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20/10/2020 | FRANCE | N°19NT03435

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 20 octobre 2020, 19NT03435


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... I... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2016 par lequel le maire de la commune de Penmarch ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme D... le 7 septembre 2016 et portant sur l'édification d'un mur en pierres sèches d'une hauteur de 0,80 m sur les parcelles cadastrées à la section AC 677, 679 et 682 situées au lieu-dit " Viben ".

Par un jugement n° 1605332, du 28 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a a

nnulé l'arrêté du 4 octobre 2016.

Procédure devant la cour :

Par une requête et d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... I... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2016 par lequel le maire de la commune de Penmarch ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme D... le 7 septembre 2016 et portant sur l'édification d'un mur en pierres sèches d'une hauteur de 0,80 m sur les parcelles cadastrées à la section AC 677, 679 et 682 situées au lieu-dit " Viben ".

Par un jugement n° 1605332, du 28 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 4 octobre 2016.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 21 août 2019, 7 avril 2020, 7 mai 2020 et 15 juin 2020, la commune de Penmarch, représentée par Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1605332 du 28 juin 2019 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) de rejeter la demande de Mme I... contre l'arrêté du 4 octobre 2016 du maire de commune de Penmarch ;

3°) de mettre à la charge de Mme I... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête de Mme I... devant le tribunal administratif était irrecevable ; la requérante n'avait pas intérêt à agir contre la décision contestée dès lors que la construction projetée ne porte pas atteinte aux conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien ;

- l'arrêté contesté est conforme à l'article L. 121-16 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté contesté ne méconnaît pas le plan de prévention des risques littoraux " Ouest Odet " ; le muret projeté ne se situe pas dans la zone " hachurée noir " de ce plan ;

- l'arrêté contesté ne méconnaît pas l'article N 2.6 du règlement du plan local d'urbanisme ; le terrain d'assiette du projet est situé en zone Ns du plan local d'urbanisme de la commune, zone qui est définie comme délimitant les espaces et milieux à préserver en fonction de leur intérêt écologique ou du caractère du patrimoine naturel en application des anciens articles L.146-6 et R.146-1 du code de l'urbanisme ; ces dispositions n'empêchent nullement l'édification ou la réfection de clôture, quand bien même ce type de construction n'est pas mentionné au sein de la liste fixée par le règlement du plan local d'urbanisme.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 décembre 2019, 23 avril, 31 mai, et 26 juin 2020, Mme I..., représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la commune de Penmarch une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé ;

- l'arrêté contesté méconnaît en outre l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, ainsi que l'article N11 du plan local d'urbanisme.

- l'arrêté contesté méconnaît également les articles L. 121-31 et R. 111-2 du code de l'urbanisme, ainsi que l'article N11.2 alinéa 2 du plan local d'urbanisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me H..., représentant la commune de Penmarch.

Considérant ce qui suit :

1. Le 7 septembre 2016, Mme D... a déposé une déclaration préalable de travaux portant sur l'édification d'un mur de clôture en pierres sèches d'une hauteur de 80 cm afin de ceindre ses parcelles cadastrées à la section AC nos 677, 679 et 682 situées au lieudit " Viben " à Penmarch. Par un arrêté du 4 octobre 2016, le maire de la commune de Penmarch a déclaré ne pas s'opposer à cette déclaration préalable. Le 6 décembre 2016, Mme I... a demandé au tribunal d'annuler cet arrêté. Par un jugement du 28 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à cette demande. La commune de Penmarch relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

2. Mme I..., requérante en première instance, justifie être propriétaire depuis le 26 décembre 1964 d'un terrain situé au lieu-dit " Viben ", sur lequel est implantée une maison d'habitation. Il ressort des pièces du dossier que ce terrain jouxte les parcelles faisant l'objet des travaux projetés, et appartenant à Mme D.... Par ailleurs, le pignon de la maison de Mme I... est percé d'une fenêtre et d'une baie vitrée au rez-de-chaussée donnant vue sur les parcelles de Mme D.... Mme I... soutient également que la construction projetée dénature un site naturel. Par suite, la commune de Penmarch n'est pas fondée à soutenir que la demande de Mme I... n'était pas recevable aux motifs qu'elle ne justifierait pas d'un intérêt lui donnant qualité pour contester l'arrêté contesté.

