d'entreprise le 3 décembre 2019. Si le requérant allègue que les représentants du personnel n'auraient pas reçu la convocation trois jours au moins avant la séance, il résulte de la comparaison de cette convocation et du procès-verbal que les représentants ont tous assisté à la séance au cours de laquelle le comité d'entreprise a été consulté sur le projet de licenciement, à l'exception de M. A.... D'autre part, il n'est pas contesté que l'identité du salarié, ses mandats et les motifs du licenciement envisagé ont été communiqués aux membres du comité d'entreprise. Le procès-verbal de séance se réfère en outre aux capacités résiduelles du salarié, qui doit s'abstenir d'efforts physiques et de gestes répétitifs, et aux postes envisagés pour un reclassement. Si M. A... produit des attestations dont il ressort qu'aucune information n'aurait été donnée, avant la réunion, sur les restrictions émises par le médecin du travail et les postes de reclassement, il ressort des mentions précitées du procès-verbal que le comité d'entreprise a disposé de ces informations au cours de la séance, lui permettant d'émettre son avis en toute connaissance de cause. Au demeurant, le comité d'entreprise avait déjà été informé de la teneur de l'avis d'inaptitude du médecin du travail et des postes proposés par l'employeur à l'occasion de la consultation précédente du 26 juin 2019 sur les conditions du reclassement envisagé. M. A... soutient encore que les membres du comité d'entreprise se sont prononcés à main levée et non au scrutin secret. Toutefois, il ne ressort ni des attestations produites à l'instance, ni des autres documents versés au dossier que les représentants du personnel auraient fait l'objet de pressions de la part de l'employeur afin qu'ils rendent à l'unanimité un avis favorable au licenciement. Il n'est donc pas établi que ce vote à main levée a été susceptible de fausser la consultation. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la procédure de consultation des délégués du personnel siégeant en comité d'entreprise était irrégulière, ni que l'inspecteur du travail aurait dû refuser d'accorder l'autorisation demandée en raison d'une telle irrégularité.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail : " Lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. / Cette proposition prend en compte (...) les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté. / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail. / Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce ". Aux termes de l'article L. 1226-12 du même code : " Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. / L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi. / L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail (...) ".
11. Dans le cas où la demande de licenciement d'un salarié protégé est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'employeur a, conformément à l'article L. 1226-10 du code du travail, cherché à reclasser le salarié sur d'autres postes appropriés à ses capacités, le cas échéant par la mise en œuvre, dans l'entreprise, de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. Le licenciement ne peut être autorisé que dans le cas où l'employeur n'a pu reclasser le salarié dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, menée tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel.
12. Dans son avis du 5 novembre 2018, le médecin du travail a retenu que M. A... présentait une inaptitude définitive à son poste de conducteur de machine offset, toute reprise d'activité professionnelle étant subordonnée à l'absence d'efforts physiques et de port de charges lourdes. Par un courrier du 3 décembre 2018, l'employeur a proposé à M. A... un poste de contrôleur qualité en journée consistant à contrôler la qualité au cours du processus de production, depuis la mise en œuvre des matières premières jusqu'aux produits finis, en réalisant des opérations de prélèvement, contrôle et suivi. M. A... ne conteste pas que ce poste correspondait à sa capacité de travail résiduelle, ainsi que l'a constaté le médecin du travail. Il n'apporte aucun élément susceptible de contredire l'employeur qui lui a expressément précisé, outre le maintien de sa rémunération, que son expérience acquise dans l'entreprise pendant quarante-et-un ans d'activité lui assurait les compétences nécessaires pour assister et accompagner ses collègues lors de la mise en route des tirages et du suivi de la production, et qu'une collègue pouvait, le cas échéant, l'accompagner et le former dans ses nouvelles fonctions. Dans ces conditions, M. A... n'établit pas être dépourvu des qualifications requises pour occuper le poste de contrôleur qualité, motif qu'il a avancé dans ses courriers des 7 et 17 décembre 2018 pour refuser cette proposition de reclassement. L'employeur a également envisagé, en mai 2019, de réintégrer le requérant dans son poste initial à l'issue de son congé de maladie, avec l'assistance d'un collaborateur chargé d'exécuter l'ensemble des tâches médicalement prohibées. Si M. A... rappelle qu'il a été déclaré inapte à son emploi de conducteur de machine Offset, le médecin du travail a fait part, le 20 mai 2019, de son avis favorable à un reclassement dans les conditions envisagées par l'employeur, sur un poste qu'il a requalifié d'opérateur machine Offset ou pupitreur. La circonstance que, dans un courriel du 4 février 2020, l'inspecteur du travail a considéré que l'employeur entendait aménager de façon artificielle le poste de conducteur machine Offset afin d'éviter un licenciement n'est pas de nature, à elle seule, à établir que le poste proposé, aménagé de façon à répondre aux restrictions médicales, serait privé de toute réalité ou même déqualifié et dépourvu de tout intérêt, ainsi que l'a estimé le requérant pour refuser cette seconde proposition de reclassement. Enfin, si M. A... soutient que son employeur n'a pas cherché de poste de reclassement dans le registre des entrées et des sorties des deux établissements composant la société Illochroma Hoaneng France, celle-ci lui a régulièrement proposé deux postes prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail, allant au-delà de ses obligations de reclassement prévues par le dernier alinéa de l'article L. 1226-12 du code du travail. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la recherche de reclassement réalisée par l'employeur n'a été ni sérieuse, ni loyale.
13. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'inspecteur du travail aurait omis, avant d'accorder l'autorisation demandée, de procéder aux vérifications nécessaires concernant le lien éventuel du projet de licenciement avec les mandats de M. A..., la réalité des efforts de reclassement et la régularité de la procédure de licenciement.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :
15. En l'absence de dépens exposés dans la présente instance, la demande présentée à ce titre par M. A... ne peut qu'être rejetée.
16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. A... demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme dont la société Illochroma Hoaneng France demande le versement sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Illochroma Hoaneng France présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et à la société Illochroma Hoaneng France.
Délibéré après l'audience publique du 19 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- Mme Dominique Bureau, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 octobre 2023.
Le président-rapporteur,
Signé : J-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre,
Signé : M-P. Viard
La greffière,
Signé : C. Sire
La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière
C. Sire
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N° 22DA01752