Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 4 avril 2017 par lequel le maire de la commune d'Orgerus a refusé de délivrer à M. E... et Mme A... un permis de construire pour la réalisation d'une maison individuelle sur son terrain situé section H n° 426, rue du Moutier.
Par un jugement n° 1708263 du 2 décembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 février 2020, M. D..., représenté par Me Mairesse, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune d'Orgerus de délivrer le permis de construire sollicité ou, à défaut, de procéder à un réexamen de la demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 250 euros par jour de retard ;
4°) de condamner la commune d'Orgerus à lui verser la somme de 9 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'arrêté du 4 avril 2017 ;
5°) de mettre à la charge de la commune d'Orgerus le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de l'instance.
M. D... soutient que :
- sa demande était recevable ;
- l'arrêté litigieux émane d'un auteur incompétent ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit en ce que l'article UG3 du règlement du PLU de la commune d'Orgerus ne s'applique pas aux chemins internes à sa parcelle ;
- le maire ne pouvait opposer l'absence d'accès de sa parcelle à la voie publique, l'arrêt de bus situé à l'issue du chemin d'accès ne constituant pas un obstacle à ce passage ;
- la construction d'un trottoir au droit de l'accès à sa parcelle constitue une voie de fait ;
- le refus litigieux lui a causé un préjudice tenant à l'impossibilité de vendre son terrain.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2022, la commune d'Orgerus, représentée par Me Segalen, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. D... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la demande était tardive ;
- les conclusions indemnitaires n'ont pas été précédées d'une demande préalable ;
- les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires, nouvelles en appel.
Par ordonnance du président de la 6ème chambre du 12 septembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 12 octobre 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme G...,
- les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique,
- et les observations de Me Segalen pour la commune d'Orgerus.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., propriétaire de la parcelle située secteur H, n° 426, rue du Moutier, sur le territoire de la commune d'Orgerus, a conclu avec M. E... et Mme A... une promesse de vente sous condition suspensive relative à l'obtention du permis de construire une maison individuelle sur ce terrain. Par un premier arrêté du 19 janvier 2017, le maire de la commune d'Orgerus a refusé de délivrer un premier permis de construire à M. E... et Mme A.... A la suite d'une nouvelle demande, le maire d'Orgerus a de nouveau refusé de leur délivrer un permis de construire par un arrêté du 4 avril 2017. M. D... relève appel du jugement du 2 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce second arrêté et demande à la cour de condamner la commune d'Orgerus à l'indemniser des préjudices nés de l'adoption de la décision du 4 avril 2017.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article UG3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Orgerus : " Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée en bonne état de viabilité. / Le nombre des accès sur les voies publiques peut être limité dans l'intérêts de la sécurité ; en particulier lorsque le terrain est desservi par plusieurs voies, les constructions peuvent d'être autorisées que sous réserve que l'accès soit établi sur la voie où la gêne pour la circulation sera la moindre. / Les caractéristiques des voies et des accès doivent être adaptées aux usagées qu'ils supposent ou aux opérations qu'ils doivent desservir ainsi que permettre de satisfaire aux règles minimales de desserte : défense contre l'incendie, protection civile, brancardage, etc. L'emprise des voies automobiles nouvelles ne pourra être inférieure à 4 mètres de large. / Les accès sur les voies publiques doivent être aménagés de façon à éviter toute perturbation et tout danger pour la circulation générale. / Les voies nouvelles se terminant en impasse ne devront pas excéder 50 mètres de longueur et seront aménagées, à l'intérieur des 50 m, de telle sorte que les véhicules puissent faire demi-tour ". Aux termes de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. Il peut également être refusé ou n'être accepté que sous réserve de prescriptions spéciales si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic ".
3. Pour refuser de délivrer le permis sollicité par M. E... et Mme A..., le maire de la commune d'Orgerus s'est fondé sur la circonstance que le chemin reliant la rue du Moutier à la construction projetée, situé sur le terrain d'assiette du projet, était d'une largeur inférieure à 4 mètres en méconnaissance des dispositions de l'article UG3. Néanmoins, il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles n'ont pas vocation à régir les voies internes aux terrains d'assiette des constructions autorisées, mais uniquement les voies d'accès à ces terrains. Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont censuré ce motif.