En ce qui concerne la légalité de la décision contestée :

S'agissant de la méconnaissance de l'article L. 121-16 du code de l'urbanisme :

3. Aux termes de l'article L. 121-16 du code de l'urbanisme : " En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement ". Ces dispositions n'ont pas pour objet d'interdire tout aménagement ou réfection des constructions ou installations déjà existantes.

4. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette des travaux déclarés est entièrement situé dans la bande de cent mètres à compter de la limite haute du rivage. Il ressort également des pièces du dossier, et notamment des plans et photographies produits, que les travaux projetés ne se situent pas au sein d'un espace urbanisé, au sens des dispositions de l'article L. 121-16 précitées du code de l'urbanisme.

5. D'autre part, les travaux projetés consistent, selon les termes mêmes de l'arrêté contesté, " en l'édification d'un mur de clôture en pierres sèches d'une hauteur de 0.8m ", afin de ceindre les parcelles cadastrées à la section AC nos 677, 679 et 682. Malgré la présence initiale, à certains endroits, de quelques pierres délimitant partiellement le terrain de Mme D..., celle-ci ne peut caractériser une clôture ou un mur déjà existant. Dans ces conditions, les travaux déclarés par Mme D... ne peuvent être regardés comme l'aménagement ou la réfection d'une construction ou d'une installation déjà existante au sens des dispositions de l'article L. 121-16 précitées du code de l'urbanisme. Par suite, le maire de la commune de Penmarch a fait une inexacte application de ces dispositions en ne s'opposant pas à la déclaration de travaux déposée par Mme D....

S'agissant de la méconnaissance du plan de prévention des risques littoraux " Ouest Odet " :

6. Aux termes du chapitre 1 du règlement du plan de prévention des risques littoraux " Ouest Odet ", relatif à son " champ d'application ", ce règlement " s'applique au zones du territoire du littoral sud-Finistère (...) comprenant les communes de (...) Penmarc'h ". Aux termes du chapitre 3 du même règlement, relatif aux dispositions applicables au zonage réglementaire " rouge hachuré noir " : " Le zonage réglementaire rouge hachuré noir correspond aux secteurs les plus dangereux (...) Article 1 - Ces zones sont strictement inconstructibles, (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier qu'au nord-ouest du terrain de Mme D..., une partie du mur projeté, en recul d'environ 150 centimètres de la limite séparative des parcelles, se situe dans la zone rouge hachurée noir du plan de prévention des risques littoraux " Ouest Odet ". Par suite, les travaux déclarés par Mme D..., se situent au sein d'une zone strictement inconstructible. Dans ces conditions, en ne s'opposant pas à la déclaration de travaux déposée par Mme D..., le maire de la commune de Penmarch a méconnu le plan de prévention des risques littoraux " Ouest Odet ".

S'agissant de la méconnaissance du règlement du plan local d'urbanisme de Penmarch :

