DU 05 Septembre 2006 -------------------------
N.R/S.B
Antoine X... C/ Patrick Y... RG N : 05/00826 - A R R E T No 826 -06 ----------------------------- Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile le cinq Septembre deux mille six, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,
ENTRE : Monsieur Antoine X... né le 18 Juin 1922 en ITALIE Demeurant 39 rue du Docteur Z... 32000 AUCH représenté par la SCP Henri TANDONNET, avoués assisté de Me Alain DUFFOURG, avocat
APPELANT d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AUCH en date du 13 Avril 2005 D'une part, ET : Monsieur Patrick Y... né le 12 Novembre 1958 à FONDOUK (ALGERIE) Demeurant 1 rue Platon 32000 AUCH représenté par la SCP VIMONT J. ET E., avoués assisté de la SELARL FAGGIANELLI - CELIER, avocats
INTIME
D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 20 Juin 2006, devant Nicole ROGER, Conseiller faisant fonctions de Présidente de Chambre (laquelle a fait un rapport oral préalable), Christian COMBES et Françoise MARTRES, Conseillers, assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
Antoine X... poursuit contre Patrick Y... la démolition sous astreinte du garage construit par son voisin sur celui-ci en raison
de son implantation qui lui cause un préjudice sur le plan esthétique, sur le plan de la qualité de la vue et de l'ensoleillement dans la mesure où il est construit en face de sa salle de séjour et de sa porte d'entrée ;
Par jugement du 13 avril 2005, le tribunal de grande instance d'AUCH l'a débouté de sa demande ; Antoine X... a relevé appel de cette décision.
Au soutien de son appel, il invoque le choix du positionnement du garage litigieux qui entraîne un trouble anormal de voisinage en créant dans un quartier pavillonnaire et résidentiel un mur droit de 4m30 de haut face à son habitation principale cachant la vue ainsi que l'ensoleillement ;
Il fait valoir que la construction de ce garage a été faite en violation du permis de construire et des règles d'urbanisme ; qu'il a en effet été construit en limite de propriété alors que le règlement d'urbanisme du POS de la commune d'AUCH prévoit que les bâtiments sont construits soit à 3 mètres de la limite séparative soit à la limite de séparation alors que le garage est construit à environ 35 cm de la limite séparative ;
Antoine X... relève le choix inesthétique de l'architecture du garage, s'explique sur le préjudice qu'il subit, cette construction constituant un obstacle direct à la vue et une perte d'ensoleillement définitive et sollicite la démolition de l'immeuble ou en tout cas 20 000 ç au titre de la réparation tant pour l'agression du bâtiment sur la vue du fonds que la perte d'ensoleillement des pièces principales et de la terrasse.
Il demande subsidiairement l'organisation d'une expertise et la condamnation de Patrick Y... au paiement de la somme de 10 000 ç supplémentaire pour le préjudice déjà subi et 2 000 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. * * *
Patrick Y... soutient que le préjudice invoqué par Antoine X... est inexistant ou certainement pas de nature à constituer un trouble de voisinage ;
Qu'en effet un tel trouble est caractérisé par l'aggravation des embarras inhérents au voisinage se traduisant en particulier par une dégradation des conditions de vie ou d'exploitation de son industrie supportée par le demandeur et par tous désordres affectant le fonds voisin ;
Patrick Y... rappelle encore que le trouble de voisinage doit présenter un caractère anormal donc de gravité certaine ; il fait plaider que l'aspect inesthétique du mur du garage sera largement atténué après la pose d'un crépis et par l'implantation d'une haie le long du grillage en suivi de celle déjà existante, que la perte d'ensoleillement invoquée si elle existe ne peut être que très partielle car le mur du garage n'occupe que six mètres d'une ligne séparative qui en fait près de quarante et qu'en conséquence le préjudice invoqué est inexistant et en tout cas n'excède en rien les inconvénients résultant d'une cohabitation en milieu urbain.
Patrick Y... conclut à la confirmation de la décision entreprise, la condamnation d'Antoine X... au paiement de la somme de 8 00 ç pour procédure abusive et injustifiée et celle de 2 000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que les autorisations de construire ne dispensent pas leur titulaire de veiller à ce que sa construction ne crée pas un trouble esthétique anormal à ses voisins ; qu'en l'espèce la hauteur et la laideur du mur sont des éléments incontestables, alors surtout que d'autres formes étaient possibles ;
Attendu que sa position prive l'habitation d'Antoine X... de tout
aspect sur le terrain au droit de sa salle de séjour et d'un ensoleillement sur la terrasse de ce séjour qu'il domine largement ; que sa présence assombrit les pièces de la maison ;
Attendu en outre que Patrick Y... n'a pas construit ce garage à la limite séparative des deux propriétés mais à 35 cm, ce qui constitue une infraction aux règles d'urbanisme ; qu'il ne lui appartient pas d'apprécier les conséquences d'une telle infraction et qu'Antoine X... est bien fondé à l'invoquer ;
Attendu qu'il apparaît en conséquence que le trouble anormal de voisinage est caractérisé, dans ce lotissement résidentiel et excède les inconvénients résultant d'une cohabitation en milieu urbain ;
Mais attendu que la gravité du préjudice subi n'est pas telle qu'elle impose la destruction de l'ouvrage ; qu'il convient de tenir compte des observations de Patrick Y... et de dire et juger que le préjudice subi par Antoine X... sera réparé par l'allocation d'une somme de 5 000 ç outre celle de 1 500 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe conformément à l'article 453 du nouveau Code de procédure civile,
Infirme le jugement du tribunal de grande instance d'AUCH du 13 avril 2005 ;
Dit et juge que le trouble anormal de voisinage est constitué ;
Déboute néanmoins Antoine X... de sa demande en destruction du garage ;
Condamne Patrick Y... à lui payer une somme de 5 000 ç en réparation de son préjudice outre celle de 1 500 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Condamne Patrick Y... en tous les dépens, avec distraction au
profit de la SCP TANDONNET, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Conseiller faisant fonctions de Présidente de Chambre et Dominique SALEY, Greffier.
Le Greffier
La Présidente