ARRÊT DU
11 Juillet 2007
F.C/S.B
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RG N : 06/00405
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Rémy X...
Alain X...
Danielle X...
Yvonne Y... épouse Z...
C/
Hélène A...
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ARRÊT no 759 / 07
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
Prononcé à l'audience publique le onze Juillet deux mille sept, par Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre,
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,
ENTRE :
Monsieur Rémy X...
né le 21 Octobre 1978 à BAZAS (33430)
...
Monsieur Alain X...
né le 16 Juillet 1943 à GISCOS (33840)
...
Madame Danielle X...
née le 22 Septembre 1947 à ALLONS (04170)
...
Madame Yvonne Y... épouse Z...
...
représentés par la SCP A.L. PATUREAU & P. RIGAULT, avoués
assistés de Me Christine GRELET BERENGUER, avocat
APPELANTS d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AUCH en date du 23 Novembre 2005
D'une part,
ET :
Maître Hélène A..., prise en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de Monsieur Jean-Michel D...
...
représentée par la SCP Henri TANDONNET, avoués
INTIMES
D'autre part a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 11 Juin 2007, devant Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre, François CERTNER, Conseiller (lequel, désigné par le Président de Chambre, a fait un rapport oral préalable) et Dominique MARGUERY, Conseiller, assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
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EXPOSE DU LITIGE
Dans des conditions de régularité de forme et de délai non discutées, les consorts X.../Z... ont interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de grande instance d'AUCH le 23/11/05 :
- les ayant déboutés de leur demande tendant à la suppression des ouvertures pratiquées dans le bâtiment BEZIAT,
- ayant constaté que les autres chefs de demande sont devenus sans objet,
- ayant condamné Jean-Michel D..., outre à supporter les entiers dépens, à leur payer la somme de 600 Euros par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Les faits de la cause ont été relatés par le premier juge en des énonciations auxquelles la Cour se réfère expressément ;
Vu les écritures déposées par les appelants le 27/04/07 aux termes desquelles, au visa des articles 675 et suivants du Code civil, ils concluent à la réformation de la décision entreprise et demandent à la Cour :
* d'ordonner sous astreinte définitive de 100 Euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir la suppression de toutes les ouvertures illégalement crées par l'intimé lui permettant d'accéder à leur parcelle ou, à tout le moins, d'ordonner la fermeture desdites ouvertures (portes) et le remplacement des vitres, des fenêtres par des verres dormants avec châssis fixes,
* d'ordonner la remise du muret dans son état antérieur sous astreinte définitive de 100 Euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir,
* de condamner Jean-Michel D..., sous astreinte définitive de 100 Euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, à remettre leur parcelle en état et à enlever tous les objets qui y sont encore entreposés ("frigo", escaliers, pierres),
* de condamner Jean-Michel D... à leur verser la somme de 1.200 Euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Ils font pour l'essentiel valoir l'argumentation suivante :
1 ) l'existence des ouvertures litigieuses ne peut résulter du plan annexé à l'acte notarié de 1986 qui ne concerne que la vente de la partie d'immeuble accueillant le fonds de commerce cadastrée AV 357 ; ce plan ne permet pas d'en déduire cette existence depuis 1970, date de construction de l'immeuble en cause ; au reste, nul ne peut se délivrer une preuve à lui-même, ce qui est le cas de ce plan dressé par l'intimé,
2 ) l'existence de ces ouvertures ne résulte pas non plus du plan annexé à l'acte notarié de 1993 relatif à la vente de l'immeuble cadastré AV 371 confrontant leur parcelle AV 293 sur lequel n'apparaît que quatre ouvertures, soit une porte (peinte en bleu) et trois fenêtres ; or, ainsi qu'en attestent les clichés photographiques pris par ministère d'Huissier de Justice annexés à son constat, il existe une cinquième ouverture matérialisée par une porte (peinte en rouge),
3 ) il ressort parfaitement de ce qui précède que les ouvertures litigieuses, qui ouvrent sur leurs parcelles AV 293, ont été pratiquées par l'intimé sans autorisation, postérieurement à 1998, date de son acquisition immobilière,
4 ) c'est à tort que les premiers juges ont estimé que leur demande relative à la remise en état du muret mitoyen, dans lequel l'intimé a cru pouvoir pratiquer une ouverture, avait été réalisée ; en réalité, il résulte d'un constat d'Huissier que l'espace entre les deux piliers en béton édifiés par ce dernier a simplement été comblé par un empilement de parpaings scellés ; il s'agit là de simples travaux de fortune et non d'une remise des lieux dans leur état antérieur alors pourtant qu'au sol, non loin, se trouve un morceau de ce mur, morceau de taille importante et d'un seul tenant,
5 ) il a encore été constaté dans le procès-verbal précité que leur parcelle n'a pas été débarrassée des nombreux déchets et gravas qui y sont entassés.