4. La commune d'Orgerus a demandé, devant les premiers juges et sur le fondement des dispositions des articles UG3 et R. 111-5 précités, que soit substitué à ce motif celui tiré de l'absence d'accès du terrain de M. D... à une voie publique au motif qu'un arrêt de bus, constitué d'un zébra et d'un poteau d'information, se situait devant cet accès. Il ressort néanmoins des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, aucun obstacle matériel n'existait à l'entrée et à la sortie des piétons et des véhicules depuis le terrain litigieux. L'arrêt de bus " Pré de la Jument " ne desservait que deux lignes de bus n'assurant chacun au plus que 5 passages par jour, concentrés entre 5 heures 30 et 8 heures 30 du matin et à 18 heures 20 du lundi au vendredi. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'accès au terrain de M. D... aurait représenté, au vu de la configuration du chemin de desserte situé sur sa parcelle et du trottoir, un danger ou une gêne excessive pour les usagers de ces transports en commun ou devrait être regardé comme particulièrement difficile du fait de cette desserte. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que le maire de la commune d'Orgerus n'a pas recherché, nonobstant la circonstance que cet aménagement relèverait de la compétence d'Ile-de-France Mobilités, si l'aménagement léger que constituait le déplacement de cet arrêt de bus ne serait pas de nature à permettre de faire droit à la demande dans de bonnes conditions de sécurité avant de prendre la décision contestée. Dès lors, M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont procédé à la substitution de motifs demandée par la commune.
5. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la commune d'Orgerus devant le tribunal administratif.
6. En premier lieu, l'intérêt à agir s'apprécie à la date d'introduction de la requête. Il ressort des pièces du dossier que la promesse de vente conclue au bénéfice de M. E... et Mme A..., pétitionnaires, était devenue caduque depuis plusieurs mois le 27 novembre 2017, date d'introduction de la demande devant le tribunal administratif, du fait de la non-réalisation de la condition suspensive tendant à l'obtention d'un permis de construire par les acquéreurs, invoquée par ces derniers le 16 juin 2017. M. D... ne soutient pas avoir eu l'intention de poursuivre le projet fondant la demande de M. E... et Mme A.... Il résulte de tout ce qui précède que si M. D... aurait été recevable à présenter, devant les premiers juges, des conclusions indemnitaires tendant à l'indemnisation du préjudice né pour lui de l'arrêté du 4 avril 2017, il ne disposait pas d'un intérêt suffisant lui donnant qualité pour demander l'annulation de cet arrêté. Dès lors, la commune d'Orgerus était fondée à soutenir que la demande de M. D... était irrecevable pour ce premier motif.
7. En second lieu, aux termes de l'article L. 110-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Sont considérées comme des demandes au sens du présent code les demandes et les réclamations, y compris les recours gracieux et hiérarchiques, adressées à l'administration ". En assimilant les "recours gracieux ou hiérarchiques" à des "demandes au sens du présent chapitre", soumises aux dispositions des articles L. 112-3 et L. 112-6 du même code prescrivant aux autorités administratives d'accuser réception de toute demande dans des conditions dont le non-respect entraîne l'inopposabilité des délais de recours, le législateur a entendu viser, conformément à sa volonté de protéger les droits des citoyens dans leurs relations avec les autorités administratives, uniquement les recours formés par les personnes contestant une décision prise à leur égard par une autorité administrative. Ne sont pas non plus applicables à la détermination du délai imparti aux tiers pour saisir la juridiction compétente à la suite d'une décision rejetant leurs recours gracieux ou hiérarchiques, les dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative selon lesquelles " les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".
8. En l'espèce, M. D..., s'il avait un intérêt à la délivrance du permis demandé par M. E... et Mme A... pendant la durée de validité de la promesse de vente conclue avec ces derniers, doit néanmoins être regardé comme un tiers à la demande formée par ces acquéreurs. Il doit être regardé comme ayant été informé de la décision de refus du 4 avril 2017, qui comportait la mention des voies et délais de recours, le 11 mai 2017, date à laquelle il a formé un recours gracieux contre cette décision. Ce recours a été rejeté par un courrier du 2 juin 2017 dont M. D... doit être regardé comme ayant été informé au plus tard le 25 juillet 2017, date de son entrevue avec les services de la mairie. Dès lors, nonobstant l'absence de mention des voies et délais de recours sur cette dernière décision, sa demande enregistrée le 27 novembre 2017 a été introduite au-delà de l'expiration du délai de recours contre les décisions en litige. Par suite, la commune d'Orgerus est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges n'ont pas rejeté cette demande comme irrecevable pour ce second motif.
9. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen soulevé par M. D..., ce dernier n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions indemnitaires :
10. La demande de M. D... tendant à la condamnation de la commune d'Orgerus à l'indemniser des préjudices subis du fait de l'adoption de l'arrêté du 4 avril 2017 a été présentée pour la première fois devant le juge d'appel. Dès lors, elle doit être rejetée comme irrecevable.
Sur l'application des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative :
11. La présente instance n'a donné lieu à aucun des frais visés à l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Dès lors, les conclusions de M. D... présentées sur ce fondement doivent être rejetées.
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. D... demande à ce titre. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... le versement de la somme que la commune d'Orgerus demande sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune d'Orgerus présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à M. B... E..., à Mme F... A... et à la commune d'Orgerus.
Délibéré après l'audience du 16 février 2023, à laquelle siégeaient :
M. Albertini, président de chambre,
M. Mauny, président assesseur,
Mme Villette, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mars 2023.
La rapporteure,
A. G...Le président,
P.-L. ALBERTINI La greffière,
S. DIABOUGA
La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 20VE00509