8. Aux termes du chapitre unique relative au règlement applicable à la zone du règlement du plan local d'urbanisme de Penmarch, approuvé le 2 avril 2010 : " La zone naturelle regroupe (...) la zone NS (Nsm en mer) délimitant les espaces et milieux à préserver en fonction de leur intérêt écologique ou caractéristique du patrimoine naturel en application des articles L. 146-6 et R. 146- 1 " du code de l'urbanisme. Aux termes du point 2 de l'article N.1 du règlement du plan local d'urbanisme de Penmarch : " (...) / Zone NL, zone Nm, zone Ns / Sont interdits tous modes d'occupations du sol à l'exception de celles définies à l'article N2 ". Aux termes du point 6 de l'article N 2 du même règlement : " Sont autorisés dans la zone Ns (Nsm en mer) : / Art. * R. 146-2.- *(D. n° 2004-310, 29 mars 2004, art. 2) - En application du deuxième alinéa de l'article L. 146-6, peuvent être implantés dans les espaces et milieux mentionnés à cet article, après enquête publique dans les cas prévus par le décret n° 85-453 du 23 avril 1985, les aménagements légers suivants, à condition que leur localisation et leur aspect ne dénaturent pas le caractère des sites, ne compromettent pas leur qualité architecturale et paysagère et ne portent pas atteinte à la préservation des milieux : / a) (...) les cheminements piétonniers et cyclables et les sentes équestres ni cimentés, ni bitumés, les objets mobiliers destinés à l'accueil ou à l'information du public, les postes d'observation de la faune ainsi que les équipements démontables liés à l'hygiène et à la sécurité tels que les sanitaires et les postes de secours (...) ; / b) Les aires de stationnement indispensables à la maîtrise de la fréquentation automobile et à la prévention de la dégradation de ces espaces par la résorption du stationnement irrégulier, (...) ; / c) La réfection des bâtiments existants et l'extension limitée des bâtiments et installations nécessaires à l'exercice d'activités économiques ; / d) A l'exclusion de toute forme d'hébergement et à condition qu'ils soient en harmonie avec le site et les constructions existantes : / - les aménagements nécessaires à l'exercice des activités agricoles, pastorales et forestières ne créant pas plus de 50 mètres carrés de surface de plancher ; / - dans les zones de pêche, de cultures marines ou lacustres, de conchyliculture, de saliculture et d'élevage d'ovins de prés salés, les constructions et aménagements exigeant la proximité immédiate de l'eau liés aux activités traditionnellement implantées dans ces zones, (...) ; / e) Les aménagements nécessaires à la gestion et à la remise en état d'éléments de patrimoine bâti reconnus par un classement au titre de la loi du 31 décembre 1913 ou localisés dans un site inscrit ou classé (...) ". Aux termes de l'article L. 146-6 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable à la date d'approbation du plan local d'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques (...) Toutefois, des aménagements légers peuvent y être implantés lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public. Un décret définit la nature et les modalités de réalisation de ces aménagements ".

9. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est situé au sein d'une zone spéciale de conservation Natura 2000 et de la zone Nsm en mer telle que définie par le plan local d'urbanisme de la commune de Penmarch, qui revêt les caractéristiques d'un espace et milieu à préserver en fonction de son intérêt écologique ou du patrimoine naturel. A supposer même que le règlement du plan local d'urbanisme, fixant les aménagements légers pouvant être implantés dans la zone Nsm où se situent les parcelles de Mme D..., ait entendu ne pas s'opposer à ce que, eu égard à leur objet et à leur nature, des travaux d'édification et de réfection de clôtures soient autorisés dans ces espaces, il ressort en tout état de cause des pièces du dossier que l'édification du mur en pierres projetée, compte tenu de sa dimension et de son importance, dénature le caractère du site protégé et compromet sa qualité paysagère. Par suite, le maire de la commune de Penmarch a fait une inexacte application des dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme en ne s'opposant pas à la déclaration de travaux déposée par Mme D....

10. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Penmarch n'est pas fondée à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de Mme I..., l'arrêté du 4 octobre 2016 par lequel le maire de la commune de Penmarch ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme D... le 7 septembre 2016.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme I..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la commune de Penmarch d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Penmarch le versement à Mme I... d'une somme de 1 000 euros au titre des mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de de la commune de Penmarch est rejetée.

Article 2 : La commune de Penmarch versera à Mme I... une somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Penmarch et à Mme F... I....

Copie en sera adressée à Mme A... D....

Délibéré après l'audience du 2 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme C..., présidente-assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 octobre 2020.

Le rapporteur,

A. B...Le président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au préfet du Finistère, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 19NT03435


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03435
Date de la décision : 20/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : ARTOIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-10-20;19nt03435 ?
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