Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures :
Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes :
Sous le n° 2002058, d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2019 par lequel la ministre des armées l'a placée en disponibilité d'office, ainsi que la décision rejetant implicitement le recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté le 3 décembre 2019.
Sous le n° 2102651, d'annuler l'arrêté du 16 juin 2021 de la ministre des armées portant prolongation de disponibilité d'office pour raison de santé, et d'enjoindre à la ministre des armées de la placer en congé de longue maladie et de procéder en conséquence à la reconstitution de ses droits à rémunération, à avancement et à la retraite, ou de procéder au réexamen de sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.
Par un jugement n° 2002058, 2102651 du 19 avril 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 31 mai 2022, Mme D... C..., représentée par Me Brunel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 avril 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2019 par lequel la ministre des armées l'a placée en disponibilité d'office, l'arrêté du 16 juin 2021 par lequel la ministre a prolongé sa disponibilité d'office, ainsi que les décisions rejetant implicitement les recours gracieux formés à l'encontre de ces arrêtés ;
3°) d'enjoindre au ministre des armées de la placer en congé de longue maladie et de procéder en conséquence à la reconstitution de ses droits à rémunération, à avancement et à la retraite, à titre subsidiaire d'enjoindre au ministre des armées de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois suivant la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle et, à défaut, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les arrêtés ont été pris par une autorité incompétente ;
- les arrêtés qui lui ont été notifiés ne comportaient pas la signature de leur auteur, en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ; rien ne garantit que ces arrêtés n'aient pas reçu signature a posteriori ;
- ils sont entachés d'un défaut de motivation ;
- elle n'a pas eu communication des avis émis par le comité médical départemental et par le comité médical supérieur, en méconnaissance des dispositions de l'article 35 du décret du 14 mars 1986 ;
- la ministre des armées aurait dû examiner la possibilité de son reclassement, en application des dispositions des articles 63 de la loi du 11 janvier 1984 et 43 du décret du 16 septembre 1985.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 juillet 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.
Par ordonnance du 15 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 13 février 2024.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 5 juillet 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n° 2011-1864 du 12 décembre 2011 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., adjointe administrative de 2ème classe du ministère de la défense affectée à la base aéronavale de Nîmes-Garons, a été victime le 6 décembre 2016 d'un accident reconnu imputable au service. Par décision du 5 décembre 2018, la ministre des armées a fixé la date de consolidation au 30 novembre 2018, avec un taux d'incapacité permanente partielle de 10 %. Par un arrêt rendu le 18 juillet 2023 sous le n° 21TL03501, la cour a, confirmant un jugement du tribunal administratif de Nîmes, rejeté la demande de Mme C... tendant à l'annulation de la décision du 5 décembre 2018. Par deux décisions, du 8 août 2019 prise après avis du comité médical départemental, et du 2 juin 2020 prise après avis du comité médical supérieur, la ministre des armées a refusé d'accorder à Mme C... un congé de longue maladie. Le 3 septembre 2019, la ministre des armées a demandé à l'intéressée de reprendre ses fonctions. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler les arrêtés des 17 octobre 2019 et 16 juin 2021 par lesquels la ministre des armées l'a placée puis maintenue en disponibilité d'office pour raison de santé, ainsi que les décisions rejetant implicitement les recours gracieux qu'elle a formés à l'encontre de ces arrêtés. Elle relève appel du jugement du 19 avril 2022 du tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté ses demandes.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci (...) ".
3. Si les ampliations des arrêtés attaqués qui ont été notifiées à Mme C... ne comportent pas la signature de Mme F..., cheffe du bureau filière administrative, il ressort des pièces du dossier que les originaux de ces arrêtés sont revêtus de la signature manuscrite de celle-ci. Aucun élément du dossier ne permet d'établir que cette signature aurait été apposée postérieurement à la décision attaquée. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration doit dès lors être écarté.
4. En deuxième lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des arrêtés attaqués par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 5 de son jugement.
5. En troisième lieu, les décisions plaçant d'office un fonctionnaire en disponibilité en raison de l'expiration de ses droits statutaires à congé de maladie ne relèvent d'aucune des catégories de décisions qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Mme C... ne peut donc utilement soutenir que les arrêtés des 17 octobre 2019 et 16 juin 2021 seraient entachés d'une insuffisance de motivation.