Vu les écritures déposées le 02/03/07 par Maître A..., ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de Jean-Michel D..., aux termes desquelles elle conclut à la confirmation du jugement querellé, sauf à le réformer en ce qui concerne la condamnation à payer aux consorts X.../Z... la somme de 600 Euros par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; elle réclame par ailleurs l'allocation de la somme de 1.500 Euros par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Elle fait pour l'essentiel valoir l'argumentation suivante :
1 ) les ouvertures litigieuses existent depuis l'édification de l'immeuble en 1970 ; les plans initiaux de cet immeuble, qui ont été annexés aux deux actes notariés d'acquisition, attestent de l'existence des cinq ouvertures contestées ; deux témoins confirment l'existence de toutes ces ouvertures dès l'origine,
2 ) l'immeuble datant de plus de trente ans, la prescription acquisitive trentenaire de l'article 690 du Code civil a joué s'agissant d'une servitude -de vue- continue et apparente sur la parcelle des appelants,
3 ) l'ouverture pratiquée dans le muret a été refermée et les divers objets entreposés sur le terrain des appelants en ont été retirés de sorte que les demandes de ces derniers à ce sujet sont effectivement sans objet.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur les ouvertures de l'immeuble d'habitation
Les premiers juges ont procédé à une analyse complète des faits à l'origine du litige et des prétentions et moyens des parties ;
Cette analyse n'est nullement contestée utilement en cause d'appel par les consorts X.../Z... qui invoquent les mêmes arguments à l'appui des mêmes demandes qu'en première instance ;
Or, il leur a été répondu en des attendus justes et bien fondés auxquels il n'y a guère qu'à ajouter ceci :
1 ) l'intimé a dans un premier temps acheté aux époux E... la partie d'immeuble dans laquelle se trouvait le fonds de commerce puis, dans un deuxième temps, le reste de l'immeuble situé dans le prolongement ; à chacun des actes notariés dressés pour ce faire les 30/12/86 et 30/04/93 a été annexé un plan des lieux différent,
2 ) rien ne prouve que ces plans soient ceux d'origine et remontent à l'époque de la construction de la maison,
3 ) les appelants ne démontrent pas que les ouvertures indiquées sur ces deux plans (une ouverture sur le plan annexé au premier acte de vente et quatre ouvertures sur le plan annexé au second acte de vente) ne correspondent pas à l'existant constaté ; ils s'abstiennent notamment d'établir que l'ouverture figurant sur le plan annexé au premier acte n'est effectivement pas la cinquième ouverture invoquée par l'intimé faute de se trouver dans le prolongement des quatre autres,
4 ) Joël F... atteste que les ouvertures actuelles sont celles qui existaient lorsque l'intimé a fait l'acquisition de l'immeuble ; Françoise G..., qui explique qu'elle vit depuis 1967 en face de l'immeuble litigieux, relate que les ouvertures présentes sont celles d'origine et datent de la construction de l'immeuble,
5 ) on sait que ledit immeuble a à tout le moins été édifié avant l'année 1970,
6 ) en toute hypothèse, s'il devait ne pas y avoir destination du père de famille, laquelle est invérifiable en l'état faute pour les parties de verser aux débats l'acte notarié complet de l'achat de leur immeuble par les appelants qui seul aurait permis de vérifier les origines de propriété antérieures, la servitude de vue, de nature continue et apparente, s'est établie par prescription trentenaire ainsi qu'il est disposé à l'article 690 du Code civil ;
