DU 27 Mars 2003 ------------------------- B.B/M.F.B
S.A. S A F E R G H L C/ Jean-Pierre X..., Marc Y..., ASSOCIATION TUTELAIRE DU GERS RG N : 01/01559 - A R R E T N° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du vingt sept Mars deux mille trois, par Bernard BOUTIE, Président de Chambre, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : S.A. SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL DE GASCOGNE HAUT LANGUEDOC prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège 6 place de l'Ancien Foirail 32000 AUCH représentée par Me TANDONNET, avoué assistée de la SCP SEGUY - BOURDIOL, avocats APPELANTE d'un jugement du Tribunal de Grande Instance d'AUCH en date du 07 Novembre 2001 D'une part, ET : Monsieur Jean-Pierre X.... représenté par la SCP VIMONT J. ET E., avoués assisté de Me Bernard MUSQUI, avocat Monsieur Marc Ernest Y.... ASSOCIATION TUTELAIRE DU GERS prise en sa qualité de mandataire spécial de M. Marc Y..., prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège Rue Jeanne d'Albret 32000 AUCH représentés par Me Jean Michel BURG, avoué assistés de Me Marianne FRANCOIS, avocat INTIMES D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 27 Février 2003, devant Bernard BOUTIE, Président de Chambre, Catherine LATRABE et Arthur ROS, Conseillers, assistés de Monique FOUYSSAC, Greffière, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
Dans un compromis de vente notarié du 15 novembre 1999, Marc Y.... vendait à Jean-Pierre X.... une propriété agricole d une superficie de 93 ha, 29 a et 03 ca pour un prix de 3.275.000 F (499270,53 ). Par courrier recommandé du 06 décembre 1999, la Société d Aménagement
Foncier et d Etablissement rural de Gascogne Haut Languedoc (dite SAFER GHL), à qui cette vente avait été notifiée le 16 novembre 1999, réclamait diverses pièces. Elle en demandait d autres par lettre recommandée des 25 janvier et 04 février 2000. Elle exerçait son droit de préemption par acte du 12 janvier 2000. Par courrier du 04 avril 2000, Marc Y.... mettait en demeure la SAFER GHL de passer l acte. Un procès-verbal e difficultés ayant été signé par le notaire le 28 avril 2000, la SAFER GHL assignait les autres parties en validité de la vente.
Par jugement du 07 novembre 2001, le tribunal de grande instance d AUCH : Constatait la nullité de plein droit de la déclaration de préemption de la SAFER GHL effectuée le 12 janvier 2000, Décidait que l acte sous seing privé entre Marc Y.... et Jean-Pierre X..., le 15 novembre 1999, produirait ses effets et renvoyait les parties devant le notaire pour la passation de l acte authentique, Déboutait Jean-Pierre X.... de sa demande de dommages-intérêts, Condamnait la SAFER GHL à payer à Jean-Pierre X.... la somme de 30.000 F (4573,47 ) et à Marc Y.... et à l association tutélaire du GERS, es-qualité de curateur de ce dernier, la somme de 15000 F (2286,74 ) en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par déclaration du 04 décembre 2001, dont la régularité n'est pas contestée, la SAFER GHL relevait appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions déposées le 18 octobre 2002, elle soutient qu elle a obtempéré à la sommation de passer l acte qui lui était délivrée par le vendeur et que la non-passation de cet acte de vente n est pas de son fait mais est la conséquence de la révélation d un contrat d entreprise liant Jean-Pierre X.... et Marc Y.... et de nouvelles exigences financières du vendeur. Elle conclut à la réformation du jugement et demande que l arrêt à intervenir tienne
lieu d acte de vente. Elle réclame encore la somme de 3050 en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Marc Y.... et l association tutélaire du GERS, dans ses dernières écritures déposées le 30 mai 2002, estime que les premiers juges ont fait une exacte application des règles de droit aux éléments de l'espèce. Il sollicite donc la confirmation du jugement entrepris. IL fait valoir encore que l action de la SAFER GHL est irrecevable car tardive. Il réclame encore la somme de 3000 en remboursement de ses frais irrépétibles.
