Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 24 septembre 2020 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français sans délai.
Par un jugement n° 2004549 du 19 janvier 2021, le tribunal administratif de Montpellier a
rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 février 2021, M. C... A... B..., représenté par Me Ortigosa-Liaz demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 19 janvier 2021 ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de renouveler sa carte de résident ou de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé et est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ; le préfet n'a pas pris en compte son absence d'attache au Maroc ni l'intensité de ses liens avec la France, où il est entré à l'âge de trois ans et a effectué l'ensemble de sa scolarité ;
- la décision portant refus de séjour méconnait les dispositions de l'article L. 314-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce qu'elle prend en compte la période de son incarcération au Maroc due à son extradition vers ce pays, qui constitue pourtant une circonstance de force majeure ;
- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il réside en France avec l'ensemble de sa famille depuis l'âge de trois ans et est père d'un enfant français né le 31 décembre 2016 ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant en ce qu'elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de son fils ;
- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la requête n'est pas fondée dans les moyens qu'elle soulève.
Par une décision du 22 novembre 2021, M. A... B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Balaresque a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 24 septembre 2020, le préfet de l'Hérault a refusé de délivrer le titre de séjour sollicité par M. A... B... et l'a obligé à quitter le territoire français sans délai. M. A... B... relève appel du jugement du 19 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
S'agissant du moyen commun aux deux décisions :
2. L'arrêté contesté vise les textes dont il fait application et énonce les considérations de fait qui ont conduit le préfet à refuser le renouvellement de la carte de résident de M. A... B... et à écarter la possibilité de lui délivrer un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français ou au titre de sa vie privée et familiale. Il ressort des termes même de cet arrêté que le préfet a notamment pris en compte l'arrivée de M. A... B... sur le territoire français à l'âge de trois ans par la procédure du regroupement familial et la durée du séjour de l'intéressé en France. La seule circonstance que cet arrêté ne mentionne pas expressément la présence des parents et de la fratrie de l'intéressé en France, laquelle n'est au demeurant pas de nature à établir l'absence de toute attache de l'intéressé dans son pays d'origine, ne saurait entacher cet arrêté d'insuffisance de motivation ni révéler un défaut d'examen de la situation personnelle de M. A... B.... Par suite, ces moyens doivent être écartés comme manquant en fait.
S'agissant du refus de séjour :
3. En premier lieu, par des motifs appropriés figurant au point 4 du jugement attaqué et qu'il convient d'adopter en appel, le tribunal a écarté le moyen tiré de l'erreur de droit dans l'application des dispositions de l'article L. 314-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Selon l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B..., ressortissant marocain, est entré en France en 1985 à l'âge de trois ans dans le cadre d'un regroupement familial et qu'à sa majorité, il a obtenu une carte de résident valable du 23 août 1999 au 22 août 2009, dont il a obtenu le renouvellement, sans retirer sa nouvelle carte valable du 23 août 2009 au 22 août 2019. Après avoir purgé une peine d'emprisonnement de trois ans au Maroc, il a sollicité sans succès un visa de retour en France en août 2014, puis est revenu irrégulièrement sur le territoire français. Ainsi, si M. A... B... se prévaut de la durée de son séjour en France, il est constant que celui-ci a été interrompu durant au moins trois ans entre 2009 et 2014, du fait de son incarcération dans son pays d'origine. Si M. A... B... fait valoir que son père, ses frères et sœurs, tous de nationalité française et sa mère, titulaire d'une carte de résident, résident en France, il n'établit pas pour autant l'absence d'attaches et l'isolement dans son pays d'origine dont il se prévaut. M. A... B..., célibataire, est désormais âgé de 29 ans. S'il est père d'un enfant français né en décembre 2016, il ressort des pièces du dossier, en particulier du jugement du 28 mars 2019 du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Montpellier, que M. A... B... a été condamné à trente mois d'emprisonnement dont six mois avec sursis en février 2019 pour violences conjugales habituelles à l'encontre de la mère de son fils, que l'exercice exclusif de l'autorité parentale a été confiée à cette dernière et que M. A... B... a été dispensé de contribution à l'entretien de son enfant du fait de son incarcération. Si M. A... B... fait valoir que ce jugement lui accorde un droit de visite médiatisé par le biais de l'association Les lieux du lien, droit qu'il a pu exercer à deux reprises en décembre 2019 et février 2020, les autres visites programmées n'ayant pu avoir lieu du fait de l'absence d'accord de la mère de son fils et des conditions sanitaires, il n'apporte aucun autre élément de nature à établir l'intensité des liens avec son enfant. Enfin, si M. A... B... fait également valoir qu'il a suivi l'ensemble de sa scolarité en France et y a débuté son insertion professionnelle, les éléments qu'il produit atteste uniquement de sa scolarisation jusqu'en 1998 et de son inscription à la chambre des métiers et de l'artisanat d'octobre 2000 à juin 2003 mais n'établissent nullement son intégration, en particulier sur le plan professionnel. Il ressort au contraire des éléments du dossier que M. A... B..., qui a fait l'objet de multiples condamnations avant son incarcération au Maroc pour purger une peine de trois ans d'emprisonnement pour usage de stupéfiants, est incarcéré depuis juillet 2017 au sein du centre pénitentiaire de Béziers à la suite de trois condamnations, l'une en juin 2017 pour conduite en état d'ivresse, l'autre en mars 2018 pour trafic de stupéfiants et la dernière en février 2019 pour violences conjugales habituelles sur la mère de son fils. M. A... B... ne conteste d'ailleurs pas le motif de l'arrêté tiré de ce que sa présence représente une menace pour l'ordre public. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard en particulier à la gravité et au caractère récent et répété des agissements ayant motivé les multiples condamnations de M. A... B... rappelées ci-dessus, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de ce dernier une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris. Les moyens invoqués tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent, dès lors, être écartés.
6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, le moyen tiré de l'erreur manifeste dont serait entachée la décision de refus de séjour contestée dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doit également être écarté.
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français sans délai :
7. Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que M. A... B... n'établit pas la réalité des liens avec son fils né en décembre 2016, ni qu'il participerait de quelque manière que ce soit à son éducation. Par suite, il n'établit pas qu'en l'obligeant à quitter le territoire français sans délai le préfet aurait porté atteinte à l'intérêt supérieur de son fils. Le moyen tiré de la méconnaissance du point 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit, dès lors, être écarté.
8. Pour les motifs figurant au point 5, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés.
9. Il résulte de ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 septembre 2020 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français sans délai.
10. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions présentées en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent être accueillies.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B..., à Me Ortigoza-Liaz et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2022, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président-assesseur,
- Mme Balaresque, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2022.
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No 21MA00682