Il convient en conséquence d'adopter les motifs non contraires des premiers juges et, sur ce point, de confirmer la décision déférée ;
Sur l'ouverture pratiquée dans le muret séparatif et l'encombrement du terrain des appelants
L'intimé ne conteste pas avoir ouvert un passage dans le muret séparatif des fonds et, pour en tenir les deux bords ainsi créées, avoir implanté deux poteaux en béton ; il est établi par procès-verbal de constat du 04/04/06 que l'espace entre ces deux poteaux a été rebouché par des parpaings scellés ;
Outre que cette façon de procéder est esthétiquement lamentable, elle ne correspond pas à la remise des lieux dans leur état antérieur ;
Il appartenait à l'intimé de commencer par démolir les deux poteaux en béton litigieux et de refaire la partie détruite du muret à l'identique de l'existant, c'est à dire une partie basse empierrée et une partie haute en ciment, voire en béton ;
Il convient de l'y condamner ;
Dans le constat d'huissier précité, il est relaté que la parcelle des appelants n'a pas été nettoyée de tout ce qui l'encombre : morceaux de bois, gravats de diverses nature, déchets de sac de ciments, pierres, briques cassées, parpaings, escaliers, etc... ; ici encore, la remise en état n'a pas été effectuée, à tout le moins convenablement ;
Il convient de condamner l'intimé à y procéder ;
Pour l'y inciter, une mesure d'astreinte doit être prononcée ;
Pour le reste :
* les autres dispositions du jugement attaqué -article 700 du nouveau Code de procédure civile et sort des dépens- doivent être confirmées,
* l'équité et la situation économique ne commandent pas de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
* les dépens d'appel doivent être laissés à la charge de l'intimé ; même si la demande des appelants relative aux ouvertures est repoussée, il n'en reste pas moins que ceux-ci ont été mis dans la nécessité d'agir en cause d'appel pour faire reconnaître leurs droits en raison de la carence de leur adversaire à réaliser convenablement les remises en état
sollicitées ; en réalité, il apparaît que ce dernier a fait montre d'une certaine désinvolture ;
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la Loi,
Réforme la décision déférée,
Constate que le muret séparatif des deux héritages n'a pas été remis dans son état antérieur,
Constate que le fonds des consorts X.../Z... n'a pas été nettoyé entièrement des divers encombrements qui le souillent,
Enjoint à Maître A..., ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de Jean-Michel D..., de procéder à la remise du muret litigieux en son état antérieur et à la purge du fonds des appelants de tout ce qui l'encombre : morceaux de bois, gravats de diverses nature, déchets de sac de ciments, pierres, briques cassées, parpaings, vieux matériels, escalier, etc...
Assortit cette injonction d'une astreinte provisoire de 30 Euros par jour de retard commençant à courir deux mois après la signification de la présente décision et ce pendant six mois, période à l'issue de laquelle il pourra de nouveau être fait droit,
Se réserve compétence pour liquider la mesure d'astreinte ordonnée,
Confirme la décision appelée en ses plus amples dispositions,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Met les dépens d'appel à la charge de Maître A..., ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de Jean-Michel D..., et dit qu'ils pourront être pris en frais privilégiés de procédure collective,
Autorise les Avoués de la cause à recouvrer directement ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.
Le présent arrêt a été signé par Jean-Louis BRIGNOL, Président de Chambre et Dominique SALEY, Greffier présent lors du prononcé.
Le Greffier, Le Président,