Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures :
I. Par une demande enregistrée sous le n° 2200106, Mme F... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler, d'une part, l'arrêté du 6 janvier 2022 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a obligée à quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire, lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et a fixé l'Albanie comme pays de destination, d'autre part, l'arrêté du même jour pris par la même autorité administrative l'assignant à résidence pour une durée de
quarante-cinq jours.
II. Par une demande enregistrée sous le n° 2200107, M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler d'une part, l'arrêté du 6 janvier 2022 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine l'a obligé à quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire, lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et a fixé l'Albanie comme pays de destination, d'autre part, l'arrêté du même jour pris par la même autorité administrative l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.
Par un jugement n° 2200106, 2200107 du 12 janvier 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.
Procédures devant la cour :
I. Sous le n°22NT00251, par une requête, enregistrée le 27 janvier 2022, Mme F... B... épouse C..., représentée par Me Rochard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 janvier 2022 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 6 janvier 2022 lui faisant obligation de quitter, sans délai, le territoire français, lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et fixant l'Albanie comme pays de destination ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet d'Ille-et-Vilaine du 6 janvier 2022 la concernant ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer, dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour ou subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation en lui délivrant, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'un défaut de motivation ainsi que d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant compte tenu de la situation actuelle de ses enfants ;
En ce qui concerne la décision fixant l'Albanie comme pays de renvoi :
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de ce qu'elle est perçue à tort, dans son pays d'origine, comme appartenant à la communauté des Roms et qu'elle et sa famille ont été victimes pendant de nombreuses années de discrimination et de marginalisation ;
En ce qui concerne la décision portant refus de départ volontaire :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que le préfet n'était pas en compétence liée pour prendre une telle mesure et que le tribunal n'a pas établi en quoi cette décision ne serait pas disproportionnée au regard de la situation de ses enfants ;
En ce qui concerne la décision faisant interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant compte tenu de ce qui a été dit précédemment sur sa situation familiale ;
En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
- elle sera annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français.
II. Sous le n°22NT00252, par une requête, enregistrée le 27 janvier 2022, M. A... C..., représenté par Me Rochard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 janvier 2022 en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 6 janvier 2022 lui faisant obligation de quitter, sans délai, le territoire français, lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et fixant l'Albanie comme pays de destination ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet d'Ille-et-Vilaine du 6 janvier 2022 le concernant ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer, dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour ou subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation en lui délivrant, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'un défaut de motivation ainsi que d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant compte tenu de la situation actuelle de ses enfants ;
En ce qui concerne la décision fixant l'Albanie comme pays de renvoi :
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de ce qu'il est perçu à tort, dans son pays d'origine, comme appartenant à la communauté des Roms et que lui et sa famille ont été victimes pendant de nombreuses années de discrimination et de marginalisation ;
En ce qui concerne la décision portant refus de départ volontaire :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que le préfet n'était pas en compétence liée pour prendre une telle mesure et que le tribunal n'a pas établi en quoi cette décision ne serait pas disproportionnée au regard de la situation de ses enfants ;
En ce qui concerne la décision faisant interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant compte tenu de ce qui a été dit précédemment sur sa situation familiale ;
En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
- elle sera annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français.
Mme F... B... épouse C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2022.
M. A... C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. L'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C... et Mme F... B..., son épouse, ressortissants albanais nés respectivement les 12 avril 1979 et 28 août 1985, ont déclaré être entrés en France, le 6 janvier 2017 où ils ont déposé une demande de reconnaissance du statut de réfugié. Par des décisions du 31 août 2017, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté leurs demandes, décisions confirmées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 11 mai 2018. Après consultation du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration sur la demande de délivrance d'un titre de séjour pour raisons médicales présentée par Mme C..., les intéressés ont fait l'objet, le 21 octobre 2019, d'arrêtés portant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours. Par un jugement du 4 février 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces deux arrêtés. M. et Mme C... n'ont pas déféré aux mesures d'éloignement devenues définitives. M. C... a été interpellé le 4 janvier 2022 pour conduite d'un véhicule sans permis de conduire. Par deux nouveaux arrêtés du 6 janvier 2022, le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé d'obliger M. et Mme C... à quitter le territoire, sans leur accorder de délai de départ volontaire, a fixé l'Albanie comme pays de renvoi, et leur a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Le même jour, le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé, par deux arrêtés distincts, d'assigner à résidence M. et Mme C... pour une durée de quarante-cinq jours. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes du 12 janvier 2022 qui a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés du 6 janvier 2022.