6. En quatrième lieu, il ne ressort d'aucune disposition législative ou réglementaire que l'administration soit tenue de communiquer à l'agent l'avis émis par le comité médical départemental ou par le comité médical supérieur. Il ressort au demeurant des pièces du dossier que Mme C... a été informée de la teneur des avis émis par ces instances par lettres des 14 août 2019 et 19 mai 2020. Par suite, le moyen tiré d'un vice de procédure en raison de l'absence de communication des avis émis par ces instances doit être écarté.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article 43 du décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions : " La mise en disponibilité ne peut être prononcée d'office qu'à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus au premier alinéa du 1°, au premier alinéa du 3° et au 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues à l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée./ La durée de la disponibilité d'office ne peut excéder une année. Elle peut être renouvelée deux fois pour une durée égale. Si le fonctionnaire n'a pu, durant cette période, bénéficier d'un reclassement, il est, à l'expiration de cette durée, soit réintégré dans son administration s'il est physiquement apte à reprendre ses fonctions, soit, en cas d'inaptitude définitive à l'exercice des fonctions, admis à la retraite ou, s'il n'a pas droit à pension, licencié (...) ". L'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires applicables à la fonction publique de l'Etat, alors en vigueur, dispose : " Lorsqu'un fonctionnaire est reconnu, par suite d'altération de son état de santé, inapte à l'exercice de ses fonctions, le poste de travail auquel il est affecté est adapté à son état de santé. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ce fonctionnaire peut être reclassé dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois en priorité dans son administration d'origine ou, à défaut, dans toute administration ou établissement public mentionnés à l'article 2 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, s'il a été déclaré en mesure de remplir les fonctions correspondantes (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'octroi d'un congé de longue maladie présentée par Mme C... a été rejetée par décision du 14 août 2019 prise après avis du comité médical départemental du Gard, lequel avait émis le 1er août 2019 un avis défavorable fondé sur l'absence de caractère invalidant et de gravité confirmée de la pathologie résultant de l'accident de service du 6 décembre 2016. Le comité médical a estimé qu'aucun argument médical ne justifiait l'arrêt de travail à compter du 1er décembre 2018 et préconisé la reprise immédiate des fonctions. Cet avis a été confirmé par le comité médical supérieur à l'issue de sa séance du 31 mars 2020. Si Mme C... se prévaut des conclusions rendues par le docteur A... dans son rapport du 14 novembre 2018, selon lequel elle est inapte à son poste antérieur, son état nécessitant un reclassement professionnel, l'expert s'est borné à relever que l'intéressée aurait des difficultés pour se rendre à son service à Nîmes alors qu'elle réside à Montpellier. S'il a ajouté que son poste de travail impliquait des déplacements à pied, aucune pièce du dossier ne permet de l'établir, alors que Mme C... exerçait des fonctions d'accueil relation client en qualité d'agent administratif. Il ne ressort d'aucune pièce médicale, notamment du rapport établi par le docteur B..., généraliste, le 29 mai 2019, et des certificats médicaux produits par l'intéressée à l'appui de son refus de reprendre ses fonctions le 16 septembre 2019, que Mme C... présentait une inaptitude à son poste de travail nécessitant son reclassement professionnel. En outre, à l'issue de sa séance du 3 juin 2021, le comité médical départemental du Gard a émis un avis favorable à la prolongation de la disponibilité d'office de Mme C... pour raison de santé pour une durée de douze mois à compter du 1er décembre 2020, et à l'inaptitude totale et définitive de l'intéressée à ses fonctions et à toutes fonctions à l'issue de cette période. Il ne ressort pas des pièces produites que l'état de santé de Mme C..., lequel ne découle pas seulement des conséquences de l'accident de service survenu en décembre 2016, lui permettait, aux dates d'édiction des arrêtés attaqués, de reprendre une activité professionnelle, au besoin après reclassement. Dès lors que Mme C... a été déclarée inapte de manière définitive et absolue à l'exercice de toute fonction, la ministre des armées n'était pas tenue de lui proposer un reclassement en application des dispositions précitées de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984. Il en résulte qu'en décidant de placer la requérante en disponibilité pour raisons de santé par son arrêté du 17 octobre 2019, puis de prolonger cette disponibilité par son arrêté du 16 juin 2021, la ministre des armées a fait une exacte application des dispositions précitées de l'article 43 du décret du 16 septembre 1985. Le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont seraient entachés les arrêtés contestés doit dès lors être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre des armées, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes. Ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... née E... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 23 avril 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
M. Teulière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mai 2024.
La rapporteure,
A. Blin
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°22TL21251 2