Le 07 août 2002, Jean-Pierre X.... conclut dans le même sens. Par appel incident, il réclame à la SAFER GHL la somme de 67840 à titre de dommages-intérêts pour le retard apporté à l entrée en jouissance ainsi que celle de 9147 en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. SUR QUOI,
Attendu que l article L.412-8 alinéa 4 du Code Rural dispose que celui qui exerce son droit de préemption dispose d un délai de deux mois à compter de la date d envoi de sa réponse au vendeur pour réaliser l acte de vente authentique ; qu à défaut, la déclaration de préemption sera nulle de plein droit, quinze jours après une mise en demeure fait par acte d huissier restée sans effet ;
Attendu en l espèce qu il est constant que la SAFER GHL déclarait exercer son droit de préemption par acte du 12 janvier 2000 ; qu elle avait donc l obligation de passer l acte avant le 13 mars 2000 ; que Marc Y.... lui faisait sommation d avoir à passer l acte par exploit du 04 avril 2000 ; que lors de la réunion des parties chez le notaire, le 14 avril 2000, l acte n était pas signé ; qu il ne l était pas davantage lors de la réunion suivante du 18 avril 2000, date à laquelle le procès-verbal de difficultés était dressé ;
Que la seule constatation de l expiration du délai sans examen des éléments de fait rendrait illusoire toute préemption en la soumettant
à la seule bonne volonté du vendeur et ne suffit donc pas à entraîner la nullité de la préemption ; qu en outre, selon le principe général de l exécution de bonne foi des conventions, il est nécessaire de rechercher si la SAFER GHL, tiers par rapport aux deux autres parties, était totalement informée des conditions exactes de la vente ;
Qu en l espèce, il est constant que la notification de la vente faite par le notaire correspond aux exigences de l article L. 400-12-8 du Code Rural ; qu elle ne mentionne aucun élément rendant la propriété indisponible ;
Qu elle n avait pas à mentionner l existence du contrat d entreprise ; qu en effet, eu égard à l effet relatif des conventions, ce contrat, qui ne conférait pas un droit réel mais un simple droit personnel, n avait d influence que dans les rapports Marc Y.... Jean-Pierre X.... ; qu il n affectait nullement la propriété des terres et leur disponibilité immédiate ; que la vente entraînait seulement la résiliation de ce contrat, qui n était pas opposable à l acquéreur et pouvait seulement entraîner sur une demande d indemnisation de l entrepreneur à l encontre du vendeur ;
Qu en outre, la SAFER GHL ne saurait sérieusement prétendre qu elle ignorait l existence de ce contrat alors que la commission départementale d orientation de l agriculture, au sein de laquelle siège le même représentant de la SAFER GHL que lors de la signature de l acte authentique, était informé de ce contrat dans sa séance du 24 octobre 1997 soit antérieurement à la préemption ;
Qu en ce qui concerne les nouvelles prétentions financières du vendeur, s il est exact que Marc Y.... réclamait lors de la seconde réunion devant le notaire le remboursement de certaines sommes représentatives de travaux et de fournitures par lui engagés pour la mise en culture, il doit être relevé que ce seul élément, qui ne
figurait pas dans la notification, ne pouvait justifier le refus de signature et qu il appartenait à la SAFER GHL de s en tenir aux documents transmis quant au montant du prix, refusant ainsi le paiement de tout supplément ;
Attendu en conséquence que le jugement sera confirmé en ce qu il constatait la nullité de plein droit de la déclaration de préemption de la SAFER GHL ;
Attendu sur les dommages-intérêts réclamés par Jean-Pierre X... que le tribunal retenait à bon droit que la faute de la SAFER GHL n est pas démontrée ; qu en effet cette partie n étant pas contractuellement liée à la SAFER GHL, il appartient à Jean-Pierre X... de démontrer la faute commise à son encontre, le préjudice par lui subi et le lien de causalité entre cette faute et ce préjudice ; Qu en l espèce, il ne peut être imputé à faute à l encontre de Jean-Pierre X... le refus de signature de la SAFER GHL, Jean-Pierre X... étant seulement lié à Marc Y... et l absence de préemption remettant en vigueur le contrat d exploitation ; qu en outre, Jean-Pierre X... ne démontre pas le préjudice par lui subi et notamment la perte des récoltes et des fonds par lui utilisés ; qu enfin, à supposer cette perte établie, elle ne peut être réclamée qu au cocontractant ; qu ainsi, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu que la SAFER GHL, qui succombe dans ses prétentions, supportera les dépens ;
Que, tenue aux dépens, elle devra payer à Marc Y... et à Jean-Pierre X... la somme de 2000 chacun en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Reçoit en la forme l'appel jugé régulier,
Au fond, confirme le jugement rendu le 07 novembre 2001 par le tribunal de grande instance d AUCH,
Condamne la SAFER GHL à payer à Marc Y... et à Jean-Pierre X... la somme de 2000 chacun en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Condamne la SAFER GHL aux dépens et autorise Maître BURG, avoué ainsi que la SCP d'avoués VIMONT à les recouvrer conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur BOUTIE, Président et par Madame FOUYSSAC, greffier présent lors du prononcé. Le Greffier
Le Président