2. La requête n°22NT00251 présentée pour Mme F... B..., épouse C... et la requête n°22NT00252 présentée pour M. A... C... concernent la situation administrative des membres d'un même couple de ressortissants étrangers, présentent à juger des questions identiques et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent [...] ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation [...] doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
4. Les décisions contestées, qui visent notamment les articles pertinents du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement desquels les arrêtés en litige ont été pris ainsi que les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant, précisent, pour chacune d'elles, la situation de M. et Mme C... en France. Elles indiquent notamment que leurs demandes d'asile ont fait l'objet de décisions de refus prises par l'OFPRA confirmées par la CNDA, ainsi que la durée et les conditions de leur séjour en France. En particulier, elles mentionnent que les intéressés n'ont pas déféré aux mesures d'éloignement prises à leur encontre le 21 octobre 2019 et qu'ils n'ont entrepris aucune démarche tendant à obtenir la régularisation de leur situation administrative. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, le préfet a également pris en compte leur situation familiale en indiquant qu'ils sont parents de six enfants mineurs dont quatre à leur charge et que les décisions en litige n'auront pas pour effet de séparer la famille qui se maintient en situation irrégulière en France et qu'ils n'établissaient pas que leurs enfants ne pourraient pas poursuivre leur scolarité ailleurs qu'en France, ni que la mesure serait de nature à méconnaître les stipulations du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant. Le préfet a également pris en compte les circonstances que les intéressés n'apportaient aucun élément nouveau de nature à justifier la délivrance d'un titre de séjour pour raisons médicales et qu'ils ne justifiaient pas ne plus avoir d'attaches dans leur pays d'origine, M. C... ayant au demeurant déclaré que ses parents ainsi que ses frères et sœurs y résidaient. Par suite, les décisions portant obligation de quitter le territoire français, qui n'ont pas à mentionner l'ensemble des éléments de la situation des intéressés mais seulement ceux sur lesquels le préfet entend fonder ses décisions, comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, en particulier s'agissant de leur situation personnelle et familiale. Par suite, le moyen tiré de leur insuffisante motivation doit être écarté.
5. En deuxième lieu, il ne ressort pas de la motivation des décisions en litige, telle que rappelée au point précédent, laquelle fait état des principaux éléments caractérisant la situation personnelle, familiale et administrative des requérants, que le préfet d'Ille-et-Vilaine n'aurait pas procédé à un examen particulier de leur situation.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme C... ne sont présents en France que depuis le mois de janvier 2017 et que leurs demandes d'asile ont été définitivement rejetées le 11 mai 2018. Ils n'ont pas déféré aux arrêtés du 21 octobre 2019 du préfet du Finistère les obligeant à quitter le territoire français et se sont ainsi maintenus irrégulièrement sur le territoire français sans solliciter la régularisation de leur situation administrative. Par ailleurs, il ressort de ces mêmes pièces que les requérants sont sans profession et sans domicile, étant pris en charge par le centre communal d'action sociale. Ils ne font état d'aucune insertion dans la société française, ni avoir, en France, d'attaches familiales particulières, hormis leurs enfants mineurs. Par ailleurs, il résulte du jugement en assistance éducative du 23 juin 2021 du tribunal pour enfants du tribunal judiciaire de Rennes, intervenu moins de six mois avant les décisions contestées, que leur fille E..., née le 4 janvier 2006, a bénéficié, à sa demande, d'une mesure de placement après avoir notamment dénoncé les violences psychologiques et physiques régulières qu'elle a subies de la part de ses parents. Ce jugement, alors même qu'il accorde un droit de visite et d'hébergement par quinzaine ainsi que quelques jours pendant les vacances scolaires, a maintenu la mesure de placement en confiant la jeune fille à l'aide sociale à l'enfance, au moins jusqu'au 28 février 2022, au motif que " la situation de E... est particulièrement alarmante. / En effet, l'adolescente multiplie les mises en danger et les éléments recueillis par le service éducatif laissent craindre que la mineure a vécu des évènements particulièrement traumatiques et qui sont aujourd'hui source de grande souffrance. / Ces constatations et inquiétudes sont notamment à mettre en lien avec les dénonciations de viol faites par E... au cours de la précédente audience " ainsi qu'en raison, alors que la mesure de placement a été prise dans un contexte de violence au domicile familial, des " postures parentales (...) [qui] font à ce jour obstacle à un retour de la mineure au domicile parental ". Si les requérants font, par ailleurs, valoir que leur fils aîné, D..., alors mineur à la date des décisions contestées, a reconnu, selon un acte établi à la mairie d'Argentré du Plessis, être le père d'un enfant qu'attend une ressortissante française, il résulte des énonciations du jugement attaqué, qui n'est pas contesté sur ce point, que leur fils alors âgé de 17 ans, réside avec sa compagne chez la mère de cette dernière. Alors que l'enfant n'est pas né à la date des décisions contestées, les requérants ne sauraient utilement se prévaloir de la qualité de grands-parents d'enfant français. Il ne ressort pas enfin des pièces du dossier que les autres enfants du couple, qui sont scolarisés, ne pourraient pas poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que les décisions les obligeant à quitter le territoire français porteraient une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
8. En quatrième lieu, aux termes du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ".
9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que le préfet d'Ille-et-Vilaine, en les obligeant à quitter le territoire français, aurait porté atteinte à l'intérieur supérieur de leurs enfants tel que garanti par les stipulations du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :
10. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
11. Il résulte de la décision du conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 9 octobre 2015 que l'Albanie figure sur la liste des pays d'origine sûrs et que les demandes d'asile présentées par M. et Mme C... ont été définitivement rejetées par des décisions de la Cour nationale du droit d'asile du 11 mai 2018. Les requérants soutiennent, néanmoins, qu'en cas de retour dans le pays dont ils sont ressortissants, ils peuvent légitimement craindre d'être soumis à des traitements prohibés par les stipulations précitées, en alléguant avoir été victimes, ainsi que leurs familles, d'exclusion aboutissant à une marginalisation totale pour avoir été assimilés, à tort, du fait de leur origine balkano-égyptienne, à la communauté des Roms. Toutefois, en se bornant à reproduire des extraits documentaires sur la situation de la communauté Rom en Albanie, ils n'établissent pas qu'ils seraient susceptibles d'être personnellement exposés à des traitements attentatoires aux droits garantis par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou à des discriminations en cas de retour dans leur pays. Il suit de là que les arrêtés contestés en fixant l'Albanie comme pays de destination n'ont pas porté une atteinte illégale aux droits que les intéressés tiennent des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne les décisions portant refus d'un délai de départ volontaire :
12. M. et Mme C... reprennent en appel les moyens, déjà invoqués en première instance, tirés de ce que les décisions portant refus d'un délai de départ volontaire sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaissent les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors que le préfet se serait de plus estimé en compétence liée pour prendre de telles décisions. Il y a lieu d'écarter ces moyens, à l'appui desquels ils n'apportent aucune argumentation ni élément nouveau, par adoption des motifs retenus par le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes aux points 8 et 9 de sa décision.
En ce qui concerne les décisions d'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an :
13. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11. ".
14. Pour soutenir que la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation, les requérants se bornent à s'en remettre à leur situation familiale qu'ils ont précédemment exposée pour contester les autres décisions contenues dans les arrêtés en litige. Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, notamment au point 7, ces moyens ne peuvent être qu'écartés.
En ce qui concerne les arrêtés portant assignation à résidence :
15. Il résulte des motifs qui précèdent que M. et Mme C... ne sont pas fondés à invoquer, par voie d'exception à l'encontre des décisions portant assignation à résidence, l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination et portant refus d'un délai de départ volontaire.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes. Doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par les requérants ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de Mme F... B... épouse C... et de M. A... C... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... B... épouse C..., à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 16 juin 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président,
- Mme Brisson, présidente-assesseure,
- M. L'hirondel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juillet 2022.
Le rapporteur
M. L'hirondel
Le président
D. Salvi
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N°s 22NT00251, 22NT00252